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RP ouvert à tous - « La peur est une force. Une vraie et belle force. Veille simplement qu'elle te pousse toujours en l'avant. »

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Jeu 27 Juil 2023 - 17:53

« La peur est une force. Une vraie et belle force. Veille simplement qu'elle te pousse toujours en l'avant. »

Vous reconnaîtrez certainement cette citation, un peu arrangée à ma sauce pour coller au thème de ce sujet. Ici, doute est devenu peur, mais après tout, ces émotions sont similaires, non ? Si vous n'avez pas la référence, je ne peux que vous recommander (vivement et armé.e d'une matraque) d'aller lire l'intégrale de l’œuvre de Pierre Bottero.

Bref.

Hier ma plume m'a conduit.e vers la peur la plus profonde d'Ariel, celle des animaux. Et comme la peur est une émotion humaine, qui fait partie de la vie, je me suis dit que ce serait intéressant de vous donner l'opportunité de réfléchir, vous aussi, sur celles de vos personnages et sur leurs origines.

Donc sentez-vous libres, et même encouragé.es, de poster à la suite de ce RP ! (et si vous souhaitez parler des peurs d'un autre personnage, un PV ou un.e hurluberlu.e de votre invention, c'est aussi votre moment !)




Papiliones Illusionibus
La pièce était pleine de ces bambins qui braillaient sans pouvoir se retenir. Parfait. C’était ce que Megan avait toujours voulu : se coltiner les pleurs, les cris, les pipis et les grosses merdes, les disputes et les débordements, le tout à longueur de journée. Elle aurait voulu dire qu’elle appréciait cet état, qu’il s’agissait juste d’une étape de mi-chemin. La vérité, c’était qu’elle était coincée dans cette ville sans intérêt. Les sorciers ne prenaient même plus la peine de s’y installer. Ils étaient cinquante familles à tout casser ; cinquante familles, pour près d’un demi-million d’habitants. Pathétique.

Liverpool n’avait pas bonne mine, ces dernières années. Les Beatles n’avaient rien de magique. Peut-être que quatre gamins bien gaulés auraient suffi à relancer l’essor ésotérique de la ville, pour peu que leurs baguettes magiques fussent aussi leurs micros, leurs basses et leurs violons.

Megan avait été prometteuse. Elle avait été bonne, à Poudlard, avait réussi ses dissertations, obtenu de bonnes notes, convaincu les professeurs. Elle était sortie de son cursus avec les félicitations d’une bonne moitié de ses mentors, les autres n’avaient pas de doute quant à sa réussite future. Fausses promesses ou mauvaises pistes, son éclat avait fini par s’éteindre. Lancée sur les traces des gouffres laissés par la magie, des traces secrètes d’Impardonnables, de magie noire et de pentacles occultes dont se gorgeait la terre avec gloutonnerie, et des fossés qui se creusaient lorsqu’on la vidait de sa substance, elle avait échoué. S’était pris un mur, sans qu’elle ne l’eût vu venir, sans comprendre les avertissements qu’on lui adressait. Bien sûr que non, que le Ministère ne la subventionnerait pas ; qui le ferait ? Son enquête était trop marginale, et pas assez utile d’ailleurs, pour qu’elle intéressât. Ils ne comprenaient pas, les bouffons, que c’était de l’avenir de la société magique dont elle parlait.

Les portes de Liverpool s’étaient ouvertes devant elle, et elle se souvenait s’être dit qu’une ville aussi triste et vide de rituels cachait forcément ses mystères. Il n’y en avait pas : son goudron gris et ses bâtiments longilignes n’avaient simplement pas su convaincre le gratin des sorciers d’y bâtir une nouvelle communauté. Et comme les loyers ne se payent pas d’espoirs perdus ni de mirages que l’on poursuit, elle avait fini par se faire embaucher par la seule crèche sorcière du coin. Un bâtiment miteux, encastré entre une épicerie moldue et une mairie de quartier, assez grand pourtant pour accueillir la vingtaine de rejetons qu’on leur confiait quotidiennement.

Une chose était sûre, Megan ne croulait pas sous les responsabilités. L’heure de la sieste arrivée et les gamins couchés, elle était tranquille, peu ou prou, pour le reste de la journée.

On se calme...

Formule d'usage, inefficace.

Elle était devenue une femme aigrie. Elle ne se souvenait plus de sa dernière interaction sociale ne rentrant pas dans le cadre de son boulot. Les gamins l’épuisaient. Et, jeunes coquilles encore inachevées, ils n’étaient pas encore assez aboutis pour qu’elle eût vraiment envie de faire des efforts. De la personnalité, à cinq ans ? Il fallait les voir se tirer la langue, se chercher des Noises et fanfaronner avec leurs dessins qui ne ressemblaient à rien.

Parfois, l’un d’entre eux s’aventurait à avoir une conversation. Aucun marmot ne l’appréciait, mais certains, mus d’un courage inopportun ou suivant l’injonction de ses petits copains, relevaient le défi et prouvaient, en même temps, leur valeur auprès des autres.

— Eh madame, je peux essayer ta baguette magique ?

C’était la dernière demande en date. Megan se laissait croupir dans un coin, les yeux à moitié fermés. Elle était en pleine phase de test. Ce que les Moldus appelaient « shit » devait lui permettre de fuir sa vie minable et lui bousiller le reste de ses connexions neuronales. Parfait – elle n’aurait, ensuite, plus qu’à attendre la fin. Patiente.

Pour le moment, à part la maintenir dans un état d’hébétude constant, la substance n’avait pas vraiment d’effet. C’était loin d’être déplaisant, mais elle songeait à augmenter les doses. Peut-être que c’était ça, qu’il lui fallait. On ne lui avait fourni aucun mode d’emploi. Son premier joint lui avait paru ratatiné – même à elle.

— Je serais vraiment stupide d’accepter, dit Megan d’un ton morne en lui tendant la baguette.

Un peu d’agitation lui ferait le plus grand bien.

Elle suivit des yeux le gamin parader devant sa cour. Il était roux, couvert de tâches de rousseur. Un peu méchant sur les bords, un peu obtus. C’était le chef de bande par excellence. Le parfait bourreau lorsqu’il grandirait un peu. Pour autant, bien sûr, qu’il ne passât pas de l’autre côté du miroir avant, victime de sa pilosité trop orange pour être acceptée.

Dans un coin, le petit Melwing les observait. Il était arrivé la veille, niché dans les bras d’une femme aux traits austères. Enceinte jusqu’au cou. C’est pour ça qu’elle avait retenu son prénom, à ce petit. Pour ça et pour ses yeux comme des abysses, curieux du monde qui l’entourait. Megan l’avait plaint, un peu. Les vieilles de ce genre n’étaient pas méchantes, au fond, mais elles n’évoluaient pas avec leur temps et elles étaient incapables de communiquer. Sa propre mère en avait fait partie ; peut-être qu’à la longue, on développait un radar capable de déceler ces profils un peu trop statiques. Et ça donnait des jeunes comme elle : mal adaptés à leur société, à la recherche d’un idéal qu’on ne pouvait pas leur offrir. Il fallait qu’ils rentrassent dans les clous. C’était tout. Pas si compliqué, Megan.

Pour le moment, Ariel Melwing n’avait pas à s’inquiéter de l’influence de ses géniteurs. Un bébé, un innocent petit bébé. Il finirait brisé, sûrement, mais il avait encore plusieurs années pour subir les injonctions de ses aînés.

Un pouce dans la bouche, le bambin analysait la situation. Il avait l’air intelligent, à la fois présent et loin dans les limbes de son cerveau d’enfant, un peu trop pur pour ce qui l’attendait. Avait-il compris le danger auquel il s’exposait ? Les autres étaient un poison.

Megan, elle, se dirait ensuite qu’elle était bête de ne pas l’avoir vu. Le gamin, en pleurs dans ses bras ramollis par le manque d’activité, le lui hurlerait : c’était à elle de jouer ce rôle et de le protéger de la misère de ce monde. Un mur contre l’adversité. Au moins pour cette fois-là.

Engoncée dans le nuage anesthésiant de sa drogue, elle avait pourtant tenté de les raisonner. Il était temps de récupérer sa baguette, avant que le rouquin ou un autre de la bande ne crevât l’œil d’un de ses bébés pensionnaires. Leurs mains miniatures l’agitaient dans tous les sens, impatients de la voir s’illuminer, et Megan fut prise d’un bref vertige. À cinq ans, ces gamins étaient capables de jeter un sort. De blesser quelqu’un. Pas besoin de baguette pour ça. Des sueurs froides montèrent lorsqu’elle imagina ce dont ils étaient capables, dotés d’un petit bout de bois.

Le jeune gangster lui tira la langue :

— Attends, on s’amuse.

Et, ni une ni deux, il se carapata à l’autre bout de la pièce.

Voilà pourquoi la drogue n’est pas recommandée lorsqu’on gère une crèche : elle tue tous vos mouvements dans l’œuf. Avant même qu’ils ne prennent forme dans votre cerveau. Avant même qu’elle n’ait l’idée de les entamer. Ils cessent d’exister.

Elle méritait la colère de Mrs Lendit : à sa place, elle se serait envoyée en exil à l’autre bout du monde. Et pourtant, Megan aurait tout donné pour que sa directrice fût présente à ce moment. Aucune place au doute, la situation n’était plus sous son contrôle. Une lueur démente brillait dans les yeux céruléens du petit roux.  

Ou devenait-elle parano ?

— Regarde ce qu’on sait faire, madame !

Des petits singes qui se balançaient, sautant, piaillant. Un ouistiti turbulent, ou peut-être un gorille miniature. Il se tourna vers ses disciples. Ils avaient les yeux ronds, vides de conscience, emplis d’anticipation.

— C’est ma sœur Cherry qui m’a appris ça. Elle dit toujours que les profs, ils sont nuls et ils leur montrent jamais rien. Elle a volé un livre de là-bas. Elle m’a dit qu’à la bibliothèque, on travaille pas. Tout le monde fait des trucs dégueus.

Beeeeeerk !

Pas étonnant : la délinquance, c’est de famille. La Cherry avait sûrement fini sur les bancs de Serpentard. Et, comme tous les zozos qui fonctionnaient à la brutalité, elle finirait à la tête d’une grande entreprise ou d’une banque milliardaire.

Ou alors il s’agissait juste d’une ado en mal de sensations. On en produisait en série, ces dernières années. C’était d’une banalité à en pleurer.

Megan ne put qu’assister à la suite, bras ballants, impuissante face à sa propre ruine. Elle ne dit rien. Ou peut-être qu’un mollasson « arrêtez ça » perça le voile, mais pour ce que ça changeait, autant ne pas le retenir. La meute avait décidé de tester son nouveau jouet. Et comme un jeu, c’est plus drôle à plusieurs, Melwing fut désigné comme un cobaye. Il était petit, puant, faible et baveux, il ferait parfaitement l’affaire. Lendit la tuerait. Même la jeunesse magique lui tournait le dos.

— Na, émit Ariel. Il paniquait, hypersensible à l’attention que lui accordait la petite bande.

Le petit se protégea la tête. La baguette du roux – elle n’appartenait plus à Megan, à présent – était pointée sur un paquet de feuilles à dessiner. Il avait pratiqué : son geste, son rictus, sa moue concentrée en étaient les meilleurs témoins. Une brève image de Cherry et de son orange de frère s’imposa à la gardienne, planqués dans le grenier, hors-la-loi avant l’heure. Leur vieille était-elle ridée des soucis qu’ils lui causaient ?

Le chef de bande ricana. Il tira la langue. Une puérilité somme toute bienvenue.

— Bah si, chantonna-t-il. Mais t’inquiète, ça va être rigolo !

Une voix sincère à ce point pouvait-elle porter de mauvaises intentions ? Plus tard, Megan se dirait que non : l’enfant n’imaginait sûrement pas mal faire. Les conséquences de son petit jeu, c’était autre chose. Ses factures impayées et son licenciement en faisaient partie.

Papiliones Illusionibus.

Megan n’était pas sûre d’avoir déjà entendu ce sortilège. Son cerveau ralenti le classa dans la catégorie des sortilèges de métamorphose d’illusion temporaire. Inoffensifs, mais terriblement convaincants. Les plus méchants s’en servaient contre les phobiques ; les psychomages en étaient friands pour le lavage des cerveaux de leurs expériences, même s’ils n’appelaient pas ça comme ça. Cherry devait le trouver beau, poétique et romantique.

Ariel, lui, n'était pas du même avis.

Une à une, les feuilles touchées par le sortilège prirent vie. S’entourèrent de couleur, se découpèrent, se plièrent. Bientôt, deux cents papillons bruissaient des ailes autour du bambin. Ils étaient magnifiques, mais surtout gigantesques. De la masse de papier soyeux, un hoquètement s’échappa. L’enfant étouffait. Fascination, stupeur, anesthésie, Megan resta immobile.

— C’est trop beau ! s’émerveilla une petite fille, celle qui suivait le rouquin comme s’il détenait la vérité.

— Bien sûr, se rengorgea-t-il.

Comme s’il pouvait en être autrement.

Les papillons se dispersèrent très vite, mais pas à cause du manque de puissance du sortilège. Ariel hurlait, les yeux fermés, les poings fermés, le nez fermé, les oreilles fermées. Il ressemblait à une grosse boule de chair rouge, trouée d’un gouffre immense – sa bouche. Une vision d’horreur. Il ne respirait pas, il se contenta de crier. Sa magie avait scellé tous les orifices de son corps et seul son cri s’en échappait. Une à une, les vitres cédèrent. Les corps reculèrent, glissèrent sur le lino sale, les livres et les comptines se désagrégèrent, des étincelles glissèrent sur les luminaires. Une hécatombe. Le roux finit par lâcher son emprise. Ariel ne cessa pas de crier et son corps ratatiné commença à bleuir.

Cette fois, l’inquiétude de Megan parvint à survoler le champ de mines dévasté de son cerveau. Rien de tel que l’adrénaline pour vous rappeler comment être sobre.

Elle saisit Ariel dans ses bras, malgré ses tympans qui l’imploraient de prendre la fuite. Dans le reste de la salle, c’était le K.O. général. Vingt-trois corps sans connaissance jonchaient le sol. Leurs cœurs battaient-ils encore ? Probablement pas à l'unisson en tout cas.

Impossible à dire combien de temps elle passa à le cajoler, mais l’expérience lui apprit une chose : elle n’aurait jamais d’enfant. Les bouchons d’oreilles qu’elle avait trouvés sur l’imprimante lui sauvèrent l’ouïe, mais seule l’idée de la rage de la Melwing au moment de lui rendre son fils lui prodigua la patience de le calmer. De bleue sa peau vira violette puis magenta. Enfin, son corps reprit la bonne couleur et la bonne forme. Du coin de l’œil, elle vit les petits remuer : aucun n’était mort, finalement. Ni sourd.

Elle ferma les yeux. La catastrophe, passée. Les brumes de la défonce pouvaient reprendre leur place. Melwing repartait déjà en direction des étagères, loin des autres bébés, comme inconscient du traumatisme qu’il avait occasionné. Beaucoup d’entre eux, ce jour-là, se plaindraient à leurs parents. Megan serait renvoyée, et elle ne saisirait pas l’opportunité – elle se laisserait glisser, comme beaucoup d’autres, le long des murs d’un squat. Une question la taraudait encore : pourquoi elle ? On demanderait des comptes aux Melwing. Ne voyaient-ils pas qu’ils avaient engendré un monstre ? Cet être bleu, chétif, fripé, d’apparence tout sauf humanoïde, deviendrait le cauchemar de ces enfants, victimes de leur propre farce.

Ariel, lui, ne saurait jamais. De cet épisode il ne conserva qu’une terreur panique des papillons, qui plus tard s’étendrait à tous les autres êtres vivants. Surtout ceux dont les ailes bruissent au vent. Et, à la marge, la désagréable sensation que son corps ne lui appartenait pas vraiment.


Codage par Libella sur Graphiorum
Le Polynectar
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Le Polynectar
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Mer 2 Aoû 2023 - 18:11


Elle s'appelait Rose, mais sentait la violette.
La magie élégante de Magnus redessinait la forme du rosier, lui offrant des courbes nouvelles et ondulées, pliant sous la perspective de son regard poétique. Le jardin de ses parents était son terrain de jeu, sa toile organique pour ériger son univers onirique, le matérialiser et le faire vivre sous le soleil de minuit, avant que les fleurs ne se fanent à nouveau à l'aube de l'hiver islandais. Leurs pétales orgueuilleux étaient l'étendard de l'éphémère, ils se dressaient dans toute leur fragilité et chantaient au vent qu'il pouvait bien les arracher, leurs couleurs survivraient au moins à l'éclosion du printemps.

Et après ?

Magnus aimait avec passion les fleurs mais, souvent lorsqu'il les humait, le parfum de la nostalgie chatouillait son odorat. Qu'y avait-il de plus beau et triste à la fois qu'une fleur qui naissait pour mourir à la saison d'après ?

Une rose rouge tomba de l'arbuste qu'il était en train de tailler. Il se pencha pour la recueillir entre son index et son majeur et, de son pouce, il se mit à caresser le contour de ses courbes. Ses pétales étaient aussi doux et fins que la peau de cette fille qui portait le nom de cette fleur. Mais son parfum n'était pas le même. Magnus posa la pointe de sa baguette sur le bouton de rose et, d'une formule susurrée, les pétales se déplièrent, s'écartèrent, s'amenuisèrent, et le rouge devint violet.

Cette fille, cette femme, s'appelait Rose. Mais son parfum était celui de la violette.

Il la connaissait depuis peu. Une dizaine de jours tout au plus. Leurs lèvres s'étaient rapidement trouvées et leurs corps avaient déjà par deux fois enjoint la même danse. Ils s'étaient revus pas plus tard que la veille, mais Magnus ne savait pas quoi en penser. Elle lui plaisait, c'était indiscutable, mais elle, qu'avait-elle pensé de leurs moments partagés ?

Rose était mystérieuse, pourtant bavarde - plus que lui -, cultivée, à l'aise, sociale, mais à l'essence indéchiffrable. Il y avait ce je-ne-sais-quoi qui le maintenait encore à distance et qui tranchait avec la rapidité de leu rapprochement. Une proximité installée au premier regard, mais qui se dérobait à chaque opportunité de baiser manquée. Une intimité qui se créait, belle et exaltée, dès que leurs corps décidaient de célébrer l'amour, mais qui s'évaporait dès le dernier souffle exhalé.

Rose était belle et dès lors qu'il l'avait vu danser, il n'avait su décrocher son regard d'elle. Elle était envoûtante lorsque ses pas se diluaient dans la musique ou que ses hanches ondulaient avec lui sur un autre rythme. Mais même en étant contre elle, il avait l'impression de ne pas parvenir à la toucher. Son corps lui semblait lointain et inaccessible et il osait à peine frôler ses lèvres pourtant rougies de désir.

Quel était donc ce voile invisible qui l'empêchait de humer le véritable parfum de cette fleur ?

Elle s'appelait Rose, mais sentait bien plus que la violette.

Ce parfum serait-il celui de son futur jardin ? Sera-t-elle celle qui embaumerait chaque jour de son quotidien ? Il n'en savait rien, et c'était bien là tout son tourment. Comment s'assurer que ce nouveau bourgeon ne soit pas aussi éphémère que le précédent ?

Elvý était partie si vite, laissant un gouffre terrifiant dans sa vie. Jamais il n'avait dû faire face à une ombre si grande, si noire, si menaçante, cette ombre que chacun abritait au fond de lui et qui s'appelait Solitude. Avant, il ne l'avait jamais remarqué. Maintenant, il ne voyait qu'elle. L'amour était-il un placard où ranger cette ombre ? Si c'était le cas, il lui fallait retrouver un placard plus solide qui, cette fois, ne se casserait pas ou alors serait réparé à la première vis qui sauterait.

S'il aimait à nouveau, il voulait que ce soit pour la vie. Mais pouvait-il encore croire que quelqu'un d'autre sur cette Terre serait capable d'une telle prouesse alors même que celle qu'il croyait être la femme de sa vie l'avait délaissé sans un regard en arrière ?

Elvý était partie, mais il se rappelait encore de son odeur.

Entre eux, était-ce vraiment fini ?
Comment accepter l'éphémère lorsque l'on avait toujours cru à l'éternel ?

Rose, c'était le nom d'une femme, c'était le nom d'une fleur. Laquelle des deux verrait-il faner en premier : celle nichée au creux de sa main ou celle qu'il tenait dans ses bras la veille ?

Si Magnus avait voulu retourner en Islande, c'était pour commencer à construire des projets stables et pérennes, là où Elvý s'était vu incapable de mettre pied à terre pour déposer une pierre sur son chemin. Elvý, c'était le vent qui changeait toujours de direction, qui arpentait les landes désolés puis les villages en fêtes, c'était la brise qui faisait s'étendre les fleurs et qui, parfois, leur arrachait des pétales.

Magnus avait aimé voyager avec elle, mais ce n'était pas – ou plus - son mode de vie à lui. Lui, n'aimait finalement pas les pages qui se tournaient et les paysages qui défilaient sans cesse. Lui, voulait à présent voir chaque matin le même rosier depuis la fenêtre de sa cuisine. Lui, il voulait une cuisine, une maison, un jardin, un toit à lui. Un cadre sécurisant où il pourrait évoluer en paix jusqu'à la fin de ses jours.

L'illusion de l'éternité était pour lui ce qu'il y avait de plus réconfortant en ce bas monde. Car sa peur la plus viscérale, à lui, c'était qu'une chose puisse toucher à sa fin. L'éphémère ne le rendait pas seulement nostalgique, l'éphémère l'angoissait.

Il huma la violette et la déposa au sommet du rosier.



( Pando )
Le Polynectar
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Le Polynectar
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