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[31/12/1995] Au Bal des Faux-Semblants [Les Sang-Purs]

 :: Le Vaste Monde :: Grande-Bretagne :: Chez les Moldus Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas
Sam 21 Aoû 2021 - 15:33
❝ Les mondanités du purisme, des masques peint d’une perfection aguicheuse ; une danse de sourires, de rictus, de ces œillades trompeuses et moqueuses.❞
Au Bal des
Faux-semblants

Les Sang-Purs

À plusieurs kilomètres au nord de Grodic’s Hollow, village au sud-ouest de l’Angleterre, se trouvait une forêt. Cette forêt, gigantesque, et n’importe qui de prétendument normal vous le direz, était aussi morte, brûlée et sans-vie, qu’il était inutile de s’y rendre à moins de vouloir s’y perdre pour ne plus jamais en ressortir. Certains prétendaient même, mais il ne s’agissait que d’une légende pour effrayer les curieux, que la nature là-bas, souffrante et en colère, se vengeait sur tous les amateurs de sensations fortes qui osaient pénétrer dans le bois.

Ce vaste labyrinthe naturel était, en vérité, bien plus vivant qu’il n’y paraissait aux visions communes des rares passants s’osant s’en rapprocher. Pour voir la vérité et non l’illusion offerte à une norme crédule, il n’y avait qu’une solution. Être un sorcier était la clef.

Le terrain appartenait à une famille qui s’y était installée des siècles plus tôt. Vendu quelques années plus tôt, puis racheté depuis peu par un Lord désireux de ressortir de l’ombre, la demeure de la Maison Shafiq se trouvait au cœur même de la sylve enchantée, au plus profond des bois.

Pour s’y rendre, un unique chemin parfaitement entretenu traversait des kilomètres de végétations. Dense, sombre et inquiétant, le bois ne laissait rien présageait de bon pour ceux qui osaient abandonner la sécurité de la route offerte. Outre le sens de l’orientation qui pouvait faire défaut à n’importe qui, elle était abritée par de nombreuses créatures magiques, de la plus inoffensive à la plus mortelle.

À certaines époques, l’endroit avait été une place-forte imprenable, où pouvoir s’y réfugier était synonyme de chance et d’une sécurité renforcée. L’attaque de Lord Voldemort, bien des années avant ce jour, lui ayant permis en outre de terrasser les parents de Lancelot Shafiq, avait quelque peu soufflé les faits passé. Une réalité qui, néanmoins, n’enlevait rien au charme victorien de la demeure qui, bien que présentait comme manoir, s’offrait le luxe de l’immense, à l’image des places d’un château ancien. Les toits pointus des très nombreuses tours donnaient ainsi la sensation de transpercer la voûte céleste.

Ce dimanche soir, à l’inverse de l’habitude du manoir, les portes étaient ouvertes en quête d’invités. Et du haut de son perchoir, munie d’une longue-vue déplacée pour l’occasion, l’aigle observait le point de transplanage à quelques kilomètres de la demeure. Quelques points apparaissaient déjà, s’installant dans les carrosses alloués pour l’occasion et qui les conduiraient à bon port. Ainsi, l’ainée des Shafiq le sut avant même que sa mère pénètre dans la pièce. Les premiers invités ne tarderaient pas à arriver et elle était conviée à se rendre dans le parc pour offrir une hospitalité digne de leur nom.

L’heure du rendez-vous avait été fixée, pour chacune des familles invitées, entre 18 heure 30 et 19 heure 30. Les horaires avaient été planifiés de sorte que chaque arrivée soit différée les unes des autres. Merlin, loin de la sottise de certain, avait saisi l’importance d’une telle manœuvre. Ils devaient tous se sentir importants, accueillis correctement et guidés jusqu’à la salle de réception par nulle autre que son père.

« Il est l’heure, Merlin. »

La voix d’Alice perça le silence relatif de sa pièce. Aménagée dans la plus haute tour, les fenêtres de sa chambre offraient une vue splendide sur l’intégralité de la forêt. La nuit, il était aussi possible de voir les lumières de Godric's Hollow perçaient son voile d’obscurité, comme des lucioles guidant les âmes vagabondes. L’heure n’était toutefois plus à la rêverie, l’oiseau devait quitter son nid.

Maquillée pour l’occasion de manière assez légère, l’adolescente avait déjà revêtu ses plus beaux atours, s’était mise sur son trente-et-un pour un 31 décembre qu’elle n’oublierait pas de sitôt. Une robe fendue d’un vert d’eau mettant en valeur ses yeux, elle était auréolée d’un châle de soie pour ne pas se laisser distraire par la température gelée qui les attendaient.

Vêtue sensiblement de la même manière, les couleurs de sa mère faisaient cependant référence à sa Maison de naissance et à son bordeaux profond. Majestueuse, les mains jointes sur son bas-ventre dans une posture d’attente, elle regarda la venue de sa fille jusqu’à elle.

Merlin ne put s’empêcher de caresser la reliure de cuire d’un carnet, déposée sur sa table de chevet, qu’elle avait eu le loisir de découvrir le matin de Noël. Une lecture qu’elle savourait et réitérait chaque soir depuis lors, tant les informations à l’intérieur de celui-ci était passionnantes. L’esprit et ses secrets la fascinaient et si cette nuit n’avait pas pour but de renouer les alliances du passé, nuls doutes que la sorcière se serait éclipsée dans l’optique de s’y replonger.

Néanmoins, l’arrivée prochaine des premiers sangs-purs ne laissaient que peu de place à ce genre d’idées saugrenues et la demoiselle en avait parfaitement conscience. Un unique geste pour sa mère permit à la femme de comprendre que l’étudiante était prête. Le trajet jusqu’au rez-de-chaussée, puis dans les allées de la cour se fit dans un silence reposant. Mieux valait garder sa salive et son énergie pour le reste de cette nuit qui ne serait pas de tout repos.

Déjà postés devant les grilles grande-ouvertes des murailles entourant le domaine, Morgane et Lancelot Shafiq étaient tous deux vêtus d’un costume cintré, d’un bleu nuit saisissant. Le plus jeune des enfants acquiesçait aux dires de son patriarche à répétition, sans pour autant que les deux femmes eurent le loisir de les entendre. À leur approche, l’homme se tourna vers les femmes, un sourire sur les lèvres, puis les incita à se positionner d’un mouvement élégant.

Comme désirée, Merlin se plaça derrière son petit frère. Son regard affûté ayant perçu les gestes démontrant le stress et l'inconfort dudit garçon, elle profita de l’attente pour placer ses mains sur ses épaules et se pencher à son oreille.

« Ne te mets pas trop la pression, soit toi-même et tu seras parfait. », lui souffla-t-elle suffisamment bas pour qu’il soit le seul à l’entendre.

Elle-même, malgré les nombreuses conversations anxiogènes avec ses parents durant les derniers préparatifs, lui ordonnant de se comporter de sorte que rien ne put être reproché, avait décidé de ne pas se cacher derrière une façade trop épaisse. La majorité des familles qui seraient présentes avaient des étudiants à Poudlard. Ils la connaissaient forcément, soit parce qu’ils étaient proches, soit par réputation. Faire semblant ne pouvait qu’attirer à elle, à eux, des ennuis sur le long terme et l’Aiglonne n’y voyait aucun intérêt. C’était-là, en tout cas, sa pensée, ce qui avait forgé sa décision de se comporter avec le plus de naturel possible.

À l’arrivée du premier carrosse, Merlin se redressa de toute sa hauteur et entrelaça ses doigts sur son ventre. Les premiers n’étaient autre que les Greengrass. Dès que le fiacre s’arrêta sur l’ordre du cocher, Lancelot s’en approcha suivi du reste de la famille. Si ce fut un serviteur, humain, qui ouvrit la portière, Lancelot aida les trois femmes à descendre en bon gentleman.

Suite aux salutations d’usage, Lancelot convia les arrivants à sa suite et s’engagea sur le chemin qui les mènerait à destination. Depuis le rachat du terrain, le parc avait été réaménagé, décoré de la splendeur des jardins à la Française. Le paysage à l’intérieur des fortifications donnait un contraste surprenant vis-à-vis de l’emplacement de la demeure qui était installée dans une ancienne et immense clairière.

Astoria et Daphnée, plaçaient avant Morgane et Merlin qui fermaient la marche, ne parlaient pas. Elles observaient les parents et écoutaient les conversations des deux duos, l’un masculin, l’autre féminin, qui se jouaient juste devant elles. Parfois, leurs regards vagabondaient sur la végétation et les rares statues qui décoraient les allées, mais les deux demoiselles s'évertuaient à rester stoïques. Cela ne changea pas jusqu’à ce qu’ils arrivent devant les escaliers en fer-à-cheval qui menaient à la porte d’entrée. Une porte d’entrée qui fut ouverte à leur approche par la magie de l’endroit.

Se cachant derrière celle-ci se trouvait un hall d’entrée somptueux au large escalier double qui se divisait en deux branches pour atteindre les étages, les murs décorés de lanternes et de tableaux mouvants. Les convives n’auraient pas l’occasion de les visiter, néanmoins et en bon guide, Lancelot les amena jusqu’à un grand battant à droite de l’entrée.

La salle de réception de la demeure Shafiq était immense. Tout du long de la galerie, le parquet croisé, lustré, du sol se mariait à merveille au blanc laiteux des colonnes de part et d’autre de la salle. Il n’était présent que pour renforcer la majesté des moulures et dorures qui habillaient les murs, ainsi qu’à droite, les seize arches où séjournaient autant d’immenses fenêtres. Chacune d’elle donnait sur un balconnet : des balustrades de pierre, revêtus de jardinière fleurie, non sans une touche de magie, et qui offrait une vue plongeante sur les labyrinthes de la cour.

À l’intérieur, les lustres en cristal sur trois paliers plongeaient l’intégralité de la pièce dans une lumière presque aveuglante, aucune touche d’ombre ne pouvant s’y abriter, l’éclat des miroirs à gauche n’y étant pas étranger. Ils éclairaient de même la fresque peinte au plafond, un dôme de peinture mouvante représentant la cime d’arbres enneigés, fait changeant au gré des saisons et qui, bien sûr, rappelait l’emblème de la Maison Shafiq. L’Arbre d’Or.

Disposée de sorte à ne pas encombrer inutilement l’espace, une scène avait pris place en longueur de l’autre côté des arches. Sur celle-ci, de nombreux musiciens s’affairaient déjà à s'accorder, désireux de pouvoir faire profiter à terme des doux sons de leurs instruments qui s’entremêleraient à merveille. Des buffets avaient aussi pris place dans la pièce, où serveurs et serveuses parfaitement ordonnés n’attendaient que de pouvoir servir et offrir aux convives un service irréprochable. Vers le fond se trouvaient aussi des assises pour ceux désireux de pouvoir reposer leurs pieds. Elles étaient proches de l’une des deux portes pouvant également être remarqués.

La première était, à l’image du mur qui séparait la pièce en deux, presque invisible. Placée de sorte à offrir un semblant d’intimité à une caste en particulier, les adolescents, tout un mur de verre d’une propreté irréfutable avait été installé, fine barrière translucide. La superficie de l’espace qui leur était dédié était plus restreint que la galerie principale, mais suffisante pour son utilité. Là-bas, les étudiants pourraient se retrouver et échanger sans que les oreilles de leurs géniteurs ne vinrent les déranger, non sans qu’ils puissent toutefois les surveiller s’ils le désiraient. Ainsi, ils pourraient découvrir les joies des mondanités en étant eux-mêmes responsables de leurs propres actes et paroles.

La seconde, elle, était un lourd battant de chêne, verni de clair, proche de l’entrée. Il donnait sur un fumoir aux accents de salon confortable. Là-bas, les adultes le désirant pourraient se retrouver, s’échanger les nouvelles du monde et consolidaient ou retrouvaient certaines alliances, qu’elles soient nouvelles ou simplement oubliées.

Pour l’une comme pour l’autre pièce, Lancelot s’évertua à expliquer leur emplacement et leurs fonctions et intérêts, s’assurant que le message soit passé. Une fois que cela fut fait, et parce que l’heure continuait de tourner sans se soucier des devoirs des organisateurs, il fut nécessaire pour lui de laisser les Greengrass a leur découverte, entre les bonnes mains d’Alice, Merlin et Morgane restant présents pour s’occuper d’eux durant l’attente.

Une seconde famille, puis une troisième. De la France au Japon, en passant par l’Amérique et les pays orientaux par la présence de sa cousine Isis, mais aussi et bien sûr une majorité d'anglais, de nombreuses Maisons du Monde arrivèrent, furent accueillies et introduits auprès d'eux. Les mouvements répétés, les salutations réitérées, les explications renouvelées. Après une heure qui parut à Merlin une éternité, le dernier carrosse attendu s’arrêta à l’entrée du domaine, la famille étant guidée par Lancelot jusqu'à eux. Après une dernière mise en scène aussi ordonnée qu’une pièce de théâtre recommencée maintes et maintes fois, il fut enfin temps de prendre place proche du centre.

Lancelot s’invita sur la scène, là où les musiciens patientaient en silence depuis de trop nombreuses minutes et pointa sa baguette sur sa jugulaire. Il murmura une formule facile à deviner, puis prit la parole, sa voix se répercutant partout, la magie lui permettant d'être entendu par tout son public.

« Bonsoir à tous, commença-t-il et il patienta quelques secondes pour que le silence se fasse. Ma famille et moi-même, nous vous souhaitons à tous et à toutes la bienvenue. J’espère que l’attente n’a pas été trop longue ou inconfortable pour vous et si c’est le cas, sachez que vous m’en voyez navré. Le but de cette soirée, bien au contraire, n’a que pour but de passer un moment agréable et fêter, comme il se doit, cette fin d’année et le début de la prochaine qui approche. »

Comme un signal, serveurs et serveuses se mirent en mouvement en même temps, commençant à passer entre les convives, plateaux et boissons au bras. Ils servaient les désireux de se rafraîchir le gosier, proposant ci-et-là les meilleures boissons qu’il était possible d’imaginer, que ce soit avec ou sans alcool.

« Je ne vais pas vous faire l’affront de faire un discours à la fois long et soporifique. Je vais plutôt me contenter de vous souhaiter une bonne soirée et que cette nuit reste dans vos mémoires longtemps après. »

Un serveur apporta un verre à chaque membre de la famille Shafiq. Si les adultes eurent droit à une coupe d'un excellent champagne tout droit sorti d’une cuve sorcière, les enfants durent se contenter d’un cocktail sans alcool.

« Je ne vais faire qu’un seul caprice avant de lancer, une bonne fois pour toutes, les festivités. Trinquons mes amis. Trinquons à nous. Trinquons à la noblesse sorcière. »

Il leva son verre. Dans la centaine de convives présents, une majorité suivie le mouvement. Les lèvres se trempèrent dans les liquides de différentes couleurs, de l’ambre à l’or, en passant par des panels de couleurs inimaginables et des arcs-en-ciel liquides. Lancelot descendit de son perchoir, se faisant immédiatement alpaguer par plusieurs individus avides de son prestige et du croustillant de son passé.

À ce moment-là et certaines rares familles n’ayant pas répondu présent à l’appel pour ne pas s’associer à leur nom le lui confirmant, Merlin comprit ce qui allait véritablement se jouer ce soir-là.

En douceur, parfait pour des danses en duo, les musiciens se lancèrent à leur tour.

Le bal pouvait enfin commencer et avec lui tout ce qui irait de pair.

Les amitiés, les inimitiés, les conflits et les solutions. Les affaires, les alliances, les ventes de filles et de noms.

Perdue dans la foule, Merlin se le demanda un instant : n’aurait-il pas été apprécié de sortir des loups pour cacher en partie leurs vrais visages au bal des faux-semblants ?

Merlin
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Mer 8 Sep 2021 - 17:58
au bal des faux semblants
rendez-vous au bal des faux semblants,
aux theatre des bonnes gens masques,
a minuit leur heure aura sonne,
et leur trepas s'ouvrira sur la nouvelle annee.

Aria détestait les fêtes de fin d'année. Il s'agissait toujours d'un enchaînement de dîners familiaux et de banquet mondains tous aussi pompeux les uns que les autres où les attentes de la haute société sorcière pesaient sur ses épaules comme du plomb.

Ça commençait par Noël. Ouvertures de ces joyeusetés fallacieuses avec une dinde longuement cuisinée et de cadeaux soigneusement emballés. Comme si tout allait bien dans le meilleur des mondes. Des mièvreries qui s'invitaient même jusque chez les Beurk.

Si leur famille était loin d'être des plus expressives, l'on croirait presque, en les voyant regroupés ainsi autour d'un riche festin, qu'un semblant de chaleur et de légèreté pouvait s'inviter dans leur foyer le temps d'une soirée. Le patriarche des Beurk évitait même d'aborder les sujets délicats – à savoir, business et politique – avec son beau-père et son beau-frère, préférant vanter avec une fierté à peine retenue les réussites scolaires de ses deux enfants. Et c'était bien là l'un des rares moments où cela se produisait.

Celestine, quant à elle, se perdait bien souvent dans sa coupe de champagne jusqu'à devenir bien plus gaie et volubile qu'à son habitude. Il s'agissait bien là du seul léger excès qu'elle s'autorisait dans l'année. Et c'était aussi l'une des rares fois où Diana semblait apprécier la compagnie de sa belle-fille, allant même à partager certains éclats de rires avec elle.

Ezechiel restait fidèle à lui-même : l'enfant prodige, diluant juste ce qu'il fallait de sa fierté dans de la fausse-modestie pour mettre un peu plus leur grand-père dans sa poche, rivalisant sans cesse son attention avec son cousin Drago.

Puis, Aria, silencieuse, égarait quelques sourires raides quand des regards adultes se posaient sur elle en ravalant simultanément son dégoût pour cette hypocrisie ambiante. Leurs sourires, tout autant que les siens, étaient atrocement faux. Son père, sous ses airs sereins, ne se délestait jamais du stress dû à ses affaires ; sa mère ne buvait que pour éteindre sa mélancolie et ses regrets ; et son frère et son cousin n'étaient que deux nœuds de frustration et de jalousie derrière leur prodigieuse bataille d'enfant parfait. Le même schéma se répétait tous les ans.

Peut-être que la meilleure partie - pour ne pas dire la moins pénible -, était l'ouverture des cadeaux. Mais juste l'ouverture, c'est-à-dire les quelques secondes à déchirer l'emballage pour découvrir la surprise nichée à l'intérieur. Ensuite, arrivait le souci de doser sa réaction afin d'exprimer sa gratitude de la bonne façon : un peu mais pas trop. Tout en modestie et en retenu. Et ce, même lorsque les cadeaux étaient décevants. Il fallait toujours faire semblant.

Mais cette année, l'inattendu s'était invité au pied du sapin pour quelque peu raviver les couleurs de Noël dans le cœur de la cadette des Beurk. Un paquet emballé dans du papier kraft dénotait parmi les autres présents et, le plus étonnant, était le nom indiqué dessus :  « Pour Aria ». La concernée eut à peine le temps de le remarquer que la voix de son paternel tonna :

- Wilty, d'où vient ce paquet ?

L'elfe de maison, tout juste après avoir débarrassé la table d'un claquement de doigts, se dépêcha d'accourir aux pieds de son maître pour répondre timidement :

- Il est arrivé tout à l'heure par hibou, Maître.

- Et tu l'as déposé sous le sapin sans songer à m'avertir ?

- Je, je... C'est... Je me suis dit que... que c'était une jolie surprise pour... pour Noël.

- Tiens donc, une jolie surprise. As-tu dans ce cas songé à vérifier qu'il n'était sous l'emprise d'aucun mauvais sort ? Bien évidemment, cela relève de mon domaine de compétences et tu sais bien que tout ce qui entre dans cette maison passe d'abord sous l'inspection scrupuleuse de ma baguette. Dois-je te rappeler les règles de sécurité de cette demeure, Wilty ?

- Non, Maître, fit l'elfe d'une voix tremblante devant le sermon d'un calme glaçant. Pa, pa... pardonnez-moi, Maître.

Aria détestait lorsque Wilty se faisait réprimander. La culpabilité que pouvait éprouver les efles de maisons était d'une intensité semblable à nulle autre : la fulgurance de leur émotion lui coupait toujours de le souffle. Et elle n'était pas la seule à la sentir. Diana posa une main sur l'épaule de son fils et prit la parole à sa place, d'une voix plus compréhensive :

- Tu t'en souviendras pour la prochaine fois, Wilty, retourne en cuisine à présent.

Il fallut quelques secondes pour que l'atmosphère se dégivre et le déballage des cadeaux fut une aubaine : la tension causée par l'incident fut presque aussitôt remplacée par l'avidité de chacun à découvrir ses présents. Hormis pour le patriarche et la cadette des Beurk. Le premier s'affairait activement à inspecter le paquet par une ribambelle de sortilèges, notamment de détection de magie noire, et la seconde l'observait du coin de l’œil, l'angoisse au ventre et les questions en fusion dans son crâne. Qui donc pouvait bien lui envoyer un cadeau de Noël ? Toute sa famille proche était présente ce soir et ça n'était aucun d'eux. Alors qui ? Quelqu'un de Poudlard ? Sessho ?

... Eileen ? Non, impossible. Et pourtant, une part d'elle ne put s'empêcher d'y croire et de s'en inquiéter car, lorsque son père voulut entamer le déballage du paquet à sa place, elle intervint brusquement :

- Père ! Je... je pense que je peux me charger du reste. Ce cadeau m'est adressé, il en vient donc de ma responsabilité, non ? J'inspecterais aussi son contenu avec des sortilèges, ceux que vous m'avez tant de fois enseignés. Ce sera une bonne mise en pratique, comme ça, n'est-ce pas ?

Gregory jaugea sa fille pendant un court instant. Elle ne sut deviner si son initiative le rendait fier ou méfiant, toutefois il finit par accepter d'un hochement de tête.

- Bien.

- Merci, père. Je m'en occuperais demain, au calme.

En réalité, elle ne put retenir l'envie de l'ouvrir dès qu'elle se retrouva isolée dans sa chambre, le soir-même, une fois le dîner achevé. Elle déchira le papier kraft puis ouvrit le carton et... le silence de la pièce prit une épaisseur vertigineuse après son hoquet de surprise. Elle n'osa plus respirer, plus bouger. Ni détourner les yeux du violon somptueux qui dormait dans le carton. Le bois était verni d'un noir abyssal qui, s'il était aussi intense que le noir recouvrant le globe maudit sur sa commode, en était mille fois plus éclatant.

Passé les premières secondes de choc, ses doigts frêles osèrent soulever l'instrument avec la plus grande des délicatesses et c'est alors qu'elle découvrit qu'un mot y été accroché. L'identité de son père Noël secret ? Malheureusement, il n'y était inscrit qu'une énigme de plus : « Je ne m'ouvre qu'à l'esprit vif. ». Le sien fut aussitôt stimulé par cette nuée de mystères. La musicienne inspecta davantage l'instrument, jusqu'à apercevoir un discret mécanisme sur le côté droit du cordier. Oubliant toutes les précautions qu'elle avait promises à son père de prendre, ses doigts vinrent titiller le mécanisme, provoquant ainsi un déclic qui désaccorda brusquement toutes les cordes. Les sourcils froncés mais les orbites émerveillées, elle tenta de comprendre où le casse-tête voulait la mener.

Elle y passa la nuit entière.

Il avait fallu réaccorder chaque corde l'une après l'autre dans un ordre bien spécifique pour ensuite débloquer le mécanisme suivant et ainsi de suite. Le plus long avait été de comprendre le fonctionnement. Ensuite, il avait s'agit d'un exercice d'endurance et, boosté par une concentration sans faille, ses paupières ne s'abaissèrent pas une minute jusqu'au lever du jour. Jusqu'à ce qu'enfin, le violon noir s'ouvre au-devant du ciel rosé sur un parchemin vierge, une plume à papote et... une lettre.

Le contre-coup de son insomnie se mua alors en un pic d'excitation irrépressible et ses mains se hâtèrent de saisir son Graal, récompense de ses longs efforts de logique et potentielle réponse aux dernières inconnues de l'équation. La sorcière déplia la lettre avec maladresse et lorsque ses yeux caressèrent avec avidité l'écriture sur le papier, elle n'eut pas besoin de lire un seul mot pour en deviner l'autrice. Elle aurait pu reconnaître cette écriture entre mille. C'était celle qu'elle avait vu tant de fois griffonnée à la hâte sur un bout de parchemin à côté d'un chaudron fumant, listant des ingrédient et des indications pour la préparation de potions. C'était celle qu'elle avait aussi déjà vu sur des lettres similaires lui étant adressées, comme la dernière l'invitant à rejoindre une soi-disante Armée de Dumbledore. Elle s'était finalement ralliée au camp opposé en tachant d'oublier tout ce que cette lettre lui avait divulgué mais, cette écriture, elle n'avait pas pu l'effacer de son esprit.

Les larmes lui montèrent aux yeux avant même qu'elle n'ait pu lire le moindre mot, réalisant soudain l'évidence : qui d'autre qu'Eileen pour lui offrir un cadeau de la sorte ? Un cadeau si précieux combiné à un casse-tête personnalisé ? Mais, il y avait aussi dans cette évidence un grand paradoxe : pourquoi lui offrir un tel cadeau maintenant, alors que la Louisianaise était censée détestait l'Anglaise ? Alors qu'Aria ne lui avait offert, quant à elle, que des paroles méprisables en signe d'au revoir ? Pourquoi ?

Pourquoi ?

Après une grande inspiration, les yeux levés au plafond pour en chasser l'humidité, Aria entama la lecture de la missive. Alors que la voix d'Eileen commençait à prendre écho dans son esprit, ses mains se mirent à trembler.

La lettre :

À la fin de sa lecture, la lettre était inondée de petites flaques salées. L'adolescente la replia contre sa poitrine, se recroquevilla dans son lit et laissa s'épancher ses sanglots. Ses émotions étaient alors aussi intenses que diffuses et elle ne sut laquelle écouter.

La joie immense qui lui provoquait des papillons dans le ventre alors que certaines phrases continuaient de résonner dans son esprit comme : « Tout ce que je veux, c'est toi, Aria. » ?

La colère envers Eileen de lui rappeler le douloureux souvenir de son visage ? De son optimisme ? De leur relation unique ?

La colère envers elle-même d'avoir envie de revenir, comme la Gryffondor le lui suppliait ?

Les remords d'avoir lu cette lettre plutôt que l'avoir brûlé dès lors qu'elle en avait reconnu l'écriture ?

… L'espoir de voir une nouvelle éclaircie du côté de la Louisiane sur la surface de son globe maudit ?

C'était trop. Il fallait qu'elle évacue ce trop-plein. Qu'elle punisse ses pensées interdites. Qu'elle se vide pour enfin pouvoir aller dormir. La jeune Beurk cacha soigneusement la lettre, la troquant contre le grimoire volé aux recoins secrets de la bibliothèque familiale.
Et elle répondit à l'appel de la page 343.

...

Elle s'endormit sur son désespoir vermeil, puis se réveilla en sursaut, probablement deux heures plus tard. Il était encore tôt mais elle ne s'autorisa pas à retourner au sommeil : le petit-déjeuner allait bientôt être servi. Elle descendit au rez-de-chaussée après s'être appliquée une lotion magique pour dissimuler ses cernes – habitude qu'elle commençait progressivement à prendre, trop souvent alertée par son air blafard devant la glace le matin – et s'installa à table en saluant les membres de sa famille comme si de rien était. Noël était fini, mais la danse des faux-semblants se poursuivait inlassablement, de son côté.

- T'es-tu déjà occupée du paquet d'hier, Aria ?

Son père la connaissait parfois trop bien. Il savait pertinemment que sa fille, tout comme lui, ne se détournait que rarement d'une énigme avant de l'avoir résolu, quitte à empiéter sur ses heures de sommeil. Or, ce que Gregory ne savait pas, c'était que l'énigme avait pris des proportions bien plus complexes qu'imaginées, bien qu'éloignée de tout danger. De cela, elle ne lui en dirait rien, évidemment.

- Oui. Il était tout à fait inoffensif, c'était simplement un cadeau de quelqu'un à Poudlard.

Si Ezechiel avait été déjà levé, il aurait sans nul doute lâché un rire moqueur en l'assénant d'un : « Tu as des amis à Poudlard qui t'offre des cadeaux, maintenant ? Toi ? ». Par chance, il n'était pas encore présent à la table du petit-déjeuner, ce qui n'enleva pas pour autant l’inflexion étonnée qui se dessina sur le visage de son paternel. Les mots qu'elle ajouta ensuite lui vinrent spontanément :

- De Sessho Shinmen.

Gregory connaissait de toute évidence ce nom. Premièrement, car il appartenait à une grande lignée de Sangs-Purs, même s'ils n'étaient pas de Grande-Bretagne, et ensuite car il avait assisté à l'interrogatoire de sa fille suite aux événements d'Halloween. Sessho Shinmen était la victime à laquelle sa fille était inconsciemment venue au secours, se confrontant par ce biais à ses collègues Mangemorts. Mais le choix de la victime, ce soir-là, n'avait pas vraiment été de leur ressort et lui-même avait trouvé ça malheureux qu'il s'agisse d'un enfant de Sang-Pur, sans pour autant en dire mot à qui que ce soit.

Aria ignorait évidemment tous ces détails, mais Sessho représentait la seule réponse crédible qu'elle avait pu prononcer : c'était le seul élève du château avec qui elle entretenait un lien assez fort et de façon non dissimulé pour attester recevoir un cadeau de sa part sans que son frère ne vienne ensuite délier ses mensonges. Puis, surtout, il s'agissait d'un élève de Sang-Pur et Aria savait pertinemment que dans leur milieu, tout présent symbolisait un certain enjeu. De quoi bercer son père d'illusions qui le satisferaient au moins pour l'éphémérité d'un temps.

La violoniste décrocha la fine chaîne d'argent autour de son cou pour en ôter son ton nouveau pendentif et rendre sa taille réelle à l'instrument couleur nuit. À présent, la pénombre dans laquelle elle s'enfonçait périlleusement l'accompagnerait même dans les teintes de sa musique.

- N'est-il pas sublime ? fit-elle d'une voix admirative en présentant le violon à son père. Sessho est pianiste, l'on joue régulièrement ensemble au club d'Art.

L'illusion de cette histoire inventée de toutes pièces posa un léger sourire sur le visage de Gregory. Finalement, il y avait peut-être de l'espoir pour que sa fille soit mariée à une bonne famille, un jour, malgré son caractère difficile, devait-il penser.

Toutefois, Aria ne s'imagina pas une seule seconde que le Shinmen lui enverrait véritablement un présent pour Noël. Par chance, celui-ci arriva dans l'après-midi du 26 par un hibou venant toquer à la fenêtre de sa chambre. Son père n'en sut rien.

Elle réceptionna donc avec une nouvelle vague d'étonnement une petite boîte enveloppée d'un papier nacré et d'un ruban vert et argent où seul son propre prénom figurait. Oubliant une fois de plus les précautions que son père lui aurait contraint de prendre, elle ôta immédiatement l'emballage pour découvrir un écrin d'un noir poli renvoyant légèrement le reflet de son visage contemplatif. Elle l'ouvrit délicatement et put alors observer un somptueux coquillage refermé sur lui-même et dont la surface était sublimée de nuances indigo s'accordant à la perfection avec les reflets que son aquarium mural projetait sur les murs de sa chambre. L'adolescente aux mèches platinées rejoignit son lit pour s'y installer, les jambes ramenées contre sa poitrine en position assise, posa l'écrin sur le sommet de ses genoux, puis écarta les deux bords du coquillage. L'une des plus belles mélodies au monde s'échappa alors d'une perle abritant le mouvement de vagues hypnotiques : le chant d'une sirène.

Aria aurait pu passer son après-midi entière à l'écouter, envoûtée par la mélodieuse voix de cet être aquatique qu'elle vénérait depuis toujours de façon démesurée. Elle finit par remarquer un petit mot niché au creux de la boîte. Elle s'en saisit et le déplia.

« Que leurs voix te guident vers des chants plus doux, Aria.
Sessho. »


Au creux de son regard encore émerveillé, de nouvelles larmes perlèrent. Son désespoir se heurta à ces mots d'une délicate bienveillance dont elle ne se crut pas un seul instant méritante. Elle porta le mot à ses lèvres pour y déposer un léger baiser et murmura :

- Merci, Sessho.

Et simultanément, Aria se demanda où est-ce que pouvaient donc l'attendre des chants plus doux. Serait-ce vers Eileen que ces voix la guideraient ? Si cette pensée la terrifiait, son cœur, lui, n'attendait que cela.



Dimanche 31 Décembre 1995

Après Noël, venait la Nouvelle Année. Événement qui s'élevait encore un cran au-dessus du premier en terme de répugnance pour la jeune Beurk. Car le banquet du Nouvel An, ce n'était plus seulement sa famille, mais aussi celle des autres Sangs-Purs. C'était un rassemblement festif entre gens de la haute société sorcière qui avaient tous pour seule préoccupation que de veiller à leur image tout le long de la soirée, n'oubliant pas une seule minute de regarder leur propre reflet dans le regard des autres. Mondanités aussi exaspérantes que lassantes auxquelles Aria ne se ferait sûrement jamais. Et cette année s'annonçait bien plus terrible que toutes les précédentes car la famille organisant le banquet n'était nul autre que les Shafiq en personnes. Rien que l'idée d'observer Merlin se pavaner avec son sourire candide au-devant de ses invités pour leur présenter leur riche demeure filait la nausée à la cadette des Beurk.

Elle eut presque l'espoir de ne pas avoir à supporter sa compagnie lorsque sa famille fut accueillie par Lancelot Shafiq seul. Et elle aurait presque même pu s'extasier devant ses richesses si celles-ci n'avaient pas ranimé sa jalousie refoulée envers Merlin. Miss Parfaite possédait donc aussi une demeure parfaite et une famille parfaite, de ce que le tableau lui renvoyait. Petite famille qui les accueillit chaleureusement une fois arrivés dans la salle de réception : l'espoir d'Aria de pouvoir esquiver tout contact avec Merlin de toute la soirée tomba aussitôt à l'eau. Et, alors qu'elle la salua - sans pour autant daigner quitter sa stature froide -, le souvenir fourbe des dernières paroles qu'elles s'étaient échangées lui revint à l'esprit. Elle aurait pu lâcher un rire amer, à présent.

Merlin voulait-elle vraiment devenir son amie ? Qu'elle s'y tente seulement et qu'elle voie : il n'y avait que des terres infécondes pour l'amitié autour de sa bulle égocentrique. Qu'elle voie : Eileen y avait fané. Qu'elle voie : il n'y avait qu'un seul oiseau et ses ailes étaient brisés. Alors, pourquoi donc avoir envie de devenir l'amie d'Aria Beurk ? La Shafiq était définitivement la dernière des idiotes.

Après les Shafiq, les Beurk dispensèrent les salutations d'usage aux autres familles alentours, jusqu'à ce que leur hôte revînt pour un bref discours qui s'acheva par :

- Trinquons mes amis. Trinquons à nous. Trinquons à la noblesse sorcière.

Aria réprima une grimace d'exaspération - réflexe qu'elle réitérerait sans aucun doute toute la soirée durant – et imita le reste de la salle en levant la coupe qu'on venait de lui servir. Elle trempa ensuite ses lèvres dans le liquide non alcoolisé et eut presque du mal à admettre qu'elle ne le trouvait pas écœurant. La minute d'après, son père s'approcha d'elle et lui demanda, en effectuant un discret mouvement du menton vers une silhouette derrière elle :

- S'agit-il du fameux Sessho Shinmen ?
 
Aria se retourna et reconnut aussitôt les traits familiers du Japonnais. Elle acquiesça machinalement sans même songer à ce qui allait suivre.

- Très bien allons remercier ce jeune homme pour le généreux cadeau qu'il t'a offert, dans ce cas.,

Aria fit de son mieux pour ne pas laisser transparaître un brin de la panique qui la submergea alors, rendant soudainement le tissu en soie de sa longue robe émeraude étouffant. Docilement, elle enroula sa main autour de l'avant-bras que son père lui tendit et ce dernier avança vers Sessho, ses deux femmes au bras - Ezechiel, lui, avait sûrement déjà rejoint des amis dans la salle réservés aux adolescents, tandis que Diana n'avait pas attendu bien longtemps avant de faire sa vie de son côté.

Sur les six mètres qui séparaient les deux familles de Sang-Pur, Aria adressa tout un tas de prières muettes à une force extérieure pour que la conversation qui l'attendait ne vînt pas à ruiner sa forteresse de mensonges. Elle allait devoir improviser comme elle le pouvait mais elle s'accrochait à l'espoir que l'illusion puisse passer : Sessho et elle n'avaient jamais eu besoin de mots pour se comprendre, cette soirée allait-elle encore une fois le prouver ? Arriverait-il à lire dans son regard pour comprendre à quel jeu se prêter ? Saurait-il déchiffrer la partition qui se jouerait ?

- Bonsoir Monsieur Shinmen, s'annonça Gregory de son ton sobre et charismatique en tendant sa main au garçon alors que sa femme se contenta d'un hochement de tête souriant et muet, imité plus timidement par Aria. Je me présente, Gregory Beurk, le père d'Aria que vous semblez bien connaître.

Effacé le Gregory froid et sévère qui réprimandait Wilty le soir de Noël. Tout son opposé s'était peint sur son visage : un sourire à la fois chaleureux et distant, fier et modeste, celui fourbe d'un homme d'affaire dans toute sa splendeur.

- Ma fille que voilà désirait justement vous remercier pour le très estimable présent que vous lui avez envoyé pour Noël.

Le gérant de la boutique de magie noire tourna son visage vers sa cadette pour l'inviter à prendre la parole. Celle-ci agrippa son nouveau pendentif du bout des doigts pour le présenter à Sessho puis ancra son regard dans le sien en espérant qu'il y lise la détresse de son appel à l'aide.

- Il est splendide. Et il sonne à merveille. Il n'y a qu'un musicien de talent comme toi pour avoir aussi bon goût en choix d'instrument.

Oui, il n'y a que toi, aux yeux de mes parents, qui pourrait m'offrir un cadeau de la sorte. Je t'en prie Sessho, joue le jeu avec moi. Accompagne-moi encore une fois, même si ton piano n'est pas là.

- Merci, sincèrement, Sessho.

Ce merci, lui, est véritable. Prends-le pour cette si jolie boîte à musique et chantons ensemble le chant des sirènes pour envoûter l'esprit des marins et noyer mes fragiles secrets au fin fond de l'océan.


Résumé:

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Aria Beurk
Admin empathique
Aria Beurk

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Ecoute cette médolie troublante.
C'est l'eau qui chante.
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Lun 20 Sep 2021 - 20:42


• 31 décembre 1995 •
⊕ LE BAL DES FAUX-SEMBLANTS ⊕


L'invitation offerte par la prestigieuse maison Shafiq aura certainement honoré de nombreuses lignées de sang-pur à travers le monde, expressément venues vanter les mérites de leurs ancêtres et de leurs descendants. Chez la famille Viperyn, en revanche, la lettre fut principalement accueillie avec des moues circonspectes. Certes, ils n'étaient pas les seuls à compter des membres derrière les barreaux d'Azkaban, mais les divisions internes demeuraient trop grandes pour espérer une cohésion. Après de brefs échanges sur le sujet, il fut décidé que l'opportunité était trop importante pour être ignorée, et qu'il était temps de faire acte de présence au cœur de la noblesse magique. Comment espérer marier un jour leur principale héritière, autrement ? Ce n'est pas comme si l'intéressée faisait de grands efforts en ce sens par elle même.

"As-tu fini de toucher à tes cheveux," soupira Drosera, accoudée à la fenêtre de son fiacre volant. "Rien de surprenant à ce qu'ils ne fourchent aussi vite..."

La jeune Merula dirigea un regard mécontent vers sa tante, sa tignasse d'ordinaire sauvage rendue lisse pour l'occasion. Elle avait reçu l'interdiction formelle de porter ses inséparables Doc Martens, ainsi que le moindre signe de son incessante rébellion. En réponse, la sorcière avait choisi de troquer sa robe de soirée contre un tuxedo plus masculin. On n'arrête pas si facilement l'excentricité d'une adolescente.

"Je ne comprends même pas pourquoi je dois être présente," répliqua celle-ci en roulant des yeux. "C'est le genre de fête où les vieux séniles mangent des huîtres en faisant du bruit."

"Tu le sais très bien au contraire," répondit la femme aux cheveux zébrés de mèches platines, détournant son attention de la forêt défilante pour mieux dévisager sa nièce. "Tu incarnes, pour le meilleur et pour le pire, l'avenir de la famille Viperyn. Cela implique de soigner nos relations en vue de futures alliances, et en d'autres termes, d'une future union."

L'aînée pinça les lèvres, jaugeant la jeune représentante de sa maison avec une mine réprobatrice.

"Je crois savoir que tu n'avais pas de partenaire durant le bal de Yule de l'an passé," s'enquit la sorcière sur le ton du jugement. "Cela en dit long..."

Merula crispa ses ongles sur la banquette de cuir, serrant les dents face au reproche à peine voilé, puis détourna le regard. Le bal de Yule demeurait son échec le plus humiliant de sa courte existence. A son grand étonnement, personne n'était venu lui la demander comme cavalière, pas même les âmes les plus désespérées du chateau. La Viperyn avait eu beau prétendre qu'elle s'en moquait, elle s'était finalement réfugiée dans un coin sombre pour pleurer toute la soirée. Une fin peu glorieuse que l'adolescente refusait encore d'admettre.

"J'ai reçu des tonnes de demandes," affabula-t-elle en croisant ses mains sur son genou. "C'est juste qu'aucun d'entre eux ne méritaient de m'emmener danser. J'ai tout de même des standards...!"

Le fiacre entama une descente, coupant court à la conversation au profit de la demoiselle. La majestueuse demeure se révéla sous une nappe de brume. Merula eu un moment d'absence, fascinée par ce panorama qui dépassait de loin ses attentes. Elle savait que les Shafiq étaient riches, mais à ce point...? Poudlard faisait pâle mine en comparaison. Une raison de plus de s'en prendre à Merlin lorsque toutes deux seront de retour à l'école...

Ironie du sort, c'est son visage que Merula reconnut en premier au sein du cortège qui les attendait dehors.

***

Bigre, songea la Serpentard en traversant le hall à la suite de sa tante. Cet endroit paraissait plus grand encore de l'intérieur, et peut-être l'était-il effectivement. Elle eut un nouveau regard pour Merlin, qui de son côté semblait redoubler d'effort pour ne pas avoir l'air de s'ennuyer à mourir. Combien de fois avait-elle dû jouer les plantes vertes pour accueillir les nouveaux venus ? Merula lui destina un sourire moqueur. Peut-être allait-elle pouvoir profiter du fameux adage qui prétend que les invités sont rois...

"Ne t'éloignes pas de trop," lui glissa Drosera une fois le tour du propriétaire terminé. "Et essayes d'être un peu avenante. Tu n'as pas autant de choix que tu ne l'imagines."

Sa nièce lui adressa une grimace une fois son dos tourné. Elle n'appréciait pas particulièrement sa tante, loin d'être à la hauteur de ses véritables parents à ses yeux. Eux auraient su voir le véritable mérite de leur fille, cela ne fait aucun doute. Résignée à devoir passer son nouvel-an au milieu des sourires pincés, Merula s'évapora dans la foule, bien décidée à explorer cette imposante demeure.

***

Evidemment, une exploration ne pouvait se faire sans prendre le risque de s'égarer une ou deux fois. Elle avait été surprise et redirigée à plusieurs reprises par des serviteurs pris au dépourvu, mais s'était toujours faufilée de nouveau là où on ne l'attendait pas. Lorsqu'elle fut finalement chassée du cellier par un intendant mécontant, Merula prit la résolution de se faire oublier quelques temps dans la masse des invités. Elle s'était débrouillée pour subtiliser l'une de ces boissons alcoolisées que seuls les adultes s'autorisaient, se pavanant d'un groupe à l'autre sans particulièrement s'y attarder.

Une voix parmi tant d'autres attira son attention, l'arrachant à ses postures d'apparat. Rendue légèrement euphorique par son breuvage, la sorcière intervint auprès d'Aria qu'elle bouscula de son coude, ignorant royalement Sessho par la même occasion.

"Beurk...!" l'aborda-t-elle sur un ton complice. "Tu ne devineras jamais la taille de cette maison. Leurs cuisines ont des cuisines...!"

Son regard s'abaissa vers le cou de sa comparse, attiré par le curieux pendentif y siégeant. Interloquée, Merula s'apprêta à la questionner sur le sujet, avant de réaliser que le reste de la famille Beurk se trouvait à proximité. La sorcière cligna des yeux, réalisant sa méprise, puis s'inclina en dissimulant adroitement son verre alcoolisé dans son dos.

"Mes hommages, sire Beurk," fit-elle, adoptant des manières plus convenables. "Merula Viperyn, pour vous servir. J'ose espérer que ces vacances d'hiver auront redonné un peu d'aplomb à votre fille. Elle paraissait bien effacée dernièrement."

Hop ! L'embarras de son intervention inopinée était désormais transféré à Aria. A quoi bon avoir une presque-amie si l'on ne peut pas la jeter sous le bus de temps en temps...

Merula Viperyn
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Merula Viperyn

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Dim 17 Oct 2021 - 1:32


   
Au bal des Faux-Semblants

Pure-blood families


No one can long hide behind a mask; the pretence soon lapses into the true character.

Sometimes falses pretenses are designed to knit the net of darkness. Les feuilles colorées écrasées sur le sol humide, laissant les branches des arbres dénudées, avaient été réduites en miettes ou s’étaient envolées. Les pluies fréquentes du Royaume-Uni ne se déversaient plus sur le pays pour offrir de nombreux paysages verdoyants, leurs perles translucides se changeant en cristaux blancs et scintillants qui recouvraient à présent les collines d’une couverture épaisse et laiteuse. Le vent froid, parfois même glacé, avait remplacé les brises fraîches et humides, pour venir griffer les visages tendus, les mains crispées qui n’avaient pas trouvé protections à leur peau fragile. Dans le ciel, le soleil avait déserté à l’approche d’un ciel blanc, couche cotonneuse trop opaque pour que la sphère enflammée fusse capable de la transpercer. L’hiver était arrivé, amenant avec lui les vacances de décembre. Drago Malefoy aimait-il cette période de l’année ? Il ne pouvait en tout cas nier préférer un temps froid à une insupportable canicule qui faisait, à coup sûr, glisser une multitude de gouttes de sueur sur sa peau lisse et blanchâtre. Mais l’éternelle insatisfaction du jeune Sang-Pur n’était inconnue de personne. Éternelle insatisfaction ou éternel pessimisme ? Qui pourrait le dire ? Le petit prince trouvait, quoi qu’il en soit, toujours un défaut à relever, et ce, également pour chaque saison de l’année. Mais, au moins, chacun de ces cycles apportait nouveauté, brisant alors la routine des jours qui s’enchaînaient. Si on oubliait la neige et son lot de contraintes, soit la fusion - même si on ne pouvait pas dire qu’elle fût toujours à l’état solide - qui trempait alors ses vêtements hors de prix, le petit sorcier aimait les longues nuits qu’offrait la saison hivernale. Ne voyant le chaudron ni à moitié vide ni à moitié plein, un brin de nostalgie l’avait enveloppé alors qu’il avait dû quitter Poudlard et ses amis. Néanmoins, ces regrets étaient confrontés à la joie qu’il ressentait à l’idée de retrouver le manoir ainsi que ses parents, les deux seules personnes en ce monde qu’il pouvait prétendre aimer de tout son cœur et envers qui il vouerait à jamais une admiration inébranlable. En ce qui concerne ses camarades, il aurait peut-être l’occasion de les revoir, que ce fut dans son manoir ou dans le leur, au cours d’une virée à Londres ou sur le Chemin de Traverse. Et puis, dans tous les cas, ces deux semaines passeraient certainement très vite.

Comme prévu, le temps s’était écoulé à une vitesse folle, pour seulement deux semaines de vacances. Si rapidement, que Noël était déjà arrivé. Un autre point que l’héritier Malefoy appréciait à cette période de l’année. Ce n’était pas forcément pour les belles décorations, l’ambiance ou la convivialité de la fête, mais plutôt pour la réception des cadeaux. Il ne célébrerait pas la veillée de cette fête seul, avec ses parents pour seule compagnie. Non, seraient aussi présents à ce dîner les autres membres de sa famille, les Beurk : son oncle Grégory, sa tante Célestine qui était aussi la sœur de son père, et ses deux cousins, Ezechiel et Aria. Mais un repas en famille ne signifiait pas que les codes opulents et les bonnes manières impériales seraient mis de côté bien que certains sujets de conversation bien trop sérieux étaient à proscrire. Aussi, bien que rien ni personne ne fût dans la capacité de surpasser Lucius et Narcissa aux yeux de Drago, ou le culte qu’il leur vouait, cela n’empêche pas qu’il eût toujours respecté la famille Beurk.

Le festin entamé, aucun faux pas n’avait été effectué tant chaque convive demeurait sous le parfait contrôle de lui-même, ou parce que certains, et surtout certaines, semblaient être ailleurs et s’enfoncer dans un ennui profond. Pendant ce temps-là, Drago conversait avec qui voulait l’écouter, vantant alors ses actions, ses capacités et ses mérites. Mais son cousin Ezechiel semblait avoir eu la même idée que lui, les deux adolescents s’adonnant à une bataille plus ou moins amicale, leur but étant le même : être celui qui aurait le plus d’attention et d’éloges. Malgré cette rivalité qui était en réalité très commune au sein de ce duo, Ezechiel était celui, autour de cette table, avec lequel Drago avait le plus bavardé durant la soirée, même si c’était parfois pour se taquiner à leur façon. Parmi ses deux cousins, l’aîné était celui avec lequel Drago s’entendait le mieux. Après tout, leur personnalité et leur comportement respectif se liaient aisément, dans la mesure où les deux garçons avaient un certain attrait pour la manipulation, partageaient le sens des affaires et se défiaient dans leur popularité à Poudlard... Choses qui les amenaient souvent à réellement se quereller, ou en tout cas à attiser un grand agacement chez Drago. Qui se ressemble s’assemble, dit-on, mais pour certaines personnalités qui se voulaient volcaniques, les conflits et éruptions pouvaient être fréquents.

Son lien avec Aria La Silencieuse, en revanche, était tout autre. Peut-être n’étaient-ils pas compatibles ou peut-être ne se comprenaient-ils pas. Du moins, c’était bien le cas de Drago, qui lui, ne la comprenait pas. Ou pas toujours. Ils étaient tels l’eau et la glace que l’on pouvait assimiler, mais qui s'opposaient malgré tout. Beaucoup de choses les liaient, mais pas assez pour surpasser leurs nombreuses différences. Ils se connaissaient depuis toujours, et ils avaient eu le temps, depuis leur enfant, de partager de nombreuses choses. Malgré tout, il demeurait une certaine distance entre eux, cette dernière galvaudant leurs liens qui n’étaient pas parfaits, les deux adolescents ayant conscience que beaucoup de choses leur échappaient en leur liaison. Éloignés, certains points de leur personnalité étaient communs. Ils partageaient une grande passion et admiration pour ce qui s’apparentait à la magie noire, depuis toujours, et ils ne se l’étaient jamais caché. La Beurk cultivait un grand esprit de compétition, et ce, dans tous les domaines et une certaine détermination, tout en travaillant beaucoup en classe. Ce que l’héritier Malefoy appréciait énormément et qui mutualisait les deux blonds, cette ambition étant telle qu’ils étaient prêts à tout pour ne serait-ce que frôler leurs buts et arriver à leurs fins. Dans un accord non discuté ou divulgué, ils souhaitaient respectivement devenir de grands sorciers. Mais le point de vue d’Aria divergeait encore puisqu’elle ne voulait absolument pas briller par son nom et sa réputation, deux facteurs que Drago aimait à mettre à profit. Après tout, s’ils pouvaient l’amener à l’aboutissement de ses objectifs, à la réalisation de ses projets, à ses yeux, c’était tout à fait légitime qu’il en profitât. Par ailleurs, quelques-uns de leurs traits de caractère alimentaient un peu plus encore leur uniformité. Ils faisaient preuve d’antipathie et froideur envers autrui et avaient parfois recours à des comportements fourbes et arrogants. Les deux Serpentard se ressemblaient bien plus qu’il n’y paraissait, pourtant ses points en commun ne parvenaient pas à grignoter la distance qui les séparait. Pour cause, et qui en était d’ailleurs la principale, Aria n’aimait pas les faux-semblants et semblait également détester beaucoup de choses des Sang-Pur - son aversion s’étendait certainement au point de haïr également beaucoup de choses qui faisait partie de Drago -, mais elle se gardait bien de le dire. Drago n’était pas dupe, était loin d’être bête, et le remarquait bien. Sinon, pourquoi aurait-elle été si absente et effacée lors des événements familiaux ou mondains ? Ainsi, bien que le sujet n’eût pas été abordé et débattu, il partageait le point de vue de Grégory quant au potentiel de sa cousine qu’elle semblait déterminée à gaspiller et à gâcher. Le côté solitaire de la jeune fille était un autre point primordial quant au fait qu’ils ne pouvaient pas toujours s’entendre. Elle préférait largement être seule dans son coin pendant que Drago, lui, préférait être entouré. Malgré ces abondantes oppositions, la notion de respect et d’estime l’un envers l’autre, avait toujours demeuré. La jeune Beurk savait qu’elle pouvait compter sur son cousin, presque autant que son grand frère, pour qu’il prenne sa défense si besoin était, et qu’elle pouvait profiter de sa popularité pour s’éviter les ennuis. Drago était-il réellement plus proche d’Ezechiel que d’Aria, sa relation avec cette dernière étant en définitive bien plus profonde ? La profondeur des choses, il n’en avait cure, en tout cas pour le moment, et préférait privilégier et caresser leur surface brillante et apparente qui avait bien plus d’impact sur son ascension dans la société. Toutefois, pour lui, Aria demeurait un grand secret à elle seule.


* * *


31 décembre. L’année était sur le point de s’achever, mais Drago Malefoy ne profiterait pas des dernières heures seulement en compagnie de sa famille, Malefoy et Beurk confondus. Un autre événement des plus importants l’attendait : lui et ses parents avaient été invités à un bal. Mais ce n’était pas n’importe quel bal. Celui-ci avait été organisé par les Shafiq en la faveur des quelques Sang-Pur de la communauté magique. Une soirée que Drago attendait avec grande impatience puisqu’il avait toujours aimé ce genre de rassemblement. Il était toujours très fier de se pavaner aux côtés de ses parents qui ne pouvaient que redorer son image et sa réputation. Fils de Lucius et Narcissa Malefoy, il pouvait faire voir ses plus belles aptitudes et qualités auprès de tous, et ce, sans modération. Il pouvait aussi faire ressortir son côté hautain, orgueilleux et impérieux à souhait sans être jugé - bien que le jugement et les préjugés, il s’en contrefichait.

Cette soirée n’était pas orchestrée par n’importe quelle famille de sorciers. Leurs hôtes ne seraient autres que Lancelot et Alice Shafiq, couple avec lequel les parents de Drago s’entendaient plus ou moins. Depuis longtemps, ils étaient invités chez les Malefoy, ou autres familles pour des soirées aristocratiques, ou pour des réceptions ministérielles, chacun des hommes des deux familles travaillant au ministère de la Magie. Ils s’étaient toujours échangé une neutre cordialité sans aller plus loin, ne partageant pas toujours la même vision des choses, mais sans pourtant se déclarer une quelconque guerre. Bien sûr, durant cette longue nuit, Drago y retrouverait leur fille aînée, Merlin, également étudiante à Poudlard, avec qui il entretenait de bonnes relations. Dans la mesure du possible...

Merlin ne pouvait être qu'une jeune fille tout à fait respectable. Il s’agissait d’une petite sorcière très douée dans tout ce qu’elle entreprenait. Drago la connaissait depuis son enfance, puisque les deux adolescents s’étaient rencontrés à de nombreuses réceptions avant de faire leur scolarité à Poudlard, bien que très distants l’un de l’autre dans un premier temps. Ils firent leur rentrée dans l’école écossaise en même temps, se retrouvant à de nombreuses reprises, et depuis des années, dans les mêmes cours. En tant que singulier Serpentard, Drago, en dehors de cette maison, détestait les Gryffondor avec lesquels s’évertuait une éternelle guerre de supériorité, et il n’appréciait pas, se désintéressait même complètement des Poufsouffle. La seule maison qu’il pouvait tolérer était celle des Serdaigle, mais bien sûr pas n’importe quel élève, et encore moins les personnes bizarres telles que la Lufuca Lovegood. Même si elles n’étaient pas comparables, Cho Chang et Merlin Shafiq faisaient partie des aiglons que Drago pouvait s’autoriser à fréquenter. Après tout, cette dernière était une sorcière très douée qui voulait en devenir une excellente pour égaler, voire surpasser ses parents, ce que Drago ne pouvait négliger dans la mesure où il estimait lui-même grandement ses paternels, les considérant comme des modèles et souhaitant particulièrement continuer ce qu’ils avaient déjà commencé. Sérieuse et studieuse, la Serdaigle demeurait une grande curieuse qui s’intéressait à tout et vivait à travers de grandes ambitions, ce qui ne pouvait que les rapprocher l’un de l’autre. Leurs démons intérieurs semblaient communs, étant donné qu’ils avaient tous deux peur de l’échec. L’intelligence de ses semblables séduisait Drago, et bien que la philosophie de Merlin le dépassait, il appréciait pouvoir discuter de sujets divers, variés et profonds en sa compagnie, et surtout, la plupart du temps, à l’abri des oreilles et des regards. À Poudlard, ils éprouvaient les mêmes goûts pour le Quidditch et le club de duel. Dans sa compétitivité inépuisable, Drago la considérait également comme une rivale dans un premier temps, car elle comme lui, occupaient le poste d’attrapeur dans leur équipe sportive respective. Le Serpentard restait souvent dans cette optique, celle de vouloir être le meilleur, mais la rivalité qu’il exprimait ne menait pas toujours aux conflits. Les différends se manifestaient surtout quant aux goûts assez spéciaux de Merlin qui s’intéressait un peu trop aux Moldus et aux objets que ces êtres inférieurs avaient pu créer. Outre cette curiosité, il lui arrivait de fréquenter des Sang-de-Bourbe, ce que Drago, très traditionaliste - alors que Merlin et sa famille étaient à l’inverse progressistes - ne tolérait guère. De plus, la jeune Shafiq, au même titre que le Malefoy, avait toujours été d’une grande franchise, avait un avis sur tout, était parfois trop directe tout en détestant avoir tort, ce qui pouvait les mener à certaines altercations. Enfin, ces dernières n’étaient pas réelles ou exprimées en finalité, il ne s’agissait que d’une question de susceptibilité de la part du serpent, l'aiglonne faisant preuve d’une tolérance considérable, même en ce qui le concernait lui-même, et acceptait largement que les points de vue diffèrent.

Le blondinet avait, pour les festivités, enfilé son plus bel ensemble, qui avait été choisi avec beaucoup de goût par Narcissa, bien qu’il eût tout de même son mot à dire. Elle, à travers les yeux argent de son fils unique, était resplendissante, alors qu’il trouva à Lucius une élégance sans pareil. Ce dernier, avant de partir, n’avait pas échappé à son rôle de père sévère et intransigeant, et avait ordonné froidement et durement à son fils de ne faire aucun faux pas durant cette soirée, auquel cas les représailles en seraient terribles. L’héritier avait acquiescé sans dire un mot, soumis et discipliné. La discipline, elle faisait partie de ses obligations, de ses devoirs en tant que seule progéniture, pourtant, à ses yeux, la soumission, qui lui allait de pair, n’était qu’à moitié réelle, car il désirait lui-même faire la fierté de son père, en allant dans son sens. Il n’avait pas vraiment le choix, mais d’après lui, Lucius et lui partageaient très exactement les mêmes avis, sur absolument tout. Les ordres du patriarche prononcés, Narcissa s’était ensuite approchée de son fils adoré - ayant attendu que son très cher époux se fût éloigné - un doux sourire à la commissure de ses lèvres parfaitement maquillées alors qu’elle posa une main rassurante sur son épaule.

« Fais ce que te dit ton père, Drago, c’est pour ton propre bien. Quoi que tu fasses ou quoi que tu dises ce soir, je suis certaine que tu seras parfait, comme toujours. »




À ses mots, elle déposa un baiser aussi léger qu’une brise d’été sur sa joue avant de le mener à l’extérieur du manoir puis en dehors de la propriété qui était sécurisée. Une fois le portail franchit, ils purent aisément se rassembler pour transplaner vers leur lieu de destination, Drago se retrouvant, l’espace de quelques secondes, englouti, aspiré dans le rien, dans le néant. Dans un tourbillon de formes et de couleurs, lui et ses parents se retrouvèrent à la lisière d’une forêt, non loin de Godric’s Hollow. Au lieu d’y voir une végétation complètement meurtrie, s’offrait à lui une forêt dense, l’ombre des nombres arbres dansant étrangement à la lueur de la lune. Les Malefoy ne se firent alors pas prier pour s’installer dans le fiacre qui les attendait, plutôt que traverser le bois sombre à pied. Durant les quelques minutes de trajet, Drago fut parcouru d’un léger frisson alors qu’il observait par la petite fenêtre du véhicule le bois inquiétant qui dissuaderait quiconque, et lui le premier, de quitter le chemin principal qui menait à la demeure des Shafiq. Merlin seul savait ce qui pourrait lui arriver s’il s’enfonçait un peu trop dans cette nature morbide. Le trajet se déroula en silence, et, une fois la diligence arrêtée, un serviteur ouvrit la porte et offrit une main galante à Narcissa pour l’aider à en descendre. Drago en sortit à son tour pour découvrir la grande cour de la demeure. Après une courte évaluation, ses yeux pâles se posèrent sur Lancelot, Alice, Merlin et le petit dernier, qui se tenaient devant le manoir semblable à un immense château, image présentée telle un magnifique tableau. Son regard s’attarda un instant sur sa camarade, prenant le loisir de détailler sa tenue et sa prestance, avant d’entamer le pas pour se diriger vers elle et sa famille. Une fois qu’il eût salué brièvement, mais poliment Lancelot et Alice Shafiq, il laissa les parents échanger quelques mots, lui, dirigeant une nouvelle fois ses iris argentés vers la Serdaigle.

« Bonsoir, Merlin, » la salua-t-il accompagnant ses propos d’un hochement de tête et d’une expression faciale des plus dignes.




Il en eut tout juste le temps puisque les parents de la jeune fille engagèrent la marche le long du chemin entouré à nouveau de végétation et de quelques statues, qui les menèrent à l’intérieur du manoir. De l’entrée à la salle de réception, Drago observa très rapidement la décoration de la demeure, sans laisser transparaître une quelconque admiration. Tout était somptueux, mais bien que le manoir surpassait aussi celui des Malefoy par sa superficie, le jeune sorcier ne démordait pas, intérieurement, quant au fait qu’il préférait de loin sa maison à lui et ses parents. Dans la salle principale, une scène avait été mise en place, sur laquelle quelques musiciens enchaînaient déjà quelques notes et accords pour divertir les invités qui attendaient le commencement de cette soirée. Drago profita des quelques minutes pour balayer la pièce du regard, reconnaissant et apercevant quelques élèves de Poudlard, dont, en premier lieu, ses cousins Ezechiel et Aria, ainsi que Pansy Parkinson, les soeurs Greengrass ou encore Merula Viperyn. Il était certain qu’il pourrait retrouver les autres que ses yeux n’avaient pas encore croisés, dans l’espace aménagé qui leur serait réservé, comme l’avait expliqué Lancelot Shafiq. Il s’agissait là d’une très bonne idée si le jeune Malefoy, ainsi que ses camarades, souhaitaient un peu plus se lâcher... Même s’il devrait prêter tout de même attention à ses faits et gestes et qu'il devrait être irréprochable.

Le jeune sorcier vit l’hôte, et donc l’homme de la famille Shafiq, prendre place sur la scène, surplombant alors le reste de la salle et de ses invités afin que l’on n'eut vu que lui. Baguette à la gorge, sa voix résonna dans l’immensité de la pièce, rebondissant sur les murs, et il entama alors un discours. Il fut bref, mais ses mots avaient été choisis avec une noble stratégie. Alors qu’il marqua une pause, les serviteurs se mirent d’un commun accord en mouvement au même moment pour faire le tour des invités auxquels ils proposèrent des boissons rafraîchissantes. Si c’était pour les désaltérer et les mettre à l’aise, Drago savait parfaitement que c’était dans le but de porter un toast et ainsi s’engager dans des promesses que tout le monde ne tiendrait pas. « Trinquons mes amis. Trinquons à nous. Trinquons à la noblesse sorcière. » Et presque d’un seul geste simultané, suivant celui de Lancelot, la plupart des invités levèrent leur verre. Le garçon, lui, ne leva rien du tout et attendit quelques secondes pour amener le récipient à ses lèvres et boire une gorgée de son cocktail fruité non alcoolisé. Pas mauvais, mais il aurait préféré d’autres saveurs, ce à quoi il remédierait un peu plus tard. Pour l’heure, il resta auprès de ses parents, leur emboîtant le pas alors qu’ils se dirigèrent vers la famille connue la plus proche, soit celle des Greengrass. Daphne et Astoria, les deux jolies progénitures, étaient de bonnes amies de Drago qu’il connaissait et fréquentait beaucoup depuis sa tendre enfance, bien qu’il s’entendît davantage avec l’aînée qui avait très exactement le même âge que lui. Si Lucius, Narcissa et lui-même devaient faire le tour des invités qu’ils connaissaient, et surtout qu’ils appréciaient, afin d’au moins les saluer tour à tour, ils auraient du pain sur la planche. Dans tous les cas, la nuit promettait d’être très longue.
Drago L. Malefoy
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Drago L. Malefoy

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THERE'S DAGGERS IN MEN'S SMILES
There the grown serpent lies. The worm that’s fled hath nature that in time will venom breed ; no teeth for th' present.
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Mer 1 Juin 2022 - 20:02
Le bal des faux semblants

Voilà l'effet des vaines pompes du monde vous êtes accoutumé apparemment à des visages riants, véritables théâtres de mensonge. La vérité est austère, Monsieur. Mais notre tâche ici-bas n'est-elle pas austère aussi ?


Une promesse vaut moins que les actes.

Debout devant son miroir, Sessho ajusta son nœud de cravate, les doigts tremblants. L'ayant déjà raté deux fois, ce qui n'était pas dans ses habitudes, il prit grand soin de soulever le tissu après une expiration contrôlée. Il serra doucement, puis, passa nerveusement une main dans ses cheveux. Si d'ordinaire la mondanité et les rassemblements aristocratiques éveillaient peu son intérêt ou son trac, à présent, se montrer en public était une source d'inquiétude, et même la perspective d'y retrouver Merlin n'y changea rien. Sans doute que l'échange désagréable qui l'avait entretenu avec son frère aîné quelques jours auparavant devait contribuer à cette vague d'angoisse le submergeant depuis des heures. Il gardait en lui à chaque fois qu'il se surprenait à y repenser les phrases blessantes et culpabilisantes. Nous avons tous une vie, lui avait-il dit suite à sa confession.

Lui qui avait préféré fuir la verbalisation de son traumatisme s'y était risqué en espérant trouver du réconfort ou un appui, même maladroit, il s'en serait contenté. Au lieu de cela, il s'était heurté douloureusement au mépris et à la déception. Si les larmes l'avaient pris, le plus grand ne s'était pas laissé attendrir, finissant de lui renvoyer sa faiblesse par une grimace de dédain.

Le dîner qui avait suivi avait été silencieux. Lui, s'était contenté de fixer le défilé d'assiettes et autres assortiments de condiments, l'appétit dans les talons, et une nausée au bord des lèvres. Il était persuadé que si l'on avait forcé à entretenir la conversation, il aurait pu se distinguer par une saute d'humeur, qui, il le savait, était fortement réprimandée non seulement dans sa culture, mais, et surtout, dans sa famille. Il n'osa à peine imaginer les réactions de ses parents s'il s'était mis à leur hurler son chagrin ou dire à haute voix ses pensées les plus sombres. Il aurait eu la sensation de délivrer la honte sur son lignage et de déshonorer les valeurs de son blason.

Il avait attendu que les sujets se lancent et qu'il soit certain que sa présence n'était pas utile pour enrichir le débat pour avoir une raison valable et polie de rester muet tout le temps de la réunion. On ne se formalisa pas de son caprice de ne rien avaler, et il douta même qu'aucun y ait réellement prêté attention. De retour dans sa chambre, il avait regardé le ciel jusque tard sur le matin, pour voir les étoiles disparaître dans les lueurs de l'aube.

Il n'était pas accepté qu'un homme puisse faire preuve de sensibilité, tout autant qu'une femme se devait d'être discrète et cultivée. De par son observation de la société britannique, il avait noté des similitudes dans les comportements à adopter en regroupement. Si les plus modestes étaient libérés d'une quelconque obligation, il revoyait dans l'attitude de certains de ses camarades les mêmes habitudes guindées qui lui avaient été imposées. D'un continent à l'autre, les conventions bourgeoises étaient quasiment les mêmes, que ce soit la virilité outrancière des garçons ou la pudeur candide des jeunes filles.

La demande d'intégration au sein de la noblesse anglaise avait été bien reçue, et son père s'était même montré flatté par cette soudaine reconnaissance. Rompant l’indifférence qu'il démontrait à son égard, il l'avait félicité pour le respect de son rôle. Après tout, n'était-ce pas pour établir un début de relation avec les autres familles influentes de pays étrangers qu'il avait souhaité envoyer l'un de ses enfants, la chaire de sa chaire, dans une autre école que celle à laquelle il aurait dû prétendre. Il s'était enorgueilli de son succès et Sessho fut partagé entre le plaisir de l'avoir finalement contenté, et la colère d'avoir été utilisé à des fins diplomatiques. Confus, il s'était replié et avait prêté une oreille peu attentive aux ordres et conseils à appliquer durant la fête.

Il ne retenu qu'une chose ; faire bonne impression.

Le jour était avancé et il regarda sa chambre être éclairée par les halos transperçant son paravent. La veste posée sur l'épaule, il traîna sur le pallier de la terrasse communicante et porta un regard évasif sur le jardin intérieur. La neige avait recouvert le bassin et les carpes s'en étaient déjà allées hiberner. Il songea qu'il aurait souhaité les imiter.

Du pouce, il toucha l'un des boutons de sa chemise bleue nuit, et il inspira à pleins poumons. Les parfums floraux se mêlèrent dans ses narines à l'odeur du froid et de son eau de Cologne. Sur sa peau, un peu rêche et cintré, un bandage barrait son torse. En son absence, il s'était parfois retrouvé contraint de revivre des extraits épisodiques de ses cauchemars. Pour pallier toute éventualité et risques, il s'était prémuni d'imaginer ses cicatrices. Une sécurité bricolée à la hâte qui portait maigrement ses fruits en journée. Sur son lit encore défait, on pouvait trouver emmêlés dans ses draps quelques ouvrages encore ouverts ou annotés et des paquets reçus au vingt-cinq mais pas encore dépouillés de leurs emballages. D'un geste de la baguette, il les rangea sur une étagère, appliquant le même soin au reste de la pièce. Les couvertures se rabattirent mollement et il apporta un léger complément en époussetant son bureau de la paume.

Sur la table étaient pliées diverses notes relatives à ses excursions nocturnes. Il devinait des dessins malhabiles de constellations ou des ébauches de retranscriptions de manuels d'astronomie. S'il tâchait de se montrer rigoureux dans ses analyses, il en comprenait les lacunes à chaque relecture. En marque page de carnet, il déplia une partition à moitié retracée et reconnue sans peine l'ultime requiem à quatre mains, là où les notes de piano étaient si dissonantes qu'elles en dégradaient la beauté du violon. La musique lui manquait depuis l'instant où il avait décidé qu'elle était terrifiante. Il repensa avec nostalgie à cette promesse qui s'était faite à huis clos, puis avec plus d'amertume qu'elle n'était pas tenue.

Je serais là, avait signé Aria de l'archet. Il lui en voulut autant qu'il éprouvait du ressentiment pour le reste de son entourage, sans parvenir à élire un coupable à leur tête, ni à formuler avec cohérence un délit dont les accabler, si ce n'est celui de se concentrer sur leurs propres préoccupations. Ce qui, rationnellement, n'était ni un crime, ni une raison de nourrir une rancune. Il doutait de l'équité dans ses relations, où il savait donner énormément, mais peu recevoir. Ce qui ne l'avait jamais profondément dérangé. Et il avait compris que ce n'était pas tout à fait relié.

Voulait-il être soutenu ou se sentait-il seulement mal de ne pouvoir contenter tout le monde ?

De l'index, il bascula la couverture en cuir et la repoussa près de l'encrier, remettant ses questions à plus tard. Les bras tendus, il fit coulisser les manches de jais et boutonna son veston assorti. Dans ses chaussures cirées, il traversa les couloirs pour rejoindre le hall principal. Tous avaient préféré s’accommoder de la mode européenne, délestant les kimonos et autres yukata. Dans sa robe poudrée, le teint de sa mère était plus laiteux que le manteau glacé dans le creux de ses coudes. Finement maquillée, elle se tenait de son port droit au bras de son père. L'homme était rasé de près, et portait cet air sévère, mais juste des hauts dignitaires. Sèchement, il l'enjoignit d'un geste de la main à se joindre à leur cortège, où, en cercle, ils touchèrent ensemble un prisme changeant qui les transporta à l’orée d'une forêt.

La nuit était tombée de l'autre côté du globe et ses pupilles, encore habituées au jour, eurent quelques secondes pour s'adapter au changement soudain. Le trajet dans le carrosse, le jeune homme le passa à contempler les arbres dans la pénombre. Le corps se balançant docilement, il vagabonda dans ses pensées. La forêt et son esthétique brumeuse étaient inspirante, aussi, il se réfugia à l'intérieur, appliquant le schéma routinier de la mise en place de ses barrières. Il vida la tristesse dans un vase, et la colère dans un autre. Il les rangea dans un coin de son monde personnel, puis, en mnémotechnie physique, serra le poing pour y garder la clé secrète de son refuge. Il se sentit plus vide, à l'image d'une coquille sans eau ni abrasion naturelle, et il accueillit cet état avec soulagement.

L'entrée de la demeure des Shafiq était comme illustrée dans les grimoires retraçant l'histoire des vingt-huit sacrés. Grande, imposante et intimidante. Le château était austère dans la nuit, mais à l'instar de Poudlard, dégageait un mystère que sa curiosité lui permettait d'apprécier. En amont de cette soirée, il s'était documenté sur les différents noms qu'il croiserait entre ces murs. À commencer par l'hôte, qu'il ne manqua de saluer d'un hochement de tête discret et poli, tandis qu'il voyait son père s'adapter à la coutume et répondre aux usages par une poignée de main. Son visage d'ordinaire fermé et froid était étiré par une amabilité factice qu'il réservait uniquement aux occasions prestigieuses. Sa mère, elle, plus réservée, conformément à ce que l'on pouvait attendre d'une femme, restait silencieuse tandis que les hommes échangeaient sur leurs points communs. Ils marchèrent sur le sentier, zigzagant dans le jardin aux allures de parc.

Une fois dans la grande salle et le hall passé, ils se séparèrent tacitement. Les adultes se mêlèrent aux discussions, rejoignant un regroupement non loin des fenêtres. Il y reconnu les mèches blondes des Malfoy, mais également la posture plus en retrait des époux Greengrass. Seul au milieu de ce qui pouvait être une piste de bal, il tira sur ses manches, il observa attentivement la décoration et les détails architecturaux. S'il avait été peu expérimenté en la matière, Callum avait comblé ses lacunes, lui qui nourrissait le rêve de vivre de sa passion pour les monuments ou les travaux artistiques. Il passa sur les arches sculptées puis le lustre de cristal à plusieurs étages.

C'est le nez en l'air qu'il se fit surprendre par un serveur dont il accepta la coupe de champagne avec un sourire bref. La coupe près du torse, et l'autre main dans la poche, il tourna son attention du plafond au sol de marbre, s'appliquant à s'attarder sur chaque détail, du pigment de la peinture sur la fresque au chevron du parquet. Le reste de la maison était-elle aussi riche de décors ? Si tel était le cas, il saisissait mieux l'intérêt de Merlin pour les tours et autres espaces permettant de respirer. Le luxe ressemblait à une parade, et il ne douta pas que sous ses belles manières, son père n'y voit là que de la poudre aux yeux.

Lorsque Lancelot Shafiq grimpa sur l'estrade, il pivota de trois quarts, non pas pour se concentrer exclusivement sur l'orateur, mais bien pour guetter les expressions de son auditoire.

« Trinquons mes amis. Trinquons à nous. Trinquons à la noblesse sorcière. »

Les verres se levèrent, et machinalement, il suivit le mouvement. Il trempa ses lèvres dans la liqueur alcoolisée, en prenant une gorgée, puis se décala le long des murs pour y admirer les moulures. Non sans les raser, il les longea d'un pas tranquille, curieux et contemplatif. Il s'arrêta devant une colonne, ensuite sachant que toutes se ressembleraient dès lors, il fit face au reste des invités, le dos droit et la mine modeste. S'il mit quelques minutes à chercher ses parents, il les retrouva à deux lieux opposés. Sa mère avait décidé de se joindre à Lady Shafiq et ses enfants, et à son air radieux, il devina que la discussion lui était profitable intellectuellement.

« Bonsoir Monsieur Shinmen. », il cligna des yeux pour découvrir la présence d'Aria et de ce qu'il devinait être son père. Résistant à l'envie de le saluer à la mode de son pays, il accepta sa main tendue avec plus de sobriété. « Je me présente, Gregory Beurk, le père d'Aria que vous semblez bien connaître. »

« Oui, en effet, Monsieur Beurk. », répondit-il le timbre calme, en inclinant le buste pour les deux femmes. « Je suis enchanté de pouvoir vous rencontrer. »

Il s'était trop de fois confronté au faux pour ne pas le reconnaître, caché derrière de jolis mots. Il ne se fia ni à son ton aimable et courtois, ni à son esquisse chaleureuse.

« Ma fille que voilà désirait justement vous remercier pour le très estimable présent que vous lui avez envoyé pour Noël. »

S'il associa la fête à une boîte à musique, en suivant le geste de son amie, il comprit qu'un nouveau secret s'était immiscé, et que cette fois-ci, il prenait la forme d'un violon nacré. Il était semblable à celui qu'elle portait autrefois en pendentif, bien qu'il pouvait deviner la facture et les finitions d'un bel ouvrage. C'était le genre de présent que l'on offrait à un être cher. Et dans son esprit, il n'y eut qu'une jeune musicienne cachée sous la capuche d'un détraqueur pour avoir trouvé un tel trésor.

« Il est splendide. Et il sonne à merveille. Il n'y a qu'un musicien de talent comme toi pour avoir aussi bon goût en choix d'instrument. »

Depuis quand, Aria, le mensonge s'est-il emparé de notre relation ? A-t-il toujours été là, ou a-t-il commencé après cette nuit ? Tu avais promis, et tu n'as pas tenu. Sur quoi d'autre pourrais-tu feindre à présent ?

« Merci, sincèrement, Sessho. »

Est-ce la seule musique que l'on jouera ? Sommes-nous condamné à composer dans ses faux semblants ?

« Je t'en prie. », répliqua-t-il naturellement. « Votre fille possède un grand talent pour le violon. Il est précieux. », à cela, il ajouta ses lèvres plus relevées, sincère dans ses compliments. « C'est une fierté de pouvoir l'accompagner. »

Il en pensa chaque syllabe et en occulta son léger concours à sa dissimulation. S'il n'avait nourri aucun appétit pour les jeux d'acteur, il s'était révélé digne prodige, si bien que dans sa bouche, cela lui semblait évident et familier. Pouvait-il seulement incomber cette faute à la platine ? Il se trouva injuste de lui en vouloir de ne pas l'avoir mis dans la confidence, ou de ne pas être l'un de ses secrets si importants. Il s'en sentit confus et mal-à-l'aise.

L'apparition de Merula arriva à point nommé et il saisit son ignorance comme une occasion de s’éclipser. Il ne rebondit pas sur son impolitesse, se trouvant chanceux d'échapper à ses enfantillages et autres piques blessantes.

« Je suis navré, mais il serait impoli de ne pas aller saluer nos hôtes. », il opina du chef pour toutes personnes présentes dans son cercle oral. « Monsieur Beurk, Madame Beurk, ce fut un plaisir. », puis, « Aria, Viperyn. », il s'éloigna d'un pas digne, traversant les convives en jouant des coudes.

De l'autre côté, après une rapide analyse, il y retrouva sa mère. En le voyant, elle en oublia ce fossé qui s'était creusé entre eux depuis son retour, et l'invita à se joindre à ses côtés d'un léger signe. Il obtempéra et s'épancha d'abord dans des excuses auprès de Lady Shafiq pour ne pas être venu plus tôt à sa rencontre, puis, moins guindé, il présenta ses respects à Merlin et son jeune frère. La caresse qu'il sentait sur sa nuque achevait de le mettre en confiance, et il prit conscience que leur complicité lui avait manqué. Il se détendit et n'oubliant pas de faire bonne impression comme il avait été stipulé plus tôt, il décida que tout cela ne devait pas être forcément abominable.

« Puis-je te réserver ta première danse ? », demanda-t-il à son amie.

Les deux mères eurent un regard de connivence à ce simple rapprochement.


CODAGE PAR AMATIS
AVATARS PAR PINTEREST


Résumé:
Sessho Shinmen
Préfet Serdaigle
Sessho Shinmen

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Un enfant perdu qui fond en larme

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Lun 27 Juin 2022 - 0:22
D’un léger mouvement de doigts, Laurel fit signe à la bougie qui flottait devant sa coiffeuse de se rapprocher du miroir, afin qu’elle put mieux s’y observer. L’éclat de la flamme alluma des reflets brillants dans l’acajou poli et les délicates ferronneries d’argent qui l’ornaient, donnant à la pièce une atmosphère bien plus riche qu’elle ne l’était réellement.  Laurel ajusta l’ovale basculant du miroir, jusqu’à ce que son reflet eut le cadrage parfait d’un portrait, puis, satisfaite, sculpta les quelques mèches qui s’échappaient de son chignon haut en anglaises lâches d’un blond de miel. Son ancêtre Josephina Flint, première propriétaire de la coiffeuse et historique Ministre de la magie, aurait approuvé, c’était sûr. D’ailleurs, son portrait daignerait peut-être le faire explicitement quand elle descendrait dans le salon. L’aïeule Josephina adorait être tenue au courant des sorties mondaines de ses descendants. Et ce soir, rien n’était trop beau pour la soirée du Nouvel An des Shafiq à laquelle ils étaient conviés. Si tous les ans, une nouvelle famille sorcière organisait les festivités de la Saint-Sylvestre, tous les réveillons n’offraient pas le même faste. La fête offerte par les Shafiq, elle, s’annonçait grandiose et tous les Flint en étaient bien conscients.

L’adolescente se scruta, vérifiant chaque détail de son apparence d’un œil critique. Dans la pénombre relative de sa chambre, ses yeux noisettes avaient des pupilles immenses qui lui donnaient un regard de biche. Fallait-il rajouter un ruban, une fleur ? Elle fronça le nez, testant du doigt son échafaudage de cheveux, puis respira un grand coup : non. On n’était plus en 1817, la famille Flint empruntait seulement un peu de grandeur à l’époque. Elle n’avait encore que quatorze ans. Suffisamment grande, elle le savait, pour commencer à jouer au jeu des alliances et des mariages futures, mais pas encore pour être une vieille fille qui aurait besoin de s’exhiber avec tous les bijoux de famille pour être vendable. Elle n’avait même pas encore ses BUSE, et, si elle était honnête, le commerce familial se portait très bien. En ces temps troublés politiquement, tout le monde voulait un balai, ce moyen de transport privé et discret. On avait moins besoin, en revanche, de contracter immédiatement une alliance avec une famille qui, dans six mois peut-être, serait en disgrâce politique. Ou à Azkaban. Ou morte. Ce soir, elle aurait seulement à leur rappeler que la famille Flint existait, et que son futur était aussi sans nuage et clair que son teint. Plus pourrait attendre. Les Flint étaient fiers de leur sang pur, mais pas au point de contracter des mariages complètement consanguins entre adolescents. Ils laissaient aux fanatiques le loisir de fiancer leur descendance au berceau, préférant une approche plus pragmatique et lucrative : faire miroiter des alliances était un jeu qui se jouait sur le long terme. En ne promettant rien à personne trop tôt, tout le monde était satisfait, et particulièrement Laurel, qui se serait bien passée de la moindre pression matrimoniale. Elle avait beau se préparer à ce futur rôle depuis sa tendre enfance, plus elle grandissait et moins la sensation d’être un simple pion dans la stratégie familiale était plaisante.

Simplicité, donc. Laurel offrit à son reflet un regard plein d’enthousiasme et de malice, et se décida pour un unique bijou : le Vif-d’or de son kit de Quidditch portatif, qu’elle avait gagné sur le marché de Noël du Chemin de Traverse, était par définition miniaturisé, et elle en avait profité pour le monter en pendentif quand elle ne jouait pas avec. Lorsqu’elle le saisit sur la tablette de sa coiffeuse, le contact de ses doigts avec le marbre froid la rasséréna.  Le pendentif, lui, se réchauffait déjà au contact de sa peau. C’était tout à fait elle, ce bijou : un accessoire moderne, qui signalait ses propres compétences au Quidditch, tout en rappelant le fond de commerce des Flint. Bien. Elle était donc prête, et soufflant la bougie, rejoignit sa famille.

***

A l’intérieur du carrosse qui leur faisait traverser la forêt de Godric’s Hollow, les Flint finissaient de se préparer à la représentation la fête de l’année. C’était la première soirée de Marius, onze ans, jusque là trop jeune et cantonné aux après-midis de jeu entre petits sang-purs. L’élève de première année, assis coincé entre ses deux aînés, ne cessait de remonter ses lunettes sur son nez dans un mélange d’excitation et de nervosité. A sa droite, paraissant géant en comparaison, Marcus trônait à son aise. Aîné et enfant chéri de la famille, c’était lui, le célibataire éligible que comptait vendre sa mère à toute la bonne société. Le jeune joueur de Quidditch professionnel, fort de son succès sur le terrain comme auprès des groupies, n’avait pourtant pas l’intention de se caser tout de suite. L’attention était trop douce, papillonner au bras d’une sorcière différente après chaque match était le sel de la vie, et il était franchement plus enthousiasmé par l’Eclair de Feu que ses parents lui avaient offert à Noël que par la perspective d’une quelconque relation suivie. Pas que l’une de ses charmante fan ne l’ai jamais proposé, d’ailleurs.

A la gauche des garçons, Laurel se tenait droite mais pas raide face au regard de ses parents. Elle était élégante, enjouée, en un mot, charmante et bien décidée à profiter de la fête somptueuse qui s’offrait à eux, les yeux déjà brillants d’admiration pour le décor grandiose. Elle était faite pour ce genre d’occasion, on le lui avait maintes fois répété. Un peu stressée, aussi, de se sentir observée, épiée, alors qu’elle n’avait pas encore mis un pied en dehors de la calèche. Et bien, elle n’aurait qu’à regarder tous ces gens en retour, pensa-t-elle, en tirant sur son décolleté pour le remonter sans s’en rendre compte, alors que le carrosse s’arrêtait. Showtime.

***

L’accueil parfait de leurs hôtes avait grandement fait baissé la nervosité de Laurel. Tout le monde était d’une politesse exquise, présentait la juste dose de sympathie et de chaleur : ce n’était pas spontané, évidemment, mais elle avait tous les codes et saurait naviguer. Après avoir salué les Shafiq avec grâce, le sentiment du devoir accompli, elle commença donc à se détendre et à réellement profiter de la soirée.

De toutes les personnes invitées, son premier objectif était de retrouver sa tante Pélagie. Les Shafiq avaient une telle réputation qu’ils ne s’étaient pas contentés d’inviter la noblesse sorcière d’Irlande et Grande-Bretagne : des invités étrangers étaient présents, et Laurel tenait à retrouver sa tante française préférée. Pélagie appartenait à une branche française de la famille, et elles ne se voyaient pas aussi souvent qu’elle l’aurait voulu, mais elle adorait sa tante, qui le lui rendait bien et lui envoyait régulièrement toutes sortes de colis surprise. Il ne fut pas difficile de repérer sa tante malgré la foule grandissante, démultipliée par les rangées de miroirs à taille humaine. Dans ce mini-Versailles, la parisienne était inloupable, d’abord pour son sens de la mode des plus chic et frenchy, quoi que présentant un léger manque de modération dans la quantité de rayures marinières proposées, puis pour sa maladresse légendaire. Même immobile, elle semblait capable de la pire des catastrophes.

Tout en lui faisant la bise, Laurel rattrapa la flûte de champagne que sa tante venait de manquer de renverser sur sa robe argentée. Maligne et complice, elle en profita pour y tremper les lèvres sans que l’adulte y voit rien à redire : c’était délicieux, et elle aurait volontiers continué si elle avait pu s’en tirer avec discrétion. Ce n’était malheureusement pas possible, car Lancelot Shafiq lançait un toast. L’adolescente rendit son verre à sa tante, qui le leva, répétant « A la noblesse sorcière » avec un fort accent. Laurel elle-même aurait sans doute suivi le mouvement si elle avait eu un verre à elle à ce moment-là, mais trop prise dans les retrouvailles avec sa tante, elle avait négligé de se servir. Sa mère, qui l’avait rejointe avec le reste de la famille une fois le brouhaha du toast terminé, trouva stratégiquement un serveur et tendit à sa fille une coupe (de cocktail sans alcool, hélas !), avant de se servir elle-même. Laurel remarqua alors que faute de verre, occupée très ostensiblement à prendre soin de son benjamin, de son aîné, de tout le monde, sa mère non plus n’avait pas pu participer au toast de leur hôte. Les deux femmes trinquèrent leurs coupes prises en retard avec un tintement discret, un sourire de connivence passant entre la mère et la fille.

***

La rumeur de conversations franchement lancées se mêlait au tintement des verres et aux premières notes de l’orchestre, même si personne n’avait encore commencé à danser. Il était temps de saluer ses connaissances, et chacun semblait glisser sur le parquet ciré, passant courtoisement d’un groupe à l’autre. Marius avait rejoint des enfants de son âge dans l’alcôve dédiée aux jeunes. En lui jetant un coup d’œil, il sembla à Laurel qu’il s’amusait à lancer des dragées surprises de Bertie Crochu vers la foule, au coude à coude avec un camarade d’école. Pas très dignifié, mais il avait l’air de bien s’amuser et cela lui fit plaisir de le voir aussi sociable. Madame Flint était restée avec sa sœur, sans doute dans l’optique d’anticiper une autre catastrophe, et le petit groupe Flint ainsi atrophié se laissa entraîné par la démarche peu subtile de Marcus.

« Malefoy ! Comment ça va depuis le temps ? Alors comme ça, on laisse ma petite sœur entrer dans l’équipe dès que j’ai le dos tourné ? T’as intérêt d’attraper le Vif d’Or avant qu’elle puisse marquer contre son camp ! » Marcus ponctua sa salutation d’un rire et d’une poignée de main tout sauf légère, sans même sembler se rendre compte qu'il était désagréable envers sa soeur.

Laurel se raidit, mortifiée, et fit diversion en commençant par saluer poliment les adultes autour d’elle, les Malefoy et les Greengrass. Puis, laissant les adultes à son père, particulièrement affable, elle prit plaisir à retrouver Daphnée et Astoria. La première avait un an de plus qu’elle, la seconde un de moins, et elles se connaissaient très bien, tant par leurs fréquentations à Poudlard que personnelles. Les enfants des Vingt-Huit sacrées grandissaient ensemble. Laurel appréciait particulièrement Astoria, peut-être plus discrète que son aînée, mais dont elle avait toujours trouvé la conversation très intéressante.

« Bonsoir, Drago. »

Elle jeta un regard agacé à Marcus, fit une légère moue en direction d’Astoria et Daphnée qui signifiait clairement « ignorez mon frère » puis reporta son attention sur son coéquipier, à qui elle sourit. C’était la première fois depuis longtemps qu’ils avaient l’occasion de tous se voir sans être attifés de l’uniforme de l’école ou d’une robe de Quidditch informe et il fallait que, pour la blague, son frère la présente comme une enfant incapable !  Elle recentra machinalement son pendentif vif d’or sur sa gorge.

« J’espère que vous avez passé de joyeuses fêtes ! Quelle chance de finir l’année ici. Les Shafiq ont beaucoup de goût pour la décoration ! Est-ce que vous avez déjà vu l’espace pour nous, là-bas ?» demanda-t-elle en désignant d’un léger mouvement de poignet la pièce vitrée vers le fond de la galerie. « Ou bien est-ce que vous comptiez plutôt aller danser ? »

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Laurel Flint
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Laurel Flint
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Ven 5 Aoû 2022 - 15:14
au bal des faux semblants
rendez-vous au bal des faux semblants,
aux theatre des bonnes gens masques,
a minuit leur heure aura sonne,
et leur trepas s'ouvrira sur la nouvelle annee.

Les doigts tremblant, Aria tenait son pendentif comme on s'accrochait à une relique sacrée, invoquant les plus grands sorciers de l'histoire pour que Sessho rentrât dans son jeu. S'il y eut une première pointe d'incompréhension dans le regard de ce dernier, elle fut si brève qu'il n'y eut qu'elle qui put l'apercevoir. Le Japonais était l'un des rares qui savait lire dans le regard énigmatique de la blonde et sa perspicacité ne lui fit pas défaut ce soir-là.

- Je t'en prie, répondit-il d'un ton posé, sans laisser transparaître la moindre hésitation, au plus grand soulagement de la Beurk qui remercia intérieurement sa bienveillance bienvenue. Votre fille possède un grand talent pour le violon. Il est précieux. C'est une fierté de pouvoir l'accompagner. 

Aria inclina sa tête en guise de remerciement, et la garda baissée pour cacher le rougissement de ses pommettes. À la fois flattée du compliment et gênée par la supercherie forcée, elle avait rarement senti la chaleur lui monter aussi vite au visage. La situation ne pouvait la rendre plus mal à l'aise : elle voulait à la fois s'excuser auprès de Sessho de l'avoir incité à mentir, le remercier d'avoir sauvé son secret, lui préciser à nouveau sa gratitude pour son présent - mais, cette fois, pour le vrai – et enfin, lui demander si ses compliments étaient sincères ou simplement inventés pour la comédie.

Mais elle connaissait Sessho, et elle l'imaginait mal inventer de réels mensonges. Peut-être, d'ailleurs, n'y avait-il aucune tromperie dans son discours, peut-être avait-il seulement su jouer des mots pour affirmer une vérité tout en en dissimulant une autre ?

Aria l'admira d'une intensité encore plus forte qu'habituellement et lorsqu'elle redressa son visage, elle eut à peine le temps de plonger son regard brillant dans le sien qu'une tornade auburn apparut dans le coin de son champ de vision.

- Beurk...! s'écria une voix farouche, coupant court à la réponse qu'allait adresser Gregory à Sessho. Tu ne devineras jamais la taille de cette maison. Leurs cuisines ont des cuisines...!

Le malaise de la violoniste s'intensifia aussitôt sous le regard offusqué de sa mère et la bouche pincée de son père. Elle qui venait pour une fois de faire bonne impression à sa famille dans le domaine social, voilà que Merula Viperyn venait tout gâcher en immisçant sa brusquerie impolie à la conversation. Elle exhalait l'indélicatesse et dû s'en apercevoir car son comportement changea du tout au tout lorsqu'elle remarqua la présence des géniteurs d'Aria. Elle s'inclina exagérément devant la famille Beurk et Aria leva les yeux au ciel, songeant que la vie lui faisait déjà payer le coût de ses mensonges.

La blonde platine fréquentait très peu d'élèves à Poudlard et ceux-ci se résumaient globalement - par défaut - à ses camarades de dortoir, mais elle aurait sûrement préféré que ce fût Parkinson et sa voix mièvre qui vînt à leur rencontre plutôt la Viperyn et sa fière indécence. Aria souhaitait actuellement s'enterrer sous terre mais elle se contenta de s'enterrer dans son silence alors que l'Irlandaise enchaînait :

- Mes hommages, sire Beurk. Merula Viperyn, pour vous servir. J'ose espérer que ces vacances d'hiver auront redonné un peu d'aplomb à votre fille. Elle paraissait bien effacée dernièrement.

La cadette des Beurk releva la tête et lança un regard noir à Merula. Mais uniquement pour la forme. Car en réalité, le pique de la Viperyn tombait à pic. Les paroles de son père qui hantaient son esprit depuis un mois se remirent à danser devant ses yeux :

« C'est préférable lorsque tu te fais oublier. »

Vois-tu, père, j'ai docilement suivi tes conseils. Ton souhait se trouve-t-il donc exaucé ?

La Sang-Pur savait que ce n'était qu'un leurre de penser comme cela : Gregory Beurk était un éternel insatisfait. Mais elle ne voulut pas lui laisser l'opportunité d'exprimer une nouvelle fois son avis sur la question, alors elle s'empressa de répondre, tout en modérant son intonation de voix :

- Tu sais bien que je me concentre avant-tout sur mes BUSE cette année. Et, j'ai déjà eu l'occasion de te le dire, mais tu devrais en faire de même.

La pénibilité de l'échange se faisait sentir dans la stature raide de chacun des Sang-pur présents dans ce petit groupe - à l'exception, peut-être, de l'autrice de ce malaise -, si bien que le Shinmen s'autorisa à poliment prendre congé d'eux :

- Je suis navré, mais il serait impoli de ne pas aller saluer nos hôtes. Monsieur Beurk, Madame Beurk, ce fut un plaisir. Aria, Viperyn.

Attristée de déjà voir la silhouette du pianiste s'éloigner et inquiète que Merula ne l'assaille de nouvelles répliques incommodantes devant ses parents, les traits d'Aria dessinèrent une grimace bizarre avant qu'elle ne se redresse et enroule sa main autour du bras gauche de sa camarade de dortoir.

- De notre côté, allons dans la salle qui nous est dédiée, je pense que nous avons également des personnes à saluer. Père, mère, l'on se retrouve tout à l'heure.

Aria fut soulagée dès lors qu'elle fut éloignée de la présence pesante de ses parents : à présent, elle n'avait plus à jouer la comédie. Ou du moins, plus autant. Elle fit de son mieux pour se débarrasser de Merula dès qu'elles eurent atteint la pièce prévue pour les adolescents et se mit en quête d'un endroit tranquille où elle ne serait plus dérangée pour le reste de la soirée. Mais ce fut en vain : ce soir, tout dans ce palais lustré était fait pour favoriser l'échange et les rencontres. Elle savait qu'à n'importe quelle assise où elle voudrait trouver repos, quelqu'un finirait pas l'accoster.

En portant un regard circulaire sur la salle dans un ultime espoir, elle aperçut la somptueuse robe de Merlin virevolter au rythme des pas de Sessho. Une pointe de douleur s'immisça dans sa poitrine à mesure qu'elle observait leur valse voluptueuse. Ô, jalousie, es-tu donc de retour ?

Plus loin, ce fut son cousin qu'elle remarqua en train de faire le paon devant de la cadette des Flint. Là aussi, un dégoût acerbe vint se coller à sa langue alors qu'elle eut l'impression étrange d'être propulsée hors de ce théâtre pour l'observer en tant que simple spectatrice. Il n'y avait devant ses yeux que des animaux qui se pavanaient, déployaient leur charme et montrer leurs plus beaux atouts  dans l'espoir d'attraper la meilleure proie. C'était un zoo immense dont les ficelles étaient tirées par leurs aînés aux yeux d'aigles avisé. Et elle, elle était l'oisillon enfermé sous une cloche en verre.

Comme j'aimerais, Sessho, qu'on me guide vers des chants plus doux. Mais je crois que j'ai moi-même oublier comment chanter.

Oisillon à la gorge déplumée, Aria passa sa soirée à errer comme une ombre dans sa robe émeraude, évitant soigneusement autant d'interactions qu'elle le pouvait et, une fois la nouvelle année souhaitée dans une nuée de verre levé, elle se mit à compter les secondes jusqu'au moment où ses parents décidèrent enfin qu'il était temps de rentrer.

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Aria Beurk
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Aria Beurk

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Ecoute cette médolie troublante.
C'est l'eau qui chante.
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Dim 20 Nov 2022 - 16:16


   
Au bal des Faux-Semblants

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No one can long hide behind a mask; the pretence soon lapses into the true character.

SONG - A Heart Made of Yarn
Malgré la puissante harmonie que s’adonnait à jouer l’orchestre payé pour animer cette soirée, les nombreux babillages parvenaient à se faire tout de même clairement entendre. Les voix enjouées, vantardes, médisantes, se mêlaient pour ne faire qu’un seul chœur. Et malgré le nombre conséquent d’invités, Drago, qui venait tout juste d’entamer une première conversation avec les sœurs Greengrass, ne put que remarquer l’arrivée de Marcus Flint, son attention ne pouvant que se détourner et être attirée par l’ancien Serpentard qui se dirigeait d’un pas lourd et décidé vers lui, avec le reste de sa famille – de sa fratrie du moins – qui le suivait de près. Le sourire de l’ancien capitaine et poursuiveur de l’équipe de Quidditch de Serpentard semblait communicatif aux yeux du jeune Malefoy, puisque ce dernier y répondit avec autant de gaieté et de malice. Drago était ravi de le revoir, ce qui était assez rare depuis la sortie de Poudlard de son ancien mais éternel camarade. Il avait vécu années durant lesquelles il s’était toujours très bien entendu avec l’aîné des Flint, en qui il avait toujours vu un véritable ami, car il lui ressemblait beaucoup, même si parfois dans ses pires vices. Les Greengrass, les Flint ainsi que les parents Malefoy, purent ainsi voir apparaître sur le visage de Drago un sourire franc et sincère, une expression qui n’était pas souvent aperçue sur sa mine parfois faussée et mensongère.

« Malefoy ! Comment ça va depuis le temps ? Alors comme ça, on laisse ma petite sœur entrer dans l’équipe dès que j’ai le dos tourné ? T’as intérêt d’attraper le Vif d’Or avant qu’elle puisse marquer contre son camp, dit Marcus tout en riant et en serrant la main du jeune Malefoy pour souligner ses salutations. Drago fut quelque peu secoué, au vu de la corpulence de Marcus, grand et costaud, qui dominait la sienne, celle d’un adolescent prenant en croissance, mais étant encore de taille moyenne, la finesse de son corps allant de pair avec celle des traits de son visage.
Flint, lui répondit Drago en s’efforçant de reprendre droite et noble stature après telle poignée de main. Marcus étant plus vieux que lui, il lui vouait un certain respect et avait pour reflex de se montrer encore plus sous son meilleur jour face à lui. Tu sais très bien que ce n’est pas moi qui m’occupe de former les équipes, commença-t-il avant d’esquisser un petit sourire moqueur et de laisser échapper un léger rire, l’humour – bien que déplacé – de Marcus l’ayant éclaboussé. Ne jamais sous-estimer l’équipe de Serpentard. Il est évident que nous donnerons toujours tout pour atteindre la victoire… et faire en sorte que ce genre de choses ne se produise pas, » reprit-il en se reprenant lui-même, prenant alors une expression et une allure emplie de fierté tout en jetant un regard en biais en direction de Laurel Flint, cible des blagues douteuses de son grand frère – "douteuses", même le jeune Drago s’était souvent surpris à le penser. Bien qu'il éprouvait un certain respect face à lui, il trouvera toujours les défauts en chacun qui ne le conviendront pas, ayant toujours cette fâcheuse tendance à se croire supérieur aux autres tout en étant le pire.

Elle eut le temps de percevoir ce regard, de s’y accrocher quelques secondes avant de se tourner vers Astoria et Daphné, et que les yeux gris de Drago ne se posent sur Marcus qui, lui, n’avait pas perdu de temps pour aborder d’autres sorciers du groupe qu’ils formaient. La petite Laurel profita de l’éloignement de son frère pour s’approcher du blond, ce premier s’étant décidé à aller taquiner les sœurs Greengrass cette fois-ci. La cadette des Flint fut la première à engager la conversation. Elle lui avait lancé un joli sourire, le genre de sourire que Drago n’avait pas pour habitude de recevoir. Un sourire doux et innocent, mais peut-être ne parvenait-il pas à déceler ce que ses yeux exprimaient encore. Cette moue n’avait pas ébloui le jeune Malefoy, mais quelque peu intrigué seulement. Ce qui était déjà beaucoup. En ce sourire elle lui montrait ne pas le détester, ni le rivaliser, ce qui flattait un tant soit peu son ego qui gonflait au peu de considération que quiconque lui accordait.

« Bonsoir, Laurel, » la salua-t-il enfin, après un silence qui n’avait duré que quelques petites secondes.

Il avait attendu un court instant, hésitant à l’appeler par son nom de famille ou par son prénom. Après tout, d’ordinaire il avait assez peu l’occasion ou même le désir d’appeler une personne qu’il connaissait à peine directement par son prénom. Encore moins lorsqu’il s’agissait d’une fille. Dans de simples appellations, l’héritier Malefoy soufflait le chaud et le froid, marquait de la distance ou bien la réduisait comme cela lui chantait. Néanmoins, il n’aurait pu s’adresser à Laurel en utilisant simplement son nom de famille car il l’avait déjà fait avec Marcus.

Maintenant qu’il lui faisait face, le jeune Serpentard ne put s’empêcher de baisser le regard pour ainsi analyser, d'un oeil critique, la tenue de sa camarade et coéquipière. Plutôt élégante, pour une fille de 14 ans, s’était-il dit. Mais il n’eut pas le temps de pousser davantage son examination puisque Laurel reprit la parole pour exprimer son intérêt et sa curiosité, forçant Drago à joindre ses iris aux siens.

« De très bonnes fêtes, oui. Et les vôtres ? dit-il poliment même si la réponse lui importait peu, d’autant plus qu’il n’était pas de ceux qui aimaient parler de choses et d’autres, de la pluie et du beau temps, de banalités en somme. Oui, c’est plutôt pas mal, répondit-il à ce que son interlocutrice pensait de la décoration de la salle ; lui, n’avait aucune envie de faire compliments et éloges, ni ne serait-ce qu’admettre leurs mérites. Non, je ne savais pas, je n’ai pas encore eu l’occasion de visiter cette pièce. Peut-être pourrions-nous nous y rendre un peu plus tard, je ne sais pas encore vraiment quand je vais pouvoir prendre congé de mes obligations, reprit-il en jetant un coup d’œil à sa mère, puis inévitablement à son père, avant de reporter son attention sur sa camarade qui venait de lui poser une drôle de question. Pour qui me prends-tu ? commença Drago, quelque peu bougon dans un premier temps – certainement un reflex pour dissimuler sa gêne –, en tournant le dos à ses parents pour se faire discret et se pencher légèrement en avant sur Laurel comme pour lui révéler un secret qu’elle devait être la seule à entendre. Et sans s'en rendre compte, en tournant le dos à ses parents, il fit de même avec les autres, l'isolant, en quelque sorte, lui et la petite Laurel du reste du groupe. Je n’aime pas vraiment danser. Mais bien évidemment, je n’hésiterai pas à le faire, s’il le faut vraiment. »

Ce sujet de conversation le mena une année en arrière, lorsque tous les élèves de Poudlard, ainsi que son personnel, s’étaient rassemblés au Bal de Noël organisé à l’occasion du Tournoi des "Trois" Sorciers. Drago, lui, s’y était rendu avec Pansy Parkinson à son bras, jeune Serpentard qui représentait pour lui une amie, mais une amie qu’il trouvait des plus élégantes et avec qui il avait établi une relation assez ambiguë. Soit, c’est avec elle qu’il avait partagé ses premières et uniques danses. Mais le jeune sorcier fut ramené à la réalité, à l’instant présent, par les doigts de la demoiselle qui lui faisait face en ce bal de Nouvel-An. Son regard les suivit alors qu’ils commençaient à se mouvoir vers le haut de sa poitrine pour y caresser un pendentif.

« Joli collier, » dit-il simplement en s’apercevant qu’il s’agissait d’un vif d’or avec une grimace qui semblait signifier "pas mal".

Il était d’ailleurs évident que, pour le peu de fois que le jeune Malefoy exprimait d'infimes compliments, c’est qu’il pensait réellement ce qu’il disait. T’as intérêt à attraper le Vif d’or... songea Drago alors qu’il fixait le pendentif doré, se remémorant les paroles que Marcus avait prononcées un peu plus tôt. Il avait froncé les sourcils. Était-ce fait exprès ? Une sorte de signe ? D'autant plus qu'il était lui-même attrapeur de son équipe ? Non, certainement pas. Il n’avait que faire de stupides superstitions. Mais il ne put s’empêcher de trouver ça assez… Drôle ? Troublant ? Cherchant ses mots, ses yeux recherchèrent ceux de Laurel, avec qui il ne parvenait pour l’instant pas à se sentir totalement à l’aise, mais dont à la fois il semblait apprécier, pour le moment, un minimum la présence.
Drago L. Malefoy
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Drago L. Malefoy

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THERE'S DAGGERS IN MEN'S SMILES
There the grown serpent lies. The worm that’s fled hath nature that in time will venom breed ; no teeth for th' present.
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Mer 22 Fév 2023 - 13:25
L’air sentait le parfum pour dames et le champagne, une odeur aussi pétillante que la boisson, qui venait presque chatouiller le nez. Cachant son agacement derrière une façade aimable, Laurel inspira profondément, et les effluves de mondanités lui remirent les idées en place. Au moins, Marcus avait retenu qu’elle jouait désormais dans l’équipe de Serpentard : c’était un progrès. Peut-être même qu’elle aurait dû y voir un compliment fraternel. Hum. Sans qu’elle s’en rende compte, son nez se retroussa légèrement. Non, elle refusait de le voir comme plus généreux qu’il ne l’était vraiment. Il savait très bien draguer les filles quand il le voulait vraiment, s’il avait voulu la flatter, il aurait pu le faire pour de vrai. Au fond, là était le drame : pour Marcus, Laurel serait toujours « une fille », dans ce sens très particulier qu’on donne aux petites sœurs, et qui est bien différent du « les filles » qu’on rencontre une fois transformé par les hormones de la puberté. Qu’importait. Elle était à la plus belle fête de l’année, elle était ravissante, ses amies étaient là, et Drago.

Elle accrocha le regard de l’attrapeur et hocha très légèrement la tête : évidemment qu’ils ne feraient rien pouvant mettre l’équipe de Serpentard en difficulté. Elle n’avait pas été recrutée à cause de son nom de famille, mais bien à cause de son talent : Serpentard était une maison fière qui n’aimait pas perdre et si la corruption pour entrer dans l’équipe n’était pas inconnue, cela aurait été au-dessus des moyens des Flint, pour influents qu’ils soient dans le milieu du Quidditch. Etait-ce cela que Drago Malefoy lui reconnaissait dans ce simple regard ? Difficile à dire.

Elle lui sourit, le salua, et après ce qui lui sembla une infime hésitation, il lui répondit. Un simple « Bonsoir Laurel » dont elle savoura la sonorité inédite. C’était la première fois, qu’à sa connaissance, il prononçait son prénom. Marcus, LE « Flint » de la soirée, avait finalement servi à quelque chose. Elle-même n’avait pas hésité à appeler son coéquipier par son prénom : c’était ce qui était approprié lors d’une telle soirée raffinée, non ? Ils n’était pas couverts de boue sur un terrain de Quidditch ce soir, à hurler par-dessus le vent pour se faire entendre.

D’ailleurs, il ne la regardait pas comme ça d’habitude, avec une rapidité insistante qui la troubla, comme si elle était soudain mise en vitrine, mélange de gêne et de fierté. C’était ridicule : elle savait pourtant qu’elle était venue exactement pour ça ce soir : briller pour les Flint. Mais elle s’était jusque là interdit de penser à ce que Drago Malefoy verrait, lui. C’est-à dire qu’elle se l’était beaucoup demandé, se forçant à changer mentalement de sujet avant que son esprit puisse formuler la moindre réponse. Laurel avait un charmant petit crush pour le Prince des Serpentard. Comment y échapper quand toute leur maison lui chantait des hosanna depuis qu’elle était rentrée à Poudlard ?

La main sur la gorge, elle cacha sa confusion en lançant la conversation, ramenant habilement les sœurs Greengrass dans leur petite équation sociale. Les filles offrirent une brève réponse sur leur fêtes de fin d’année et demandèrent si Laurel était allée en France, comme à son habitude. « Non, pas cette année, malheureusement. C’est ma Tante Pélagie qui est venue chez nous de Paris, d’ailleurs, elle est ici ce soir. Mais nous y retournerons certainement cet été, il faudra venir nous voir en Provence ! » Rien qu’à l’idée de flotter dans l’eau turquoise en compagnie des calanques avec ses amies, son visage s’illumina. Oh, ce serait délicieux après la grisaille de l’Ecosse !

La conversation vira ensuite sur la fête offerte par leurs hôtes. Si Laurel était volontiers admiratrice de tant de splendeurs, dont elle était ravie de bénéficier pour un soir, Drago semblait moins enthousiaste. Il ne lui vint pas à l’idée qu’il pu être jaloux. Elle-même ne l’était pas : elle savait que les Shafiq étaient écœurement riches, et il n’aurait servi à rien de se comparer. Au moins avaient-ils la générosité (la vanité ?) de régaler leurs invités de leur splendeur. Est-ce que les Malefoy étaient plus ou moins riches ? Hum. Elle n’en savait rien mais elle n’avait pas souvenir qu’ils aient jamais donné de fête aussi éblouissante. Drago se réfugia derrière ses « obligations ». Le terme ne choqua pas Laurel, habituée des codes sociaux de telles célébrations. Elle hocha légèrement la tête avec respect pour la place sociale qu'il se donnait.« C’est vrai qu’il y a beaucoup de monde ce soir. » Elle-même n’était pas particulièrement inquiète : elle aimait ce genre d’échanges sociaux, papillonner de groupe en groupe, et puis, en comptant tante Pélagie, les Flint étaient six, ce qui rendait bien plus facile de n’oublier personne. Elle pouvait passer un moment avec ses camarades avec une conscience sans tâche.

Alors que Daphné s’enthousiasmait pour la piste de danse avec des mouvements et un ton plus démonstratifs qu’à son habitude, Drago réagit avec une morgue qui surprit Laurel. Ses yeux s’écarquillèrent légèrement d’incompréhension : elle avait posé une question somme toute innocente. C’était vrai, elle aurait adoré que Drago l’invite à danser mais au fond, même cela n’aurait rien voulu dire. Il s’agissait d’un réveillon de Nouvel An, danser une valse ou une mazurka faisait partie des attendus, non ? Elle eu l’impression qu’il lui faisait une confidence quand, se penchant vers elle, Drago avoua qu’il n’aimait pas vraiment danser. Sa déception fut mitigée : certes, il ne lui proposerait sans doute pas de valser, mais c’était bien la première fois qu’il lui disait quelque chose de personnel. « Ah oui ? » répondit-elle avec le même ton de confidence que le sien. « C’est dommage, avec un aussi bon orchestre que ce soir. Personnellement, j’aime beaucoup danser. Mais si cela ne te plaît pas, il y a beaucoup d’autres choses à faire. » Peut-être qu’effectivement, ce n’était pas très agréable d’être un héritier à qui toutes les mères essayaient de refiler leur fille sur la piste de danse. D’ailleurs, maintenant qu’elle y pensait, il était étonnant que Drago ne soit pas déjà fiancé, vu le conservatisme de sa famille. A moins qu’il ne le soit déjà et le cache ? Ca expliquerait qu’il ne veuille pas danser avec d’autres. De toute manière, il pouvait faire ce qu’il voulait, puisque c’était les hommes qui invitaient les femmes.

« Merci. » Le rose lui monta aux joues face à ce compliment plus qu’inattendu. De manière inconsciente, elle aussi pivota légèrement, sortant temporairement de l’angle de vision des sœurs Greengrass. « Je l’ai gagné à la course sur balais du marché de Noël du chemin de Traverse. » Elle était fière de cette démonstration de ses qualités de joueuse, même si évidemment, le hasard avait aussi eu sa part. « Enfin, j’ai gagné un set de Quidditch complet, mais un Vif, c’est tout de même plus joli qu’un Souaffle. » Relevant les yeux parce que regarder son pendentif risquait de la faire loucher, elle croisa le regard de Drago à travers ses cils. « Tu as toujours voulu être Attrapeur ? » Question sans doute un peu bête, c’était un poste prestigieux qu’on obtenait rarement par défaut, mais elle voulait prolonger cette première conversation personnelle qu’ils avaient. Et puis, peut-être que ce n’était pas si bête. Son rêve secret à elle était bien d’être gardienne et ce n’était pas le poste qu’elle occupait actuellement.

Dans la lente chorégraphie des Sangs-Purs configurant et reconfigurant salutations et sous-entendus dans la vaste salle de réception, les sœurs Greengrass s’éloignèrent légèrement, Astoria lui envoyant un discret signe de la main. Son père discutait toujours avec les Malefoy, et Marcus se dirigeait d’un air assuré vers une jolie petite héritière et son chaperon. Laurel attrapa un petit four sur le plateau qu’un elfe de maison leur tendait et s’efforça de le déguster avec le plus de grâce possible.

« Est-ce que tu vas prendre des résolutions pour le nouvel an ? » demanda-t-elle sur un ton de conversation. Cette bouchée pimentée à la citrouille lui donnait du courage, et peut-être n’était-elle pas la seule cause de la rougeur qui envahissait soudain ses joues.  
Laurel Flint
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Mar 31 Oct 2023 - 16:12


   
Au bal des Faux-Semblants

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SONG - A Heart Made of Yarn
L’héritier Malefoy et sa famille ne différaient guère des autres branches de l’arbre qui lierait éternellement les Sang-Pur, ni de leurs ancêtres. Le jeune garçon qui n’avait pourtant pas encore assez gagné en maturité, n’avait pas encore atteint toutes ses capacités en termes de magie, était-il déjà lié à une quelconque jeune fille de bonne famille, en vue d’un futur mariage ? C’est ce que certaines demoiselles de la maison Serpentard de Poudlard devaient se demander, entre elles ou en secret. Mais il n’en était encore rien. Du moins pas à la connaissance de Drago. Mais c’était complètement idiot de se poser la question, après tout, si c’était le cas, peut-être se serait-il déjà vanté de la fille à qui il était promis ? Ou peut-être bien que non. Tout dépendait, justement, de la fille. Mais il évitait de se poser la question. Constamment s’interroger sur toutes les filles issues de familles de Sang-Pur lui en ferait perdre sûrement un peu la tête. Mais est-ce que ses parents en discutaient entre eux lorsqu’il n’était pas là ? Là était la réelle question. Et en ce bal du Nouvel-An, avaient-ils justement prévu d’analyser la chair fraîche potentiellement faite pour leur progéniture ? Là non plus, Drago n’en savait rien. Mais fille ou pas, il devait faire bonne figure, ne devait pas entacher la réputation de sa famille, aux yeux de n’importe quel individu présent dans l’immensité de la demeure des Shafiq. De même, stratagème qu’il devait continuer à exécuter en la présence de la petite Laurel Flint.

« En effet, confirma-t-il et imita sa camarade en hochant la tête. Il balaya brièvement du regard une partie de la salle de réception au-dessus de l’épaule de Laurel pour finalement le reposer sur elle. Mais au moins, tu ne trouveras que des bons partis ici, poursuivit-il en souriant. Quoi que certains peuvent parfois se montrer un peu douteux. »

À ces derniers mots, la voix emplie de sous-entendus, son rictus s’intensifia quelque peu. Soit, peut-être aurait-il l’occasion d’aller se réfugier dans l’espace crée pour les adolescents un peu plus tard. Mais en l’instant, le jeune Malefoy semblait légèrement baisser sa garde, pour se laisser porter par la douceur qui émanait de la petite blonde et de la délicatesse de la mélodie jouée par l’orchestre qui parvenait à ses oreilles par-dessus leurs échanges. Il était encore quelque peu penché sur elle dans sa confidence quand elle lui répondit sur le même ton. Il ne réagit pas tout de suite, une fois que ses mots parvinrent à ses oreilles, les analysant durant quelques secondes. Faisait-elle allusion au fait de vouloir danser avec lui ? Il n’en était pas sûr, la formulation de sa phrase semblait peut-être faire des insinuations, tout comme cela ne voulait peut-être aussi rien dire. Pourtant, cette idée était venue lui effleurer l’esprit, néanmoins son incertitude le poussait à ne rien répondre, seulement à le noter dans un coin de sa tête. S’il avait eu une cavalière, que ce fusse Laurel ou une autre, peut-être aurait-il fait l’effort de l’inviter à danser quelques minutes. Or, ce n’était pas le cas, et s’il pouvait alors s’en passer, cela l’arrangeait. « Personnellement, j’aime beaucoup danser. Mais si cela ne te plaît pas, il y a beaucoup d’autres choses à faire. » Drago tenta de trouver une réponse en scrutant le visage de la jeune Flint, la vérité sur le fait qu’elle aurait potentiellement envie de danser ou d’autres choses… avec lui ? Pour toute réponse, il hocha d’abord la tête, confirmant lui-même le savoir-faire de l’orchestre symphonique.

« Oui, il y a sûrement beaucoup d’autres choses à faire, affirma-t-il, plutôt évasif. Qu’importe ce que nous ferons, nous verrons en temps et en heure, » conclut-il comme pour également clore le sujet auquel il ne savait plus vraiment quoi ajouter.

Si la décoration n’était pas le genre de sujet de conversation sur lequel Drago aimait s'entretenir, il préférait de loin verbaliser le jugement qu’il portait sur la tenue de tout individu croisant son chemin. Et Laurel semblait touchée sur celui qu’il portait sur le bijou qui habillait son cou fin. Il était très rare d’entendre un compliment sortir de la bouche du jeune sorcier, mais il n’aurait pu aller à l’encontre de ce qu’il pensait vraiment, aimant particulièrement le fait qu’il se fut agi d’un Vif d’or. Les origines de ce collier ne tardèrent pas à être énoncées par la petite blonde qui avait, en réalité, gagner un set de Quidditch à la Course aux cadeaux organisée à l’occasion de la fête de Noël sur le Chemin de Traverse.

« En effet, plus joli qu’un Cognard et plus élégant qu’une batte, débuta-t-il en lâchant un petit rire. Et après quelques secondes de latence, il reprit, se rendant compte de ce qu’elle venait de lui avouer. Attends, tu veux dire que c’est un vrai Vif d’or... miniaturisé ? » avait-il demandé de manière rhétorique sur un ton de stupéfaction.

En réalité, il trouva cette idée très bonne, et même ingénieuse. Ce qu’il se garda bien d'admettre verbalement. Cette jeune Serpentard, était-elle en fait pleine de surprises ? Elle préféra cette fois-ci reprendre la parole, mais pour diriger son intérêt vers lui, ce qui n’était pas pour lui déplaire. Loin de là.

« Tu as toujours voulu être Attrapeur ? »
Eh bien, je dirais que oui. Je pense que je ne me suis jamais vu à aucun autre poste, si ce n’est peut-être celui de Poursuiveur. Et encore, ça ne me correspondrait pas forcément complètement. »

Il ne lui retourna pourtant pas la question et profita du petit silence qui s’était installé. Ses yeux allaient un peu partout, pour finalement revenir se poser sur Laurel qui, comme lui, s’était plongée dans une analyse approfondie de ce qu'il se passait autour d’eux. Il choisit alors de suivre son regard pour connaître l’origine de la légère exaspération qu’il renvoyait. Marcus faisait encore des siennes et était parti à la rencontre d’une jeune fille, un sourire charmeur accroché à ses lèvres. Il arqua un sourcil, retourna son visage face à son interlocutrice puis ses yeux roulèrent dans leurs orbites.

« Eh bien, il y en a qui ne perdent pas de temps ! » répliqua-t-il sarcastiquement.

Un plateau rempli de bouchées apéritives se trouvait à présent à côté d’eux, sans pourtant que Drago visse qui que ce soit le porter. Il dut baisser les yeux pour découvrir un elfe de maison auquel il envoya un regard hautain avant de s’emparer à son tour d’un des mets. Il n’était pas sûr d’avoir faim pour le moment, mais il choisit d’accompagner Laurel dans sa dégustation. La curiosité de cette dernière revint d’ailleurs alimenter la conversation.

« Est-ce que tu vas prendre des résolutions pour le nouvel an ? »

Le jeune Malefoy, qui avait choisi un petit four duquel il put ne faire qu’une seule bouchée, le mâcha mollement et prit le soin d’attendre de l’avaler dans sa totalité pour prendre la parole.

« Pour quoi faire, des résolutions ? avait-il répondu d’une voix renfrognée dans un premier temps, quelque peu exaspéré par sa question, mais se reprenant pourtant bien vite. Eh bien, je ne ferai rien de plus ni rien de moins de ce que je fais déjà d’habitude, puisque j’aime constamment donner mon maximum dans tout ce que j’entreprends, ajouta-t-il fièrement en haussant les épaules. Et toi ? »

Mais sa question flotta dans les airs et la réponse de sa camarade resta en suspens, car Narcissa Malefoy s’était approché d’eux, un doux sourire aux lèvres.

« Bonsoir Miss Flint. Vous êtes bien élégante, ce soir, » avait-elle commencé.

Ses yeux allèrent de Drago à la petite Flint. Puis de Laurel à Drago. Son regard était empli de tendresse et de malice à la vue de ce petit "couple" en pleine conversation depuis maintenant quelques bonnes minutes. Elle n’avait pas pour habitude de voir son cher fils en compagnie féminine, ni de l’entendre prononcer le prénom ou parler d’une jeune fille de son école au cours de ses récits à propos de ses aventures, ou mésaventures, à Poudlard.

« Si vous voulez bien m’excusez, dit-elle à l’attention de Laurel, son intérêt se portant par la suite directement sur son propre enfant. Drago, ton père et moi aimerions te présenter à divers sorcières et sorciers. Miss Flint et toi pourrez vous retrouver un peu plus tard dans la soirée. »

Drago hocha seulement la tête et se tourna une dernière fois vers Laurel pendant que sa mère se dirigeait de nouveau vers Lucius, sans doute consciente et soucieuse de leur laisser toute l’intimité dont ils avaient besoin pour clore leurs échanges qui n’appartenaient qu’à eux.

« Eh bien, Laurel... À tout à l’heure, si l’on vient à se recroiser. Si ce n’est pas le cas... À bientôt, » répliqua-t-il cette fois-ci sans montrer une quelconque émotion sans pour autant se défaire de sa politesse.

Il lui tourna alors le dos pour partir vers ses parents qui l’attendaient. Se recroiser, ce fut le cas, et ce même dans l’espace prévu pour les adolescents présents à cette réception. Néanmoins, aucun d’entre eux n’était retourné vers l’autre, préférant passer la soirée et attendre les douze coups de minuit en compagnie de leurs amis respectifs.
Drago L. Malefoy
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Drago L. Malefoy

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