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In the dark I see green | Dimanche 1 octobre 1995 | Aria Beurk

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Ven 24 Avr 2020 - 18:44

In the dark I see green
Aria Beurk
La magie, c'est quand même quelque chose d'extraordinaire. Je vous arrête tout de suite, je ne parle pas de l'illusionnisme. Oui, c'est génial, ça me permet d'émerveiller les personnes que je rencontre, de les faire vivre des expériences inédites qu'ils ne comprennent pas, mais ça n'a absolument rien à voir. Moi, je vous parle de la magie avec un grand M. Je vous parle de la sorcellerie. De la vraie. Celle avec une baguette, qui sans la moindre logique, nous permet des folies inconcevables pour un esprit cartésien.

Depuis que j'ai appris que je suis capable de telles prouesses, j'ai voulu en découvrir plus, toujours plus. Comprenez-moi ! J'ai été littéralement balancée dans un monde que je n'aurais même pas osé imaginer du jour au lendemain. Dans ce monde, il est possible de faire des potions, de voler sur un balais, de voyager d'un bout à l'autre d'un pays juste en tournant sur soi-même. C'est fantastique !

Bien sûr, je sais que tout n'est jamais tout blanc ou tout noir. Je l'ai appris à la dure. La vie ne m'a pas fait de cadeau. Bien après la mort de mes parents, quand le professeur McGonagall est venue me trouver pour me livrer ma lettre, j'ai été reniée par la famille qui me restait. Depuis, je dois travailler tous les étés pour avoir une chambre, de quoi manger et m'acheter mes fournitures scolaires. Je n'ai rien de neuf, d'ailleurs. Tout est toujours d'occasion, même si ça ne me dérange pas vraiment.

Avec le temps, j'ai aussi compris que cet univers, pourtant si phénoménal, est arriéré. Leur monde et mode de pensée n'évoluent pas. Leur politique est une vaste blague. Les vieilles et riches familles gouvernent comme les grands seigneurs de jadis. Les Lord ne se soucient pas du bien-être mental de leurs sujets et de leurs enfants. Ils ne font pas attention à leurs envies, à leurs besoins et c'est à cause de ça, à mes yeux, que certains sombres dans les abîmes de leur folie.

Les larmes d'une blonde un jour de pluie.

In the dark I see green | Dimanche 1 octobre 1995 | Aria Beurk 200428122044787862

Après une énième vérification, Eileen se releva lentement de son lit. Elle ouvrit sa malle avec toutes les précautions nécessaires pour ne pas faire de bruit, attrapa ses vêtements et se dirigea vers la salle de bain. Ses camarades de dortoir dormaient encore comme elle s'en était assurée, ce qui lui laissait le champ libre pour son escapade. Il fallait dire qu'en dehors d'elle-même et des jumeaux Weasley, il y avait peu de chance de trouver quelqu'un d'autre d'éveiller à une heure pareille un dimanche matin. Il n'était pas encore six heures, le petit-déjeuner ne serait pas servi avant plusieurs heures et le couvre-feu n'était même pas encore levé. Des détails sans importance pour la née-moldue. Aujourd'hui, c'était le dernier jour où elle pouvait passer du temps en compagnie d'Aria sans trop de risques, si elle s'y prenait correctement. Elle ne voulait pas rater l'occasion.

Après s'être habillée, tout en jean comme à son habitude, en dehors d'un t-shirt rose pâle à l'effigie des Guns N' Roses, la Gryffondor manqua de trébucher en essayant de mettre ses Doc Martens. Elle parvint à se rattraper in-extremis au mur à côté du lit de Tabata. Une goutte de sueur gelée glissa le long de sa colonne vertébrale et la fit déglutir. C'était un miracle qu'elle n'eût réveillé personne vu le vacarme qu'elle venait de faire, mais elle n'allait pas s'en plaindre. Elle était prête, elle pouvait partir.

Elle commença par descendre les escaliers qui menaient à la pièce de vie décorée de rouge et d'or, s'apprêta à réveiller la gardienne de l'entrée sans aucune forme de pitié, mais elle se figea sur place. La culpabilité s'invita dans une étreinte que la demoiselle n'apprécia pas, lui faisant pincer les lèvres d'agacement. Elle avait bien le droit d'avoir ses secrets, n'est-ce pas ? Pour son Jiminy Cricket personnel, il fallait croire que non.

Faisant volte-face, la trublionne remonta les marches quatre à quatre jusqu'à arriver devant la porte menant à sa chambre. Elle l'ouvrit doucement, essayant de ne pas faire grincer le bois, puis attrapa plume et parchemin dans sa valise encore ouverte. Elle avait oublié de la fermer, ce qui lui servait pour une fois. Elle griffonna quelques mots, puis déposa la courte missive sur la table de nuit de sa meilleure amie. Voilà, maintenant, elle pouvait s'éclipser.

Si la Grosse Dame râla de se faire surprendre par la Queen à la carte, cette dernière ne s'en soucia pas une seconde. Elle continua sa route en courant, jusqu'à se rendre dans les cuisines où, essoufflée, elle demanda un repas à emporter. Les elfes furent ravir de la servir. Elle n'appréciait pas l'idée de les surcharger de travail, mais les petites créatures avaient tellement l'air d'aimer ça qu'elle s'en laissait attendrir. Du coup, ce fut avec un panier rempli pour un régiment qu'elle les quitta.

Il ne restait plus qu'à s'enfoncer dans les cachots. Les bribes du sommeil commençant réellement à s'en aller, se fut avec toute son énergie retrouvée qu'elle commença sa course. Tourner à droite, puis à gauche, soulever la tapisserie et se glisser dans le passage secret. À peine sortie dans les plus sombres corridors du château, qu'elle se retrouva à devoir se jeter dans un placard à balais pour laisser passer le professeur Rogue sans se faire voir — elle ne savait pas si le couvre-feu était terminé. Elle reprit sa route dès qu'elle l'entendit s'éloigner et put enfin se rapprocher de sa destination. Il ne restait plus qu'à trouver la bonne teinture.

Là ! Un vieillard qui essayait de séparer les têtes qui se chamaillaient d'un runespoor. Cette peinture était d'un ridicule. D'ailleurs, en y repensant, c'était parce que cette drôle d'oeuvre existait qu'elle était capable de retrouver le salon abandonné. En d'autres circonstances, elle n'en aurait jamais plus eu l'accès. Un autre de ses secrets, qu'elle avait gardé jalousement. Poudlard recelait de mystères extraordinaires qu'elle aimait remarquer, garder et pour une exploratrice en herbe comme elle, c'était le paradis.

Elle remercia aussi mentalement Rusard. Le concierge, durant sa troisième année, avait bien failli lui tomber dessus au beau milieu de la nuit. Elle ressortait tout juste de nombreuses heures d'entrainement pour sa maîtrise des mélanges et, avec la fatigue, son cerveau lui avait refusé toute réflexion censée. Elle avait couru jusqu'à en perdre haleine et était tombé sur une vieille porte verrouillée dans les souterrains, la serrure rouillée par le temps et le manque d'entretien. C'était le stress d'être découverte qui l'avait poussée à sortir sa baguette pour lancer le charme Alohomora. Dès que le verrou s'était ouvert, elle n'avait pas cherché à savoir s'il y avait un quelconque danger et s'était précipité à l'intérieur, ce qui lui avait sauvé la mise.

Il lui avait fallu un an pour retrouver son emplacement exact et plusieurs mois supplémentaires pour remettre le séjour en état. Avec les siècles, la poussière s'était logé partout, même dans des endroits improbables. Il lui avait fallu réparer certains meubles brisé ou rongé par les mites. Elle avait également dû récupérer des ingrédients à garder ici.

Maintenant qu'elle y était, il ne restait plus qu'à pénétrer dans l'antre. Il s'agissait d'un mélange entre un salon et un laboratoire. La pièce était plus petite que la salle commune de Gryffondor, même si la disposition pouvait y faire penser, à la différence que les ornements étaient celles de Serpentard. Les carreaux avaient été remplacés par des vitraux donnant directement sur des profondeurs. Elle ne savait pas si c'était une illusion ou si la magie permettait réellement de voir l'intérieur du lac noir, mais elle crut voir l'ombre d'un tentacule géant passer devant l'une des fenêtres et ce n'était pas la première fois. Le vert, bien sûr, était clairement en dominance, les reflets de l'eau dansant sur les murs de pierre sombre, en parallèle au feu de la cheminée qui était d'une couleur factice. Pour terminer, dans le fond, sur une petite estrade taillé dans la roche, le contenu d'un chaudron mijotait doucement.

Aria se sentirait chez elle ici. Elle connaissait suffisamment la demoiselle pour savoir que la décoration devrait lui plaire — pas qu'elle y fut pour quelque chose, mais elle n'allait pas cracher sur sa chance. Il ne restait plus qu'à attendre la concernée et espérer qu'elle ne se trompait pas.

Pour qu'elle pût entrer, elle laissa le battant entre-ouvert, tout en restant derrière, à l'affût du moindre bruit. Si elle entendait une personne arriver, elle vérifiait son identité. Si ce n'était pas la sang-pure, la porte était refermée. Avec l'apparence abîmée du bois, ça ressemblait de l'extérieur à un placard à balais tout ce qu'il y avait de plus standard. En outre, cette cachette était vraiment pratique.

Elle n'avait encore jamais parlé à personne de cet endroit. Elle ne savait pas si Aria le connaissait, mais elle ne l'espérait pas. Elle voulait lui faire partager cette découverte. Jusque-là, elle n'en avait jamais eu l'utilité, sauf pour ses expérimentations. La pièce lui offrait tout un attirail de maître des potions en dehors des ingrédients, il aurait été idiot de ne pas s'en servir. Elle avait un autre laboratoire, plus public, qu'elle avait elle-même emménagé. Néanmoins, si elle voulait être tranquille, ne pas être interrompue durant une préparation complexe, c'était ici qu'elle venait depuis qu'elle connaissait son emplacement.

Un emplacement qu'elle partageait, du coup, pour la toute première fois. C'était dans cette optique qu'elle avait envoyé un mot ensorcelé à la blonde dans la semaine. C'était durant un cours de potion, quand Severus ne l'assassinait pas du regard et était occupé à martyriser quelqu'un d'autre, pour une fois. Un petit oiseau en papier s'était posé sur le bureau de sa prétendue ennemie et s'était déplié.

Fais attention à ce que tu fais, sinon ta potion va être aussi ragoutante que ton nom.

Une attaque ironique, d'une certaine méchanceté, que la née-moldu ne pensait pas. Le bon enchantement révélait le véritable message qui lui indiquait le chemin à suivre pour la retrouver durant la mâtiné. Eileen avait juste oublié un tout petit détail dans ses explications. Elle n'avait pas précisé d'heure exacte. C'était pour ça qu'elle se retrouvait à poireauter derrière la porte. Si quelqu'un l'avait vu ? Il l'aurait pris pour une paranoïaque.

L'empathe finit bien sûr par arriver. La lionne se retint de lui sauter dessus pour l'enlacer, lui ouvrit la porte avec sa joie habituelle et referma après son passage. Elle laissa à son amie le soin d'observer l'environnement. Pendant ce temps, elle se détourna pour aller se laisser choir sur l'un des fauteuils, devant la petite table basse où était entreposé le petit-déjeuner qu'elle avait récupéré. Dès que son amie la rejoignit, essayant sans trop y parvenir de ne pas la fixer bêtement, elle lui désigna les mets dans le panier.

« J'espère que tu as faim, s'exclama-t-elle avec un sourire intense. Les elfes ont cru que je venais pour distribuer de la nourriture à l'intégralité du château. »

Une tentative d'humour assez gauche. Cela ne l'arrêta pas pour autant et, avec cet entrain si unique, elle se releva, commençant à tout déballer. Elle se figea après quelques secondes, cependant.

« À moins que tu aies déjà mangé ? »

Elle n'avait aucune idée du temps qu'elle avait passé ici à l'attendre. Elle braqua son regard dans celui de son secret, pinça les lèvres dans une moue ridicule et enchaîna.

« Maintenant que j'y pense... Une question me taraude : quelle heure est-il ? »

Vive et directe, King ne s’embarrassait pas de faux-semblants. Elle disait ce qui lui passait par la tête sans plus de réflexion et attendait les réponses. Le Choixpeau n'avait pas fait d'elle une disciple de Godric pour rien. Un choix judicieux.
FRIMELDA

Eileen M. King
Admin enragé
Eileen M. King

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Rêve ta vie en

COULEUR
• lilie
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Dim 26 Avr 2020 - 21:45
in the dark I see green
Le tendre murmure d'un secret, la delicate vision d'une cachette. Un instant invisible que l'on partage a deux. Oh douce hypnose, toi qui sais m'envouter, reste avec moi pour l'eternite.

Dimanche 1er Octobre 1995

Aria se réveilla tôt ce matin-là. Un cauchemar. Elle en faisait des fois. Mais rares étaient ceux qui la remuaient autant que celui-là. Dans le noir, ses yeux miroitants fixaient droit devant elle, incapables de laisser ses paupières les recouvrir de nouvelles visions du songe. Mais les sons, eux, persistaient. Un écho dans son crâne, intarissable. Des mots dont elle ne comprenait toujours pas le sens, l'origine. Et qui pourtant lui crachaient une réalité presque douloureuse au visage. Ces mots, pourquoi revenaient-ils la hanter plus d'une semaine après ?

« Je veux juste être reconnue pour qui je suis réellement, prouver que je peux exister par moi-même et pas à travers mon nom ou mon sang ! »

Miroir, miroir. Pourquoi était-ce le reflet de Shafiq qu'il lui montrait ? Elle, qu'elle avait cru si différente, lui était-elle en fait bien plus semblable qu'elle ne le pensait ? Leurs désirs profonds pouvaient-il se superposer sur une même image ?

« Et je voulais être ton amie ! »

Cet écho-là, le plus terrible, le plus perçant, le plus tremblant, elle ne le comprenait pas. Était-ce donc pour ça, que Merlin n'avait jamais été en colère après elle ? Malgré tous les sales coup que la Beurk lui avait fait ? Elle ne comprenait pas. Pourquoi vouloir être son amie ? Pourquoi ? Merlin qui était si populaire, pourquoi vouloir se lier à une solitaire ? Merlin qui était si bienveillante, pourquoi chercher l'affection d'une blonde antipathique ? Pourquoi ?

Aria ne voulait pas faire face à ces questionnements. Elle les avait fui jusqu'à maintenant mais dans l'obscurité, ils la rattrapaient. Elle se leva.

Elle était la première du dortoir debout, comme souvent. Elle regarda l'heure sur sa montre. 6h23. Le couvre-feu était levé, elle pouvait librement s'échapper dans les dédales du château. Elle ouvrit sa malle pour prendre des vêtements. Une note dépassait. D'un coup elle se souvint. C'était aujourd'hui ! Les souvenirs brumeux de son songe s'éclipsèrent aussitôt derrière le soleil radieux qu'apporta cette bonne nouvelle. Finalement, ce matin-là s'annonçait moins morne que prévu. Elle trépignait d'impatience.

Elle se coiffa et s'habilla rapidement dans l'obscurité du dortoir. Une chemise blanche boutonnée jusqu'au cou et rentrée dans un pantalon à pont noir recouvrant des bottines de la même teinte. Élégant mais stricte. Parfois, elle aurait bien aimé troquer ses vêtements de Sang-Pur contre ceux décontractés de la Née-moldue qu'elle s'apprêtait à rejoindre. Mais ça, elle ne l'avouerait jamais.

Avant de quitter le dortoir, elle jeta un œil au bocal opaque au pied de son lit. Un sortilège d'extension avait permis d'y créer un habitat de vie plus ou moins vaste pour son crapaud. Mais, loin d'elle l'envie de le garder constamment en captivité, elle l'emmenait souvent avec elle quand elle n'avait pas cours. Qu'en était-il ce matin-là ? L'emmenait-elle ? Et si jamais Eileen avait ramené Duchesse ?



Flashblack


Les larmes pleuvaient sur ses joues pâles. Des soubresauts agitaient ses épaules. Plic, ploc. La pluie non plus, ne s'arrêtait pas. Aria détestait cet endroit. Ce château plein de visages inconnus qui la maintenaient loin de chez elle, de son cocon. Loin d'une solitude réconfortante pour la confronter à une solitude éprouvante, sans refuge. Elle ne s'y faisait pas. Elle entamait sa troisième à Poudlard et ne gérait toujours pas les émotions qui inondaient son être. Depuis sa première année, elle s'isolait, elle avait rejeté tous ceux qui avaient voulu lui tendre la main. Plus elle se maintenait loin d'eux, mieux c'était. Moins elle ressentait. Plus elle contrôlait. Mais ils étaient trop nombreux, trop envahissants, trop humains. Et leurs émotions se faisaient trop présentes, trop étouffantes, trop intenses. Elle absorbait tout. N'en perdait pas une miette. Elle avalait sans un mot. Jusqu'à tout recracher dans un coin, loin des regards. Des sanglots qui ne s'arrêtaient plus.

Dans le coin de son champ de vision, une ombre. N'était-elle donc pas seule ? Elle se tourna. Un cri eu tout juste le temps de s'échapper de sa gorge quand elle vit le chat bondir sur Heinrich. Sa main se dirigea automatiquement en direction de sa baguette. Mais il sera trop tard.

Une autre silhouette apparut. Bien plus grande. Elle plongea devant la blonde. Attrapa le chat. Le crapaud bondit vers sa maîtresse. Elle l'attrapa de ses mains fébriles. Puis, ses grands yeux mouillés observèrent la brune. Tétanisée. Désemparée. Vulnérable. Reconnaissante.

Était-ce à ce moment-là que tout débuta ?

Il pleuvait. Le masque impassible d'Aria traînait dans la boue. Ses larmes la trahissaient. Heinrich venait d'être sauvé. Et l'autre élève souriait. Quelques mots de sa part. Les bons. De ceux qui allégeaient l'atmosphère. Qui ramenaient le soleil.

Oui, c'était à ce moment-là que tout débuta.



Oui, elle allait emmener Heinrich. Tant pis si Duchesse était là, elle le garderait auprès d'elle. Puis, de toutes façons, Duchesse était rarement là quand les deux sorcières se voyaient.

Son crapaud dans les mains, Aria sortit de la Salle Commune des Serpents. Personne dans les couloirs. Rien de plus anodin, un dimanche matin. Elle déplia la note que lui avait fait parvenir la Gryffondor au dernier cours de potions et exécuta le sort permettant de révéler les inscriptions cachées. Bifurquant d'un mot à l'autre, elle se laissa ainsi guider parmi les couloirs des cachots. Jusqu'à arriver devant une porte. Était-ce la bonne ? D'après le tableau qui lui faisait face, oui. Elle toqua.

Dans les éclats d'une lumière verte diffuse, le sourire étincelant de son amie l’accueillit. Eileen. Son secret. Mais, très vite, le regard opalin de la Sang-Pur se détourna d'elle. Quel était donc cet endroit ?

Aria avança dans la petite pièce parée de vert. Sublime. Elle observa les lieux silencieusement avec un émerveillement qui était presque étranger à ses traits. Elle relâcha Heinrich par terre puis, doucement, elle longea les murs, passa ses doigts délicats sur le rebord des meubles, détailla de ses prunelles chaque élément de la décoration. Les étagères, les fauteuils, la cheminée, le chaudron. Les vitraux. Comme ceux de sa Salle Commune. Offrant une vue hypnotique sur les abysses du lac. Elle déposa sa main sur la vitre froide. Cela voulait-il dire que désormais, cet endroit ne serait rien qu'à elles ?

Elle se tourna vers la Née-moldue avachie sur l'un des fauteuils, la regarda de ses yeux brillants et tout ce qu'elle parvint à prononcer fut :

- Woaaah...

Elle vint doucement la rejoindre et s'installa sur un autre fauteuil. Son regard dévia alors sur le festin qui les attendait. Eileen le remarqua aussitôt et s'empressa de déclarer :

- J'espère que tu as faim. Les elfes ont cru que je venais pour distribuer de la nourriture à l'intégralité du château.

Aria la regarda déballer le panier avec un sourire amusé. Ça faisait du bien de la retrouver. Tout autant que ça lui faisait mal de se dire que c'était la dernière fois qu'elle pourrait en profiter avant un certain temps. Si seulement Wyatt avait été renvoyée à la rentrée, ça aurait été tellement plus simple. Elle aurait eu la Queen à la Carte rien que pour elle et ce, pendant toute l'année. Toujours à l'abri des regards bien sûr, toujours en secret. Mais cette salle n'était-elle pas une promesse qu'elles se verraient plus souvent, au final ? Maintenant qu'elles avaient un véritable lieu de rendez-vous, une cachette établie, et plus de recoins douteux et aléatoires pour se retrouver. Peut-être.

- À moins que tu aies déjà mangé ? 

Aria secoua la tête. Non, elle avait été trop pressée de découvrir sa surprise pour faire un détour par la Grande Salle. Puis, son cauchemar lui avait aussi pas mal coupé l'appétit sur le coup.

- Maintenant que j'y pense... Une question me taraude : quelle heure est-il ?

Aria se mit à rigoler. Pas de son rire amer que nombreux connaissaient. Mais de son rire sincère, celui que seule Eileen avait l'art de faire résonner.

- Toi, je vais vraiment finir par t'offrir une montre, soupira-t-elle avec amusement. Puis... ça fera aussi office de remerciements pour – elle leva ses bras et les sépara en un arc de cercle autour d'elle – tout ça.

Elle lui sourit tendrement, avec gratitude. Ses yeux brillaient encore. C'était probablement l'une des plus belles surprises qu'on ne lui avait jamais faite. Elle voulait lui exprimer à quel point elle était heureuse, à cet instant précis, à quel point elle appréciait les efforts de son amie. Puis, sa présence à ses côtés, tout simplement. C'était sûrement grâce à elle que maintenant, elle supportait mieux son don. Avec Eileen, elle pouvait se délivrer de tout ce qui l'entravait. Se défaire du poids du quotidien. Oublier. Vivre. Mais elle ne sut pas comment exprimer toute cette gratitude qui fleurissait en elle, alors elle baissa les yeux vers sa montre et annonça :

- 7h08.

Elle se pencha ensuite vers la table basse et s'empara de l'assiette de pancakes. Elle en prit deux qu'elle déposa sur une seconde assiette puis les recouvrit de chocolat fondu. Elle attrapa des couverts et déclara :

- Bon appétit !

Elle commença à découper une première bouchée, penchée en avant, le dos droit. Puis, elle se rappela qu'avec Eileen, elle pouvait se débarrasser des bonnes manières que son éducation lui avait toujours inculqué. Elle changea donc de position pour se mettre en tailleur et abandonna ses couverts pour prendre les pancakes avec ses mains. C'était mieux ainsi. Avec un regard complice à l'adresse de celle qu'elle considérait comme sa meilleure amie, elle croqua dans son petit-déjeuner. Elle attendit toutefois de ne plus avoir la bouche pleine, pour demander :

- C'est aujourd'hui, donc, que ta petite fête va être annoncée au grand public ?

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Aria Beurk
Admin empathique
Aria Beurk

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Ecoute cette médolie troublante.
C'est l'eau qui chante.
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Mar 28 Avr 2020 - 0:16

In the dark I see green
Aria Beurk
Je crois que c'était sa tendance à l'exploration qui me fascinait le plus avec cette fille, mais surtout cette énergie débordante qu'elle avait l'air d'avoir tout le temps. Sérieusement, elle avait ce côté inépuisable qui finissait par me fatiguer à sa place.

C'était drôle, quand j'y repense. Elle ne s'arrêtait jamais. D'une certaine façon, elle me donnait l'impression d'avoir peur du temps. Comme si ça l'effrayait de ne pas en avoir assez. C'était évident qu'elle voulait tout vivre, tout voir, tout entendre, tout découvrir. Une jeune femme qui fonçait à toute allure et qu'il nous était impossible de freiner.

Une boule de joie ambulante. C'était une extraterrestre pour nous, parce qu'on avait tous nos moments de doute, nos peurs et nos pleurs. Elle ? Je ne l'ai jamais vu la larme à l’œil. Elle pouvait s'énerver et elle était assez flippante dans ses colères froides, mais ça ne durait jamais. Est-ce qu'elle se cachait quand elle allait mal ? Je ne pense pas. Elle n'avait pas peur du regard des autres, alors pourquoi l'aurait-elle fait ?

Ouais, c'était plaisant de la voir vivre. Elle réchauffait nos cœurs à tous et elle disait ce qu'on pensait tout bas, sans la moindre crainte dans la voix. Au fond, c'était un peu une drogue, quand j'étais adolescent. Être un protagoniste ne l'intéressait pas, cependant, sauf peut-être pour quelqu'un. Avec le recul, je me dis que, ouais, elle voulait être son héroïne à elle.

In the dark I see green | Dimanche 1 octobre 1995 | Aria Beurk 200428122044787862

Flashback

Il pleuvait ce jour-là. Est-ce qu'Eileen aimait l'orage ? Oui. Est-ce qu'elle avait peur d'attraper froid ? Non. Est-ce qu'elle s'en servait pour se cacher et pleurer ? Oui. Est-ce que ça durait ? Jamais.

Ses larmes, c'était comme un torrent déchaîné qui ne demandait qu'à s'échapper, mais seulement les jours de pluie. C'était pratique pour garder le secret. L'eau avait été son premier complice.

Quand les mains de sa tante se posaient trop brutalement contre ses cottes, ses joues ou attrapaient ses cheveux pour pouvoir l'enfermer, elle attendait que les nuages londoniens pleurent. Quand c'était le cas, le trou dans le toit des combles, qui lui servait de chambre, l'invitait dans une danse. Le sel se mêlait à la pollution. Et quand un orage éclatait, sa voix s'y ajoutait.

Sa tante n'avait jamais été émerveillée. Elle ne voyait en elle qu'une gamine à problème, étrange, qu'il fallait redresser. Une délinquante en devenir qui ferait nombre d'erreurs, sauf si elle lui apprenait la vie à la dure. Comme si la mort de ses parents n'avait pas été assez difficile pour la sorcière.

Puis, un jour, un étrange chat s'était invité dans son univers. Le Professeur McGonagall lui avait expliqué qui elle était, mais l'avait également emmenée loin de la violence de sa dernière attache. Elle était émancipée pour le monde sorcier, mais il lui fallait travailler pour avoir une chambre. Tom avait été si bienveillant, si patient, pour lui apprendre à mélanger les cocktails. Un premier pas dans l'univers des mélanges. Un premier pas vers l'un de ses trop nombreux rêves. Sa première passion.

Elle avait pu, aussi, entrer à Poudlard. Un second pas, le deuil était fait. Elle n'avait plus droit à l'erreur, maintenant, et avec ses talents, elle put se faire une première amie. Elle ne lui parla pas de son passé et se contenta de lui dire où elle vivait. Elle était une orpheline, comme il y en avait tant. Son histoire valait la peine d'être racontée, mais elle s'y était refusée : c'était à elle.

Ses pouvoirs étaient une chance. La vie lui avait offert le plus beau des cadeaux, et elle ne pouvait et ne voulait pas la décevoir. Des pouvoirs qui lui avaient permis de trouver bien plus. Ils formaient un couple étrange, leurs âges avaient trop d'écart, leurs styles étaient trop différents, mais elle s'en foutait.

La métamorphose était devenue sa matière magique préférée. Un jour, elle demanderait à la dame de lui apprendre pour devenir une animagus. Néanmoins, c'était surtout l'art complexe de la préparation des potions et la façon dont l'homme les avait tous traité de cornichon qui l'avait le plus attiré. Il n'avait pas sa langue dans sa poche : comme elle et son véritable paternel, même si le ton n'était pas le même.

Ainsi, Poudlard était devenue une nouvelle maison et deux de ses directeurs s'étaient transformé en parents de substitution. Le reste des enseignants, ceux qu'elle côtoyait, formaient ses oncles et ses tantes. Une grande famille dysfonctionnelle, mais l'important était la joie que ces membres parvenaient à faire naître chez l'adolescente. À chaque fois qu'elle captait un regard emprunt de fierté, dirigé dans sa direction, elle sentait son cœur se gonflait d'allégresse.

Le Professeur Dumbledore aussi avait eu droit à sa place dans le cœur de l'illusionniste. Il était secret, un peu étrange, mais ils avaient déjà eu l'occasion de converser. Il fallait dire qu'elle avait atterri plus d'une fois dans son bureau après avoir voulu attirer l'attention de Minerva ou Severus.

Elle était une révoltée et il le savait, mais ne cherchait pas à l'arrêter. À la place, il s'était montré patient et compréhensif. Il l'avait toujours traité avec un grand respect, lui offrant de sages paroles qui avait su raisonner en elle, apaiser la cascade ardente qui menaçait de la submerger. Albus était un grand-père un peu particulier et elle ne comprenait pas toujours ce qu'il racontait, mais elle savait que tout ce qu'il désirait était son bonheur et ça lui suffisait.

Enfin, le dernier membre de sa grande famille s'était rajouté. Hagrid qui avait voulu la gronder durant la première retenue qu'elle avait eu avec lui, mais qui avait vu le liquide qu'elle ravalait au lieu de le laisser couler. Elle n'avait voulu que transformer une chaise pour rendre fière sa Directrice de Maison. Le pire, c'était qu'elle y était arrivée... Elle n'avait juste pas su viser la bonne assise et un élève s'était retrouvé à terre, lourdement.

Des points en moins, les premiers de sa scolarité et une retenue. Au lieux de la sanctionner, comme prévu, le garde-chasse l'avait consolé et ils avaient fait une escapade fantastique dans la forêt interdite avec Crockdur, qu'elle s'était mise à adorer. Était-ce pour ça que ce grand-frère bourru, géant, lui avait offert Duchesse le jour de son premier Noël à l'école ? Sûrement.

Elle était restée au château et sous le sapin, il n'y avait pas eu beaucoup de paquets : celui offert par Tabata et celui offert par les Jumeaux, avec qui elle s'était tout de suite bien entendue. Ce n'étaient pas ces présents qui l'avait vraiment marqué, cependant. Il lui avait offert, pour fêter ce jour particulier, en main propre. Le premier qu'elle recevait d'un adulte depuis la mort de ses parents. Ce jour-ci, tout le monde l'avait vu pleurer : la joie était trop intense, trop précieuse. Elle avait juré à Rubeus d'en prendre grand soin. Ce chaton était plus important que sa propre vie.

Trois ans plus tard, la femelle avait bien grandi et son caractère s'était développé. Elle était une reine exploratrice. Poudlard lui appartenait, et même Miss Teigne avait peur d'elle. Ce simple fait avait d'ailleurs beaucoup fait rire l'orpheline. Un rire qu'elle n'avait pas, ce jour-ci.

Les détraqueurs cernaient Poudlard cette année. Ces non-êtres, qui faisaient ressortir ses pires souvenirs dès qu'elle les croisait, la tétanisait sur place, l'effrayait au plus haut point. Depuis la mort de ses parents, elle n'avait plus eu peur de rien. Elle n'avait plus rien à perdre, ou le croyait jusqu'alors, mais ces créatures hideuses lui avaient prouvé le contraire. Elle avait encore ses souvenirs heureux avec eux, des souvenirs qu'ils essayaient de lui retirer, d'aspirer, à chaque fois qu'elle se trouvait à proximité.

Elle ne savait pas si ça fonctionnait avec les chats, mais c'était l'image sombre d'une Duchesse devenue une coquille vide, sans but, qui l'avait poussé à sortir, à braver l'orage et leur présence néfaste. Les larmes s'étaient mêlées aux gouttes tombées du ciel grisâtre, alors qu'elle ne la retrouvait pas. Le maine coon avait été habituée à l'eau très tôt, alors le mauvais temps ne la dérangeait pas. Cette année, la Gryffondor avait pensé que ça avait été une erreur de sa part, alors qu'elle hurlait son nom contre le vent, qui empêchait sa voix de porter.

Le soulagement s'était mêlé à sa frayeur du moment à la seconde où elle l'avait reconnue. Une ombre plus grande que les autres chats du château, tapis dans l'ombre d'un buisson, non loin d'une blonde solitaire proche du lac. Eileen n'en fut qu'à demi-surprise : il lui arrivait aussi de sortir sous des tempêtes, que ce soit pour s'isoler, souffler ou pour rechercher des ingrédients particuliers pour ses breuvages. Cette fille avait bien le droit à son intimité aussi.

La peur s'était invité une seconde fois, cependant. Le félin observait un crapaud qui gambadait joyeusement sous la pluie. Elle comprenait son besoin de chasser. Duchesse ne le faisait pas pour se nourrir. La King s'assurait toujours qu'elle ne manque de rien. Elle traquait des animaux pour les lui rapporter. Des offrandes, pour lui faire comprendre qu'elle lui restait fidèle, d'après le gardien des lieux. Elle n'avait pas cherché à la disputer, du coup, même si elle soignait les animaux qu'elle ramenait et les relâchait dans la nature ensuite. Le problème ? Sa proie du jour était trop proche d'une sorcière pour être sauvage.

Une course effrénée, un plongeon digne d'une footballeuse professionnelle, elle avait attrapé l'animal avant qu'il puisse se jeter toutes griffes sorties sur Heinrich. Le soulagement palpable, quand elle avait vérifié que le familier de sa future amie était bien saint et sauf, s'était installée, lui offrant un rire presque hystérique.

Jusqu'à ce qu'elle remarque les larmes. Elle s'était excusée, sur le moment, mais ça n'avait pas suffit à chasser la peine qu'elle lisait sur le visage de la Serpentard. Une sang-pure, Beurk, de la même année qu'elle. Une facette qu'elle ne lui aurait jamais imaginée si elle ne l'avait pas vu. Depuis ce jour, elle s'était donnée pour mission de la détendre, de l'émerveiller. Aria cachait un rire si mélodieux, si plaisant à entendre et un sourire si charmant. Elle voulait lui faire comprendre qu'elle avait le droit de les montrer, qu'elle avait le droit de vivre pleinement et d'être heureuse.


In the dark I see green | Dimanche 1 octobre 1995 | Aria Beurk 200428122044787862

« Woaaah... »

Eileen ne retint pas son sourire satisfait. Oui, la Queen à la carte était plutôt fière d'elle et du résultat qu'elle avait obtenu suite à son dur labeur. Ça avait été difficile à remettre en état, mais à la réaction d'Aria, elle comprit que son travail n'avait pas été vain.

Quand l'Empathe la rejoignit, s'installant sur un fauteuil devant le feu de cheminée, elle lui désigna les plats, puis les déballa avec son entrain habituel. Les mots suivirent naturellement, entre humour bancal et question sérieuse, un soyeux mélange dont la Gryffondor avait le secret.

« J'espère que tu as faim. Les elfes ont cru que je venais pour distribuer de la nourriture à l'intégralité du château. »

Elle ne s'arrêta pas en si bon chemin. Elle ne pensait pas, débitait ses paroles à toute allure. Parfois, avec le recul, loin de la blonde, ça lui arrivait d'en regretter certaines, mais elle se voyait toujours incapable de faire fonctionner correctement sa boite crânienne quand elle était proche d'elle. C'était à la fois plaisant et incompréhensible, comme la sensation bizarre, physique, qu'elle ressentait au niveau du ventre quand elle la regardait. Était-ce pour ça qu'elle évitait de la regarder pour l'instant et qu'elle se concentrait sur la nourriture ? Absolument.

« À moins que tu aies déjà mangé ? »

Elle finit toutefois par tourner ses iris d'un bleu pâle dans sa direction, pour la voir secouer la tête. Oui, elle ressentait toujours la même chose, en plus du soulagement. Non, elle ne se concentrait pas dessus. C'était assez intimidant et gênant comme ça pour oser méditer dessus, surtout à côté d'une empathe. Elle n'était pas idiote, elle se doutait que si elle se mettait à rêvasser à côté de la vipère, cette dernière se transformerait en éponge. Elle ne lui souhaitait pas. C'était la joie et la bonne humeur qu'elle voulait lui transmettre, le bonheur qu'elle ressentait à être en sa compagnie, surtout ici. Le fait que l'attente l'avait rendue totalement impatiente n'était qu'un détail insignifiant, non ?

« Maintenant que j'y pense... Une question me taraude : quelle heure est-il ? »

Le rire d'Aria fit exploser un feu d'artifice au creux de son estomac et ce fut avec un entrain tout particulier qu'elle commença à se servir des pancakes, sans aucune retenue. Elle les plaça dans une assiette qu'elle rapprocha un peu du feu pour les réchauffer, mis une bonne dose de chocolat fondue et de chantilly dessus, avant de les déguster. Un regard complice pour l'autre demoiselle et elle se retrouvait la bouche pleine.

« Toi, je vais vraiment finir par t'offrir une montre. »

Eileen s'apprêta à répondre, mais se retint au dernier moment. Elle risquait surtout de lui cracher l'intégralité du contenu de sa cavité buccale si elle l'ouvrait à présent. Elle n'était pas sûre que la blonde apprécierait la plaisanterie.  

« Puis... ça fera aussi office de remerciements pour tout ça. »

Elle se força à attendre avant de répondre, un sourcil redressé dans une mimique faussement hautaine. Son regard rencontra le sourire reconnaissant d'Aria et elle en oublia presque de répondre. Qu'il était plaisant de pouvoir regarder son visage sans masque. Presque.

« Non, marmonna-t-elle. Je n'attends pas de cadeau. Et puis, pour être franche, ce serait Rusard qu'il faudrait remercier. Sans lui, je ne serais jamais tombé dessus et je n'aurais pas pu restaurer le salon-laboratoire de Salazar. »

Elle n'avait pas fait un grand ménage, ne l'avait pas remi à neuf, dans l'idée de recevoir quelque chose. Elle voulait juste lui faire plaisir, parce que pour la lionne, la Beurk le méritait. Finalement, cette dernière rompit le contact pour regarder sa montre et la trublionne en profita pour chasser — ou accentuer, la concernant — les rougeurs de ses joues. La technique ? Devenir une écrevisse : elle fit exprès de se rapprocher du feu pour que la chaleur fît une excuse parfaite.

« 7h08.
Merci ! »

Son exclamation fut suivie d'un autre haussement de son sourcil droit, l'heure déjà oubliée, alors qu'elle ne parvenait plus à la quitter des yeux. Depuis quand la sang-pure s'embêtait-elle avec son éducation quand elles se retrouvaient seules ? Ce n'était pas elle qui allait la reprendre, elle n'était même pas un exemple à suivre en matière de politesse. Indirectement, sa camarade ne se priva pas de le lui rappeler.

« Bon appétit !
Ah !, la musicienne ne put retenir son petit cri désolé. Oui, tu as raison, je manque à tous mes devoirs d'hôte ! Bon appétit à toi aussi ! »

La seconde d'après, l'orpheline ne se gêna pas pour observer la demoiselle changer de posture, abandonner ses faux-semblants. Elle était bien mieux ainsi, d'après la mentaliste. Certes, elle perdait ce côté presque mystique qu'elle lui trouvait quand elle se montrait hautaine, mais elle y gagnait une douceur et une candeur qu'elle lui préférait.

Finalement, elle se replongea dans son propre repas dans un silence appréciable, qu'elle finit par rompre en chantonnant l'air d'une comptine pour enfant. Elle s'arrêta quand la voix de son mystère résonna dans leur pièce.

« C'est aujourd'hui, donc, que ta petite fête va être annoncée au grand public ? »

La née-moldu hocha la tête, puis la laissa choir sur le dossier de son assise en levant les yeux vers le lustre. Elle trépignait d'impatience à l'idée d'être au 31 octobre. Ca avait été difficile de convaincre Madame Rosmerta, mais son inventivité couplet à celle de Gred et Feorge avait fini par la faire céder. Ce midi, tout le monde saurait et si tout se passait comme prévu, Papy Dumbledore annoncerait que tout le monde pouvait s'y rendre s'ils le souhaitaient. Est-ce que c'était démesuré et complètement fou ? Oui, à l'image de leur trio dégénéré. Et ce n'était absolument pas une attaque personnelle envers Ombrage. Pas. Du. Tout.

« C'est aujourd'hui, oui, mais je ne te dis pas comment, dit-elle en lui lançant une œillade joueuse. Et tu as intérêt à venir, d'ailleurs ! »

La dernière phrase avait été dite sur un ton sévère, ses paupières plissées par une méfiance feinte. Au fond, elle savait que si la blonde ne venait pas, elle se sentirait vexée, mais elle ne voulait pas vraiment la forcer. Après, vu les efforts qu'elle avait déployé pour la convaincre de venir, elle devait bien avouer qu'elle se sentirait vraiment idiote si Aria lui faisait faux bond. Une possibilité peu reluisante à ses yeux. Elle ne voulait pas y songer, pas maintenant, alors elle préféra s'esquiver, changer de sujet avec la douceur d'une illusion. La magie, ça la connaissait après tout.

« Oh, j'allais oublier !, dit-elle avec un sourire en coin. Ça me fait penser : joyeuse fête ! »

D'un bond, oubliant son repas à peine commencé, elle se releva pour improviser une petite danse ridicule, qui ne dura pas plus de trente secondes. Elle n'avait pas peur de la honte, mais elle n'allait pas non plus offrir à sa compagne du moment le loisir de se moquer d'elle toute la mâtinée !

Elle préféra, au demeurant, partir vers le fond de la pièce, non loin du chaudron, pour sortir un bocal d'une étagère. À l'intérieur, d'une taille moyenne, sommeillait une araignée. Elle partit ensuite à la recherche de Heinrich et finit par l'attraper d'un geste habile. La préparation des breuvages magiques, ça offrait des réflexes assez impressionnant. Elle le tenait d'une main, quand elle alla se rasseoir, pour le garder sur ses genoux.

L'arachnide n'était pas venimeux et elle n'avait pas envie de le relâcher dans la nature alors qu'il pouvait servir de repas. Bon, si en vérité, elle avait eu l'intention d'en faire un ingrédient, elle pouvait bien en sacrifier un pour l'amphibien. Ce fut dans cette optique, sans la moindre peur, qu'elle dévissa le couvercle avant de plonger sa main dans le récipient. Elle en retira la petite bête, puis la laissa grimper sur son bras nu, avant de lâcher le familier semi-aquatique. Il n'en fallut pas plus pour que spiderman disparût.
FRIMELDA

Eileen M. King
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Eileen M. King

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Rêve ta vie en

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Jeu 30 Avr 2020 - 19:08
in the dark I see green
Le tendre murmure d'un secret, la delicate vision d'une cachette. Un instant invisible que l'on partage a deux. Oh douce hypnose, toi qui sais m'envouter, reste avec moi pour l'eternite.

Dimanche 1er Octobre 1995

Comment remercier Eileen pour ce magnifique cadeau ? Un présent à partager à deux. Un abonnement pour des représentations secrètes dans un théâtre souterrain. Eileen faisait toujours tant de choses pour elle. Elle se découpait en quatre pour arriver à trouver du temps dans son emploi du temps chargé pour la blonde. Plus que ça, elle lui partageait son intimité à elle seule. Un cocon dans lequel Aria pouvait s'ouvrir sans pudeur. Fleurir sous la pâleur de la lune, éclairée par les rayons de sa précieuse amie.

Et Aria, que faisait-elle pour Eileen ? Alors qu'elle parcourait la pièce restaurée de son regard clair, qu'elle foulait le sol de ses pas légers et qu'elle survolait les meubles de ses doigts fins, elle se posa cette question. Qu'avait-elle fait pour Eileen depuis qu'elle la connaissait ? Qu'avait-elle fait pour mériter tout ça ? Ses cadeaux, son amitié ? Une bénédiction. Un miracle. Parce qu'Aria n'avait jamais rien fait. Ou peut-être que si : pour une fois, elle était entièrement elle-même avec quelqu'un. Était-ce cela, son cadeau à elle ?

Cette pensée ne traversa pas l'esprit de la Serpentard. Elle était redevable à la Gryffondor. Et même si ce concept n'était en rien ancré dans sa maigre charte morale, elle désirait tout de même réussir à lui faire un jour plaisir à son tour. Pas avec une montre. Loin du matérialisme que pourrait suggérer l'origine de son sang, c'était bien d'un geste symbolique que l'héritière des Beurk espérait un jour remercier la King.

- Non, articula cette dernière la bouche pleine. Je n'attends pas de cadeau. Et puis, pour être franche, ce serait Rusard qu'il faudrait remercier. Sans lui, je ne serais jamais tombé dessus et je n'aurais pas pu restaurer le salon-laboratoire de Salazar.

La Gryffondor pouvait dire tout ce qu'elle voulait pour faire oublier le travail majeur qu'elle avait dû fournir pour remettre cette salle en état et lui offrir une chaleur mystique, la blonde ne l'entendait que d'une oreille. L'idée avait déjà planté ses racines dans son esprit : un jour, elle la remercierait de la meilleur façon qu'il soit. Peut-être que c'était cela qu'elle essayait de lui dire dans son regard luisant de reconnaissance et de détermination. Un échange silencieux de quelques secondes auquel elle ne voulut pas ajouter de mots. Elle verrait bien.

Elle mit fin à sa promesse muette en déviant son regard vers son poignet. Les aiguilles pointaient l'heure du petit-déjeuner. Aria suivit le mouvement de la Née-Moldue qui n'avait pas attendu pour se servir. Et c'est bien cette dernière qui remarqua en premier, avant même que la concernée n'en prenne conscience, la position trop droite, trop stricte de la Sang-Pur.

- Ah ! Oui, tu as raison, je manque à tous mes devoirs d'hôte ! Bon appétit à toi aussi !

Ce fut de cette remarque théâtrale prononcée sur l'ode de l'ironie qu'Eileen lui fit comprendre qu'elle n'était pas à une réception mondaine. Aria sourit bêtement à ce constat et changea de position pour se mettre plus à l'aise. Non, elle n'était ni à une réception, ni à la maison. Mais dans un lieu nouveau où son éducation ne valait pas plus qu'un grain de poussière. Une fois installée en tailleur, elle offrit un regard entendu à son amie. Mieux ?


Flashblack


Impuissante, Aria ne pouvait plus faire marche arrière. Elle ne pouvait plus récupérer son masque froid après avoir montré ses traits si vulnérables. Elle ne pouvait pas remettre son armure qui la protégeait des assaillants en recherche de contact humain après s'être montré à nu. Cela ne servirait plus à rien. Et elle n'en avait pas la force. Alors, sans réfléchir, juste en se laissant porter par l'éclat maladroit du rire de sa rencontre imprévue, elle laissa son sourire fleurir sous les larmes qui l'abreuvaient. Un soleil qui chassait la tempête. Des sanglots qui devenaient des rires. Une autre façon de tout évacuer. Et ce fut sur ces pommettes relevées, offrant un relief nouveau au ruisseau salé, qu'elle accueillit la présence d'Eileen M. King.

Était-ce ainsi que tout avait débuté ?

Les deux filles étaient restées ensemble tout le reste l'après-midi, accueillant la pluie sur leurs vêtements avec l'indifférence de deux âmes qui ne remarquaient plus que le monde continuait de tourner. Ni que le temps ne s'était pas arrêté dans sa course effrénée. Une heure ? Deux heures ? Quatre ? De quoi donc avaient-elles parlé ? Comment avaient-elles seulement pu commencer à se parler ? Une Sang-Pur et une Née-Moldue. Une Beurk et une King. Une vipère et une lionne. Une blonde et une brune. Un tableau à l'aquarelle qui s'apprêtait à compter une longue histoire.

- Est-ce que... tu serais d'accord pour me montrer... un de tes tours ?

Aria se souvenait avoir posé cette question avec la timidité et la honte d'une sorcière de famille respectée qui ne devrait pas s'intéresser à des sornettes d'Impurs. Mais la carte qui dépassait sournoisement d'une poche de l'illusionniste l'avait trop longuement nargué pour qu'elle retienne plus longtemps la demande qui lui brûlait les lèvres. Depuis sa première année, elle observait de loin la King avec mépris. Avec envie. Un vicieux mélange qui naissait de la vision de l'inconnu qui lui était interdite. Aria aussi, avait voulu faire partie de son public. Aria aussi, avait voulu essayer de réveiller l'étincelle d'émerveillement dans ses pupilles avant qu'elle ne finisse par s'engourdir dans un sommeil éternel.

C'était peut-être ainsi que tout avait débuté, cet après-midi pluvieux au bord du lac.

Puis, elles s'étaient revues. En cachette. La représentation d'un spectacle d'illusions sur une scène dont les projecteurs éclairaient deux artistes. Deux actrices qui finirent par ne former plus qu'un dans les instants qu'elles volaient au temps.

Les premiers avaient été hésitants. Un rendez-vous dans une salle vide. Dans un couloir non fréquenté. Des coulisses dissimulées derrière un rideau trop fragile.

Aria mis du temps avant de se sentir vraiment à l'aise. Comment se défaire de son ton froid ? De son regard narquois ? De ses paroles pimentées ? Comment oublier tous les murs que son inconscient avait pris soin de construire pendant plusieurs années ? Comment se défaire des habitudes que la bienséance avait ancré dans chacun de ses mouvements ? Elle était trop droite, trop raide, trop hautaine. Mais Eileen était en quelque sorte son petit miracle. Ce fut elle qui lui rappela qu'elle n'était pas qu'une poupée de chiffon répondant au caprice d'un marionnettiste. Ce fut elle qui, d'un simple rire, chassait toutes les tensions du corps de la blonde. Ce fut elle qui arrivait à détendre les traits de son visage d'un simple regard. Ce fut elle qui lui apprit qu'elle ne se réduisait pas à ce qu'elle renvoyait au monde. Elle était plus que ça. Mais elle s'était oubliée. Eileen avait été son Rappeltout.



Aria croqua dans son pancake à pleines dents. Elle sentit le chocolat fondu s'étaler sur sa lèvre supérieure pour lui faire une moustache enfantine. Elle l'essuya de son index gracile qu'elle lécha ensuite. Adieu les bonnes manières. Bonjour le naturel retrouvé.

- C'est aujourd'hui, donc, que ta petite fête va être annoncée au grand public ? demanda-t-elle à la fin de sa première bouchée.

- C'est aujourd'hui, oui, mais je ne te dis pas comment. Et tu as intérêt à venir, d'ailleurs !

La brune se la jouait mystérieuse pour ensuite donner un ordre ? Appuyé, en plus, par des sourcils retroussés au-dessus d'un regard plissé. Aria arqua les siens en réponse. Elle ouvrit la bouche pour protester mais la fougueuse Lionne l'interrompit, rattrapée par une autre pensée.

- Oh, j'allais oublier ! Ça me fait penser : joyeuse fête !

Joyeuse fête ? Eileen connaissait le jour de sa fête ? Ses sourcils gravirent de nouveaux sommets alors que l'étonnement gagna la totalité de son visage. Dans sa famille, ce n'était pas quelque chose qui se souhaitait. Elle n'était d'ailleurs même pas certaine que quelqu'un le lui ait déjà souhaité. Ne serait-ce qu'une seule fois. Mais c'était sans aucune importance et l'idée que ce soit aujourd'hui la fête des Aria ne lui apporta aucune émotion notable, si ce n'était une indifférence profonde. C'était déjà un miracle qu'elle ait elle-même retenu que sa fête était bien marquée au 1er octobre sur le calendrier. Peut-être parce que ça l'avait inconsciemment marqué de constater que ce mois d'automne s'ouvrait avec son prénom pour se clôturer avec son anniversaire.

Mais si elle avait le droit à une représentation comme celle qu'Eileen lui proposait à l'instant-même à chaque 1er octobre, alors peut-être que ça valait le coup de retenir sa fête. Aria applaudit la chorégraphie d'un rire agrémenté d'un soupçon de moquerie. Pour la forme. La spontanéité d'Eileen, c'était probablement l'une des qualités qu'elle appréciait le plus chez son amie.

- Tu es vraiment ridicule, affirma-t-elle avec ses yeux rieurs. Mais merci pour ce spectacle inédit, je suis sûre de passer une bonne journée maintenant, avec ce souvenir ancré à ma rétine !

La mine farceuse, Aria regarda son ami se détourner d'elle pour s'approcher de bocaux entreposés à un autre coin de la pièce. La violoniste recentra, quant à elle, son intérêt sur l'assiette abandonnée sur ses jambes croisées pour reprendre la dégustation de son petit-déjeuner. Quand la Queen à la carte revint s'asseoir à ses côtés, elle comprit qu'Heinrich allait lui aussi avoir le droit à son premier repas de la journée. Aria observa l'araignée s'enfuir vainement sur le bras de son amie avant que la langue du crapaud ne s'occupe de son sort. Du côté de la blonde, ce fut son premier pancake qu'elle se chargea de faire disparaître. Puis, elle s'essuya une fois de plus le contour des lèvres avant de relever ses cils vers la Gryffondor, l'air songeur.

- C'est quoi déjà que tu disais tout à l'heure ? Que j'ai « intérêt à venir » à ta fête ?

Aria affronta Eileen du regard. Oui, elle remettait sur le tapis le sujet que l'autre sorcière avait savamment esquivé. Sans scrupules.

-  Et que se passera-t-il, si je ne viens pas ? évoqua-t-elle avec fourberie, laissant ses mots s'épanouir dans un doux écho de provocation. Parce qu'il m'a semblé déceler l'ombre d'une menace dans tes paroles... Je me trompe, King ?

Prête à se délecter de la réaction de son amie dans ce nouveau jeu malicieusement enclenché, elle ne dévia pas ses orbites de son visage. Si ce ne fut pendant une courte seconde, le temps d'accompagner ses doigts qui plongèrent dans la sauce brune stagnant dans son assiette. Mais ce ne fut pas à sa bouche qu'elle amena le liquide chocolaté. Bien sûr que non. Dans un dernier virage, sa main prit la direction de la joue de sa voisine. Cible atteinte ! Une attaque brillamment manœuvrée. L'offensive d'une peintre fiévreuse. D'un pinceau fougueux sur une toile claire et lisse. Et ce fut avec le rire d'un diablotin qu'elle acclama sont œuvre à peine commencé.


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Aria Beurk
Admin empathique
Aria Beurk

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Ecoute cette médolie troublante.
C'est l'eau qui chante.
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Sam 2 Mai 2020 - 18:01

In the dark I see green
Aria Beurk
Est-ce qu'au fond, j'étais déjà au courant ? Certainement. Ça faisait des années que je la connaissais. Ça faisait des années que je faisais tout pour la rendre heureuse. Ça faisait des années que je me saignais pour elle. Alors, oui, au fond, je crois que j'étais déjà au courant.

Est-ce que je me l'avouais ? Non. J'allais sur mes seize ans. À cet âge-là, on ne comprend pas vraiment ce qu'il se passe dans notre corps et notre esprit. On pense que c'est passager, que ce n'est rien de grave, que ça va nous passer. On ne se concentre pas dessus, jamais. Non, je ne me l'avouais pas, même si je me demande parfois si ça n'aurait pas été plus simple dès le début.

Est-ce que je lui aurai dit si ça avait été le cas ? Vous croyez connaître la réponse, n'est-ce pas ? Je suis une Gryffondor, je suis courageuse, voir imprudente. C'est ce que vous vous diriez, je me trompe ? La vérité, c'est que je ne lui en aurai pas parlé, pas à cet instant et peut-être jamais. C'est son bonheur qui m'importe. Le mien, je l'aurai si elle se sent heureuse et si pour ça, je dois la pousser dans une direction qui ne me plaît pas, je le ferais quand même.

Un grand-père de ma connaissance a dit un jour que l'amour est la plus puissante des magies. Je suis parfaitement d'accord avec lui.

La pluie, un coup de foudre. Les prémices d'une longue histoire.

Sera-t-elle belle ? Restez et vous le découvrirez.

In the dark I see green | Dimanche 1 octobre 1995 | Aria Beurk 200428122044787862

Flashback

Eileen, après la mort de sa mère, perdue dans les méandres de sa tristesse, avait cherché à se raccrocher à ce qu'elle pouvait pour continuer de vivre. L'illusionnisme, si sa tante ne comprenait pas, avait été une barrière entre elle et les anges qui l'appelaient ; ses envies de disparaître, sa haine du monde qui lui avait arraché sa famille. L'illusionnisme, et cette haine féroce qui se tapissait à l'époque, avait été une porte vers le diable. Et ce diable, cet enfer, avait pris une forme particulière : ses talents.

Combien de fois avait-elle fugué quand cette femme horrible buvait de trop et finissait, par chance, par l'oublier ? Trop pour les compter, trop de fois pour qu'elle s'en souvienne. C'était durant l'une de ses nuits froide, où elle laissait les larmes coulées, la pluie caressant sa peau diaphane, qu'elle l'avait rencontré.

John. Le moldu, tout aussi pommé qu'elle, était un adolescent des rues. À quinze ans, il s'était fait virer de chez lui par un père qui se servait de sa mère, droguée, comme d'une prostituée. Armé d'un pistolet, il lui avait enseigné à viser et à tirer. Ce n'était rien de grave, juste quelques bouteilles détruites, qu'il trouvait dans les poubelles, n'est-ce pas ? Eileen le comprenait avec le recul, la gamine qu'elle avait été, c'était un peu une raison pour lui de ne pas se servir de l'arme contre sa tempe ou celle de son géniteur.

John, c'était un maître des illusions, lui aussi. La magie, il trouvait ça fantastique et il avait été émerveillé par ses tours. Mais il lui avait aussi dit qu'il y en avait bien d'autres qui permettaient de faire croire des merveilles aux autres humains. La magie, c'était un premier pas. Les illusions ne s'y arrêtaient pas et il s'était mis en tête de lui apprendre. Elle avait été réceptive, admirative et elle s'était donnée à fond dans cette initiation qu'il lui offrait. Un guide. Un diable. Son diable, ça avait été ce précepteur particulier.

À onze ans, il y avait eu le monde magique. Avant de partir, elle avait tenu à le revoir une dernière fois. Elle voulait lui faire ses adieux. Elle ne savait pas si elle aurait la chance de le recroiser un jour. Elle lui avait fait jurer de continuer, tout comme elle lui avait promis de s'améliorer. Elle était partie et lui, il avait continué de vivre. Aujourd'hui, John s'en était sorti et dans les rues de Londres, il était possible de voir des affiches de lui avec un pistolet à la main visant un public imaginaire. John, il s'en était sorti et il offrait des spectacles grandioses. Un jour, elle le savait déjà, elle finirait par aller le voir et se faire avoir.

À l'époque où elle avait eu la chance, le bonheur de rencontrer réellement Aria Beurk pour la première fois, elle n'en avait pas encore eu la chance. Les places étaient chers. Ce petit rêve, néanmoins, finirait par arriver, elle y comptait bien. Pour l'instant, cependant, après un sauvetage de crapaud peu conventionnel de sa part, c'était la question de la sang-pure, la prenant au dépourvu, qui tournait dans son esprit. Les premiers mots sous une tempête. Deux cœurs qui battaient à l'unisson, qui s'étaient retrouvé l'un en face de l'autre par les caprices du destin.

« Est-ce que... tu serais d'accord pour me montrer... un de tes tours ? »

La honte dans la voix de la blonde l'avait surprise, puis son timbre l'avait outrée. Elle ne la connaissait pas encore, mais elle avait saisi par les explications de Tabata que les sang-purs avaient, souvent, des éducations strictes. Le contrôle était de mise, les faux-semblants s'invitaient dans leur vie dès la naissance. Sur le dé du destin, ils tombaient tous sur des masques.

Des masques que la King comprenait plus qu'elle l'aurait désiré. Elle n'en utilisait déjà, à l'époque, et tout comme elle, elle comprenait que ses parents y avaient été contraints. Tout comme les dons qu'elle avait acquis par l'apprentissage qu'ils lui avaient fourni, la célébrité avait des avantages et des inconvénients. Ces artifices-là, à ces yeux, avaient contribué à son malheur. L'accident était survenu quand la petite famille se rendait à une soirée mondaine où ils étaient conviés. La malchance avait fait le reste. Ils avaient croisé un chauffard qui ne les avait pas repérés. L'impact resterait à jamais gravé dans son esprit. Sa violence. Le sang de sa mère et de son père. Et elle, intacte.

« Tu n'as pas à avoir honte. C'est quelque chose que tu ne connais pas et la curiosité, c'est naturelle. »

Était-ce parce qu'elle refusait de voir les simulations des autres les consumer, au point de s'oublier, qu'elle s'était mise en tête d'émerveiller le plus sang-purs qu'elle pouvait ? Il était souvent plus réceptifs, moins logiques, mais il y avait effectivement cette pointe d'envie qui persistait. Elle voulait être leur rempart, leur bouclier et si pour cela, elle devait accepter leurs brimades et leurs insultes, elle le faisait, s'y était préparée. Elle rendait coup pour coup, mais s'y employait d'une manière particulière : elle leur offrait ses plus beaux mensonges. Seule une véritable colère froide pouvait la faire réellement devenir dangereuse. Serpentard refoulée, elle savait se contrôler et se faire rusée. Gryffondor jusqu'au bout des ongles, son courage la guidait et l'empêchait d'abandonner.

« Oui, je vais te faire un tour. Tu m'en diras des nouvelles. »

Elle s'était approchée de l'empathe et s'était installée à ses côtés. Autoritaire, quelque peu intrusive, elle lui avait pris le bras et l'avait guidée avec une idée bien précise, sans lui donner d'explication concrète. Aria s'était endormie, plongée dans un état méditatif parfait pour l'hypnose, sans qu'elle le sache. La vérité, c'était qu'elle pénétrait son esprit, y déposait deux graines. La première allait germer dans l'immédiat. La seconde finirait par suivre plus lentement. Des idées. Des rêves. L'émerveillement. L'acceptation de soi. Elle s'était redressée après plusieurs minutes, la réveillant, s'étant rendu compte que la vipère était très réceptive, plus que les autres nobles de cet univers.

« Regarde-moi, lui avait-elle ordonné avec le sourire. Prête ? »

Et sans attendre de réponse, elle avait claqué des doigts. La réalité ? Il pleuvait et les nuages continuaient de déverser leurs larmes autour d'elles. Cependant, ce n'était plus le présent qu'Aria voyait maintenant. C'était un songe, une croyance si fortement ancrée qu'elle en devenait palpable pour sa perception troublée. La préparation de la brune, un rêve éveillé. Les gouttes d'eau, aux yeux de la blonde, lévitaient tout autour d'elle, venaient de s'arrêter ; le temps se figeait. Elle voulait un tour ? Elle lui offrait le plus spectaculaire. Une illusion, un conte pour enfant, pour sécher les perles salées et faire rayonner un sourire, permettre à un rire de s'évader.
Parfois, le mensonge est plus beau que la vérité. C'était ce que sa mère lui avait enseigné et ce que John avait appuyé.

C'était faux, mais c'était agréable. Après ce jour, la Queen voulait revoir son sourire, entendre son rire, apprécier l'extase qu'elle avait décelé dans ce regard habituellement glacial. Durant un cours commun, elle lui avait transmis un message. Une insulte pour qui ne savait pas regarder. Elle savait la blonde intelligente. Elle comprendrait. Cachés à l'intérieur se trouvaient une proposition et un lieu. Elle l'y avait attendu. Ainsi, leurs rendez-vous s'étaient inventés, puis fait plus fréquents. Toujours en cachette. Aria, c'était son secret.

C'était son monde. Patiente, elle avait attendu que l'idée germe, que sa camarade se sente plus à l'aise en sa compagnie, qu'elle s'ouvre pleinement. Un bourgeon qui cachait la plus belle fleur qu'elle avait eu l'occasion d'observer. Aria aussi, elle savait émerveiller. Deux mondes, un seul univers. La noble avait su l'envoyer au Valhalla par sa simple présence et métamorphoser la roturière en valkyrie pour qu'elle la guide jusqu'à ce plan d'existence irréel. Ensemble, elles se faisaient protectrices des lieux.

Serait-il détruit un jour ? Restez et vous le découvrirez.


In the dark I see green | Dimanche 1 octobre 1995 | Aria Beurk 200428122044787862

« Oh, j'allais oublier ! Ça me fait penser : joyeuse fête ! »

Eileen, elle savait se contrôler, tout comme Aria le faisait. Ici ? Les masques n'avaient pas leur place. C'était la spontanéité la plus totale qui l'animait. Sans prendre la peine de réfléchir plus d'une seconde, elle s'était levée, abandonnant son repas, pour offrir une représentation ridicule à son amie. Ce qui lui permit, au demeurant, de voir son étonnement.

Il fallait bien comprendre que la Gryffondor possédait une énergie que certain aurait qualifié d'inépuisable. C'était parfaitement vrai pour apprendre, surtout sur des sujets qui la passionnaient, l'intéressaient. C'était pour ça qu'elle savait. Parce qu'Aria, c'était autant une passion que les potions, la magie ou la musique. Non, elle se fourvoyait.

Aria, c'était une passion plus grande encore. Réunir la somme des trois suscités et ils ne l'égaleraient jamais. Oui, elle savait. Elle savait quand était le jour où l'on fêtait son prénom ou sa date de naissance, comme elle savait où se situait la boutique de son père. Elle ne prétendait pas tout connaître d'elle, mais elle pouvait se targuer d'en connaître suffisamment pour la surprendre et lui faire apprécier quelques moments privilégiés. Et ça lui suffisait amplement. Voir son sourire, c'était son petit bonheur personnel. Personne n'avait le droit de lui arracher.

« Tu es vraiment ridicule, souffla son ami, mais merci pour ce spectacle inédit, je suis sûre de passer une bonne journée maintenant, avec ce souvenir ancré à ma rétine !
C'est précisément le but recherché ! », rétorqua la danseuse improvisée après s'être arrêtée.

Puis, dans une idée de fuite absolue, elle se mit à la recherche du crapaud pour le sustenter à son tour. Heinrich trouvé, elle vint se rasseoir aux côtés de la blonde. Il ne fallut que quelques secondes, après avoir libéré l'araignée, pour que celle-ci disparût. La brune n'avait même pas pris la peine de s'y intéresser plus que de raison : elle faisait confiance à l'amphibien. Non, son regard avait dévié et s'était à nouveau accroché au profil de sa propriétaire.

Ce simple geste était de plus en plus fréquent. Ici, c'était plus simple, bien sûr. Elle parvenait à le cacher par quelques illusions sorti tout droit de son imaginaire. C'était toutefois plus complexe ailleurs. Dans les couloirs, quand elle la croisait. Durant les cours, où Tabata pouvait la surprendre. Dans la Grande Salle, où tout le monde pouvait le remarquer. Un combat de tous les instants pour s'empêcher d'y songer, ne pas s'égarer, ne pas se laisser porter par sa fantaisie. La voix, où elle pouvait déceler une pointe de fourberie, de la Serpentard finit par la sortir de ses pensées et, intérieurement, elle l'en remercia.

« C'est quoi déjà que tu disais tout à l'heure ? Que j'ai « intérêt à venir » à ta fête ? »

Eileen, sans la moindre peur, redressa le menton avec une fierté qu'il était facile de découvrir autant chez les lions que chez les serpents. Elle affronta sans ciller les opales de son vis-à-vis, miroir des siens par leurs couleurs. Si l'autre adolescente voulait jouer à ce petit jeu, elle allait se faire un plaisir de participer.

« Et que se passera-t-il, si je ne viens pas ?, laissa échapper son interlocutrice dans une douce provocation. Parce qu'il m'a semblé déceler l'ombre d'une menace dans tes paroles... Je me trompe, King ?
Tu ne te trompes pas, rétorqua la fameuse King en empruntant le même ton provocateur. Mais penses-tu réellement que je vais te dire ce qui arrivera si tu ne viens pas, Beurk ? »

Sur une note plus joueuse, le coin de ses lèvres toujours redressé en un faux rictus railleur pour appuyer ses propos, elle poursuivit sur sa lancée.

« Ce serait bien mal me connaître que de prétendre pouvoir m'arracher une information capitale aussi facilement. »

Désastre, disgrâce, fléau ! Trop concentrée sur ses répliques, elle ne put voir venir l'attaque de l'autre fille. Sa joue fut maculée par la peinture improvisée, lui faisant perdre son masque d'actrice. Ses sourcils se dressèrent dans une moue surprise, puis ses yeux se plissèrent. C'était une bataille qu'elle recherchait ?

« Ooooh toi !, souffla-t-elle en laissant échapper un rire. Tu vas voir ! »

D'une main, elle attrapa Heinrich pour le déposer sur la table – elle ne tenait pas à ce qu'il lui arrivât malheur. De l'autre, elle attrapa le pot de chocolat fondu. L'amphibien libéré, ses doigts migrèrent dans la nourriture, puis elle se jeta presque sur la blonde pour l'immobiliser. Son but ? La maquiller. Les joues, le contour des yeux, les lèvres, tout y passa. Le fait qu'elle se servait du coulis n'était qu'un détail.

Fort heureuse de son action, tout aussi déloyal que sans scrupule, elle relâcha la demoiselle et se redressa, se reculant, pour pouvoir observer son œuvre. Les bras croisés, l'air satisfaite de son méfait, elle acquiesça vers la demoiselle.

« C'est bien mieux ainsi ! »

Le timbre de sa voix rieur, elle se laissa à nouveau retomber sur son assise devant le feu et repris un pancake pour le déguster. Si elle avait conquis cette première terre, la guerre n'était pas terminée. Elle était déclarée. Que serait la vengeance de sa méduse ? Elle l'attendait avec impatience, lui lançant des œillades provocatrices. Ses iris, visibles durant ces moments, brillaient d'un éclat de malice, pétillaient d'un bonheur qu'elle ne pouvait et ne voulait pas dissimuler.

Parfois, Eileen se demandait si sa vie valait la peine d'être vécue. Parfois, elle se questionnait sur ce qu'elle fabriquait. Parfois, elle se demandait si ses souhaits se réaliseraient. Quand Aria était présente, toutefois, ses interrogations se dissipaient. Elles n'avaient plus lieu d'être, parce qu'elle savait qu'elle serait heureuse. Ses croyances, ses espérances.

Se réaliseraient-elles un jour ? Restez et vous le découvrirez.
FRIMELDA

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Lun 4 Mai 2020 - 17:34
in the dark I see green
Le tendre murmure d'un secret, la delicate vision d'une cachette. Un instant invisible que l'on partage a deux. Oh douce hypnose, toi qui sais m'envouter, reste avec moi pour l'eternite.

Dimanche 1er Octobre 1995

1er octobre. Mélodie d'une journée d'automne. La fête des Aria. Un chant qu'une certaine Gryffondor n'avait pas oublié. Une danse qui anima ses membres dans un spectacle grotesque.

- Tu es vraiment ridicule, se moqua celle qui était à l'honneur de cette représentation. Mais merci pour ce spectacle inédit, je suis sûre de passer une bonne journée maintenant, avec ce souvenir ancré à ma rétine !

C'est précisément le but recherché ! se vanta l'artiste.

Marquer les mémoires, faire fleurir les rires, émerveiller et alléger les cœurs. Oui, voilà bien ce qu'Eileen M. King recherchait toujours à faire. Des objectifs honorables, une ambition humble. Une hypnose qui était parvenue à ensorceler le plus inaccessible des cœur. Aussi rigide qu'il était fragile. Celui d'Aria Beurk.


Flashblack


La pluie ponctuait leur rencontre d'un hymne apaisant. Plic, ploc. La brune avait capturé les gouttes ruisselant sur les joues maigres de la blonde pour les cristalliser en rires. Son premier tour. Une magie invisible, indescriptible, mystérieuse. La magie d'un sourire. D'un cœur joyeux un jour de pluie.

Un regard inondé. Plic, ploc. Des iris sauvés de la noyade. Un crapaud sauvé d'un prédateur. Une bouée aux rayures rouge et or.

Parmi les souvenirs de la blonde, tout demeurait un peu flou. Plic, ploc. Un après-midi brumeux mais heureux. Mais une scène restait accrochée à la toile de sa mémoire. Celle qui avait surgi d'une question hésitante. D'un jamais qui s'était transformé en pourquoi pas. D'un monde auquel elle avait eu l'audace d'ouvrir la porte alors qu'on lui avait toujours appris à en rester éloigné. La première transgression du plus grand des interdits.

- Tu n'as pas à avoir honte. C'est quelque chose que tu ne connais pas et la curiosité, c'est naturelle.

Aria avait courbé un peu plus ses épaules. Plic, ploc. Ces paroles n'avaient fait que renforcer son malaise. Lui rappeler que, si, elle devait avoir honte. Qu'elle n'avait rien à faire là, avec cette Née-Moldue. Qu'elle devait fuir à toutes jambes à défaut de pouvoir ramasser son masque de tous les jours. Abdiquer et oublier. Mais la curiosité l'emporta sur la honte. Elle voulait voir. Ses orbites, d'une timidité qu'on ne leur connaissait pas, restèrent accrochées à la silhouette de la brune. Au fond, si on regardait bien, on pouvait y lire de la détermination.

- Oui, je vais te faire un tour. Tu m'en diras des nouvelles. 

Aria avait froncé les sourcils quand sa camarade de classe avait pris son bras. Plic, ploc. Mais, la seconde d'après déjà, tous ses traits se décrispèrent. Ses paupières s'abandonnèrent à la gravité. Sa tête bascula sur le côté et en avant. Sommeil profond.

Pourtant, elle entendait encore tout. Plic, ploc. La pluie, les oiseaux, le silence. Elle entendait tout. Mais ça lui semblait lointain. Son corps ne l'écoutait plus. Aspiré par un gouffre qui l'empêchait de rouvrir les yeux.

- Regarde-moi.

L'autorisation donnée, l'ordre énoncé, la Sang-Pur rouvrit les yeux pour les planter dans ceux de la Née-Moldue. Plic, ploc. Elle se sentait légère. Un pantin.

- Prête ?

Un claquement de doigt. Plic... ploc ? Où avait disparu le chant de la pluie ? Aria ouvrit des yeux immenses. Incroyable. Impensable. Irréel. Les gouttes s'étaient suspendues dans les airs. Le temps s'était-il arrêté ? Elle n'arrivait pas vraiment à structurer ses pensées. Alors, elle se contenta d'admirer. L'eau s'était figée autour d'elle comme des joyaux flottant dans les airs. Elle leva une main. Elle voulait les toucher. Sentir sur sa peau pâle la pluie qui s'était arrêté d'exister. Qui s'était cristallisée dans l'intemporalité. Quand son index frôla l'une des bulles liquide, l'illusion s'évapora. Elle se réveilla.

Aria releva son regard vers Eileen. Plic, ploc. Que s'était-il passé ? Des images, floues, parcouraient son esprit. L'émerveillement restait imprimé sur ses pupilles. Mais le temps avait repris.

Voilà là encore une nouvelle forme de magie. Plic, ploc. Un envoûtement que la Sang-Pur avait du mal à accepter comme appartenant à ce monde qui lui était étranger. La Née-Moldue n'avait-elle pas utilisé sa baguette en douce pour lui faire croire à l'illusion ? Mais comment aurait-elle seulement pu connaître un sortilège pareil du haut de ses treize ans ? Un mystère auquel, secrètement, Aria avait envie de croire. Une énigme qu'elle ne désirait pas résoudre. Un interdit qui l'attirait vertigineusement.


~


La semaine qui suivit, au milieu d'un cours où elle s'était laissée aller aux rêveries, un mot atterrit sur sa table. La jeune Vipère laissa planer un regard suspicieux autour d'elle. King ? La Lionne lui offrit un clin d'œil discret. Aria ouvrit le message plié.


« Tes yeux globuleux t'offrent-ils une vision déformée ? Nan, parce que ce serait dommage de se laisser tromper par une illusion à cause d'eux... »


Aria s'empressa de fourrer le mot dans sa poche. Était-ce une menace ? La King prévoyait-elle de raconter à tout le château que la Beurk avait voulu voir un de ses tours de passe-passe? Qu'elle s'était montré vulnérable au bord du lac ? Pourquoi donc avait-elle eu l'idiotie de faire confiance à l'illusionniste ? Qu'elle était stupide.

Le soir-même, Aria n'arrivait pas à trouver le sommeil. Elle ruminait trop ses pensées. Vaincue, elle finit par sortir la note de ses vêtements pliés sur sa malle. Emmitouflée dans son lit, elle relut les mots qu'elle distinguait faiblement dans le noir jusqu'à les connaître par cœur. Pourquoi lui avoir fait un clin d’œil complice pour une fourberie de si mauvais goût ? Elle ne voulait pas croire qu'Eileen avait voulu être méchante avec elle. Pourquoi ? Pourquoi, alors qu'Aria avait pourtant déjà perdu foi en l'espèce humaine ? Pourquoi refusait-elle d'ajouter Eileen à cette liste interminable de personnes détestables ?

À l'orée du sommeil, le mot « illusion » se retourna encore et encore dans l'esprit de la blonde, il se déforma, se contorsionna, dans tous les sens, mille fois. Cette nuit-là, elle rêva. Au matin, elle comprit. La reine des illusions lui offrait un nouveau défi.

Avec l'alliance de son bois de Noisetier, Aria finit par parvenir à décrypter le message caché :


« Si tes jolis yeux veulent assister à un nouveau spectacle enchanteur, rejoins-moi vendredi soir, 18h, dans la salle de classe face au portrait de notre légendaire Merlin. Le magicien sera gardien de notre secret. »



- C'est quoi déjà que tu disais tout à l'heure ? Que j'ai « intérêt à venir » à ta fête ?

Aria lança un regard en coin à Eileen. Songeur. Provocateur. La brune se parât alors d'une allure fière, menton haut, prête à résister à tout affront.

- Et que se passera-t-il, si je ne viens pas ? Parce qu'il m'a semblé déceler l'ombre d'une menace dans tes paroles... Je me trompe, King ?

En présence de la Lionne, la fourberie de la Vipère s'adoucissait pour se muter en farce malicieusement affective. Un complot de sa personnalité qu'elle seule connaissait. Un côté taquin qui avait pour but de provoquer avec candeur et non avec mépris. L'illusionniste se joignit à la partie, abattant son jeu sur la table. Une main qu'elle espérait probablement victorieuse.

- Tu ne te trompes pas. Mais penses-tu réellement que je vais te dire ce qui arrivera si tu ne viens pas, Beurk ?

Ses cartes ? Eileen ne les dévoilait pas toutes. Jamais. Garder le suspens, éveiller la curiosité, manipuler le mystère. Un art qu'elle maîtrisait mieux que quiconque. Et pourtant, elle se laissait encore avoir à son propre jeu.

- Ce serait bien mal me connaître que de prétendre pouvoir m'arracher une information capitale aussi facilement.

Alors que la magicienne continuait sa tirade, Aria en profita pour tremper ses doigts dans le venin sucré. Profitant du fait que sa voisine ait abaissé certaines défenses pour s'atteler à en dresser d'autres, elle envoya sa première offensive. Des doigts vicieux, adroits, gourmands vinrent écorcher la joue de la King pour y laisser une traînée de chocolat. Prise à son propre jeu. Illusionniste aveuglée, attention émiettée, l'artiste était devenue spectatrice. La marionnettiste était devenu pantin. Et la Lionne devint Serpent quand elle bifurqua sur le chemin de la vengeance.

- Ooooh toi ! Tu vas voir !

Quand la blonde vit la brune déposer son crapaud sur la table, elle eut tout juste le temps de comprendre ce qui allait suivre pour se débarrasser de son assiette sur un fauteuil voisin - elle n'aimait pas le bruit des objets qui se cassaient. Puis, son rire mesquin se transforma en petit cri quand elle fut surprise par l'assaut de la brune qui s'était avérée bien plus vive qu'elle ne l'aurait pensé. Les bras emprisonnés par ses deux genoux, Aria était vulnérable face à l'attaque de son amie et dut se contraindre à accepter le maquillage dégoulinant qu'elle lui affligea. Dans de veines tentatives d'esquives, elle secoua encore la tête de droite à gauche tout en protestant oralement mais rien n'y fit. L'œuvre ratée était à présent apposée sur son visage grimaçant.

- C'est bien mieux ainsi ! affirma la peintre avec un air satisfait devant le rendu de son travail.

La Beurk plissa son regard et retroussa son nez pour offrir un air insolent à ses traits. Eileen la relâcha de son emprise et se servit un nouveau pancake avant de retourner s'installer près du feu. Aria se redressa, tenta d'essuyer le carnage sur son visage d'une main mais abandonna bien vite en constatant de l'ampleur du désastre. Doucement, ses épaules s'agitaient. Elle riait.

Elle se sentait toujours si joyeuse, si légère en présence de la Gryffondor. Était-ce un reflet des émotions de cette dernière ou les siennes propres ? Aria ne se posait pas la question. Elle profitait du moment, voilà tout. Elle ne sut donc pas s'expliquer pourquoi ce fut à ce moment-là qu'un souvenir occulté lui réapparut dans un flash.

« Et je voulais être ton amie ! »

Merlin...
Sans réfléchir, Aria demanda d'une voix songeuse, presque absente, trop spontanée pour être hésitante :

- Eileen, pourquoi as-tu voulu devenir mon amie ?

Ce ne fut qu'à la fin de sa question teintée d'innocence qu'elle releva le regard vers son interlocutrice. Ce ne fut qu'à cet instant-là qu'elle se rendit compte des mots qu'elle avait laissé échapper. Avec Eileen, tout avait toujours semblé léger, rares étaient les paroles que la blonde avait peur de lui avouer. Mais qu'en était-il à cet instant-là ? Aria décida de chasser la pudeur qui tentait de se frayer un chemin jusqu'à ses iris pour les garder plongés avec détermination dans cet autre océan bleuté. Elle voulait savoir. Elle voulait comprendre. Pourquoi la Queen à la Carte avait-elle fait le premier pas en lui envoyant un mot ce jour-là ? Qu'est-ce qui l'avait poussé à vouloir sceller la promesse d'un secret à travers un message caché ?

Dans l'attente d'une réponse que l'âme solitaire d'Aria désirait depuis longtemps déjà, ce fut comme si le temps se figea. Le silence éphémère de gouttes suspendues en plein air.



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Ecoute cette médolie troublante.
C'est l'eau qui chante.
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Mar 5 Mai 2020 - 15:52

In the dark I see green
Aria Beurk
Cette gosse des rues ? Vous allez vous foutre de ma gueule.

Moi, le grand magicien des temps modernes ? Je suis arrivé au sommet seul. Je venais d'une famille dysfonctionnelle et j'ai su arracher un avenir radieux au destin. Je peux en être fier, n'est-ce pas ? Ouais, je peux en être fier. Au fond, je le suis, même s'il m'arrive de me questionner sur son avenir à elle.

Que fait-elle ? Qu'advient-il d'elle ? A-t-elle trouvé sa place ? Est-elle heureuse ? J'aimerai vous dire que je le sais. J'aimerais pouvoir m'en assurer. La vérité, c'est que je ne sais pas ce qu'elle est devenue. Je n'ai plus jamais eu de nouvelle d'elle après ses adieux.

J'ai cru l’apercevoir, une ou deux fois, assise au premier rang lors d'un de mes spectacles, mais comment m'assurer que c'était bien elle ? Elle n'était pas prévu dans le show, alors je ne pouvais pas vraiment la faire monter sur scène, vous voyez ? J'espère qu'elle a eu tout ce qu'elle voulait, qu'elle a réussit tout ce qu'elle a entreprit. C'est tout. La vie ne lui a pas fait de cadeau à elle aussi, alors pour moi, elle le mérite.

Ouais, vous allez vous foutre de ma gueule, c'est obligé. Je suis au sommet. Sauf que sans elle, je ne serais rien.

Cette gosse des rues, c'était ma raison de vivre, de réussir, d'exister.

In the dark I see green | Dimanche 1 octobre 1995 | Aria Beurk 200428122044787862

Flashback

Eileen n'aurait jamais cru que le message, sous couvert d'une insulte, et qui lui avait demandé une certaine réflexion pour les tournures de phrases, avait pu blesser Aria. Elle n'y avait pas songé une seconde. Déjà à l'époque et sans même s'en douter, elle la mettait sur un piédestal.

Aria était secrète, difficile à approcher, sèche et ironique. Une sang-pur qui fuyait les autres humains, préférait la solitude. Pourtant, elle avait accepté sa compagnie pendant plusieurs heures, lui avait ouvert la porte de son monde. À elle, une adolescente venant d'un tout autre plan de l'existence, qui n'était pas le sien, qu'elle n'aurait jamais dû approcher.

La Beurk, même si elle le cachait, était d'un courage exemplaire. L'illusionniste n'était pas idiote. Elle se doutait, elle savait que leur relation finirait par éclater au grand jour. Les mystères, ses longues nuits de recherche dans le château le lui avaient enseigné, finissaient toujours par être découverts et résolus.

Pourtant, la noble avait accepté de la retrouver. Elle était venue. La Gryffondor s'était préparée à une attente interminable, puis à s'avouer dans un murmure qu'elle avait fait le voyage pour rien. La porte de la pièce s'ouvrant sur une jolie blonde avait démontré son fourvoiement. Avait-elle souri comme une damnée, heureuse de la retrouver, ce jour-ci ? Heureuse de la voir venir, alors que rien n'aurait pu le prédire ? Oui.

Elle lui avait proposé un tour, puis un second. Celui dont la brune se souvenait, qui l'avait le plus marqué était d'une simplicité enfantine pour sa perception. Un jeu de cartes. Elle l'avait ouvert, puis la brune l'avait mélangé sous le regard attentif de sa nouvelle amie, avant de les étaler devant elle. Faces cachées sur une table.

Elle n'avait pas pris la parole immédiatement. À la place, elle avait pris sa baguette et la lui avait tendue. Une preuve que, non, elle n'utilisait pas la magie. Ou si c'était le cas, c'était de la magie sans baguette. Une adolescente de son âge n'en était pas capable.

Une illusion. Une magie invisible, indiscernable, dans l'oeuvre déjà programmée. C'était un message caché. Une confiance aveugle qu'elle lui accordait. Elle-même, à l'époque, n'aurait su dire pourquoi. C'était ainsi, elle ne se l'expliquait pas.

Quand sa compagne du jour l'avait capturée, la Queen avait explicité ses demandes, avait repris le cours de son tour.

« Choisis une carte et garde-là, ne me la montre pas tout de suite. »

Elle lui avait donné l'ordre avec un rictus à la fois amusé et provocateur. Doux. Aria, il fallait savoir la piquer à vif pour qu'elle accepte de se déparer de ses entraves. Elle l'avait regardé hésité, patiente, allant jusqu'à relever les yeux au plafond dans une attente muette, jusqu'à ce qu'elle eût choisi. Sans toucher le paquet, Eileen avait laissé l'esquisse d'un sourire en coin poindre sur ses traits.

« J'ai une chance sur cinquante-deux pour avoir raison, mais je dirais que tu as la reine de pique. »

La vérité, c'est qu'elle ne pouvait pas faire d'erreur. C'était l'un des premiers tours qu'elle avait maîtrisés, petite. Il était d'une simplicité affligeante pour elle, même s'il était toujours agréable de voir la réaction des sorciers quand elle le leur offrait. Un nouveau mensonge, bien que beaucoup plus simple à réaliser qu'une hypnose, et ce, même si l'empathe était extrêmement réceptive à cause de son don.

« La réalité, avait-elle soufflé après quelques secondes de suspenses, c'est que j'avais surtout pas intérêt à me foirer, parce que... »

Elle avait laissé sa phrase en suspens, mourir dans un silence égayé de son mysticisme exposé. De sa main droite, avec une dextérité maîtrisée par ses années d'entrainement, elle avait retrouvé le reste du jeu pour montrer les autres faces. Des faces qui étaient toutes vierges. Seul la reine de pique avait les symboles qui la caractérisaient. Une carte que la blonde tenait entre ses doigts et que la brune lui avait cédée. Un souvenir.


In the dark I see green | Dimanche 1 octobre 1995 | Aria Beurk 200428122044787862

Il était toujours agréable de voir et d'entendre le rire de la blonde. Eileen ne s'en lassait jamais. C'était à la fois une preuve de sa réussite et de l'amitié qui les liaient. Une preuve qu'avec elle, Aria parvenait à être elle-même. C'était précisément ce qu'elle demandait, ce qu'elle espérait. La sang-pure ne s'en rendait peut-être pas compte. Avec son don, qu'elle lui avait avoué à demi-mot, ça devait être compliqué.

Cependant, elle était bien plus captivante sans les dorures de son masque d'ivoire. Une glace aux facettes insoupçonnées qui, fondue, offrait tout un royaume souterrain aussi captivant que séduisant, d'une beauté à couper le souffle. Un royaume aquatique, où l'eau et l'air des musiques se mêlaient, se mélangeaient, pour former des bulles intemporelles, où il était facile pour les humains de s'y réfugier, d'enfin parvenir à respirer.

Elle était splendide et d'une ondulation, parvenait à capturer tout un océan torturé d'une moue égayée, ennuyée ou suppliciée. À l'image du liquide si fantasque, qui pouvait se métamorphoser en une multitude de spectacles enchanteurs, elle était fascinante.

Elle pouvait se draper de la sculpture naturelle d'une glace impérieuse, de la douceur enfantine de l'imaginaire d'un nuage, de la tranquillité soudaine d'un lac ou encore de la prestance royale d'un océan. Elle était ce tout. Elle était un royaume enchanteur où lion et serpent ne faisait qu'un, et où même les oiseaux auraient pu s'exprimer sous l'eau. Elle était unique. Elle était son secret. Elle était son aria.

Alors, quand les mots échappèrent à la Serpentard, avec une spontanéité aussi brusque qu'appréciable, la réponse de la Gryffondor ne put que fuser. La vitesse d'une goutte d'eau s'échouant des cieux, prémisse d'une soudaine tempête. Un ouragan qui allait happer son esprit.

« Eileen, pourquoi as-tu voulu devenir mon amie ?
Parce que je t'aime. »

La réponse était clairement à des années-lumière de l'explication que son interlocutrice quémandait, mais de la même simplicité qu'un tour préparé en amont. Une interrogation distordue par la perception de la jeune femme, enfoncée dans ses pensées, ses croyances, la poussant à offrir une réplique irréfléchie. Elle sentit néanmoins la chaleur escalader son être, ses joues et la compréhension éclaira son esprit dans un flash aveuglant.

Pourquoi as-tu voulu devenir mon amie ?

La question n'était pas au présent.

Ses lèvres s'entrouvrirent, puis se refermèrent. Un poisson hors de l'eau. L'aquatique était autant son univers que celui de la demoiselle assise à quelques mètres. Les mystères qu'il renfermait l'attiraient autant qu'elle convoitait les iris de la méduse à ses côtés.

Je n'ai jamais voulu être ton ami.

La pensée s'imposa à son esprit et les mots refusèrent de se dérober à son emprise. Elle ne voulait pas lui mentir, tout comme elle ne pouvait pas lui affirmer une vérité qui, elle le pressentait, la ferait fuir. Elle, à présent, avait une envie soudaine de sortir.

La pièce devenait trop exiguë, était trop petite et elles étaient seules. Pour se donner contenance, la brune attrapa Heinrich qu'elle déposa sur ses genoux et se mit à le caresser. Elle laissa son regard se perdre dans les flammes éternelles. Elle n'avait pas le droit de lui souffler de mensonge. L'illusionnisme, c'était une chose. Les paroles, c'était bien plus précieux.

« Je crois que je n'ai jamais vraiment voulu être ton amie, expliqua-t-elle dans une gêne croissante, tourbillonnante. Ce jour-là, tu m'as montré quelqu'un de sublime, une fille qui mérite d'être heureuse et c'est ce que j'ai voulu être pour toi. »

Tout dans la tournure de la phrase explicitait ce qu'elle cherchait à dire sans y parvenir. Il n'y avait aucun terme assez puissant, assez fort, à la définition assez précise pour qu'elle pût lui confier l'émotion qui l'ébranlait. Elle comprendrait, un jour, peut-être. Elle ne l'espérait pas, pas entièrement. La peur de la perdre. Il y avait une vérité absolue dans ces mots, cependant. Une vérité absolue qu'Aria pouvait facilement comprendre.

« Un petit bonheur. »

Elle désirait que la blonde fût heureuse. Des mots qui s'enfuyaient, qui lui échappaient. Avec ou sans elle ne lui importait pas vraiment. Tout ce qui lui importait, c'était l'assurance du salut de son âme tourmentée.

Je veux que tu sois heureuse.
FRIMELDA

Eileen M. King
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Sam 9 Mai 2020 - 18:38
in the dark I see green
Le tendre murmure d'un secret, la delicate vision d'une cachette. Un instant invisible que l'on partage a deux. Oh douce hypnose, toi qui sais m'envouter, reste avec moi pour l'eternite.

Dimanche 1er Octobre 1995


Flashblack


Dans son dos, le regard vif du vieux portrait l'observait. Allait-elle avoir l'imprudence d'ouvrir cette porte ? Le courage de poser sa main sur la poignée. Voilà à présent une bonne minute que la blonde était figée devant l'entrée de ce lieu que sa curiosité voulait découvrir mais que son sang voulait fuir. Le sorcier prisonnier du cadre derrière elle lâcha un rire cynique. Aria sursauta et se retourna aussitôt avec l'expression d'une enfant prise en faute. Son regard croisa alors la peinture et elle la défia du regard. Fichu tableaux. Et puis tant pis, elle entra.

Regretta-t-elle sa décision aussitôt qu'elle avait refermé la porte derrière elle ? Peut-être qu'une part d'elle, oui. Mais ce qu'elle ressentit à ce moment-là, surtout, ce fut une explosion de joie. La sienne ? Peut-être un peu, mais pas que. C'était étrange. Était-ce l'excitation de franchir l'interdit qui lui procurait cette sensation dans son corps ? Ou la joie de revoir la Gryffondor ? De combler sa solitude avec une présence inespérée ?

Ridicule. Si elle était là, ce n'était que par curiosité. Simple curiosité. Ça ne durerait pas. Juste un autre instant volé et ça s'arrêterait. La Sang-Pur ne se doutait pas à ce moment-là que ces moments hors du temps deviendraient aussi addictifs qu'une drogue.

Aria refoula cette émotion étrange qui la faisait se sentir légère et avança vers l'illusionniste les sourcils froncés de méfiance. Aucune parole ne vint briser le silence indéchiffrable qui avait pris possession de la salle vide. King se contenta de sortir un paquet de cartes et de le mélanger devant les yeux d'Aria qui se laissèrent alors envoûter une fois de plus. Allait-elle lui montrer un nouveau tour ? Devant l'impatience de ce qui allait suivre, Aria en oublia complètement l'expression austère qu'elle avait cherché à afficher et, malgré elle, son regard devint esclave des mouvements de la brune. Une nouvelle hypnose.

La Queen à la Carte lui tendit sa baguette. Aria sembla se réveiller de sa torpeur à ce moment-là. Vraiment ? Elle lui confiait sa baguette ? La blonde toisa sa vis-à-vis pendant quelques secondes. Elles ne se connaissaient pas, ne se fréquentaient pas. Et elle lui tendait sa baguette sans plus sans accommoder ? Décidément, cette King était une énigme. Une énigme que la Serpentard voulait de plus en plus déchiffrer. Elle s'empara du bois de charme. Ainsi fut scellée la promesse qu'aucune magie sorcière ne viendrait interférer avec la magie moldue de la Louisianaise.

- Choisis une carte et garde-là, ne me la montre pas tout de suite. 

La Beurk toisa un instant de plus la Née-Moldue qui leva sa tête vers le plafond pour ne pas regarder son choix. Quel était ce tour ? Qu'allait-elle lui montrer cette fois ? Quelle magie renfermaient ces cartes ? L'illusionniste pouvait-elle les suspendre dans les airs comme elle l'avait fait avec la pluie ?

La spectatrice détacha son regard suspicieux de la magicienne pour le rabattre sur les cartes. En choisir une. Elle s'éxecuta sans trop réfléchir et la regarda. Dame de Pique. Elle hocha la tête.

- C'est bon.

King rabaissa ses deux topazes sur la silhouette d'Aria. Son sourire en coin crispa un peu plus les sourcils de la blonde. Qu'avait-elle derrière la tête ? A quoi rimait cette mise en scène ?

- J'ai une chance sur cinquante-deux pour avoir raison, mais je dirais que tu as la reine de pique.

Aria laissa une expression ahurit se dessiner une demi-seconde sur son visage avant que la suspicion revienne plisser son front. Elle ne se laisserait pas tromper – même si c'était déjà le cas -, il devait forcément y avoir une explication magique. Dévorée par la méfiance qui prenait le pas dans son esprit incrédule, Aria jeta tout de même un nouveau coup d'œil à sa carte. Une putain de Dame de Pique.

- La réalité, reprit King dans un murmure à l'aura presque mystique, c'est que j'avais surtout pas intérêt à me foirer, parce que...

La magicienne retourna toutes ses cartes. Le paquet entier était taché d'une blancheur insoupçonnée. Un alignement de cartes vierges. La seule pourvue d'un motif résidait entre les doigts de l'unique spectatrice. Et celle-ci, cette fois-ci, ne put retenir son étonnement de s'exprimer sur son faciès. Ses lèvres se détachèrent l'une de l'autre et elle observa les cartes sur la table avec ses sourcils à présent courbé en sens inverse. Ses longs doigts se laissèrent attirer par l'une des vierges et la saisit avant de la retourner dans tous les sens devant ses opales réflectives.

- Impossible, murmura-t-elle.

Comment avait-elle réussi à piocher la seule vraie carte du jeu sans que la Queen à la Carte n'intervienne une seule fois dans son choix ?

- Le paquet est ensorcelé, conclut-elle d'un ton inflexible. Un sortilège d'attraction ou quelque chose comme ça.

La Vipère défia la Lionne du regard. Elle ne voulait pas y croire. Ne voulait pas accepter que les Moldus possédaient leurs propres stratégies pour créer de la magie. La Beurk ayant pourtant elle-même une réflexion très logique, les croyances qu'on lui avait toujours inculquées la poussait à croire que seule la vraie magie pouvait tromper l'esprit. L'illusionnisme ? Ce mot inconnu allait pourtant finir par se frayer un chemin dans sa tête blonde. Il fallait d'abord, toutefois, démolir quelques murs qui cloisonnaient son esprit. Tache à laquelle la King allait s'atteler – inconsciemment ou non - à partir de ce jour-ci.

Alors, pourquoi ? Pourquoi se donner tant de mal pour abolir ces frontières ? Pourquoi vouloir relier son monde à celui de la Sang-Pur ? Pourquoi s'obstiner à créer un pont qui n'aurait jamais dû exister ?




- Parce que je t'aime.

Le regard confiant de la Beurk tomba aussitôt dans une fuite vers le bas, au-dessus de deux joues rosies par cette réponse inattendue. Elle masqua maladroitement son inconfort dans une toux entremêlée d'un rire nerveux. Si elle avait eu quelque chose en bouche à ce moment-là, probablement qu'elle se serait étouffé avec.

Eileen lui avait-elle déjà dit ça ? Aria ne s'en souvenait pas. À vrai dire, elle ne se souvenait d'aucune personne lui ayant déjà dit ça. Peut-être sa grand-mère Diana quand elle était petite, mais là encore le souvenir restait flou. « Parce que je t'aime. » Des frissons la parcouraient encore alors que ces mots résonnaient à l'infini dans son esprit. Avait-elle douté de l'affection d'Eileen à son égard ? Non. Ou peut-être juste un peu, des fois, quand elle la voyait rire avec Wyatt et qu'à ces moments-là, elle, Aria, n'existait pas. Mais elle n'avait pour autant jamais douté de la sincérité de leur amitié. Aussi interdite qu'elle fut. Alors, pourquoi ça lui faisait cet effet-là ? « Parce que je t'aime. » Une boule étrange qui fleurissait dans son ventre. Agréable ou désagréable ? Elle ne savait pas, ne savait plus. Tout devenait flou, sa réflexion s'était figée.

Seul le feu de cheminée faisait encore entendre son crépitement dans le silence qui avait envahi la petite pièce. Un silence lourd. Embarrassant. Et Aria ressentait cette gêne si intensément qu'elle n'aurait même pas su dire si elle ne venait que d'elle ou si Eileen la partageait.

L'héritière des Beurk était-elle censée répondre quelque chose ? Mettre à son tour des mots sur l'affection qu'elle portait à la brune ? Mettre des mots. C'était bien quelque chose qu'on ne lui avait jamais appris. Jouer avec les mots, les enjoliver, les manipuler, ça oui, on avait voulu le lui apprendre. Ça avait mieux marché avec son frère. Mais, mettre des mots sur ses émotions, ses sentiments... C'était là un concept inconnu dans la sphère la plus élevée de la hiérarchie sorcière, au plus grand désarroi de l'Empathe.

Alors, démunie et déstabilisée, celle à la pâle chevelure s'enfonça encore un peu plus dans le silence ambiant. À son plus grand soulagement, la Queen à la Carte reprit la parole :

- Je crois que je n'ai jamais vraiment voulu être ton amie. Ce jour-là, tu m'as montré quelqu'un de sublime, une fille qui mérite d'être heureuse et c'est ce que j'ai voulu être pour toi. Un petit bonheur. 

Le malaise d'Aria gravit un nouveau pic. Son visage - d'habitude si pâle – devait à présent être écarlate. Un sourire touché vint toutefois remonter ses pommettes rougies. Quelqu'un de sublime. Une fille qui mérite d'être heureuse. La Beurk se sentait à mille lieux de ces descriptions qui la concernaient. En fut-elle d'autant plus flattée ? Peut-être. Ou surprise, plutôt. Car un doute persistait malgré elle quant à la véracité de ces paroles. Doutait-elle de la sincérité d'Eileen ? Ça non, du tout. Mais la trompettiste voyait la vie à travers un filtre lumineux qui rendait le monde autour d'elle bien plus coloré qu'il ne l'était. Tandis que la violoniste voyait quant à elle l'univers en noir et blanc et avait donc du mal à prendre réellement conscience de ce qu'elle pouvait représenter aux yeux de la Gryffondor. Une autre folie de sa perception déformée, sans doute.

L'empathe regrettait-elle sa question ? Son malaise actuel lui faisait penser que oui. Là où la douce sensation qui enveloppait son âme aurait susurré que non. Avait-elle eu sa réponse ? Sa rationalité lui faisait croire que non. Eileen n'avait pas pu la trouver si incroyable après un simple après-midi sous la pluie. L'affection ne naissait qu'avec le temps, n'était-ce pas ? Pourtant, son don lui murmurait que les sentiments étaient un domaine bien trop complexe pour en attendre une explication rationnelle. Bien trop insaisissable, bien trop inexplicable. La rencontre d'une nouvelle personne pouvait créer tout un tas d'émotions chez un humain. Mais ces émotions pouvaient-elles se muaient si rapidement en sentiments ? Un mystère qui échappait à la Sang-Pur qui fuyait autant les émotions que les sentiments. Sauf avec elle.

Elle eut enfin le cran de relever la tête vers son amie. Elle aurait voulu lui dire à son tour à quel point elle la trouvait grandiose, sa Queen à la Carte. Sa magicienne préférée. Sa lionne exceptionnelle. Son secret précieusement gardé. Mais rien d'autre qu'une raillerie taquine accepta de franchir ses lèvres.

- Quel égocentrisme ! Miss King voulait donc seulement devenir l'astre solaire d'une nouvelle personne ! Qu'une nouvelle planète gravite autour d'elle !

La farceuse faisait son grand retour pour combler la gêne qu'elle avait elle-même amené par sa soudaine interrogation. Mais à son grand sourire malicieux, on pouvait facilement comprendre qu'aucun de ses mots n'étaient prononcées avec sérieux. Rien que l'utilisation du nom de famille de son amie alertait sur le second degré de ses paroles.

- Eh bien, ton sombre complot est une réussite visiblement.

Un sourire en coin se dressa quelques secondes sur le visage de la Vipère avant de se plier dans une courbe plus douce, quand elle ajouta :

- Et c'est un univers splendide que tu nous as créé.

Ses orbites bleues voyagèrent une fois de plus dans la pièce jusqu'à s'arrêter sur le vitrail dévoilant les profondeurs du lac.

- Rien que pour nous deux...

Sa voix auparavant taquine se faisait à présent plus songeuse et quand ses iris se déposèrent à nouveau sur Eileen, elle chuchota :

- Merci.

Un mot qui était non seulement adressé aux exploits de la Lionne pour leur dénicher un endroit pareil, mais aussi – de manière plus subtile – adressé aux paroles précédemment énoncées. À sa sincérité touchante. Sa présence permanente bien que cachée.

Refusant de laisser le malaise s'installer à nouveau à leurs côtés sur les canapés douillets, la blonde se leva et décrocha son pendentif de son cou.

- D'ailleurs, cette salle mérite une inauguration digne de ce nom, ne crois-tu pas ?

Comme un pendule, elle laissa son pendentif se balancer sous son poing fermé. L'hypnose d'une mélodie à partager.

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Aria Beurk
Admin empathique
Aria Beurk

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Ecoute cette médolie troublante.
C'est l'eau qui chante.
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Mar 12 Mai 2020 - 17:04

In the dark I see green
Aria Beurk
Même si, au fond, je l'avais toujours su, retirer ses œillères, se l'avouer pleinement, c'était étrange. Je ne crois pas que j'y étais préparée, pas vraiment. Et je ne crois pas qu'Aria l'était également. Pas que je m'attendais à quelque chose de sa part. Pas que je m'attendais à ce qu'elle me retourne de tels sentiments, ça non, mais peut-être que si je m'en étais rendue compte plus tard, ou peut-être que si je ne lui avais pas dit, clairement, sans le vouloir, ça nous aurait évité quelques problèmes.

Ou ça en aurait créé d'autres, maintenant que j'y pense. Comment le savoir, de toute façon ? Ce qui est fait, est fait, comme on dit. On ne peut pas revenir dans le passé et changer les choses. Enfin... Techniquement, si, c'est possible, mais même si j'avais essayé, je n'aurais jamais pu m'empêcher d'ouvrir les yeux, ni de lui avouer de cette façon. C'est ça que je veux dire par-là.

Après, je n'ai pas vraiment à me plaindre. Sur le moment, elle ne l'avait pas compris. Enfin, je ne crois pas. Et, je dois bien l'avouer, ça m'avait soulagé. Je ne craignais pas vraiment ce que j'étais. C'était étrange, bien sûr. À cette époque, et surtout dans ce monde, on ne pouvait pas vraiment dire que c'était quelque chose de bien vue. Ce n'était pas, et je mets clairement des guillemets, normal pour la majorité des sorciers.

Comprenez bien. Aria, c'était une sang-pure. Même si je l'acceptais telle qu'elle était, que je ne voulais surtout pas la changer, je ne pouvais pas m'empêcher de craindre le jour où elle saisirait vraiment la portée de mes mots. Comment allait-elle réagir ?

Elle avait été élevée dans des préjugés très fort, et même si elle avait su passer outre cette barrière une fois, pour moi, cette née-moldue qui cachait ses origines tout en les montrant fièrement de façon relativement subtile, je ne pouvais pas être certaine que ça recommencerait. D'autant plus qu'elle ne le faisait pas de façon visible, que c'était un secret entre nous deux. Pas que je ne comprenne pas la nécessité, je ne suis pas idiote.

Enfin, bref. Tout ça pour dire que, ouais, ça me faisait peur. Ça me terrifiait. Et si je la perdais à cause de ça ? Mais en même temps, assez bizarrement, ça me faisait du bien de lui avoir dit. C'était paradoxale. Du coup, je me dis que c'était très bien comme ça.

Je voulais dis, non ? Je n'avais pas à me plaindre.

In the dark I see green | Dimanche 1 octobre 1995 | Aria Beurk 200428122044787862

Flashback

La réaction d'Aria, ce jour-ci, devant un tour d'une simplicité presque affligeante, était assez prévisible. Elle n'y était pas habituée. Elle n'était pas capable de comprendre ce qui venait de se passer. Elle n'avait pas la réflexion qu'un non-maj pouvait avoir pour déceler l'arnaque. Elle comprenait qu'il y en avait une, mais la façon de réfléchir n'était pas la même. Alors, suite au premier mot qu'elle affirma, après la réalisation du tour, arracha à Eileen un léger rictus en coin, victorieux.

« Impossible. »

La Queen à la carte, qui ne possédait pas ce surnom pour rien depuis sa première année, l'observait toujours. Elle retournait la carte vierge dans tous les sens. Il était évident que la blonde allait rechercher une explication, si ce n'était logique, au moins cohérente vis-à-vis de son univers. Et si la King ne lui avait encore jamais affirmé, ce qui viendrait dans leur futur, ses réelles origines, la Beurk devait déjà s'en douter.

Non que cela gênât la lionne, c'était précisément ce qu'elle recherchait. Elle n'affirmait pas, mais elle le faisait comprendre. Si un jour, elle devait se draper derrière un mensonge, cependant, elle le ferait, y était déjà prête, suite aux sages conseils d'un autre élève. Mentir, ce n'était pas dérangeant, ce n'était pas grave, tant que ça ne blessait personne. Tant que c'était fait pour émerveiller ou protéger.

« Le paquet est ensorcelé, explosa l'autre demoiselle, sous le regard pétillant de son interlocutrice. Un sortilège d'attraction ou quelque chose comme ça. »

Les deux vipères, l'une refoulée, l'autre bien visible, se défièrent du regard. Lac gelé, implacable, d'un côté. Océan malicieux, chaleureux, de l'autre. Après quelques secondes, l'illusionniste coupa court au contact. Une fausse mimique coupable. Actrice et chef d'orchestre de ses propres réalisations, ce n'était qu'ainsi que les contes, qu'elle offrait, fonctionnait. Après un temps indéfini, elle déposa sa main sur la table et tapota celle-ci de son index, dans un rythme précis. Elle devait lui faire comprendre et, douée pour improviser, elle savait précisément comment s'y prendre.

« Revelio, répliqua-t-elle, avant de relever le regard sur le visage de son vis-à-vis. La formule pour découvrir si quelque chose est ensorcelé, c'est revelio. »

Elle marqua une pause, soupira une fausse défaite, puis laissa son dos choir sur le dossier de sa chaise. Elle fronça légèrement les sourcils, jouant de d'expressions calculées pour la convaincre. Les bras croisés, elle donnait l'impression de se retrouver sur la défensive. La réalité, c'était qu'elle avait déjà gagné. Un duel à sens unique. Une partie d'échec truquée. Elle avait triché. C'était simple, d'une grande facilité.

Ce qui était pratique, quand on était un serpent planqué dans la fosse aux lions, c'était que les autres ne se méfiaient pas assez. C'était quelque chose que la Louisianaise avait très vite saisi et, même si le Choixpeau avait hésité, elle ne pouvait que le remercier, avec le recul, de son choix de maisonnée. De la sorte, en portant le blason vert, aurait-elle pu tant s'en amuser ? Dans ces autres circonstances, aurait-elle eu la possibilité de surprendre aussi facilement les autres écoliers ? Ce jour-ci, elle comprit que ça n'aurait pas été le cas. Le hurlement de l'objet l'envoyant à Gryffondor avait été une bénédiction.

« Utilise l'enchantement et tu auras ta réponse. »

À la seconde même où la sorcellerie allait révéler à sa compagne du moment l'absence évidente de sortilège, la graine que son interlocutrice avait plantée serait arrosée. Le temps devait encore faire son office, mais la blonde serait forcée d'accepter, dans une semaine ou dans dix ans, la possibilité qu'il n'y avait pas besoin d'une baguette pour faire de la magie.

La magie, ça ne se résumait pas à agiter bêtement un bout de bois dans un sens ou dans un autre, en marmonnant des formules en latin ou en grec, pour dénaturer ce que le monde nous offrait. Ça, c'était de la sorcellerie. C'était ce qui avait effrayé les moldus par le passé, aussi merveilleux que ce fût. Non, la magie, c'était la possibilité de faire rêver, de faire voyager, de faire découvrir des horizons inexplorés.

Tout comme il était possible de modifier une table en chaise avec la bonne formule, il était possible de faire croire l'impossible avec la bonne méthode. Comme les larmes du ciel en suspens. Tout comme il était possible d'enfermer la mort en bouteille avec la bonne recette, il était possible d'ouvrir les cœurs avec la bonne mélodie. Comme les notes qu'un archet ôtait à un violon nacré, mêlées à celles de cordes qui dansaient.


In the dark I see green | Dimanche 1 octobre 1995 | Aria Beurk 200428122044787862

« Parce que je t'aime. »

C'était bien la première fois, depuis toute son existence, qu'elle ressentait autant de gêne. À l'image d'une blonde aux joues rougies, ce qu'elle ne remarqua pas, les siennes se retrouvaient à brûler. Les flammes qui la dévoraient n'avaient rien de malfaisantes, d'insupportables. Elles n'avaient rien de réellement désagréable. Ce qui l'était, c'était la possibilité, ou plutôt la certitude, que la blonde allait attraper ses émotions et les ressentir avec la même intensité.

D'habitude, cette possibilité ne la gênait pas. Au contraire. Si Aria voyait son don comme une malédiction, Eileen l'avait découvert comme une bénédiction. Elle ne pouvait pas comprendre, pas entièrement, ce qu'elle vivait, c'était évident. Toutefois, dans sa perception erronée, elle imaginait que la blonde pouvait saisir ce que les autres traversaient et, si elle s'y décidait un jour, pourrait les aider.

Non qu'elle fût idiote pour autant, elle ne se faisait pas d'illusion quant à cette possibilité. Jamais la demoiselle ne le ferait d'elle-même. Elle ne supportait pas l'idée de la foule, ce qui était compréhensible, et elle fuyait la majorité de l'espèce humaine à cause de sa capacité innée. Quelque chose que la brune n'avait jamais vraiment admis, et n'avait pas cherché à explorer, jusqu'à ce jour-ci. Si elle sentait sa gêne, pouvait-elle vraiment définir si c'était la sienne ?

Ce fut à cause de cette possibilité qu'elle voulut quitter l'endroit, ce qu'elle ne fit pas. Ses jambes étaient en plombs et seule la partie haute de son corps, en dehors de son visage qu'elle cachait derrière sa tignasse, répondait à ses ordres. Elle attrapa Heinrich et commença à le caresser. Une façon de se donner une contenance.

Elle n'avait pas répondu à la question, n'en avait pas réellement l'envie et, pourtant, elle allait s'y atteler. Bien à l'avance, elle pouvait déjà le prédire. Elle ne lui ferait pas faux bond, elle lui offrirait une explication qui n'était pas aussi directe, bien que tout aussi parlante. À travers le rideau que formait sa chevelure, elle se mit à regarder, pensivement, les flammes verdâtres dans l'âtre.

« Je crois que je n'ai jamais vraiment voulu être ton amie. Ce jour-là, tu m'as montré quelqu'un de sublime, une fille qui mérite d'être heureuse et c'est ce que j'ai voulu être pour toi. »

Son malaise était croissant.

Tout. Elle lui avait tout dit, ou presque, bien qu'avec la retenue qui la caractérisait quand elle n'était pas à son aise.

Elle en était amoureuse.

C'était... étrange de le comprendre aussi soudainement. Elle avait l'impression que le feu dans ses joues se muait en une explosion incontrôlable dans l'intégralité de son corps. Elle en avait la chair de poule et des frissons le long de la colonne vertébrale.

Les derniers termes, qu'elle explicita, lui échappèrent dans un presque murmure, comme la plus importante de toutes les révélations. Comme si c'était ça, qu'elle recherchait. Comme si son amie devait retenir ce message-là, plus que tous les autres mots qu'elle avait prononcé jusque-là.

« Un petit bonheur. »

Le sien. C'était le cas. C'était ce qu'elle avait voulu façonner pour elle. Elle se foutait de savoir si Aria lui retournait ses sentiments. Elle n'y croyait pas une seule seconde. À ses yeux, ce n'était pas possible et elle ne le voulait pas. Elle n'était pas un bon choix. Ce n'était pas cohérent pour une sang-pure de son rang. Elle était une fille et, même si ça ne se savait réellement que par six personnes, elle était une née-moldue. Ça lui allait ainsi. Parce que, ce qu'elle lui avait dit, elle le pensait, elle y croyait dure comme fer. Tout ce qui comptait, c'était elle.

Tabata était peut-être une sang-pure, mais elle avait su se détacher très vite de cette étiquette pour apprendre à apprécier ce que la vie lui donnait. Sa meilleure amie serait heureuse, elle y parviendrait. Elle était entourée et protégée, malgré ses frasques et son aveuglement. Elle n'avait rien à craindre pour elle.

Ce n'était pas le cas d'Aria qui n'avait appris qu'à fuir pour se construire.

Elle, qui était née dans une famille fermée, qui empoisonnait l'esprit par une éducation raciste, méprisante. Elle, qui avait hérité d'une malédiction qui la forçait à cloisonner ses propres émotions et sentiments. Elle, qui n'arrivait pas à avouer ses propres ressentis sauf à l'aide d'un instrument. Elle, à ses yeux, méritait plus que tous les autres d'être heureuse.

Elle n'était pas objective, elle le savait, elle le comprenait, mais honnêtement, elle s'en foutait. Aria méritait d'être heureuse. C'était simple, c'était concis, c'était précis, une vérité absolu. Elle méritait d'être heureuse. Avec ou sans elle, ça n'avait pas la moindre importance. Elle méritait d'être heureuse. Elle le dirait, serait capable de le hurlait pour le faire entendre si nécessaire. Elle méritait d'être heureuse.

Cependant, parce qu'elle ne voulait pas la gêner plus qu'elle devait déjà l'être. Parce qu'elle refusait de s'enfermer dans une spirale tourbillonnante d'émotions qu'elle ne contrôlait pas, directement créée par ses sentiments, elle préféra garder le silence. Elle le pensait, y croyait autant qu'elle savait que la terre avait besoin de l'astre du jour pour subsister. Elle y croyait autant qu'elle savait que la lune n'était visible que parce qu'elle reflétait les rayons du soleil.

Cette connaissance, maintenant, elle l'avait, tout comme elle l'avait partagé. Elle ne recommença pas et, dans un même temps, elle se fit la réflexion qu'elle ne recommencerait juste plus. Pas de cette façon.

Forte de cette constatation mentale, elle détourna les iris des flammes pour les poser sur les océans de lumière et se perdit un temps à l'intérieur. À chaque fois qu'elle les rencontrait, elle voyageait, rêvait. Elle savait enfin pourquoi elle vivait cet effet. C'était plaisant de pouvoir mettre des mots, même s'ils ne seraient jamais assez puissants, sur ce qu'elle ressentait.

« Quel égocentrisme ! Miss King voulait donc seulement devenir l'astre solaire d'une nouvelle personne ! Qu'une nouvelle planète gravite autour d'elle ! »

La brume de ses songes se dissipa, comme si, déesse de l'univers, la Beurk avait créé une bourrasque violente pour la chasser. Eileen esquissa un sourire en coin. Son embarras disparaissait. Il laissait sa place à l'amusement. L'étudiante laissa un rire s'échapper de ses lèvres, relativement bref, un poil moqueur envers elle-même.

Pas d'une nouvelle personne quelconque, mais d'elle, de son secret. Et, même ainsi, ce n'était pas vraiment ce qu'elle désirait, mais si elle devait être honnête envers elle-même, ce qu'elle préférait être, ce serait agréable. Être l'unique rayon de soleil d'Aria, aussi égoïste que ce fût, ne serait-ce pas un rêve qui devenait réalité ?

Elle fit disparaître bien vite cette interrogation de son esprit et croisa les bras, dans une fausse attitude défensive. Ou peut-être ne l'était-elle pas tant que ça. Une défense contre elle-même, son adversaire le plus brutal, le plus difficile à combattre, à dompter.

« Eh bien, ton sombre complot est une réussite visiblement. »

Pourquoi son cœur venait-il de rater un battement ? C'était une plaisanterie, rien d'autre. Juste une boutade de son secret. Il n'y avait, dans ces mots, aucun message caché. Elle n'avait pas à en imaginer un, ça ne servait à rien. L'espoir n'était pas permis ici. Comme elle pouvait facilement imaginer un tsunami qui ravageait tout sur son passage, elle refusa ce sentiment, s'en débarrassa d'un revers mental.

« Et c'est un univers splendide que tu nous as créé. »

Elle ne répliqua pas. Elle parvenait, maintenant, à étouffer son malaise, à faire ressentir sa joie, comme à l’accoutumé. Néanmoins, elle s'en doutait, si elle l'ouvrait maintenant, elle ne maîtriserait pas sa voix. Elle n'y arriverait pas, pas dans l'immédiat. Elle se devait d'être patiente, d'attendre le bon moment. Elle préféra, de fait, la laisser s'exprimer. Elle devait se calmer.

Ce n'était pas si difficile, elle y était habituée depuis des années, bien avant son arrivée dans le monde magique. La technique était simple. Elle fermait les yeux et retenait sa respiration pendant six secondes, puis elle soufflait. Elle patientait six secondes de plus, puis elle inspirait.

Un procédé qui parvenait à la détendre jusqu'à l'endormir quand elle ne trouvait plus le sommeil. Il servait aussi à la cadrer, à la détendre dans des situations de stress intense. La seule différence résidait dans le fait qu'elle ne pouvait pas laisser ses paupières closes. Ce serait bien trop visible.

« Rien que pour nous deux...
Pour toi. Uniquement toi... »

Elle n'avait pas pu se retenir plus longtemps et l'avait susurré. Elle voulait qu'elle comprît. Elle ne le faisait pas pour leur duo. Elle le faisait pour elle. Uniquement elle. Parce qu'elle était ce besoin qui lui avait tant manqué pendant des années. Qu'elle était ce sentiment, si extraordinaire, qu'elle avait recherché sans jamais le retrouver, pas complètement, jusqu'à ce jour. Il prenait une forme différente, plus intime, mais il était bien présent, semblable. Elle était tout et elle devait le comprendre. Cet univers, il lui appartenait entièrement.

« Merci. »

Ce simple mot eut plus d'effet que toutes les offrandes qu'Aria aurait pu lui offrir. Ce simple terme, prononcé pensivement, avait plus de poids que tous les aveux qu'elle aurait pu formuler. Ce merci avait le goût de la réussite. Il offrait une vue plongeante sur un futur radieux. Il avait la sensation d'une caresse dans les cheveux.

En bref, il avait l'odeur si bénéfique du bonheur.

Comme si la blonde refusait que l'instant, magique, se dissipât, elle se redressa. Elle décrocha son pendentif, le laissant pendre le long de ses doigts, où son violon miniaturisé patientait. Incapable de prononcer le moindre mot, de comprendre pleinement ce qu'elle attendait, la brune laissa ses yeux voyager sur le pendentif, hypnotisée par le pendule imaginé.

« D'ailleurs, cette salle mérite une inauguration digne de ce nom, ne crois-tu pas ? »

Pour seule réponse, l'autre adolescente se releva à son tour, tout en retirant le charme de sa position initiale. Réflexe d'une duelliste devenue aguerrie par les années, bien qu'elle ne possédait pas de holster, elle avait pris l'habitude de la cacher dans ses manches trop grandes. Elle se rapprocha rapidement de sa compagne et, tout en murmurant l'enchantement pour lui rendre sa taille initiale, attrapa l'instrument nacré pour le lui tendre avec une esquisse solaire. Elle n'avait pas besoin de s'adresser directement à elle par des mots. Elle allait le faire à travers des notes.

Des notes qui venaient d'un monde que la Serpentard découvrirait, un jour, la Gryffondor s'en était fait la promesse. Des notes qui, d'habitude, possédaient leurs paroles. Des notes qui, d'habitude, étaient l'accompagnement d'un message prononcé de façon plus marqué. Ce jour-ci, cependant, elle se contenterait de lui affirmer ce qu'elle désirait lui dire à travers un morceau arrangé. Ou deux. Ou trois. Autant qu'il le faudrait.

Dans cette optique, ce ne fut pas sa trompette qu'elle fit apparaître, mais sa guitare électrique, enchanté, d'un vert si reconnaissable. Le même que le blason que son duo portait. Puis, elle ordonna l'apparition des partitions dont elles auraient besoin pour discuter. La mélodie qui allait les guider dans ce nouveau monde.

Ainsi, la barre bien en main, ses doigts prêts à naviguer, et de nouveau installée, l'Américaine ferma les yeux. L'Anglaise suivrait, elle s'en était assurée.

Maintenant, elle pouvait lui transmettre son message.

Nothing else matters.

FRIMELDA



Musique :
Eileen M. King
Admin enragé
Eileen M. King

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Rêve ta vie en

COULEUR
• lilie
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Sam 16 Mai 2020 - 18:43
in the dark I see green
Le tendre murmure d'un secret, la delicate vision d'une cachette. Un instant invisible que l'on partage a deux. Oh douce hypnose, toi qui sais m'envouter, reste avec moi pour l'eternite.

Dimanche 1er Octobre 1995

- Un petit bonheur.

Des mots tendres, sincères, secrètement euphorisants. Mais surtout porteurs d'un malaise croissant. Regards fuyants, pommettes rougies, silence ambiant. L'embarras d'Aria était décuplé par deux sans qu'elle ne distingue pour autant les frontières de ses propres émotions. Un brouillant confus. Un flou diffus.

Le coassement d'Heinrich, posé sur les genoux d'Eileen, la ramena à la réalité.

Quelque chose. Il fallait trouver quelque chose à répondre. Et quand une situation déstabilisait la Vipère, ses vieilles habitudes prenaient le dessus. La moquerie. Le sarcasme. Cueillis comme des fleurs égarées dans le champ d'affection qu'elle portait à la Lionne.

- Quel égocentrisme ! Miss King voulait donc seulement devenir l'astre solaire d'une nouvelle personne ! Qu'une nouvelle planète gravite autour d'elle !

Le regard à nouveau levé, Aria assista au changement d'attitude instantané de son amie. Elle s'enfonça un peu plus dans son fauteuil dans un rire amer et croisa les bras dans une posture de défense. Un sourire en coin trahissait son amusement. L'embarras s'estompa. Envolé pour laisser revenir la joie.

- Eh bien, ton sombre complot est une réussite visiblement.

Le Serpent délaissa sa peau rugueuse au pied du Mont Sarcasme pour à nouveau s'afficher sous une apparence lisse et douce.

- Et c'est un univers splendide que tu nous as créé.

Un mince sourire vint illustrer la sincérité de la blonde. Ses pupilles quittèrent celles de son secret pour plonger dans le bassin bleuté, de l'autre côté du vitrail. Un nouveau songe qu'on offrait à ses yeux gourmands. Un nouvel univers rien que pour elles.

- Rien que pour nous deux...

Le ton rêveur, l'air absent. Un murmure fuyant. Des pensées qu'elle peinait à mettre en mots. Des émotions qu'elle voulait à son tour partager. Des sentiments qui n'arrivaient pas à emprunter un chemin direct pour se montrer. Puis, une réponse qui arriva aussi soudainement qu'un coup de tonnerre.

- Pour toi. Uniquement toi...

Touchée par la foudre. Une électricité indescriptible remonta le long de la colonne vertébrale d'Aria. Ses iris recherchèrent aussitôt le contact de leurs partenaires préférés. Des regards qui se lièrent à nouveau, quoiqu'un peu maladroitement. Pendant une seconde qui semblait figée dans le temps, ces mots se déclinèrent en une palette de couleurs infinie dans l'esprit de la blonde et, sur un fond de souvenirs entrelacés, ils prirent tous leurs sens.



Flashblack

La magie moldue n'existait pas. Le monde moldu était terne, plat, vide. Inintéressant. Encore plus que celui des Sorciers. Les Moldus n'étaient pas dignes d'intérêt. Les Moldus représentaient l'impureté de l'humanité.

C'était ce qu'on lui avait toujours appris.

Comment une simple Dame de Pique avait pu ébranler ces croyances ancrées ? Une reine majestueuse qui par sa seule apparition avait fragilisé les fondations d'une grande bâtisse. Armée d'un marteau, elle menaçait Aria du regard. Un pas de plus et je cogne dans le mur. Aria ne voulait pas voir ce mur s'effondrer.

- Impossible.

Un murmure de protestation. Une brigade de renfort. Le déni comme meilleure défense.

- Le paquet est ensorcelé. Un sortilège d'attraction ou quelque chose comme ça.

Un pont entre deux regards. Un affrontement muet. La Dame de Pique abdiqua, retira son armée. Le pont disparu. Un index se mit à percuter la table dans l'impatience du silence, tapant le rythme régulier des soldats qui se repliaient. Jusqu'à refermer le piège.

- Revelio. 

La Dame de Pique lui fit à nouveau face. Déterminée. Prête au combat.

- La formule pour découvrir si quelque chose est ensorcelé, c'est revelio.

Aria fronça les sourcils. Elle ne connaissait que trop bien cette formule. Un hymne familial. Une tradition commerciale. Une Règle d'Or. « Ne toucher à aucun objet de Barjow&Beuk avant d'avoir, au minimum, lancé ce sort. » Un enchantement qui dévoilait de sombres secrets, qui extrayait le vice caché de certains objets, qui exorcisait sa cible. Le premier sortilège auquel devait penser un sorcier qui touchait à la plus sombre dimension de la magie s'il tenait à sa survie.

Cependant, ce jour-là, il n'était pas question de révéler les tranchants obscurs de la magie mais bien son absence totale.

- Utilise l'enchantement et tu auras ta réponse.

Une part d'elle voulait refuser. Elle craignait cette réponse. Elle la connaissait déjà. Et ses remparts en tremblaient.

Elle sortit sa baguette et la pointa sur la carte blanche qu'elle tenait dans son autre main.

- Revelio.

Il ne se passa rien. Un silence terrifiant. Un vide qui aspira sournoisement l'obstination de la Verte-et-Argent. Elle resta figée. Incrédule. Sept secondes. Elle sortit de sa torpeur, rassembla les cartes pour reformer le paquet qu'elle tendit à l'illusionniste. Elle voulait une nouvelle preuve.

- Encore, sil-te-plaît. Un autre.

Un pas de trop. Le marteau asséna un nouveau coup. Le jeu n'était pas ensorcelé. Un pan du mur s'effondra.  La magie moldue existait.


~

Les flocons trouaient le ciel gris, c'était les vacances de Noël. Wilty déposa les bagages de la jeune Beurk dans sa chambre d'un claquement de doigt puis disparut. Aria s'approcha du mur qui abritait un grand aquarium et y plongea son regard, une main entrelaçant son pendentif. Ça faisait du bien d'être rentrée. Mais, dans son cœur, une autre émotion tentait de s'inviter. L'ombre d'une personne qui allait s'en doute lui manquer. Pour la première fois depuis son entrée à l'école de sorcellerie, le Poudlard Express l'ayant ramené à son foyer pour les fêtes de fin d'année ne lui était pas apparu comme un sauveur tant attendu. Pour la première fois, elle n'avait pas été pressée de quitter le château. Pour la première fois, elle avait eu peur que la solitude se fasse plus étouffante dans sa propre maison. Car, pour la première fois, son antipathie avait donné l'opportunité à une amitié de fleurir dans les recoins secrets du château. Pour la première fois, elle avait quitté Poudlard avec un certain visage flottant dans ses pensées.

Dans le coin de son champ de vision, une faible lueur naquit. Aria détourna son attention de la vitre aquatique pour tourner la tête vers la source de lumière inhabituelle. Sa chambre, seulement baignée des derniers rayons du jour qui s'éteignait, était plongée dans une semie-obscurité qu'elle appréciait. Hormis l'aquarium luxueux, sa décoration était sobre. Une large pièce avec un lit arrondi en son centre pour étouffer le vide créé par l'espaces trop grand. Une commode contre un mur, des étagères contre un autre. Sur la commode, une unique sculpture. Une sphère noire.

La Terre engloutie par les ténèbres.

Mais, quelque chose avait changé parmi les nuages noirs qui flottaient habituellement autour d'elle. Une éclaircie. La sphère continua sa rotation et la lueur s'échappa à la vision de la sorcière. Celle-ci s'approcha, attirée par cet éclat discret, à présent dissimulé. Il réapparut quelques instants plus tard, de l'autre côté. Les yeux de la blonde vinrent alors se fixer à quelques centimètres du globe. Les nuages s'étaient amincis sur une maigre partie, elle reconnut un continent. L'Amérique du Nord. Un faible point lumineux avait troué les ténèbres pour éclairer une mince région au sud-est des Etats-Unis. Pourquoi ?

Aria ne comprenait pas. Ne voulait pas comprendre. Elle s'obstinait avec cette même question dont elle avait pourtant la réponse. Pourquoi ?

Aria estimait être la seule à connaître les secrets de cette sombre sculpture. La seule de sa famille, du moins. Elle se souvenait l'avoir longtemps observé dans la vitrine de la boutique de son père. Le Revelio n'avait rien révéler. Cet objet détenait un secret enfoui plus profondément, ancré dans son fonctionnement même. Son père s'y était un peu penché. Pas assez. C'était d'un air las, la tête remplie par d'autres affaires plus importantes, qu'il l'avait abandonné dans la vitrine. Une simple décoration sans danger. Ça, il avait pris le temps de s'en assurer. Noël approchait à cette époque et pourtant, aucun client ne semblait s'intéresser à cette sculpture baignée dans un brouillard de mystère. Personne ne semblait remarquer sa splendeur hormis deux opales enfantines. Aria retrouva la planète noire sous son sapin de Noël.

Dressée majestueusement sur la commode de sa chambre, la cadette des Beurk avait continué à l'observer longuement toutes les fois où la curiosité s'était mêlée à l'ennui. Et elle avait fini par comprendre. La sculpture avait le pouvoir de se frayer un chemin jusque dans la tête de l'être humain le plus proche pour en extraire ses pensées les plus noires et s'en servir de manteau. Des nuages reflétant les tourments insidieux de l'esprit, un ciel prévenant des orages qui agitaient l'âme. Si, en trois ans de possession, Aria avait déjà pu voir les nuages s'amincirent légèrement quand elle parvenait à trouver le calme – souvent à l'aide de son violon nacré -, jamais elle n'y avait vu de réelle éclaircie. Jamais aucun point lumineux n'était venu trouer les ténèbres.

Alors, pourquoi maintenant ?

Parce que, parfois, une personne apparaissait et pouvait vous sauver de la noyade.
Peut-être, finalement, qu'Aria ne s'était pas laissée entièrement engloutir par les ténèbres.



- Merci.

Voilà tout ce que l'Anglaise parvint à répondre à la Louisianaise. Un simple mot qui retraçait toute une histoire. Un mot qui s'imprégnait de chaque souvenir où figurait la brune. Une reconnaissance qui croissait de jour en jour. Qu'elle espérait éternelle. Salvatrice.

Et, de la même façon qu'Aria doutait qu'Eileen lui ai déjà dit qu'elle l'aimait, elle n'était pas certaine de l'avoir, elle, déjà remercié. Jamais aussi sincèrement, en tout cas. Un merci à la symbolique défiant les plus grands océans en terme de profondeur.

Mais, avant que sa portée n'ait pu à nouveau peindre l'atmosphère d'une gêne intrusive, Aria se leva – un peu brusquement – et dénoua son collier. Il devint pendule d'une hypnose nouvelle pour attirer le soleil et disperser la brume de l'embarras.

- D'ailleurs, cette salle mérite une inauguration digne de ce nom, ne crois-tu pas ?

Pour toute réponse, la King se leva à son tour, s'approcha de la Beurk et, de ses mains habiles, s'empara de son pendentif avant de lui rendre sa forme originelle. Un violon nacré au bout du bras tendu de la Rouge-et-Or. Aria s'en saisit avec un sourire amusé et complice. Chacun des gestes de l'illusionniste était un spectacle, une habileté sans faille, un émerveillement quotidien.

Eileen fit ensuite apparaître sa guitare électrique. Aria préférait la voir à la trompette, une singularité qui marquait ses origines, qui la transportait jusqu'à un continent éloigné et dessinait dans son esprit la Nouvelle-Orléans. Le jazz, au détour d'un refrain qui trouait les ténèbres, lui donnait rendez-vous au point lumineux.

Mais la guitare électrique s'accordait mieux au violon. Elle relevait sa tonalité, l'accompagnait hors des sentiers battus. Deux instruments opposés pour deux âmes complémentaires. Un duo unique.

Portées par leur passion commune, par leur inspiration musicale, par des morceaux répétés depuis un ou deux ans, les deux filles passèrent le reste de la matinée à jouer. Comme si elles étaient seules dans cet immense château. Comme si plus rien d'autre n'existait. Comme si le temps qui défilait n'avait plus la moindre importance. Jusqu'à ce que les douze coups de midi les ramènent à la réalité, les contraignant à abandonner leur songe enchanté.

Aria indiqua à Eileen de sortir la première. C'était l'une de leurs règles pour préserver leur secret : ne jamais sortir en même temps d'une salle où elles s'étaient réfugiées. Toujours respecter un intervalle de cinq minutes, minimum. Et ce jour-ci, la blonde platine sut exactement comment elle allait combler ces cinq minutes.

Elle attrapa un bout de parchemin, une plume et un encrier qu'elle avait repéré sur une étagère – Eileen avait vraiment pensé à tout au moment d'habiller cette pièce -, et les posa sur la table basse en s'asseyant sur un fauteuil en face. Elle n'eut pas besoin de réfléchir, elle savait déjà ce qu'elle allait écrire. Une fois fait, elle roulerait le parchemin et le déposerait au fond du chaudron de celle qui s'inventait potionniste à ses heures perdues. Pas d'attaque ni de sortilège cachant le véritable mot pour cette fois. Seul ce nouveau lieu secret serait le gardien de l'authenticité de sa pensée allongée sur le papier.

Aria trempa sa plume dans l'encrier.

Mot:


FIN

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Aria Beurk
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Aria Beurk

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