La sombre lignée des Beurk [5/5]

"Une chevelure d'un blond enneigé qui a traversé une fois son champ de vision pour ne plus jamais en sortir. Une silhouette gracieuse qu'il n'eut à voir qu'une seule fois pour savoir qu'il voulait en faire sa femme. Un nom synonyme de prospérité auquel Gregory Beurk eut l'ambition de se lier.

Voilà ce qu'a été Celestine Malefoy pour le commerçant en devenir. Un voile fantomatique duquel il voulut s'envelopper pour s'envoler jusqu'aux sommets. Il n'y a jamais vraiment eu d'amour dans cette union, si ce n'est l'amour de la renommée. Parmi les Sang-Purs de Grande-Bretagne, les Malefoy font sans contexte parti de ceux qui ont le plus de pouvoir et d'influence. Se lier à cette famille a semblé être la meilleure stratégie pour redorer le nom des Beurk et faire refleurir leur commerce.

Celestine Malefoy, ça a été une promesse, ça a été une clé. Aujourd'hui, Celestine Beurk marche à ses côtés et il en est fier. C'est une femme bien éduquée, noble, gentille et obéissante. Il ne lui accorde pas beaucoup de son temps mais cela n'a jamais nui à leur couple. Lui gère les affaires, elle entretient les apparences. Ça a toujours fonctionné comme ça et ça fonctionnera toujours ainsi. Un duo idéal, dans l'esprit logique et l'âme rigide de Gregory. Que demander de plus ?"

"Un reflet de sa jeunesse. Une ambition nouvelle investie dans l'âme d'un héritier. Des espoirs nourris par une tête blonde.

Ezechiel, c'est le fils dont Gregory est fier. Un Beurk qui fait honneur à son nom, qui partage l'ambition et la ruse de sa lignée et qui sera un jour prêt à reprendre les affaires de son père. Ezechiel, c'est le fils qu'il a pris soin d'éduquer avec sévérité pour lui apprendre les mille facettes de leur monde. Les pièges qui ne cesseront jamais de traîner sur leur route, les mots qu'il fallait savoir utiliser avec minutie pour manier la vie, les apparences qu'il fallait entretenir autant que les secrets, les contacts qu'il fallait récolter autant que les bonnes adresses. Ezechiel, c'est un jeune homme rusé et un sorcier au grand potentiel.

Ezechiel, c'est son fils. Et c'est derrière une exigence sans faille que se dissimule l'immense fierté d'un père."

"L'éclat d'un miroir brisé. La lame fragile d'un pétale d'orchidée. L'exception de la lignée.

Aria, c'est sa fille, son bijou, son inquiétude. Une Beurk différente des autres, une enfant qui a grandi dans la tourmente et les tempêtes d'émotions. La petite fille bien trop expressive d'un père bien trop impassible. Des yeux aussi perçants que les siens qui savent transpercer son âme pour accéder aux tréfonds de ses émotions, celles que lui-même ne sait plus lire. Aria, c'est l'enfant qui l'a toujours compris de la plus troublante des manières, de la même façon que sa mère Diana a toujours su déchiffrer chacun de ses états d'âme. Aria a hérité du don de sa grand-mère, Aria est née Empathe.

Aria, c'est sa fille, son bijou, son inquiétude. Celle qu'il a voulu endurcir sans réussir à se faire aussi intransigeant qu'avec son grand frère. Aria, c'est sa faille, la seule qui arrive encore à lui tirer des élans de tendresse insoupçonnés. Celle qui a sans le savoir plus de contrôle sur lui que lui sur elle.

Aria, c'est sa fille, son bijou, son inquiétude. Cette enfant expressive qu'il a vu se renfermer sur elle au fil des années. Pour le mieux. Pour supporter le monde qui l'entoure. Une solitaire qu'il accepte de laisser vagabonder dans sa bulle tant qu'elle se laisse guider par son apprentissage. Pas celui de la manipulation, ni de tout autre artefacts sociales desquels se parer, non. Aria, c'est la curiosité, la réflexion, mais pas le tact. C'est le savoir isolé de sombres secrets qu'il offre à ses yeux avides, la prédilection pour les arts noirs qui se transmettent de génération en génération dans leur maison.  

Aria, c'est sa fille, son bijou, son inquiétude. Une sourde qui sait l'entendre, une muette qui sait le bercer, une aveugle qui sait l'observer."

"La figure noble d'une mère respectée. Diana Beurk, c'est peut-être la seule femme que Gregory Beurk estime réellement.

Aussi tendre qu’exigeante, Diana a toujours été une présence mystique surplombant Gregory. Comme un soleil le suivant des yeux en permanence, même dans ses absences et sachant mettre en lumière chacune de ses parts d'ombres. Une mère qui, de la plus énigmatique des manières, connaît tous ses secrets. Une mère Empathe.

Diana sait tout, comprend tout, mais elle ne confie rien. Diana, c'est la patience, la compréhension, la morale sans jamais qu'aucun mot ne se pose sur cette intimité partagé à sens unique entre une mère et un fils. Tout était dans un regard et jamais dans les paroles. Et c'est peut-être de là que se sont érigées les premières barrières de pudeur et d'impassibilité d'un fils terrifié par la bienveillance froide d'une mère aussi envahissante que distante.

Diana, c'est l'amour d'une mère décliné en admiration, en respect et en crainte dans les yeux d'un fils."

"Un meuble rendu poussiéreux par les années. Une décoration intemporelle de la demeure des Beurk. Voilà tout ce que représente Wilty aux yeux de son maître actuel et tout ce qu'elle a représenté aux yeux de ceux qui l'ont précédé. Une poussière. Mais une poussière utile.

Wilty, ce n'est qu'une elfe. Un être dévoué à le servir. Une créature craintive qui ne vaut pas la peine qu'on lui porte plus d'intérêt. Wilty, c'est une elfe respectueuse quoiqu'un peu fouineuse mais Gregory n'a pas le temps ni la patience de la surveiller. Alors, il lui rappelle souvent ses interdits si bien qu'à présent elle les connaît sur le bout des doigts et tant qu'elle serait sous les ordres de Gregory Beurk, elle les respecterait. C'est ainsi qu'il en est."

"La droiture d'un homme charismatique. L’inflexion d'un homme flatteur. Gregory Beurk, c'était d'abord un simple visage de plus sur le tableau des apparences. Un visage qui a ensuite su la charmer pour s'immiscer dans sa vie et se faire une place sur le portrait de famille.

"Un Beurk ?", s'était étonné son père. "Pourquoi pas, après tout, se lier à leur commerce pourrait nous être favorable. Pour une fois que tu prends une bonne décision, Célestine."

S'unir à un Beurk, ça a été la première approbation de son père à son égard. S'unir a un Beurk, ça a permis d'élargir le pouvoir des Malefoy en leur offrant un lien étroit avec un commerce auquel ils s'intéressaient de près. S'unir a un Beurk, ça a symbolisé l'émancipation d'une jeune femme quittant un homme autoritaire pour se soumettre aux volontés d'un autre. S'unir à un Beurk, ça a été la promesse d'un futur prospère, serein et confortable. S'unir à un Beurk, ça a été tout ça, mais ça n'a jamais été synonyme d'amour.

Gregory, c'est un homme moins rabaissant que son père mais tout aussi froid. C'est un mari qu'elle affectionne à demi. Une alliance qui lui offre l'illusion d'une liberté un peu plus grande sans pour autant la délier de ses chaînes."

"Le regard vif et intelligent des Beurk. Le physique polaire des Malefoy. L'enfant parfait de deux familles nobles. Son enfant.

Celestine chérit son fils tel une perle rare qu'il ne faudrait surtout pas abîmer. Il est, pour elle, peut-être la seule véritable réalisation dans sa vie de femme, cette vie qui ne semble ne lui appartenir qu'à moitié. Ezechiel, c'est son fils et elle l'aime. De tout l'amour qu'on ne lui a jamais offert, à elle.

Mais d'elle, Ezechiel n'a que peu hérité, si ce n'est de sa chevelure hivernale. Ezechiel, dans ses gestes, ses intonations, ses tournures de phrases, ses réactions, c'est son père. Son imitation parfaite. Et c'est tant mieux. C'est dans ce rôle noble d'homme de sang pur qu'il fait la fierté de sa mère. Qu'il honore sa famille.

Ezechiel, elle le surprotège peut-être. Mais c'est parce qu'Ezechiel, c'est son bonheur, son ultime accomplissement, la touche colorée dans la saveur fade de sa vie fanée."

"Le regard intelligent et troublant de son père. L'allure discrète et effacée de sa mère. L'étrange enfant d'une union dépourvue d'amour. Son enfant.

Celestine a toujours eu du mal à comprendre Aria. À comprendre ses émotions trop débordantes quand elle était enfant puis ses silences insondables une fois qu'elle eût grandi. Ce ne sont pourtant pas les mêmes silences qu'elle, sa propre mère. Celestine se soumet dans son mutisme. Aria s'isole simplement dans le sien. Celestine inspire la pitié. Aria a su attirer le respect, ou du moins, celui de son père. Un respect que sa mère lui jalouse intimement. Le trône d'une princesse que son propre père, Abraxas, ne lui a jamais offert.

Celestine aurait pu jouer le rôle de la mère confidente. Mais Celestine ne comprend pas sa fille. Ou peut-être qu'elle n'a jamais cherché à le faire. Aria est comme elle, discrète, effacée, silencieuse, tout en étant à l'extrême opposé. Car Aria, elle le voit dans l'abîme brûlant de ses iris, est indomptable.

Aria, elle lui porte trop peu d'attention, peut-être. Mais c'est parce qu'elle est le reflet douloureux d'une force intérieure qui lui manque à elle, Celestine Malefoy, sa propre mère."

"Diana, c'est la stalactite qui pendait au seuil de la demeure des Beurk lorsque Celestine y a mis les pieds pour la première fois. Une femme imposante et hautaine au regard perçant et dérangeant. Une belle-mère jaugeant sa belle-fille avec un dédain certain.

Dès le début, Celestine a été impressionnée par la droiture noble et confiante de Diana. Presque apeurée par sa prestance qu'elle voit comme une menace tapis dans l'ombre des murs. Mais elle ne montre rien. Celestine garde le menton haut et fier. Discrète mais droite. Hautaine dans sa soumission. Si les hommes l'ont toujours fait se sentir inférieure et inexistante, ce n'est pas une femme qu'elle autorisera à la rabaisser. Parmi celles du même sexe qu'elle, elle n'a pas le droit de flancher. Elle se doit au moins ça.

Mais peut-être qu'elle est devenue, au fond d'elle, encore plus terrorisée quand Diana s'est radouci et a tenté de se rapprocher d'elle, de discuter, de la comprendre. Alors, elle s'est braquée davantage encore. Et dès lors, une règle immuable s'est dressée entre elles : leur relation ne dépassera jamais une cordialité polie mais froide, préservant ainsi une distance convenable entre une belle-mère et sa belle-fille."

"L'ennui et la solitude sont parmi les ennemis les plus tenaces de Celestine. Wilty est devenue l'arme pour les combattre.

Wilty est l'elfe de maison des Beurk mais c'est avant tout la fille des Malfoy qui profite de son utilité. Avec elle, Celestine se montre intransigeante, exigeante et stricte. Peut-être qu'elle cherche en cette créature tout le respect qu'elle n'a jamais trouvé ailleurs. Peut-être qu'elle cherche, en lui donnant des ordres, à jouir d'un pouvoir qu'elle n'aura jamais sur personne d'autre. Wilty, c'est sa revanche sur la vie.

Mais Wilty, c'est aussi une compagnie. Un élément mouvant du décor qui rythme un peu ses journées. Qu'elle a invité à partager sa dure routine solitaire. Qu'elle sollicite abusivement pour combler l'ennui. Une oreille soumise à l'écoute de son insatisfaction et de sa frustration toutes deux ancrées et redirigées dans chaque détail insignifiant du quotidien."

"Un père strict, autoritaire et exigent. Une relation aussi froide que profonde. Un lien fort dissimulé derrière du gel. Et parfois, quand Ezechiel se met à gratter, il distingue presque la lueur de fierté dans les iris glacées de son aîné.

Son père, il lui a tout appris. L'art de manipuler, de plaire, de courber le verbe, de flatter et d'ordonner, de donner pour mieux reprendre. La manipulation, la logique, la stratégie. Réfléchir pour appréhender une situation, réfléchir pour avoir ce que l'on veut, réfléchir posément. Improviser pour surprendre, improviser pour retomber sur ses pieds, improviser intelligemment. C'est la clé de la réussite qu'Ezechiel a toujours entre-aperçu à travers cet enseignement intransigeant.

Alors, il a toujours écouté et écoute encore. Etre attentif, droit et fier devant son paternel. Une ligne de conduite qu'il s'est approprié en famille. Car son père, il l'admire. Il veut le rendre satisfait de lui, peut-être même fier. Il veut être un héritier digne des affaires familiales. Il veut ressembler à Gregory Beurk, devenir comme lui.

Plus qu'un père, c'est un précepteur, c'est un modèle. "

"Une mère douce, protectrice, aimante. Une relation aussi tendre que fusionnelle. Un lien indéfectible entre une mère et son fils.

Depuis tout petit, Ezechiel s'est fait chouchouter par sa mère. Elle a toujours été un foyer de douceurs et d'attentions compensateur de la présence froide de son père. Il eut même peur que cela change quand Aria vint au monde, mais il n'en fut rien. Il est son préféré et il le sait. Il en joue.

La faiblesse de Celestine repose dans la tendresse qu'elle n'offre qu'à lui seul. Alors, Ezechiel a très vite appris à creuser cette faille pour y faire passer tous ses caprices. Il sait à la perfection comment attendrir sa mère, quels mots prononcer et quels traits afficher pour qu'elle cède à tout. La manipulation par les sentiments, c'est par sa mère qu'il l'a développé. L'avouera-t-il ? Jamais.

Car sa mère, il l'aime. Peut-être qu'il ne la respecte pas beaucoup plus que les autres hommes de la famille, dans le fond, mais contrairement à eux, il fera toujours tout pour la protéger. Quoiqu'il advienne.  "

"Peut-être qu'il aurait préféré être fils unique. Peut-être que ça l'arrange bien d'avoir une petite sœur, aussi. Son opinion fluctue d'un jour à l'autre.

Le lundi, il la jalouse. Pourquoi attire-t-elle plus l'attention de leur père alors qu'elle ne fait aucun effort pour se plier aux convenances de leur caste ?
Le mardi, il lui est reconnaissant. Est-ce volontaire de sa part de rester tapis dans l'ombre pour lui laisser tant de place sous les projecteurs ?
Le mercredi, il en a honte. Cela la rongerait-elle de faire preuve d'un peu plus de tact et d'amabilité de façade en société ?
Le jeudi, il l'envie. Et si lui aussi pouvait s'isoler au gré de ses humeurs sans qu'on ne lui fasse aucun reproche ?
Le vendredi, il en est fier. Sa répartie mordante et son air hautain prouve bien qu'elle a du sang Beurk, n'est-ce pas ?
Le samedi, il la hait. Pourquoi faut-il qu'elle entache sa réputation si reluisante en agissant comme l'associable qu'elle est ?
Le dimanche, il l'aime quand même. Aussi étrange soit-elle, il se doit bien de la protéger et de la défendre en tant que grand frère, non ?

Aria, c'est son paradoxe détesté. Aria, c'est son énigme à préserver."

"Cette femme l'a toujours impressionné. Sa grand-mère est unique en son genre, songe-t-il souvent. Un mélange inexplicable de douceur et d'autorité. Une femme différente des autres.

Au-delà de l'affection qu'il porte à sa grand-mère, c'est un respect profond et ancré qu'Ezechiel nourrit envers elle. Son emprise sur lui est aussi forte que celle de son père, peut-être, bien que très différente. Diana, ce n'est pas la même froideur que les iris de Gregory, non, c'est au contraire la chaleur d'un sourire aussi noble que strict. Diana, ce n'est pas non plus l'amour à profusion des trop fortes étreintes de Celestine, non, c'est plutôt une tendresse distante et teintée d'élégance. Sa douceur n'est pas une faiblesse comme l'est celle de sa mère.

Diana, c'est une concoction de paradoxes subtils qui font d'elle une grand-mère respectée sans être crainte, aimée sans être manipulée. Une femme qui défit humblement les lois du patriarcat jusqu'à devenir, probablement, la seule femme admirée par son petit-fils."

"Wilty, c'est la chose utile des Beurk. Un jour, ce sera sa chose à lui. L'elfe de maison qui lui sera léguée. De père en fils, une boucle qui ne cessera qu'au dernier souffle de l'elfe.

Une chose utile. Dès petit, Ezechiel s'en servait pour lui faire porter le chapeau de ses propres fautes. Une cible toute trouvée pour assumer les conséquences de ses méfaits enfantins. Victime soumise d'un comploteur.

Une chose utile. Aujourd'hui, Ezechiel s'en sert à d'autres fins. Il connaît bien cette elfe, il sait sa curiosité, son envie irrépressible de fouiner, d'écouter, de savoir. Wilty c'est devenu ses oreilles-à-rallonge, celle qu'il envoie flâner auprès des adultes lorsqu'ils sont en conversation privée pour ensuite lui soutirer les informations glanées innocemment. De victime, Wilty s'est faite complice. D'accusée, Wilty est devenue son alliée.

Wilty, c'est déjà sa chose utile à lui."

"Son fils unique. Celui qu'elle a éduqué avec autant de tendresse qu'intransigeance. Celui qu'elle a peut-être un peu trop couvé, peut-être un peu trop cherché à comprendre, à décortiquer, en laissant s'immiscer son don dans leur relation. Chercher à connaître les moindres inflexions de ses émotions en oubliant de lui partager les siennes. Une mère compréhensive mais trop impassible. Et c'est probablement ce déséquilibre relationnel qui a conduit son fils à se renfermer et se rigidifier progressivement, sans qu'elle ne s'avoue encore sa part de responsabilités majeure dans son évolution en tant qu'homme.

Un homme droit, renfermé, pudique, insensible. Une froideur qui est venue en opposition à la chaleur d'un amour maternel. Malgré son esprit rigide qu'elle n'ait jamais parvenu à assouplir, Diana veille toujours sur lui, reste à ses côtés et se mêle encore un peu trop souvent à sa vie. C'est plus fort qu'elle. C'est son fils unique et malgré leurs psychologies aussi liées que divergentes, elle continuera toujours à l'accompagner et lui continuera toujours à l'écouter."

"Celestine Malefoy est aussi fade que vicieuse. Cette femme est celle qui lui a dérobé son fils pour épouser un commerce florissant. Cette femme est celle qui s'est fait une place dans leur famille de part son nom sans n'apporter rien d'autre qu'argent et bonne réputation, en oubliant la plus importante des richesses : celle du cœur. Alors, s'il y a au moins une chose que Celestine n'a pas réussi dérobé à Diana, il s'agit bien de l'amour de son fils Gregory. Alors, bien sûr qu'il mériterait lui aussi de trouver le vrai amour, mais à défaut d'avoir pu s'opposer à cette union, Diana peut au moins garder l'affection de son enfant pour elle.

Toutefois, Diana a essayé, au fil des années, de se faire à l'idée, de se radoucir vis-à-vis de Celestine, de la comprendre. Après un accueil glacial, la doyenne des Beurk a finalement tenté de s'ouvrir et de découvrir plus en profondeur sa belle-fille. Elle entend la colère et la détresse qui bouillonne en elle et a même songé à se proposer comme confidente à ce trop-plein d'émotions enfouies. Mais tous ses efforts furent vains car la fille des Malefoy n'est qu'un mur froid et infranchissable. Une présence aussi fade qu'ennuyante et inutile. La première intuition est toujours la bonne, après tout."

"Quand elle regarde son petit-fils Ezechiel, elle y revoit son fils Gregory, au même âge. L'ambition familiale, la détermination à toute épreuve, le charisme insolent. Mais Ezechiel n'est pas encore devenu le même homme que Gregory et, secrètement, elle espère le voir évoluer différemment.

Diana aime son fils Gregory, mais il est devenu trop rigide, trop fermé, trop détaché de ses émotions. Alors, elle souhaite du plus profond d'elle-même qu'Ezechiel garde quant à lui une part de son innocence. Cette spontanéité qui contre-balance avec le côté calculateur, cette émotivité qui le rend plus humain. Ces traits que tant de personne perdent après que l'adolescence les ait exacerbés.

Alors, Diana veille sur Ezechiel. Elle ne lui dicte pas de conduite à tenir, ni lui donne des leçons de morale. Mais elle veille silencieusement, en suivant son évolution de près, en restant une grand-mère présente mais non-envahissante. Tendre mais distante. Comme une chouette qui observe de son perchoir le chemin que va prendre un renard sans jamais interrompre le calme réflectif de la nuit qui l'entoure."

"L’entrelacement de deux secrets partagés. Un plutôt, d'un même secret. Celui d'un même don.

« Tu es une Empathe, Aria. Comme moi. »

Ces paroles scellèrent la complicité de deux confidentes réunies dans l'intemporalité. Une grand-mère et sa petite-fille soudées comme des alliées dans l'ombre, plongées dans leur univers propre, celui qui dépasse la compréhension du reste monde. Un univers peuplé d'émotions. Un univers dans lequel Diana a appris à se complaire. Un univers qu'Aria rejette encore.

Diana devine sans difficulté les tourments que traverse Aria via son don. Elle les connaît, les a elle aussi vécu et les ressent à nouveau en la fragilité de sa petite-fille. Alors, elle garde espoir pour elle, l'espoir qu'un jour Aria arrive à ôter le voile monochrome de son regard pour observer les teintes vives et pétillantes que lui offre le don d'Empathe. Diana se veut comme un guide pour sa petite-fille, un soutien, une conseillère, une confidente. Sa complice. Et elle est probablement celle qui connaît le mieux l'adolescente. À travers ses confidences et ses émotions, Aria n'est rien de moins, à ses yeux de grand-mère aimante, qu'une beauté précieuse mais cachée qui n'attend qu'à être sublimée."

"Wilty est l'elfe de maison des Beurk depuis 4 générations. Diana l'a adopté comme un être vivant à part entière lorsqu'elle s'est installé dans le manoir de son mari.

Bien sûr, Wilty reste une elfe de maison conçue pour les servir, eux, sorciers. Mais c'est un être doté de parole et de réflexion, alors pourquoi la réduire au rang d'objet lorsqu'elle peut, en plus de se rendre utile par sa servitude, devenir une alliée redoutable pour tuer le temps et la solitude ? La vie de femme au foyer est ennuyante à bien des égards, alors engager la conversation avec la seule autre créature pourvue de cordes vocales lorsque le manoir déserté n'a jamais parut être une mauvaise idée aux yeux de femme de Desmond.

Wilty, ce n'est rien de plus qu'une elfe de maison. Pourtant, elle revêt les traits d'une confidente par bien des aspects dans le quotidien de Diana et affirmer que cette dernière ne s'est pas attachée à cette petite créature serait un mensonge."

"Gregory Beurk, c'est son quatrième maître. Un homme strict et droit qui mérite tout le respect que Wilty lui doit en tant qu'elfe de maison. Toute sa servitude lui revient à lui, avant tout.

Wilty est fascinée autant qu'apeurée par cet homme sévère. Elle ne veut pas le décevoir, pas lui désobéir. Jamais. Et chaque erreur de sa part est pour elle une honte abominable. Une culpabilité méritée. En la présence de Gregory Beurk, Wilty se tient sage. Wilty se tient silencieuse. Wilty garde son nez dans ses propres affaires. Wilty repousse sa curiosité malvenue autant qu'elle le peut. En la présence de Gregory Beurk, Wilty se doit d'être une efle de maison exemplaire."

"Celestine Beurk est sa maîtresse. La seconde. La première personne digne de sa servitude étant bien évidemment son mari, Gregory Beurk. Mais Celestine est probablement celle qui sollicite le plus Wilty. La plus assistée. La plus demandeuse. La plus insatisfaite.

8h, le petit-déjeuner. Tu as trop sucré Wilty. 10h, le ménage. Il reste encore de la poussière, là, Wilty. 12h, le déjeuner. C'est trop cuit, Wilty. 14h, laver le linge. Es-tu donc incapable d'enlever cette tache, Wilty ? 16h, le thé. Ces plantes-là sont trop fades, Wilty. 19h, le dîner. La nappe n'est pas droite, Wilty.

Tant de caprices et d’exigences qui sont devenues la routine de l'elfe de maison. Une routine qu'elle en vient presque à apprécier tant elle éloigne l'ennui de ses journées. Celestine Beurk, c'est une maîtresse avec laquelle elle partage sa solitude."

"Ezechiel Beurk, ce sera son cinquième maître. Celui qui, de son allure aussi noble et respectable que celle de son père, sera l'homme que Wilty devra servir avec la même soumission et loyauté qu'elle l'a fait avec ses quatre aînés.

Mais peut-être qu'il a déjà dérobé cette soumission toute entière qui lui est promise.

Peut-être que, prématurément, la loyauté de Wilty a déjà transité. Peut-être qu'à présent, elle sert déjà plus les intérêts du fils que du père lorsqu'elle s'improvise espionne au compte du plus jeune et au détriment du plus âgé. Et ce simple constat la tiraille au point de remplacer son sommeil par des heures d'auto-punition.

Ezechiel Beurk l’impressionne moins que son paternel, peut-être parce que Wilty voit dans son regard la candeur de l'enfant en lui qui persiste encore. Ezechiel, c'est un maître pour qui elle porte une admiration plus tendre, un respect moins craintif. C'est un charisme plus doux qui lui donne l'illusion que le jeune homme lui porte de l'attention.

Et c'est là que s'est créée la faille. Celle d'une allégeance trop vite polarisée."

"Aria Beurk, c'est la dernière de la lignée. Une étrange enfant. Beaucoup le disent. Wilty le pense aussi. Que dire d'autre de cette blonde platine au regard tantôt expressif, tantôt insondable ?

Aria Beurk aurait pu être une maîtresse de Wilty comme les autres. L'indifférence de la jeune Sang-Pur à l'égard de l'elfe aurait pu résumer leur relation. Seulement, cette indifférence, parfois, se brise. Quand Wilty veut se punir, parfois, Aria l'en empêche. Quand Wilty commet une faute, une erreur, parfois, Aria l'aide à la réparer. Puis, elle s'en retourne à son indifférence. Son contact est froid, jamais accompagné d'un sourire, ni d'un geste tendre. Pourtant, derrière son regard de givre, c'est la compassion qui dicte ses actions.

Aria Beurk, c'est le mystère d'un flocon imparfait. Défaillant dans son indifférence. Craquelé dans son empathie."

"Diana Beurk, c'est une sorcière majestueuse. La femme de son dernier maître, Desmond Beurk. Cet homme était différent des autres hommes de la famille. Moins sévère. Wilty a passé de belles années en compagnie de ce couple, bien qu'ils aient peut-être étaient trop laxistes avec elle, ce qui a sans aucun doute laisser champ libre à l'expression de ses vices. Comme celui de sa curiosité mal placée.

Mais elle ne peut leur en vouloir, car ce sont eux qui l'ont le mieux traité. Diana Beurk est devenue sa confidente, la première sorcière à lui faire la conversation, comme si Wilty était plus qu'une chose. Comme si Wilty n'était pas qu'un meuble poussiéreux. Qu'un objet utile. Diana Beurk, c'est une présence chaleureuse et rassurante. Une voix gracieuse aux intonations respectueuses. Wilty pourrait presque la qualifier d'amie mais ce serait se donner trop d'honneur que d'affirmer cela. Diana Beurk est avant tout l'une de ses maîtresses, mais probablement celle au cœur le plus noble. "