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[25/09/95] Coup de Jus | Aria & Merlin

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Jeu 21 Nov 2019 - 20:02
Coup de jus
Crois-moi, cette tension electrique est immuable. Crois-moi, ou prouve-moi le contraire.

Lundi 25 Septembre 1995

Aria rangea silencieusement ses affaires dans son sac avant de quitter la salle de métamorphose. Le couloir se remplit rapidement d'une foule d'élèves affamés. Elle, n'avait pas si faim. Était-ce la frustration ? Ou le stress ? Cette année allait être déterminante pour le futur d'Aria et de tous les autres élèves de sa classe. Cette année, c'était celle de leurs premiers examens officiels : les BUSE. Alors, en plus de la pression qu'elle se mettait elle-même, la Serpentard peinait à trouver de l'air respirable dans la nouvelle atmosphère qui avait envahi chacune de leur salle de classe. Le stress s'y était ancré, imperceptiblement, caché dans un recoin, aux aguets, montrant son visage laid dès que les examens de fin d'année étaient mentionnés. Et ce stress semblait pénétrer furtivement ses pores jusqu'à ce que l'intoxication pointe doucement le bout de son nez. Les premiers symptômes s'étaient manifestés dans les cours de pratique. Comme ce matin, dans le cours de métamorphose qu'elle venait de quitter.

Elle avait passé une heure entière à s'entraîner au sortilège de disparition, en vain. Les premiers essais avaient été des échecs. Le premier résultat avait été ridicule : plutôt que de disparaître, la tasse avait commencé à se liquéfier, presque moqueusement, devant son air frustré. À la fin de l'heure, elle avait finalement réussi à faire disparaître la tasse. Sauf son anse, qui s'était pitoyablement effondrée sur la table, dans un tintement d'échec. Elle ne comprenait pas. Certes, McGonagall avait précisé qu'il s'agissait là d'un sort de métamorphose particulièrement complexe, mais la Beurk était l'une des meilleures de sa classe, elle sortait rarement d'un cours avec le goût amer de l'échec collé au palais. Puis, ce n'était pas que ça. Elle avait senti quelque chose de différent avec sa baguette. Comme si cette dernière se voulait moins coopérative. Elle adoptait le même comportement que les fois où Aria bourdonnait d'émotions négatives.
Le stress.
Il fallait à tout prix qu'elle l'évacue.

Mais bientôt, l'image de l'anse solitaire qui dansait dans son esprit pour la narguer fut remplacée par une vision encore plus désagréable. Merlin Shafiq venait de la dépasser, trottinant de son pas léger dans le couloir pour rattraper un autre élève de cinquième année. Elle posa une main sur son bras, il se retourna. Ils se sourirent, échangèrent quelques paroles qu'Aria n'entendait pas. Ce tableau la rendait encore plus malade. Shafiq et son hypocrisie à vomir, comme d'habitude. Shafiq et ses beaux sourires, Shafiq et ses belles paroles, Shafiq l'élève modèle, Shafiq qui réussissait le sortilège de disparition dès le premier cours, elle. Oui, la blonde l'avait observé du coin de l’œil pendant l'heure passée, histoire d'enfler encore plus sa frustration. Puis, ce n'était pas comme si le talent naturel de la Serdaigle en métamorphose passait inaperçu. Et à la voir ainsi, dans ce couloir, son air si joyeux accroché comme toujours à son faciès détestable, une vieille manie revint titiller les doigts d'Aria qui, déjà, s'enroulèrent autour de sa baguette.

Dès leur première année, Aria avait catalogué Merlin comme la petite fille parfaite. Trop parfaite pour être vraie. Trop lisse pour être sincère. C'était donc elle qu'elle avait élue comme première cible de ses maléfices. Mais jamais elle n'avait su percer ce voile de positivisme qui flottait autour d'elle. Jamais la Serpentard n'avait réussi à tirer la moindre réaction haineuse de ses méfaits. Shafiq était-elle donc vraiment parfaite ? Non, Aria ne croyait pas à ça. Shafiq, c'était soit une manipulatrice hors pair, soit un spécimen humain des plus étranges.

Puis, avec le temps, elle avait arrêté. Arrêté de s'acharner sur cette autre Sang-Pur car ses maléfices n'avaient aucune portée intéressante ou stimulante sur elle. Quelques fois seulement, l'envie revenait et subtilement, le mouvement de ses lèvres accompagnait la danse de son poignet en direction de la Bleue-et-Bronze. Quelques fois. Comme ce matin-là.

Ils étaient à quelques mètres devant Aria. Merlin et son ami, Porter, un Né-Moldu. Voilà une preuve qu'elle n'était pas parfaite. Ses parents ne lui avaient-ils donc jamais expliqué quelles étaient les bonnes fréquentations à avoir ? L'esprit d'Aria émit un rire sarcastique face à sa propre pensée. Elle aurait eu une meilleure place dans la tête de son frère que dans la sienne. Avait-elle seulement elle-même écouté les dires de ses parents concernant sa vie sociale ? Visiblement non, étant donné que celle-ci se résumait à quelques miettes à peine discernables parmi les effluves d'amitié qui s'exhalaient à travers cet immense château.

Le Né-moldu ouvrit son sac et sorti un objet cubique à l'effigie de son origine. Aria s'était souvent demandée de quoi il s'agissait. Mais c'était de la curiosité mal placée. Le monde des Moldus était encore plus morne que celui des sorciers, alors, à quoi bon chercher à découvrir leurs technologies ? Perte de temps. Merlin, elle, ne semblait pas de cet avis et, alors qu'elle tendait sa main vers l'objet en question, Aria jugea le moment idéal pour diriger la pointe de sa baguette vers elle tout en susurrant un doux maléfice. La seconde d'après, la main de Merlin fut agitée d'un soubresaut et elle laissa tomber à terre la console que Porter venait de lui donner. Le bras d'Aria, quant à lui, était resté plaqué sereinement le long de son corps, n'autorisant qu'un discret mouvement de poignet pendant l'incantation du sortilège, et c'est avec un fin sourire moqueur qu'elle dépassa Miss Parfaite. Elle croisa son regard sans pudeur, trahissant avec une fierté non dissimulée son méfait. Alors, Shafiq, c'était comment ce coup de jus ?

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Sam 28 Mar 2020 - 15:53

COUP DE JUS

Lundi 25 Septembre 1995,

Contrairement aux croyances populaires, Merlin n'avait jamais réellement eu de facilité pour pratiquer la magie, confectionner des potions, s'occuper des plantes ou des animaux, qu'ils fussent magiques ou non. Contrairement à la croyance populaire, dont certains de ses camarades avaient été les précurseurs, c'était des heures d'entraînement, d'apprentissage, qui lui permettait aujourd'hui cette facilité à la réalisation des sortilèges et autres œuvres. C'était des heures d'études qui lui offraient la compréhension nécessaire, ainsi qu'une attention particulièrement poussée pour ses professeurs durant les cours. Elle se voyait seule, les autres invisibles, alors qu'elle plongeait dans un état presque méditatif pour intégrer les paroles, les explications. C'était uniquement par cet acharnement qui était le sien, sa peur de l'échec, en dépit souvent de sa propre santé, qu'elle parvenait à réaliser l'impensable.

Comme ce jour-ci, avec le sortilège de disparition. Comme cette heure-ci, alors que d'un coup de poignet habile, sa voix presque chantante résonnant dans la pièce, sa tasse avait entièrement disparu. Peut-être bien, oui, qu'elle avait certaines facilités avec certaines matières, mais seul le travail permettait de déployer le talent. Ça n'apparaissait pas seul, sans logique, mais les sorciers, qui en étaient bien trop souvent dépourvus, ne parvenaient pas toujours à le comprendre. Ils lui prêtaient alors des pouvoirs exceptionnels, un destin à la hauteur de son prénom, de futurs faits d'armes ou des découvertes extraordinaires. La Serdaigle, pour sa part, se contentait d'en sourire, amusée bien malgré elle par la sottise des autres élèves, bien qu'une petite inquiétude venait parfois s'installer en fond, à peine perceptible. Le désir de ne pas décevoir, l'appréhension qui s'installait d'un même mouvement.

L'oublie était la seule solution. Elle n'était que passagère, finissait par disparaître, se dissiper comme une légère brume qui ne pouvait résister à un vent violent. Jamais, l'adolescente le comprenait, ce remède serait suffisant pour remédier à ses frayeurs, souvent nocturnes, petits démons tapis dans des coins sombres, lui arrachant le sommeil par quelques angoisses rongeant sa bonne humeur et sa bonté le temps de l'obscurité. La Shafiq, et elle ne prétendait pas l'être elle-même, n'était pas parfaite. Elle avait ses peurs, ses pleurs, ses peines. Des émotions qu'elle fuyait, aidée par l'astre du jour, qui lui offrait par sa lumière le réconfort dont elle avait besoin. Le positivisme qu'elle chérissait comme le plus précieux des cadeaux. Un présent qu'elle gardait jalousement, sachant qu'elle l'égarerait dès le soir venu, enfermée derrière les rideaux de son lit, les bruits de ses camarades assoupies lui vrillant les tympans.

Non, Merlin n'était pas la fille idéale, l'amie fantastique, étonnante par ses actions. Personne ne l'était, le maléfice de Beurk – Aria – le prouvait la concernant. Elle s'en prenait à elle. Encore. Une fois de plus, après toutes ses années. La disciple de Rowena ne comptait plus le nombre de fois. Que lui avait-elle fait, pour mériter son courroux ? L'incompréhension, ce sentiment insupportable, la frappa de plein fouet, la gifla avec une force trop intense pour qu'elle réagît. Leurs regards se rencontrèrent, puis elle l'observa disparaître dans le flot des élèves. Par réflexe, sa main empoigna sa baguette pour réparer la console de son ami, puis elle lui tendit avec un sourire d'excuse, se redressant, alors même qu'elle s'était accroupie pour la récupérer par instinct, sans se l'expliquer. Puis, sans se justifier, elle suivit sa trace.

Et pour la énième fois, elle se questionna. Pourquoi vouloir lui parler ? Pourquoi vouloir comprendre ses réactions, qu'elle savait puériles ? Une ébauche de réponse s'imposa à son esprit, lui arrachant un rictus moqueur dirigé contre elle-même. Aria lui ressemblait, plus qu'elle l'aurait espéré. D'un geste agacé de la tête, elle fit disparaître cette idée. C'était faux. Aria était elle-même, se complaisait dans sa marginalité. Ce n'était pas le cas de l'autre sang-pur, malgré la solitude qui pesait doucement sur les épaules des deux adolescentes. Deux incomprises, deux âmes prisonnières de griffes invisibles, bien qu'acérées. La différence majeure résidait dans un fait brute, simple et visible. Aria s'y complaisait, l'acceptait, à un point tel, aux yeux de la voyante, qu'elle en venait à doucement la jalouser, dans un secret absolu.

« Beurk !, s'annonça Merlin, la rattrapant. Aria. »

Elle se disposa à sa droite, puis ralentit l'allure pour caler son rythme au sien. Elle s'osa à une observation minutieuse de la blonde, faisant taire ses émotions contradictoires, jusqu'à les reléguer à un bourdonnement lointain. Que devait-elle dire ? Que devait-elle faire ? Pourquoi se sentait-elle, à nouveau, contre toute logique, attirée par la Serpentard ? Pourquoi, après toutes ses années, vouloir encore sympathiser avec elle, alors que toutes ses tentatives passé s'étaient soldées par un échec ? Aria ne lui faisait pas de la peine. Elle n'était pas sans défense. Elle n'avait pas besoin d'elle. Non, elle n'avait pas besoin d'elle. Alors, la réalisation la frappa avec la force d'un coup-de-poing en plein visage, lui faisant détourner les yeux du visage de poupée de la vipère.

C'était elle, qui avait cette nécessité. Le besoin viscéral de trouver quelqu'un qui pourrait la comprendre. Dans son entièreté. Un espoir fugace, une chimère, un rêve irréaliste : le fossé qui s'était créé entre les deux sorcières à travers les années étaient maintenant trop grand. Elle ne pouvait plus l'enjamber. Avec un pincement au cœur, les lèvres closes, elle ne dit rien de plus, suite à sa compréhension. Suite à toutes ses années de souffrance silencieuse, elle s'était souvent questionnée : dans quelle intention se laissait-elle faire ? La réponse était aujourd'hui évidente. Elle ne pouvait avoir une réaction violente vis-à-vis d'elle, d'un paradoxal modèle.
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Mer 1 Avr 2020 - 14:54
Coup de jus
Crois-moi, cette tension electrique est immuable. Crois-moi, ou prouve-moi le contraire.

Lundi 25 Septembre 1995

Du plus innocent des mouvements, Aria laissa glisser sa baguette dans la poche de sa cape. Méfait accompli. Sourire aux lèvres. Enfin, un peu mais pas trop non plus. Tout était une question de subtilité, d'un léger coin de ses lèvres levé en signe de victoire sous les deux lunes pâles que représentaient ses yeux gris. Les maléfices qu'elle lançait, elle les savourait jusqu'à la dernière miette. Ce midi-là, elle ne loupa pas un instant de la scène, du coup de jus dans la main de Shafiq, au lourd rebond de la console moldue au sol, jusqu'au regard affolé de Porter. Seule déception : elle ne vit aucun nuage mauvais assombrir le regard de la disciple de Rowena.

Mais ça, elle s'y était attendu.

Au fil des années, elle avait abandonné l'idée de fissurer le masque de bienveillance de Shafiq. Cette fille-là, aussi parfaite qu'elle pouvait paraître, était quand même d'un ennui profond. Maléfices après maléfices, elle ne s'énervait jamais. Jamais. Et c'en était énervant.

Aria la contourna en prenant le temps de détailler cet air angéliquement surpris qui dessinait de jolis traits sur le visage de la brune. Jolis mais, encore une fois, ennuyants, lassants. Au moins, la Vipère avait pu se défouler, évacuer un peu de son stress. Puis, aussi, rappeler à l'Aiglonne qu'elle ne l'oubliait pas, qu'elle était toujours là pour lui faire des crasses de temps à autres. Qu'elle ne lâchait pas totalement l'affaire.

Et, pourquoi, au juste, ne lâchait-elle toujours pas l'affaire ? Pourquoi cet acharnement sur Shafiq ? Pourquoi cette fille-là réveillait en elle ce besoin de montrer au monde sa fourberie ?
Peut-être parce qu'après être resté trop longtemps dans la pénombre, c'était le soleil qu'on percevait comme une menace. Alors, on s'en prenait à lui, au soleil, d'abord pour lui reprocher de nous voler nos heures sombres, puis pour vérifier qu'il était bien présent, bien réel. Le défier au risque de s'y brûler sans savoir qu'au fond de nos cœurs, on avait juste besoin d'un de ses rayons pour se réchauffer.

- Beurk ! Aria.

Ah ? Avançant au milieu des élèves qui se dirigeaient vers la Grande Salle, Aria laissa discrètement apparaître un nouveau sourire sur son visage avant que Merlin ne la rattrape.

- Shafiq, fit la blonde d'une froideur ironique en retour.

Avait-elle touché une corde sensible en s'attaquant au bien d'un des amis de princesse Shafiq ? Celle-ci avait-elle enfin décidé de se rebeller un peu et de désobéir à ses grandes vertus ?

Bien sûr que non.

Aria poussa un long soupir d'exaspération alors que l'autre Sang-Pur restait-là sans rien dire, marchant à ses côtés bras ballants. La déception se manifesta à nouveau, car aucune émotion négative ne semblait émaner d'elle. Aucune assez forte pour qu'Aria puisse la sentir, du moins. Une pensée vint alors lui chuchoter avec sarcasme que ça lui ferait pas de mal, à Shafiq, de piquer un peu du surplus de colère de Jun, histoire d'équilibrer un peu. Mais bon, c'était bien connu, on ne naissait pas égaux. Et Shafiq, elle, était née avec la foutue patience d'une sainte.

- Bon, tu comptes me suivre comme ça pendant longtemps encore ? finit par demander Aria avec agacement alors qu'elles bifurquaient dans un nouveau couloir menant aux escaliers.

Elle tourna enfin son visage vers celui de la brune et arqua un sourcil pour appuyer sa question. Elle remarqua alors sa mine tourmentée et ajouta moqueusement :

- C'est bon, sors-là ta jolie phrase prémâchée plein de jolis mots moralisants. Que je puisse ensuite aller manger en paix.


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Sam 4 Avr 2020 - 17:24

COUP DE JUS

Lundi 25 Septembre 1995,

Pourquoi ? Cette question restait ancrée dans son esprit. Curieuse de nature, à vouloir tout savoir, elle en avait besoin. Combien de fois avait-elle posée cette interrogation, durant sa courte vie ? Elle-même n'aurait pas su le dire. Trop de fois, sans doute. C'en était devenu vitale, avec le temps. Elle avait ce besoin de savoir, mais avant tout, de comprendre. La compréhension offrait la possibilité de s'en servir réellement, pour arriver à ses fins. Merlin n'était pas connu pour être ambitieuse, elle était une Serdaigle, qui poussait l’intellect par amour de l'étude et non pas pour s'en servir.

Pourquoi ? Parce que c'était une belle vérité, si appréciable. Le vrai problème, c'était que ce n'en était qu'une en demi-teinte. Le savoir, elle en avait besoin pour dépasser ses parents. Les connaissances, elle les convoiter par peur de l'échec, pour devenir forte et prouver sa valeur. Être reconnue pour qui elle était, Merlin et non plus pour sa famille. La fille Shafiq. L'enfant de Lancelot et Alice. La petite-fille de deux sorciers exceptionnels ayant combattu le Seigneur des Ténèbres jusqu'à sa fuite.

Pourquoi ? Parce qu'elle en avait assez, au final, d'être cette petite fille rangée. Qu'elle n'en pouvait plus de n'osait qu'à moitié, de n'espérait que partiellement. Elle voulait s'affranchir des règles, se comporter comme elle l'entendait, sans se préoccuper des regards et jugements de ses proches. Elle était une sang-pure. Sa vie était toute tracée, du début à la fin, mais personne ne lui avait demandé son avis. Est-ce que l'un d'entre eux y avait-il déjà pensé ?

Pourquoi ? Pourquoi ne devait-elle pas être amie avec tel ou tel sang-pure ? Pourquoi devait-elle préférer les sang-mêlés ou les née-moldus pour ses proches à l'école, en dehors de certaines familles comme les Weasley ? Pourquoi devait-elle avoir peur de s'approcher de certains camarades plus que d'autres ?

Pourquoi ? Au fond, elle le savait. Une petite voix, qui avait désagréablement la voix de sa mère, le lui murmurait au creux de son oreille. Sauf que l'oniromancienne, elle, n'y croyait pas. Ça aurait été génial, mais elle n'était pas si spéciale. Elle n'était pas voyante. Ce n'était que le rêve d'une enfant qui refusait de grandir, de sortir de sa bulle et de sa zone de confort.

Pourquoi ? Parce que le monde était effrayant quand elle l'observait d'un regard plus adulte. Merlin était catégorisée comme une fille sage, calme et, si elle n'était pas discrète, tranquille. De beaux mots, mais comment pouvaient-ils le penser d'une fille aussi étrange, décalée de la réalité, qui préférait le rêve, si confortable, à l'évidence ?

Pourquoi ? C'était tellement plus simple de voir ses sourires, de remarquer son calme olympien et de se dire que c'était normal. Normal, sérieusement ? Qui pouvait être normal tout en se laissant marcher dessus du moment qu'on ne touchait pas à ses amis ? Qui pouvait être normal en restant enfermé dans des songes pour esquiver habilement le pragmatisme ? Qui pouvait être normal en se tuant à la tâche pour avoir des notes excellentes dans toutes les matières, même celles qui ne lui plaisaient pas, tout en faisant partie de nombreux clubs ?

Pourquoi ? Parce que chacun était ainsi, avec ses problèmes et ses peines et qu'il était plus simple de se concentrer sur soi-même plutôt que sur les autres. Peu était de ces personnes à remarquer que quelque chose n'allait pas. Que quelque chose clochait. Elle était trop solaire, et paradoxalement, trop lunaire.

Pourquoi ? Parce qu'elle n'avait pas le droit de faire partie des ombres. Parce qu'elle n'avait pas le droit d'être mal dans sa peau. Parce qu'elle était une Shafiq, qu'elle avait le sang de ses ancêtres qui coulait dans ses veines. L'héritage, extrêmement lourd, à porter ne lui permettait pas d'être qui elle voudrait être. L'attente, trop intense, l'écrasait, elle et ses désirs.

Alors, oui, pourquoi Aria, elle, ne se gênait pas ? Pourquoi était-elle si peu sociable, alors que sa famille était connue pour être des vendeurs d'exceptions, ayant de nombreuses relations ? Pourquoi était-elle si piquante, alors qu'elle aurait pu être l'une de ses fleurs fragiles à protéger ? Pourquoi était-elle si mauvaise, avec elle, depuis des années maintenant, alors que leurs familles respectives n'avaient jamais eu de mauvaises relations par le passé ? Au fond, pour Merlin, c'était simple.

Parce que la Serpentard, elle, avait du cran. Comment lui en vouloir ? Pourquoi lui en vouloir ? Elle n'en avait pas la force. La seule émotion qui l'animait la concernant était une forme d'envie si fine, si distillée à travers son être, qu'il en était indiscernable même pour la principale concernée. Dans les profondeurs les plus sombres de son esprit, elle osait se le hurler : elle aurait aimé être Aria. Avoir sa beauté, son talent, mais surtout, cette liberté qu'elle parvenait à arracher, malgré son sang, malgré son propre héritage. Cette simple constatation, qu'elle ne s'avouait, encore et toujours, qu'en demi-teinte, l'empêcha de lui parler, l'empêcha de continuer.

Jusqu'à ce que la violoniste reprît d'une voix cassante, bien après l'avoir salué à son tour, alors que l'oniromancienne continuait de la suivre comme l'ombre suivait la courbe du soleil.

« Bon, tu comptes me suivre comme ça pendant longtemps encore ?»

Beurk bifurqua vers un couloir adjacent. Merlin la suivit. Elle ne lui répondit pas. Elle n'en eut pas le temps. Peut-être qu'au fond, elle n'en avait pas l'envie ou la force. C'était ça, la vérité. Elle qui était connue pour être honnête, parfois de façon trop brutale, n'était pas capable de l'être avec elle-même ? Ironique. D'une voix dégoulinante de moquerie, la blonde reprit, après avoir tourné son faciès dans sa direction.

« C'est bon, sors-là ta jolie phrase prémâchée plein de jolis mots moralisants. Que je puisse ensuite aller manger en paix. »

À quoi bon ? Elle ne l'écouterait pas. Elle se moquerait d'elle et Merlin laisserait faire. Comme d'habitude, bien à l'abris dans sa bulle, elle ne le remarquerait qu'à moitié. Une protection qui se fissurait un peu, à présent, alors qu'elle se retrouvait incapable de répondre dans l'immédiat. Quoi faire ? Quoi dire ? Pourquoi ne pas être capable de dire ses pensées envers elle, alors qu'elle ne se gênait pas avec les autres ? Il n'y avait aucune raison, si ce n'était la cage dans laquelle elle s'enfermait elle-même. Une prison qui, pour une fois dans sa vie, l'étouffait. Elle avait besoin d'air, elle avait besoin de sortir et c'est ce qu'elle fit. Elle tourna son regard vers Aria et, toujours avec ce calme qui la caractérisait, elle répliqua, un sourire en coin des lèvres destiné à l'étudiante au blason vert.

« À quoi bon ?, répliqua-t-elle, osant formuler sa pensée. Nous savons toutes les deux que tu ne m'écouterais pas. »

Elle lui laissa le temps d'intégrer ses paroles, puis elle continua, toujours sur le même ton. Son timbre si particulier, comme si elle parlait de la pluie et du beau temps, l'air un peu ailleurs.

« Ce serait une perte de temps, autant pour toi que moi, dit-elle ensuite, toujours avec ce micro-sourire à peine perceptible, agaçant. Non, je voulais juste te demander... Pourquoi est-ce que tu es une pareille petite conne ? »

Si ses parents l'avaient entendue, ils auraient sans doute hurlé au scandale ou auraient fait une crise cardiaque sur place... Où était passée leur petite Merlin, si douce, si bienveillante ? Elle était toujours présente, là où eux n'étaient pas là, mais à l'image d'une rose, au doux parfum, elle avait décidé de sortir les épines. Le pire ? Elle le faisait sans même y penser. Aucune colère. Aucune haine. Juste de la curiosité. Irritante.
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Sam 11 Avr 2020 - 17:31
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Crois-moi, cette tension electrique est immuable. Crois-moi, ou prouve-moi le contraire.

Lundi 25 Septembre 1995

Dans les aspérités de son masque froid de solitaire, il y avait de la provocation. Oui, Aria aimait provoquer. Pas tout le temps. Pas tout le monde. Et toujours en subtilité. Loin des élans théâtraux des Lions, c'était bien avec la discrétion et la ruse d'une Vipère qu'elle entrait dans l'arène. Dispersant son venin sinueusement avec un sifflement aigu aux oreilles des indésirables. De ses crocs, elle ne mordait pas, elle piquait. Jamais trop profond, son but n'était pas de blesser. Mais juste assez profond pour titiller sa cible et lui arracher un léger gémissement, une réaction. C'était comme ça, que la Beurk provoquait. En subtilité.

Le réveil du vice. Chant dissonant qu'elle aimait entendre. Qu'elle aimait voir émerger d'une cachette insoupçonnée. Au final, ne s'y était-elle pas attachée, à cette laideur humaine ? Le vice, ça avait quelque chose de rassurant pour elle, comme un repère, une barre de fer à laquelle se raccrochait en cas de tempête. Car le vice, c'était tout ce qu'elle connaissait. Il n'y avait rien de plus réel, de plus vrai, de plus transparent. De plus noir.

Mais tout le monde faisait comme s'il n'existait pas. Les grands discours sur l'amour et la bonté humaine, ça la faisait bien rire. D'un rire cynique qui brûlait la gorge. Ce n'était pas à une fille ayant été bercée par la magie noire depuis sa plus petite enfance qu'on allait faire croire que l'être humain était beau, que l'être humain était lisse. Aucun d'entre eux ne l'était. Pas même toi, Shafiq.

Voilà pourquoi elle. Pourquoi elle, plus qu'une autre, ravivait le goût de la Vipère pour la provocation. Une cible toute trouvée, infatigable, éternelle. La faiblesse de celle qui courbe l'échine sans dire un mot mêlée à la force de celle qui ne se laisserait briser par aucun coup. Aussi fascinant que lassant. Où se cachait-il donc, le vice ? Montrerait-il un jour un bout de son visage au creux des iris marron de l'Aiglonne?

Ce jour-là, hésitait-il à faire surface, une bonne fois pour toutes ? Aria avait tourné son visage au teint hivernal vers la Sang-Pur qui s'était invitée à ses côtés.

- C'est bon, sors-là ta jolie phrase prémâchée plein de jolis mots moralisants que je puisse ensuite aller manger en paix.

Un léger sourire, indéchiffrable, se posa sur le visage angélique de la concernée. Bien sûr qu'elle gardait bonne figure. As always...

- À quoi bon ? répondit-elle d'une voix trop douce, trop calme. Nous savons toutes les deux que tu ne m'écouterais pas.

Alors, que lui voulait-elle ? Pourquoi la Serdaigle s'obstinait-elle à marcher à ses côtés comme si elles se fréquentaient, comme si elles étaient amies ? Aria n'avait pas besoin de sa présence muette pour rejoindre la Grande Salle, elle connaissait le chemin, merci.

La Verte-et-Argent haussa les épaules avec indifférence avant de reporter son regard droit devant elle. Elle accéléra le pas.

- Ce serait une perte de temps, autant pour toi que moi, continua malgré tout la brune.

Oui, totalement, une perte de temps. Ça lui arrivait donc parfois, à la Shafiq, de dire des trucs censés ! À peu de chose près, Aria aurait applaudit. Sauf que là, elle leur faisait déjà perdre leur temps. Qu'elle aille droit au but, à la fin !

- Non, je voulais juste te demander...

Vas-y crache le morceau, Shafiq. Ca te brûle la gorge depuis trop longtemps déjà.

- Pourquoi est-ce que tu es une pareille petite conne ?

Aria se stoppa brutalement. Pardon? Avait-elle bien entendu ? Pendant un instant, elle ne sut dire ce qui l'avait le plus perturbé. Le fait que Shafiq ait dit un gros mot ? Qu'elle l'ait prononcé avec un calme aussi étrange que gracieux ? Ou que, pour la première fois, elle osait répliquer ?

- Eh, fais gaffe !

Un élève venait de rentrer dans Aria après qu'elle ait coupé court à sa démarche rapide pour se figer de surprise. Elle l'ignora et continua de dévisager l'autre Sang-Pur qui l'avait alors dépassé de quelques pas. L'inattendu avait posé sa marque sur le visage de la blonde, élargissant ses traits d'un air stupéfait.

Ce fut un rire sobre qui vint la sortir de sa stature figée. Un rire, un vrai, aussi aigre qu'il pouvait sonner. C'était trop beau, trop innattendu. Avait-elle vraiment réussi à dérider la Shafiq ? Ou avait-elle rêvé ?

- P... Pardon ? articula Aria.

Ce fut loin d'être un élan offusqué qui mouva ses lèvres, mais bien une incrédulité débordante de sarcasme. Elle continua à toiser Shafiq alors que sa voix libéra quelques nouvelles notes de son rire étrange.

- Mais regardez-là, c'est qu'elle se rebelle, la Shafiq !

Le ton moqueur, toujours et encore, pour continuer à se sentir maître de la situation. Et cet air arrogant seyait presque aussi bien à son teint qu'à celui de son cousin Drago. Puis, ce n'était pas comme si ce que pensait les autres l'affectait. Peu de chose la touchait. Si ce n'était les émotions vibrantes... ou bien, serait-ce plutôt leur absence ?

La Vipère se rapprocha de quelques pas vers l'Aiglonne face à elle. Autour des deux Sangs-Purs, le couloir commençait doucement à se vider. La blonde aussi savait se parer d'un léger sourire en coin. Mais le sien, il puait le sarcasme.

- Et toi, Shafiq, pourquoi tu es une pareille petite sainte ?

Une question retournée à la place d'une réponse. Le retour du boomerang. Pas de cartes défaussées. Un jeu insensé. Un labyrinthe sans issue. Des échecs sans roi. Un miroir au reflet inversé. Alors, es-tu enfin prête à jouer, Shafiq?

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Mer 15 Avr 2020 - 19:10

COUP DE JUS

Lundi 25 Septembre 1995,

La première fois qu'elle avait réellement eu l'occasion d'apercevoir Aria, c'était dans la boutique de son père. À l'époque, elle ne savait pas qui elle était. Elle était encore trop jeune.

La disparition du Seigneur des Ténèbres était encore dans toutes les mémoires, alors ses parents avaient décliné les invitations aux soirées mondaines organisées entre riches familles de sorciers se voulant de sang-purs. C'était une façon, pour eux, de mettre de la distance avec celui ou celle qui les avait forcément trahi et qui avait offert leur position au Mage Noir.

Malheureusement, qui disait la fin du Lord Noir, disait aussi l'investigation des Aurors pour traquer les Mangemorts encore en liberté. Aussi neutre que les Shafiq l'avaient été dans le conflit, même après l'apparition du Seigneur des Ténèbres à leur porte, la famille n'en restait pas moins l'une du Registre, surtout riche, qui n'avait pas un seul moldu dans leur arbre généalogique.

Ils n'allaient pas passer à côté, et même si ça avait tardé, Lancelot avait dû prendre des dispositions pour s'assurer que sa Maison fût tranquille à l'avenir. Lui-même n'avait jamais été un fervent collectionneur, mais ses parents n'avaient pas pu faire face à Voldemort, même si ça leur avait finalement coûté la vie, sans quelques connaissances obscures.

Il n'avait pas tout vendu, bien sûr. Les livres, certains extrêmement rares, étaient restés dans la bibliothèque familiale, par exemple. Après tout, ce n'était que des grimoires et ça n'apportait aucune réelle preuve. Certains objets, par contre, auraient pu provoquer des soupçons.

Dans un souci de discrétion, le Patriarche avait bien sûr accepté de broder les prix, d'autant qu'il connaissait les exigences de l'acheteur. C'était ainsi que les relations entre les Beurk et les Shafiq s'étaient renouées. Ils n'étaient pas amis et on ne pouvait pas non plus à proprement parler d'alliés, mais la cordialité était de mise. Pour le bien du relationnel avec le client, sans doute.

C'était ainsi que Merlin avait rencontré Aria la première fois. Ou, plus exactement, la première fois qu'elle l'avait vu. Elle n'avait pas bien saisi, à l'époque, pourquoi son père l'avait emmené. La réponse ne lui serait jamais réellement dévoilée, bien qu'elle était facile à trouver : le manque de temps. La précipitation. Quand l'enquête avait réellement débutée, il lui restait encore quelques sombres bibelots, ayant appartenu au grand-père de la demoiselle, à faire disparaître.

Elle ne l'avait pas approchée. Elle s'était contenté d'observer cette gracieuse petite fille blonde qui regardait avec une fascination certaine les différents articles en vente. Elle-même, elle devait le reconnaître, curieuse de nature, se serait prêtée au jeu si elle n'avait pas eu si peur du regard de l'homme qui l'accompagnait. Alors, mal à l'aise, elle était restée droite, à sa gauche, à écouter les deux adultes sans comprendre réellement de quoi ils parlaient, puis ils avaient quitté la boutique pour ne plus jamais y remettre les pieds.

La seconde fois où elle avait revu Aria, c'était au Manoir Malfoy. Elle n'aurait jamais cru possible, n'ayant pas grandi dans l'ancien Manoir Shafiq, celui-ci ayant été vendu, qu'une demeure pouvait être aussi grande. Une invitation à un banquet que les Shafiq, pour une raison qu'elle ignorait encore, n'avaient pu refuser.

Elle s'y était sentie mise à l'écart, observant les autres enfants qui s'amusait à reproduire les comportements de leurs aînés. Elle n'avait pas su participer, n'avait pas joué. Elle ne savait plus si Aria s'y était prêtée, mais Merlin l'y avait vue. Quoi d'étonnant à cela en sachant qu'elle possédait du sang Malfoy dans les veines ? Elle l'imaginait bien, toutefois, se mettre à l'écart. Un souvenir peut-être faussé par ce qu'elle percevait de la sang-pure aujourd'hui.

Et puis, il y avait eu Poudlard. Le fait qu'elles y entrassent toutes deux la même année avait créé un drôle d'espoir pour la sorcière. Elle avait cru bêtement que le fait de ne plus avoir le regard de ses parents posés sur elle lui permettrait de l'approchait. De se rapprocher de cette autre fille qu'elle avait perçu, dans ses souvenirs, comme tout aussi solitaire qu'elle l'avait été. Le fait qu'elles fussent envoyées dans deux maisons différentes n'avait d'ailleurs pas arrêté Merlin.

Elle s'y était essayée, pour se heurter à un mur. Puis à des brimades. Puis à des humiliations. Des années d'espoir qui n'avaient pas lieu d'être. Ce qu'elle refusait de comprendre, encore aujourd'hui. Ce qu'elle n'acceptait pas comme évidence. Un aveuglement. Un de plus. Peut-être parce que c'était lui qui lui avait permis de se rapprocher des jumelles Carrow.

N'était-elle pas devenue maîtresse dans l'art de se mettre des œillères, de toute façon ? Les mots lui avaient presque échappé. Aussi rapidement et facilement qu'elle pouvait envoyer un maléfice dans un duel, les termes choisis ne l'étaient pas au hasard. Pourtant, elle ne s'en serait pas cru capable en premier lieu.

Ce n'était, bien sûr, pas la première fois qu'il lui arrivait de faire un acte qu'elle jugeait pourtant répréhensible, aussi facilement qu'elle pouvait offrir un bonjour et un sourire à ses camarades. Comme quand elle pouvait s'en prendre violemment à un élève, qui avait osé blesser l'un de ses protégés, d'une manière ou d'une autre. Comme quand elle pouvait être vicieuse, particulièrement dangereuse, si on osait toucher à un cheveu de son frère.

Une question d'apparence simple, mue par une curiosité jugée insatiable. Un ton presque rêveur. Elle l'avait suivie, accélérant la cadence de ses pas en même temps que les siens, comme si elles étaient de bonnes amies depuis toujours. Ce n'était pas le cas. Un songe avorté. Deux mondes parallèles qui possédaient des ressemblances, mais bien différents.

« Non, je voulais juste te demander... Pourquoi est-ce que tu es une pareille petite conne ? »

L'effet papillon. Chaque acte entraîne une chaîne de conséquences qu'il faut supporter, comprendre. Merlin le savait. Il lui arrivait d'ailleurs souvent de se le rappeler. Pour cause : pour enchanter correctement un objet, il fallait connaître parfaitement le fonctionnement des sortilèges pour trouver les bons à utiliser et éviter des conséquences désastreuses.

Comme pour Monsieur Noodle, faisant encore les recherches nécessaires pour lui offrir la conscience que l'objet méritait aux yeux de sa propriétaire. Comme pour la console de Porter. Il lui arrivait encore de faire des erreurs, comme c'était le cas pour cette dernière.

Comme c'était le cas aujourd'hui. Elle n'avait pas mesuré la portée de ses mots. Elle n'avait pas calculé les possibles interactions suivantes. La réaction de Beurk. Le fait qu'elle se figeât dans le corridor comme si elle venait de lui envoyer un maléfice de saucisson particulièrement bien réussi.

« Eh, fais gaffe ! »

Le fait qu'un étudiant pressé de manger lui rentre dedans sans prendre la peine de s'excuser. Elle eut presque un mouvement d'humeur vers le garçon. Presque. Jusqu'à entendre le rire de la blonde. Jusqu'à comprendre son interrogation.

« P... Pardon ? »

Le bégaiement de l'autre sang-pure la surprit plus que le manque de consternation de sa part. Arrêtée depuis quelques secondes déjà, son regard dévisageant sans s'en rendre compte la blonde, elle l'observa faire sa scène sans réagir.

« Mais regardez-là, c'est qu'elle se rebelle, la Shafiq ! »

La surprise laissa rapidement place à une forme de détachement qu'elle connaissait bien. Confortable. Si les rares élèves restant, les moins pressés, leur lançaient des regards en coin en passant, ça ne dérangeait pas Merlin. Elle avait appris depuis longtemps à ne plus vraiment faire attention aux murmures et rumeurs.

Elle n'était qu'une donnée, bien moins importante, à ses yeux, que certains pouvaient le croire. Son instinct de protection exacerbée pour ses proches venait de là. À côté d'eux, elle s'imaginait insignifiante. Ce n'était pas elle, petite princesse sang-pure, qui allait changer le monde, le faire évoluer.

Ce fut avec cette étrange pensée en tête, cette froideur indistincte qui la caractérisait parfois revenue se draper autour d'elle, qu'elle suivit du regard la Serpentard se rapprochait de sa position. Cette dernière laissa émerger à son tour un sourire en coin qui puait l'ironie, à l'image des mots qui allaient franchir ses lèvres.

« Et toi, Shafiq, pourquoi tu es une pareille petite sainte ? »

C'était une défense commune. Retourner une question pour éviter de répondre. Un jeu pouvant être inépuisable et pourtant si fragile. Est-ce que Merlin souhaitait qu'il s'arrêtât ? Une question complexe. Au fond, c'était la première conversation aussi longue qu'elle avait avec cette fille depuis des années. Et, aussi futile que cela pouvait paraître, elle n'avait pas envie d'y mettre un terme aussi vite.

D'une certaine façon, elle en avait besoin. Elle avait toujours eu besoin d'Aria. Cette dernière, sans le savoir, sans s'en douter, confortait Shafiq dans ce qu'elle voyait comme de bons choix. Elle se devait de lui reconnaître : c'était en partie parce qu'elle existait, par pur instinct de contradiction, qu'elle continuait à avoir la force de supporter les méandres de son labyrinthe social. Le dédale dans lequel elle évoluait, qu'elle avait consolidé autour d'elle.

Ce n'était pas de l’hypocrisie pour autant, comme on pourrait y songer de prime abord, parce qu'elle appréciait véritablement les personnes avec qui elle passait du temps. Elle aimait les conversations intéressantes qu'elle parvenait à dénicher avec certains de ses camarades. Souvent des êtres que bons nombres de personnes pensaient être sans intérêt.

Luna et sa sagesse qu'elle trouvait exceptionnelle. Kyle et sa technologie moldu qu'elle voulait comprendre et faire fonctionner. Joris et son véritable don de voyance. Sessho et sa culture à la fois si proche et si lointaine de la sienne ; bien que, pour lui, c'était différent, peut-être parce qu'il savait.

« C'est censé être une insulte ? »

Un réflexe ancré en elle. Elle s'était redressée, reprenant ce port détestable qui était le sien. Celui de la princesse. Celui de la sang-pure. Celui qui hurlait sa supériorité au visage de son interlocuteur.

Un maintient qu'elle avait naturellement, qui s'était dissipé quelques secondes sous le poids des mots et de la distance émotionnelle qu'elle avait instinctivement placé entre elle et sa situation. Une allure. Son élégance nonchalante disparue pour mieux se réinstaller avec la même subtilité d'une brise venant titiller des braises, attiser les flammes.

« Question idiote. Venant de toi, j'imagine que oui, mais arrête-moi si je me trompe. »

Merlin joint ses mains dans son dos, dans une posture ouverte. Inconsciente devant sa propre provocation. Une impulsion machinale, déraisonnable.

« Qui sait ? Peut-être que je me fourvoie et qu'au fond, c'est de l'admiration ? »

Le sarcasme n'était pas l’apanage des vipères. L'aiglonne avait prononcé les derniers mots comme si elle s'attendait réellement à une réponse positive. Elle n'avait pas besoin d'être devin, ironie quand tu nous tiens, pour connaître la réponse de l'empathe à ses mots.

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Dim 19 Avr 2020 - 17:29
Coup de jus
Crois-moi, cette tension electrique est immuable. Crois-moi, ou prouve-moi le contraire.

Lundi 25 Septembre 1995

Aria s’était toujours sentie à mille lieux de l’univers dans lequel elle vivait. Comme si sa réalité était en décalage constant avec celle des autres. Comme si elle ne parlait pas le même langage qu’eux. Comme si elle ne voyait pas les mêmes couleurs. Comme si elle n’entendait pas les mêmes sons. Comme si elle ne ressentait pas les mêmes choses. Comme si sa tête était enfouie dans l’eau et qu’elle observait sa surface depuis ses profondeurs. Les images étaient floues, les bruits étaient étouffés. Son corps flottait parmi les vagues. Et il en avait toujours été ainsi.

Petite, ses yeux étaient comme deux bulles bleues qui voulaient capturer le monde qu’elle découvrait à chaque regard. Ce monde étranger. Ce monde qu’elle ne comprenait pas. Puis, les bulles devinrent des cristaux de larmes, des opales sans reflets, des lunes noires. Ce monde était trop souillé pour pouvoir être capturé dans une bulle.

Alors, elle continuait à regarder mais sans jamais comprendre. Et plus elle regardait, plus l’incompréhension changeait de forme. Plus elle regardait, plus la haine commençait à la ronger.

Pourquoi faisait-il tous semblants ?

L’interrogation d’une vie. La question sans réponse. L’énigme irrésolue. Pour la gloire ? Pour la fortune ? Pour les affaires ? Pour le succès ? Pour l’admiration ? Pour le respect ? Pour l’acceptation ? … Pour l’amour ?

Mais qui étaient-ils alors, à force de tous faire semblant ? L’amour existait-il seulement ?
Et elle, qui était-elle ? N’avait-elle pas fini, elle aussi, par se joindre à cette mascarade ?

- Et toi, Shafiq, pourquoi tu es une pareille petite sainte ?

Merlin Shafiq. L’incarnation même de l’absence de ces réponses. L’écho sans fin de ce monde princier et pur auquel Aria avait cru un jour. Ce jour si lointain enterré sous la stèle de son enfance. Quel était le secret de Shafiq ? Celui qui était enfoui si profondément dans l’obscurité de ses non-dits qu’il en était indiscernable ? Ne se lassait-elle jamais de jouer à la fille parfaite ? Ne se lassait-elle jamais de faire autant semblant ?

Aria ne se l’avouerait probablement jamais, mais une part d’elle avait envie de découvrir l’univers de l’autre Sang-Pur. Il avait l’air doux, innocent et serein. Comme le monde qu’elle aurait voulu capturer dans une bulle. Mais elle n’était plus enfant depuis trop longtemps déjà, elle n’y croyait plus. Ses espoirs s’étaient éteints.

- C'est censé être une insulte ? l’interrogea l’Aiglonne en se redressant.

Peut-être espérait-elle contrer les attaques de la Vipère en bombant ainsi le torse ? Le rire amer d’Aria résonna une fois de plus dans sa gorge. Bien sûr, Miss Parfaite était satisfaite de sa réputation. Elle se confortait dans ses allures de vertueuse petite sorcière. Aria était-elle la seule à en avoir la nausée ?

- Question idiote, enchaîna-t-elle sans attendre de réponse de la blonde. Venant de toi, j'imagine que oui, mais arrête-moi si je me trompe.

- Bravo, tu es douée en déduction.

Aria joignit ses mains devant elle pour l’applaudir moqueusement.

- Une vraie Serdaigle !

Pas de doute. Avec l’air suffisant que lui donnait son menton levé de la sorte, Shafiq portait décidément bien ses couleurs. Mais qu’elle fasse attention, un peu plus et le bleu pourrait virer au vert.

- Qui sait ? reprit-elle de son éternel ton indifférent, insensible à toute remarque. Peut-être que je me fourvoie et qu'au fond, c'est de l'admiration ?

Trop tard. La couleur des Serpents venait de ronger sa cravate. À ce rythme, Aria allait finir par lui tendre l’écusson de sa maison avant de pouvoir aller manger.

- L’admiration, hein ? C’est donc ça qui t’intéresse ?

Bien sûr, Aria savait reconnaître le sarcasme. Son précieux allié n’avait plus de secrets pour elle. Mais ce qu’elle avait appris de lui, aussi, c’était qu’il pouvait bien souvent cacher la vérité dans l’ombre de ses faux-semblants. Alors, il fallait rejoindre la danse, titiller, creuser toujours plus profond. Dans l’espoir de la déterrer, cette vérité. Se joindre à la partie de poker, tenter le bluff pour faire se coucher l’autre. Croire au faux pour en extraire le vrai.

Mais, Aria jouait-elle seulement encore ? Ne s’était-elle pas trop accrochée à l’espoir d’avoir trouvé une faille pour s’engouffrer aveuglément dedans ? Elle soupira. Lasse. Depuis le temps, elle allait devoir finir par l’admettre : il n’y avait rien à tirer de Shafiq. Pas un sentiment mauvais ne décidait de se pointer à la surface, jamais. Elle laissait inlassablement les coups glisser sur sa peau épurée. Il n’y avait rien à tirer. Peut-être parce qu’elle était encore plus vide que ce qu’Aria pensait ? Et peut-être que l'admiration était bel et bien tout ce qui l'intéressait...

- Comme tous les autres, en fait, ajouta l’empathe en baissant les yeux dans un murmure de déception.

Était-ce alors là que s’achevait le mythe de Merlin Shafiq ? Aria abandonnait-elle la fouille de ces terres inconnues ? Probablement. Car l’évidence venait alors de lui surgir à la figure avec la brutalité d’une gifle. Shafiq n’avait rien de spécial. Elle faisait juste mieux semblant. Mais, au fond d’elle, ses ambitions étaient semblables à celle de tous. Que ce soit l’admiration ou autre chose, peu importait. Elle vivait au travers du regard des autres. Comme tous ces autres.

Comme elle, Aria, peut-être. Après tout, n’était-ce pas elle qui nourrissait au fond d’elle le désir d’être un jour reconnue pour ses compétences, ses capacités, ses pouvoirs ? Que l’on oublie son sang et sa naissance pour simplement l’observer faire ses preuves ? Mais quelles preuves ? Stupide désir bercé de désespoir. Elle ne se faisait pas d’illusions. Les Sangs-Purs ne changeraient pas. Ni leurs regards sur elle, ni leur manière d’évoluer en société. Elle les détestait, elle ne voulait pas leur ressembler, elle ne voulait pas faire partie de la masse. Même si on lui avait toujours dit qu’il devait en être ainsi.

À ce moment-précis, le port altier de Shafiq lui rappela tout ce qu’elle ne voulait pas être. Alors, elle releva la tête, s’approcha de son oreille et chuchota sur le ton de la confidence :

- Petit conseil : tiens-toi plus droite encore. Avec cette raideur de statue, tu gagneras peut-être ta place dans un musée et peut-être qu’alors, ça me donnera l’envie de venir t’admirer.

Sur ces dernières paroles, et sans négliger de heurter l’épaule de l’autre Sang-Pur sur son passage, elle partit.


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Aria Beurk
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Aria Beurk

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Ecoute cette médolie troublante.
C'est l'eau qui chante.
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Lun 20 Avr 2020 - 16:27

COUP DE JUS

Lundi 25 Septembre 1995,

Elle avait toujours eu besoin d'Aria. Petite, elle avait été son mystère. Une envie de découvrir son monde, de partager sa vie. Elle n'avait pas eu le courage de lui adresser la parole. Elle avait eu peur du regard de son père, à la boutique, puis elle s'était sentie à l'écart chez les Malfoy et n'avait osé parler à personne. 

C'était un rêve. Une amie imaginaire qu'elle s'était inventée, avec qui elle s'amusait dans sa demeure, quand elle se décidait à se comporter comme une enfant de son âge. Loin des regards.

C'était intime. Une énigme qu'elle essayait de résoudre, lui inventant un caractère et des mots d'une sagesse d'un monde inconnu. Une voix douce et basse. Un rire clair et discret. Elle savait déjà, à l'époque, qu'elle était à mille lieus de la réalité. Ça ne l'avait pas empêché de continuer.

Sa beauté pâle, son corps d'une trop grande finesse et sa longue tignasse d'un blond polaire lui avaient donné un air d'esprit d'un autre temps, d'une autre époque. 

Ce qui l'avait pourtant le plus marqué, c'était son regard. Merlin l'avait perçu lointain, mais fasciné. Presque éteint, mais avec une pointe d'émerveillement qui l'illuminait. Une extase distante, insolite, inexplicable. Ça avait offert à la fille Beurk un côté fantaisiste que la future Lady aurait aimée découvrir en profondeur. Partager son univers. Voir le monde comme l'autre sang-pure avait l'air de le percevoir.

Où était passée cette Aria ? Celle qu'elle avait contemplée ? Avait-elle seulement existé ? Avait-elle été, réellement, comme Merlin l'avait estimé dans ses songes enfantins ?

« Question idiote, affirma Shafiq sans arrière-pensée. Venant de toi, j'imagine que oui, mais arrête-moi si je me trompe. »

Si c'était le cas, cachée derrière des masques, son hostilité, son sadisme, son âpreté, son amertume, son ironie, sa moquerie... Subsistait-elle ?

« Bravo, tu es douée en déduction. »

Elle avait toujours eu besoin d'Aria. L'espoir avait remplacé l'imagination. Sa famille ne serait pas présente à Poudlard. Elle allait pouvoir l'approcher, essayer de sympathiser. Avec la bonne volonté, elle pourrait découvrir le domaine de cette souveraine. Sa précieuse bulle, ce royaume qui n'appartenait qu'à elle, capturé dans ses topazes bleutées. Merlin avait voulu qu'Aria fût son Arthur.

« Une vraie Serdaigle ! »

Son désir, teinté d'optimisme, était-il toujours permis ? Les années avaient passé. Elle n'avait jamais pu l'atteindre, n'avait jamais su quoi lui dire pour lui faire comprendre son souhait. 

À la place, elle avait trouvé deux amies, les jumelles. C'était une chance, car elle n'aurait d'elle-même jamais abordé des filles portant le nom Carrow. Des demoiselles observatrices qui avaient compris, qui avaient saisi avant elle qu'elle n'y parviendrait pas. Deux corps pour une seule âme. Une âme qui avait voulu sauvegarder la sienne.

Elle n'avait plus envie d'être protégée. Elle ne voulait plus se blinder. C'était mu par l'envie d'avoir une explication qu'elle l'avait suivi. Elle pouvait bien se l'avouer maintenant. Une réponse douloureuse, insupportable pour l'enfant dans sa cage, mais nécessaire.

« Qui sait ?, souffla-t-elle de son éternel ton indifférent, le sarcasme roulant sur sa langue avec une facilité déconcertante. Peut-être que je me fourvoie et qu'au fond, c'est de l'admiration ? »

Perdu dans les profondeurs de son esprit, l'écho des applaudissements d'Aria lui arriva à retardement. Ses répliques suivirent. Trop tard. 

« L’admiration, hein ? C’est donc ça qui t’intéresse ? »

Elle avait toujours eu besoin d'Aria. À présent qu'elle se retrouvait face à elle, sa réplique l'extirpant des merveilles de ses rêveries, Merlin eut une étrange sensation. Désagréable. Ses sourcils se froncèrent délicatement. 

Elle s'apprêta à ouvrir la bouche, mais finit par s’astreindre à garder les lèvres clauses. Elle aurait voulu lui dire que, non, ce n'était pas l'admiration qu'elle recherchait. Une vérité. L'admiration ne l'intéressait pas. Pas vraiment. Pas venant d'elle.

L'expression de la blonde lui fit l'effet d'une douche froide. D'une gifle. Dans ce regard qu'elle appréciait tant, secrètement, malgré la noirceur qui avait remplacé l'émerveillement, elle lisait la déception.

« Comme tous les autres, en fait... »

La voix de la Serpentard était à peine audible et pourtant, la Serdaigle crut qu'elle venait de lui hurler au visage. Elle se crispa. Pourquoi avait-elle cette impression, insupportable, d'avoir fauté ? Son cœur s'emballa et une boule se forma au niveau de sa gorge. Elle déglutit, difficilement. Une, deux fois. Elle ne disparut pas.

Elle ne put qu'observer sa camarade se rapprocher d'elle, se plaçant sur la pointe des pieds pour venir murmurer à son oreille, comme si elle s'apprêtait à lui offrir un secret bien gardé. Comme si elle ne voulait pas que les autres élèves pussent l'entendre. 

Des autres qui n'existaient plus, à présent. Elles étaient seules dans ce corridor. Beurk n'en avait pas besoin. C'était du théâtre, une représentation de ce que Shafiq voyait comme de la douleur. Une souffrance qu'elle voulait partager.

« Petit conseil : tiens-toi plus droite encore. Avec cette raideur de statue, tu gagneras peut-être ta place dans un musée et peut-être qu’alors, ça me donnera l’envie de venir t’admirer. »

Il n'y avait plus d'avertissements. Ce n'était plus un jeu. C'était un coup de poignard en plein cœur.

Elle était venue chercher des réponses. Savoir si, par Rowena, cette fillette n'avait été qu'une illusion, comme elle s'en était finalement doutée, comme elle l'avait même admis à l'insu de ses réflexions. L'espoir n'était plus permis, elle devait ouvrir les yeux pour pouvoir avancer, grandir, mûrir. Les rêves d'enfants n'avaient pas leur place dans le monde impitoyable des adultes.

Alors pourquoi ses espérances de petite fille se réveillaient-elles ? Une conviction pesante, cruelle.

La boule dans sa gorge se renforça quand sa consœur se détourna. Son malaise se fit sensiblement plus violent. 

Elle se renforça quand elle frappa son épaule de la sienne pour la dégager de son passage. Elle avait l'impression d'être une poussière accrochée à des robes célestes, chassée par les doigts implacables de la reine. 

Elle se renforça quand les talons de son amie imaginaire claquèrent dans le couloir, quittant la sphère, l'obscure bulle dans laquelle elles avaient échangé quelques mots. Une prison, des barreaux qui l'empêchaient d'avancer, de la rattraper ; ils l'entravaient, la contraignaient à la voir s'éloigner.

Elle se renforça, puis elle explosa. Un unique sanglot.

« Je... »

Sa voix était tremblante. Impuissante. Elle força sur ses cordes vocales. Aria devait l'entendre. Elle devait comprendre. Sa sincérité reprenait le dessus, finissait toujours par prouver sa force. 

« Je ne cherche pas ton admiration, ni celle des autres ! »

Ce n'était pas un hurlement, ni même un cri. Toujours chevrotante, mais bien dosée, elle portait dans le couloir que l'autre sang-pure allait fuir, mais qu'elle n'avait pas encore quitté.

« Je veux juste être reconnue pour qui je suis réellement, prouver que je peux exister par moi-même et pas à travers mon nom ou mon sang ! »

La douleur qu'elle ressentait, qui n'était pas physique, n'était pas vraiment dû aux dernières paroles de l'empathe. C'était l'expression qu'elle avait eue, mue par une perception que la plus âgée jugeait faussée, qui la blessait. Une brûlure idiote, aveugle. 

Les perles dévalaient ses joues. Une cascade salée qu'elle n'eut pas la force de maîtriser.

« Et je voulais être ton amie ! »

La dernière tirade lui échappa. La sincérité ruisselante dans le torrent d'émotions qui la submergeaient la surprit. Choquée, elle se figea sur place.

Elle aurait voulu voir si Aria s'arrêtait. Si elle se retournait. Si elle lui adressait de nouvelles paroles, même froides, moqueuses, acharnée dans son inflexible cruauté. Une reine de cœur dans un royaume qui aurait dû être merveilleux.

Elle aurait voulu faire face, digne héroïne d'un roman cauchemardesque où la folie et l'admiration s’entrelaçaient. Elle n'était pas dans une histoire et elle n'était pas son protagoniste. Elle n'était qu'une adolescente parmi tant d'autres dans une école trop grande.

Elle se retourna sèchement et, lâche, refusant d'être confrontée à sa franchise, elle courut. Elle ne s'arrêta qu'après avoir claqué deux portes : celle qui menait à la salle d'Art et Lecture et la seconde, qui lui permit de s'enfermer, dans la pièce adjacente où elle pouvait peindre. L’œuvre que Sessho avait sauvé plus tôt dans le mois était accrochée au mur et l’accueillait, narquoise.

Ici, elle se laissa glisser contre un mur. Elle remonta ses genoux contre sa poitrine et enfouit son visage dans ses bras croisés. Les nuages pleuraient. Les sources dans ses opales baignées refusaient de se tarir.

Merlin avait toujours eu besoin d'Aria. Elle en aurait encore besoin, elle le pressentait. Elle n'aurait pas le choix, elle devrait supporter son regard. Supporter sa couardise, Supporter le jugement.

La petite fille, avait-elle un jour existait ? Merlin le croyait. Pensait-elle pouvoir la revoir, espérer lui sourire, rire en sa compagnie, découvrir son univers ? Elle en doutait. Le songe avait été corrompu, la noirceur s'était installée. D'un rêve enfantin, il devenait le cauchemar de l'adolescente.

Derrière la cage, elle avait vu la fillette. Elle n'avait pas pu l'approcher. Elle n'avait pas su l'affronter. Avec sa solitude, compagne d'infortune, elle se fit la réflexion qu'elle n'y arriverait jamais.

La douleur redoubla d'intensité.

FIN
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