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[07/10/1995] Accusée coupable | ft. Jules Murphy

 :: Hors-Jeu :: La Pensine :: RP Harry Potter :: Les RP Terminés Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas
Mar 21 Juil 2020 - 21:40
Accusée Coupable

ft. Jules Murphy

La capitaine de l’équipe de Gryffondor hurla un ordre et ses joueurs se mirent en formation. En face, les potentielles recrues se concentrèrent : il s’agissait d’un exercice important, peut-être décisif pour l’équipe rouge et or, et aucun des aspirants joueurs ne souhaitaient laisser passer sa chance.

Ariel ne connaissait pas grand-chose au Quidditch mais il savait qu’Angelina Johnson était réputée pour sa rigueur. D’après des échos qu’il avait attrapés au vol, elle aimait pousser son équipe à bout et les faire crier d’agonie à la fin des entraînements. Un parfait relais à Dubois, qui avait quitté l’école à la fin de l’année précédente.

Le jeune Serdaigle s’enfonça dans son siège, boudeur. L’unique raison de sa présence sur les tribunes du terrain de Quidditch était l’affection et la loyauté sans limite qu’il portait à ses amis. Jules passait les essais et il avait cédé à ses yeux de chiens battus.

À choisir, il préférait le regard rieur.

— Je hais le Quidditch, râla Ariel pour la dixième fois du début des essais.

— Tais-toi, lui ordonna Louisa plus sèchement qu'à l'accoutumée. Tu n’avais qu’à pas venir, si tu détestes tant que ça. Jules n’a pas besoin d’ondes négatives.

Le violet soupira à la mort, fort et très longtemps. Elle avait raison, bien sûr. Et elle semblait excédée, lassée de subir ses assauts colériques toutes les cinq minutes. Ce n’était pas le genre d’Ariel pourtant, mais l’ennui qu’il ressentait assis devant des balais volants mêlé à l’angoisse de la mise-au-point à venir avec Jules le rendait sombre.

Beaucoup trop sombre pour son moral.

Il chercha un peu de réconfort auprès d’Oscar, son indéfectible meilleur ami, mais toute son attention était dirigée sur les futurs membres de l’équipe et les joueurs déjà en place. Son air concentré étonna un peu Ariel - on parlait d’Oscar, duquel l’aversion pour ce sport avait en partie attiré le jeune homme -, mais il ne releva pas. À la place, il se concentra sur les feintes et les boucles qu’effectuait son amie dans les airs, crispant les poings à chaque nouvel exploit.

Évidemment qu’il était inquiet. Inutile d’être diplômé des ASPICs pour le comprendre. Il faisait toutefois de son mieux pour que personne ne le remarque. Il ne voulait perdre aucune miette de sa crédibilité pour leur conversation toute proche.

Cela faisait quelques jours qu’il y pensait. Après qu’il ait parlé à sa soeur du sentiment de malaise qui l’habitait en face de ses amis depuis sa coloration, pour être tout à fait précis.

La fillette lui avait demandé d’analyser son ressenti, toujours aussi lucide, puis de chercher à comprendre l’origine de son inconfort. Ariel avait d’office retenu l’acte de violence sans se poser plus de questions. Un Petrificus Totalus, pour être plus clair - mais il considérait avoir été violenté. Les conseils d’Amy l’avait mis dans le doute.

Il avait rédigé une liste, parce que écrire des mots lui avait toujours permis de mieux appréhender ses idées. Le morceau de papier était soigneusement plié dans l’une de ses poches. Juste au cas où il perdrait sa conviction, juste au cas où le visage adorable et moqueur de son amie lui fasse changer d’avis.


Raisons pour lesquelles je pourrais être mal-à-l’aise avec mes amis
(ce qui ne m’est jamais arrivé)

- Ils m’ont lancé un Petrificus Totalus et comme entrée en matière, c’était violent.
- C’était une action de groupe et pour la première fois depuis longtemps, ils ne m’ont pas inclus (en même temps j’étais la cible)(mais ils ont préparé quelque chose tous ensemble sans m’en parler, ça ne m’était jamais arrivé).
- Oscar m’a menti (les autres aussi, mais Oscar, quoi !).
- Ils voulaient me colorer les cheveux contre mon grès (ne pas oublier qu’au début, je ne voulais pas).
- Jules a parlé d’un des mes secrets aux autres sans que je lui dise oui. Je ne peux plus lui faire confiance.


C’est en écrivant la dernière suggestion qu’Ariel avait compris le noeud du problème. Depuis la coloration de ses cheveux, quelques semaines plus tôt, il ne s’était plus confié à Jules. Ce qui était devenu un rituel était devenu la source de ses blocages. Même si d’ordinaire, la petite fille faisait toujours le premier pas vers son ami, ce dernier finissait toujours par s’épancher. Il finissait vidé, engourdi par ses confessions, presque anesthésié des larmes qu’il retenait souvent.

Sans ce temps qu’ils partageaient à deux, le brouillard d’émotions indiscernables qui habitait Ariel prenait de l’ampleur. Insidieusement.

Bien sûr, Jules n’était pas la seule personne avec qui il pouvait se confier. Oscar tenait lui aussi ce rôle. Depuis la Première Année. Mais quelque chose en Jules - il ne savait pas quoi, il ne savait pas comment - lui donnait la sensation d’être mieux compris. Quelque chose en Jules l’attirait, même s’il savait qu’il ne s’agissait en rien d’un émoi amoureux. C’était autre chose. Autre chose qui lui permettait de se livrer entièrement, sans concession et qui mettait soudain au clair toutes ses pensées.

Ariel s’était retourné pour faire part de ses conclusions à sa petite soeur, mi-fier mi-apeuré par sa découverte. Amy s’était éclipsée, sans doute pour laisser un peu d’intimité au jeune garçon.

La conclusion logique à cette affaire, c’était qu’il fallait qu’il règle ce problème de confiance. En allant lui parler, en ayant une conversation à coeur ouvert sur le sujet. Cela impliquait de se livrer à nouveau à la Rouge et Or le temps d’un instant, mais il n’avait pas d’option alternative. Ariel Melwing choisissait rarement la simplicité.

Il se demanda si elle aussi avait l’impression que l’air avait changé, entre eux.

Les essais se poursuivirent à une lenteur abominable. Les pensées d’Ariel eurent le loisir de tourner et voltiger dans son esprit et les scénarios de se construire, de se déconstruire et de se reconstruire. Lorsque le nom des nouveaux joueurs fut annoncé, Ariel ne savait plus s’il allait rester ami avec Jules. Les battements de son coeur effrénés et sa respiration irrégulière n’annonçaient rien de bon.

— Ariel ! Tu viens ?, l’interpella Tom, et Ariel se rendit compte que ses amis étaient déjà en train de descendre des gradins.

Il secoua la tête, vérifia que son sac et ses notes ne traînaient pas sur le banc, et emboîta le pas aux trois autres. Première étape : féliciter la nouvellement Poursuiveuse de l’équipe de Gryffondor, Jules Murphy. Ariel se sentit un peu à part, avec Oscar, parce qu’ils étaient les seuls étrangers à la Maison. Ils avaient pourtant reçu des dérogations spéciales de la part de Johnson - Louisa, Tom et Jules devaient être très persuasifs -, mais il fut heureux quand le Club des cinq entama son retour vers le château.

Plutôt quatre, en l’occurrence. Ariel traîna des pieds le long du terrain. Soudain, la pelouse tondue qui le recouvrait se révéla fascinante. Ses amis furent bientôt à une dizaine de mètres de lui. Il pria pour que ce soit Jules et pas un autre qui remarque son absence.

Heureusement, ce fut le cas.

Laissant les autres s’éloigner sans les avertir, il s’adossa au mur bétonné, le regard fixé derrière lui. Ses lèvres n’esquissèrent aucun sourire, mais il estima préférable débuter leur conversation sur une note positive :

— Bien joué, pour les essais. J’ai lu que c’était plutôt rare d’être admise dans l’équipe principale dès la deuxième année, dans les équipes de Poudlard. (Il désigna le livre en question, L’Histoire de Poudlard, qu’il tenait fermement entre ses bras. Le bouquin faisait office d’anti-stress et de dignité.) Félicitations !

Mais il ne souriait toujours pas. La froideur de son regard contrebalançait la chaleur de son discours. Il ne voulait pas tomber dans le piège, il ne voulait pas que ce soit si facile. Il voulait qu’elle aussi, elle ait ce coup au coeur qui l’avait saisi quand il avait compris qu’elle leur avait dit.

Et il voulait, très égoïstement, qu’elle patauge un peu. Qu’elle se sente perdue, comme lui. Qu’elle comprenne ce qu’il avait ressenti.

Parce qu’avec sa foutue fierté, Jules n’avait pas prononcé une seule excuse depuis le fameux jour. Une tape sur l’épaule, une plaisanterie bien placée, et c’était reparti. Tom, Oscar et Louisa n’en avait plus reparlé, n’avait plus évoqué cette colère si rare qui avait dansé dans les yeux d’Ariel.

Lui n’attendait que ça, en parler, et aussi tout mettre à plat. Arrêter de se voiler la face. Un accroc avait abîmé leur si précieuse amitié. Il fallait s’y attarder. Le recoudre. Il prenait de plus en plus d’importance à mesure que les jours passaient.

Ariel sentit que la colère reprenait son souffle et s’en servit pour donner de l’élan à sa question :

— Tu n’aurais pas quelque chose à me dire, des fois ?

L’accuser, elle. Se mettre en retrait. Ne pas s’impliquer dans les événements. Ne pas se rendre coupable.

À force de se tourner l’action et les réactions en boucle dans sa tête, mêlée à une pointe de culpabilité, l’amertume prit le dessus sur la tristesse.
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Ariel Melwing
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Ariel Melwing
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Ven 24 Juil 2020 - 15:29



Accusée coupable
feat Ariel Melwing

Samedi 7 octobre 1995

Les mèches rousses au vent, le bois rugueux du balai entre ses paumes serrées, la vitesse qui galvanise, les virages qui s'improvisent, un lancé décisif sur lequel on mise. Concentration, détermination, audace, provocation. Donner son maximum et plus encore. Faire oublier sa petite taille et son jeune âge à travers une performance qui veut se démarquer des autres. Des passes encore imprécises mais un vol maîtrisé, des voltiges osées, risquées, non-assurées, mais réussies. L'adrénaline d'un rêve que l'on touche du bout des doigts et que l'on veut saisir de tout son être, comme le Vif d'Or qui narguait un autre postulant. L'ultime moment pour démontrer toutes les heures d'entraînement qui ont précédées, l’assiduité d'une élève qui s'est faite guidée un an durant par une joueuse plus âgée. Qui a épluché de long en large la théorie d'un univers qu'elle découvrait à peine. Qui a très tôt voulu allier créativité et audace pour créer sa propre signature dans les airs. Une Deuxième année qui a encore tant à apprendre mais qui veut y croire. Qui a fait de son mieux et plus encore.

Jules descendit du balai, son corps tremblant tout entier sous les battements impétueux de son cœur.

Le sifflet avait sonné la fin des sélections. Il fallut attendre avant le verdict. Jules resta étonnement silencieuse parmi les autres postulants. À vrai dire, ils le furent tous. Esclaves du mutisme. L'instant était religieux.

Puis, la voix du capitaine d'équipe percuta le silence. Une liste de noms. Un écho flou. Dans lequel résonna son nom à elle.

Jules Murphy au poste de poursuiveuse.

Jules Murphy. Au poste de poursuiveuse.

Elle explosa de joie. Sans retenue, la Gryffondor poussa un cri de victoire, ses poings se dressant en l'air et ses pieds la propulsant du sol. Si ça ne tenait qu'à elle, elle se serait à nouveau saisie d'un balai et aurait rejoint les airs pour expulser sa joie dans des pirouettes folles. Si ça ne tenait qu'à elle, elle aurait commencé le premier entraînement de l'équipe là, maintenant, tout de suite. Mais Jules avait ses amis qui étaient venus pour la soutenir alors, c'était avec eux qu'elle allait célébrer cette première victoire. Aujourd'hui, elle avait conquis les cieux, songea-t-elle dans toute son euphorie.

Louisa fut la première silhouette qu'elle vit dévaler les gradins pour venir lui sauter au cou. Ses félicitations se mêlèrent aux hurlements de joie que Jules continuait de pousser au milieu des autres futurs joueurs qui faisaient de même. Une joie lionnesque s'était emparée du terrain, oubliant égoïstement les quelques refoulés qui repartaient déjà, tête baissée. Tom arriva à la suite de la Clark et se joignit sans ménagement à l'étreinte tout en ébouriffant les cheveux de la rouquine. Déséquilibré par ce nouvel arrivant, le trio tournoya vaguement sur lui-même avant de s'effondrer sur la pelouse. Étalée de tout son long sur le dos, Jules s'époumona d'un rire joyeux, déversant les dernières traces de son adrénaline dans ces convulsions hilares. Quand elle se redressa, ce furent les félicitations d'Oscar qu'elle reçue, bien que plus modestement. Le tableau était parfait. Ou presque. Il manquait une pièce, il était incomplet.

Ariel était resté à l'écart.

Mais Jules ne voulut pas encore voir l'évidence. L'effervescence d'une foule, il n'aimait pas ça, voilà tout. Alors, elle suivit le mouvement sans se poser plus de questions quand le groupe des Gryffondors s'apprêta à rejoindre le château. Comme eux, elle se changerait plus tard, dans les dortoirs de sa maison, pas maintenant dans les vestiaires. Car maintenant, il fallait fêter ! Et sa tenue sportive était le symbole de sa victoire du jour, alors, autant la porter fièrement sur le chemin du château, puis dans la tour Gryffondor. Autant afficher clairement la source de sa fierté : elle venait d'entrer dans l'équipe. Elle, Jules Murphy, une Née-Moldue, une Deuxième Année, elle venait d'entrer dans l'équipe. Ainsi, elle leur montrerait aux mauvaises langues de quoi une Murphy était capable quand toute la détermination du monde s'emparait d'elle !

Mais au creux de toute cette fierté, de toute cette euphorie, de toute cette satisfaction, un malaise persistait. Une sensation pernicieuse qui, à chaque pas, éloignait un peu plus son esprit de l'ambiance stimulante qui l'entourait. Qui la faisait ralentir progressivement. Jusqu'à ce qu'elle comprenne. L'acclamation des autres Gryffondor n'était en réalité pas la première chose qu'elle désirait à l'instant même. Ce qu'elle voulait était d'une simplicité toute autre : les félicitations de la pièce manquante au tableau. Une seule personne qui comptait plus que la majorité des autres. Alors, au moment où Louisa engagea une conversation avec un élève plus âgé - ce qui capta également l'intérêt d'Oscar et de Tom -, Jules en profita pour s'extirper du groupe et faire marche arrière. Elle rejoignit un Ariel qui traînait du pied.

À son approche, Ariel s'arrêta pour s'adosser à un mur. Son regard fuyant et ses épaules recroquevillées sur le livre qu'il tenait entre ses bras annonçait déjà son humeur. L'euphorie de Jules oublia de dégainer le parachute et se heurta froidement à la pelouse.

- Bien joué, pour les essais. J’ai lu que c’était plutôt rare d’être admise dans l’équipe principale dès la deuxième année, dans les équipes de Poudlard. dit factuellement le Serdaigle en désignant son livre. Félicitations !

L'intonation plate de ses paroles disloqua tout son discours. Jules n'entendit pas ses félicitations. Jules sentit seulement le souffle froid de ses mots glisser sur sa peau encore en sueur et attiser les braises de ses tourments refoulés.

- Merci, répondit la nouvelle poursuiveuse d'une voix sceptique, loin des précédentes explosions de joie.

Cela faisait des jours déjà. Bientôt un mois. Ce froid. Insidieux, muet, discret. Et elle savait pourquoi. Mais n'avait pas encore osé la pointer du doigt, la cause de tout ça. De ce malaise qui s'était installé en silence entre son confident et elle. Avec le temps, ça passerait, s'était-elle dit. Ariel finirait bien par digérer, s'était-elle répétée. Pas la peine d'en reparler, de dramatiser une situation qui s'était bien finie. L'important, c'était le résultat après tout, non ? Et ici, le résultat était une pure réussite : Ariel avait revêtu le violet comme teinte capillaire et en était fier. Alors, pourquoi aborder le Petrificus Totalus ? Pourquoi aborder le voyage fugace d'un secret ? Pourquoi donner vie à des tensions qui auraient dues s'éteindre après l'accomplissement d'un grand projet ?

Non, il n'y avait aucune raison de remettre tout ça sur le tapis. Du superflu.

Et pourtant, ils étaient là. Tous deux immergés dans un malaise crevant la surface du déni.

- Tu n’aurais pas quelque chose à me dire, des fois ? attaqua directement le Melwing.

Et voilà. Enfin. Ils y étaient. Effleurant le cœur du problème par une première question. Et Jules aurait bien voulu prononcé les excuses que son confident attendait d'elle. Elle aurait bien voulu lui dire avec sincérité qu'elle s'en voulait, quelque part tout au fond d'elle. Mais il s'agissait de Jules Murphy, alors, lorsqu'elle ouvrit la bouche, son ego fit vriller sa langue dans une toute autre direction.

- Huuum, merci d'avoir sacrifié ton après-midi pour assister aux sélections d'un sport qui t'ennuies plus qu'autre chose pour soutenir ta grande amie Jules Murphy qui va bientôt devenir une poursuiveuse mondialement reconnue ?

Elle tenta un sourire. Puis, elle comprit que la situation ne se prêtait pas vraiment à l'humour. Son sourire fana sous le poids de son malaise.

- Allez, Arie, viens, faut qu'on fête ça tout ensemble quand même...

Après la tentative de l'humour, celle de la fuite. La Murphy regarda le groupe qu'elle venait de déserter se rétrécir au loin et amorça un mouvement pour faire mine de les rejoindre. Elle n'osait désormais plus regarder Ariel dans les yeux.

☾ anesidora
Jules Murphy
Admin idéaliste
Jules Murphy
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Mar 28 Juil 2020 - 23:39
Accusée Coupable

ft. Jules Murphy

Ariel avait toujours été exigeant en ce qui concernait le choix de ses amis. Sans avoir d’image précise définie au préalable, il avait tout de même fixé quelques critères et les observait avec rigueur. Sans en être conscient, bien sûr - mais il s’avérait quand même que sur certains points la plupart de ses amis se ressemblaient, qu’ils le sachent ou non.

Ainsi, le jeune garçon était entouré de personnes intelligentes, sensibles et dévouées. Il était intransigeant sur la loyauté, ce qui donnait à ses disputes des dimensions de fin du monde. Quelques uns étaient agités mais la majorité était calme et réfléchie. Ils étaient intéressants, curieux et savaient tenir des conversations.

Le problème avec ce genre de personne, c’était qu’elles ne se limitaient pas à des qualités. Lui-même en possédait à la pelle, des défauts : rancunier, distant, parfois irréfléchi - disons plutôt qu’il était très têtu et renonçait rarement à un projet, aussi irréalisable fût-il -, dépendant de l’affection qu’on voulait bien lui donner, insécure… Ils se listaient à l’infini, lui semblait-il. Et c’était peut-être à cause de ça, à cause de ses propres failles, qu’il acceptait mal que les gens qu’il admirait en aient aussi.

Jules en faisait partie, de ces gens. Et naturellement, si elle avait les qualités citées plus haut, ils étaient compensés par des traits de caractère moins glorieux. Ils avaient le don d’insupporter Ariel. Le Serdaigle reconnaissait à des miles de distance les moments où ses horripilantes manies faisaient surface. Parmi elles : le déni. Ou une capacité impressionnante à se voiler la face, ou l’expertise pour fuir ses responsabilités - Ariel avait eu le temps de lui donner plusieurs noms au cours du mois précédent.

Dans tous les cas, quelque chose sur son visage lui annonçait que la fillette allait jouer sa Jules Murphy dans toute sa splendeur. Comprendre : faire l’autruche jusqu’à ce que crédibilité entre en jeu. Et même après, le garçon n’était pas sûr de pouvoir en tirer quelque chose.

Le remerciement en demi-teinte qu’elle lui adressa ne l’étonna même pas un peu. Elle devait flairer qu’il se passait quelque chose de louche. Qu’Ariel n’était pas dans son état normal.

Même si Ariel n’était pas dans son état normal depuis presque un mois.

Finies les confidences auprès des fenêtres de la Salle Commune. Finis les éclats de rire se perdant dans les ramures végétales des arbres du parc de l’école. Finies leurs étourderies dans les couloirs dont les tableaux étaient les uniques témoins. Et surtout, finies les paroles rassurantes que seule Jules avait le pouvoir de trouver. Tout avait changé, dans leur quotidien. Même Jules devait s’en être rendue compte, si enfoncée dans son déni fût-elle.

Le malaise était palpable autour d’eux. Le silence n’avait jamais eu sa place quand ils étaient ensemble et pourtant, à la sortie d’un terrain immense qu’il honnissait et loin des oreilles indiscrètes, il régnait en maître.

Une gêne à l’image de celles qu’ils avaient vécues pendant un mois. Démultipliée par dix.

Ariel serra les bras autour du torse, comme pour se protéger de l’aveuglement de Jules. Le livre était là, rassurant. Il attaqua.

— Tu n’aurais pas quelque chose à me dire, des fois ?

— Huuum, merci d’avoir sacrifié ton après-midi pour assister aux sélections d’un sport qui t’ennuie plus qu’autre chose pour soutenir ta grande amie Jules Murphy qui va bientôt devenir une Poursuiveuse mondialement reconnus ?

— Jules…, soupira Ariel.

Elle n’avait même pas l’air de s’en vouloir. Son ton guilleret annonçait la couleur : non, elle ne souhaitait s’engager sur ce terrain là. Elle resterait sur une conversation légère, sans incidence et facile.

Sauf que lui ne supportait plus leurs silences et leurs rires trop bruyants - car quand Ariel ne l’évitait pas, ils étaient passés maîtres dans l’art de faire semblant. Lui avait besoin de cracher le morceau, de mettre des mots sur ce qui le rendait malade tous les jours, de tirer enfin un trait sur cet épisode de leur amitié.

Ou de tirer un trait sur leur amitié - une possibilité qu’il refusait d’envisager mais pourtant bien présente, tapie au fond de son esprit.

Il en avait marre des conversations faciles.

— Allez, Arie, reprit Jules d’une voix plaintive, viens, il faut qu’on fête ça tous ensemble quand même…

Peut-être que la supplication dans sa voix fut de trop, peut-être que c’était sa manie de dévier le sujet encore une fois, ou alors il s’agissait de son infime mouvement de fuite, mais il sentit clairement le chaudron déborder. La goutte de trop dans la fiole déjà remplie.

C’était lui la victime. Pas elle. Hors de question d’inverser les rôles.

— Ecoute Jules, si tu veux fêter ça, ok, dit Ariel d’une voix très calme - presque gentille. Mais sans moi. J’en ai marre.

Il fit mine de s’en aller, esquissa quelques pas, fit demi-tour. Les yeux de chien battu de la fillette l’agacèrent encore plus. N’était-elle pas à Gryffondor ? N’était-elle pas supposée incarner le courage et la bravoure ? Il n’en décelait pas une once sur son visage défait.

Ariel broya ses propres poings. La colère et la froide distance se disputaient l’attitude à adopter. Le garçon savait que s’il s’énervait les larmes commenceraient à couler d’elles-mêmes ; et en même temps il constatait depuis des semaines que la glaciation de leurs échanges ne suffisait pas.

Ne suffirait jamais sans doute. Du temps perdu.

— Puisqu’il semble y avoir des trous dans ta perception de ces dernières semaines, reprit Ariel, voici pour toi : vous m’avez, toi et tes petits copains, lancé un sortilège à bout portant alors que j’avais le dos tourné. Attaquer un ami déjà, ça correspond pas à l’image que je me fais d’une amitié, et puis je ne pouvais même pas me défendre !

Et il y avait tellement d’autres biais qui aurait permis à Jules d’atteindre son but. Le convaincre, évidemment, même s’il concevait que l’option paraissait compromise avant même d’en établir les bases. La patience également - c’était une qualité qui manquait cruellement à Jules.

En élaborant une stratégie posée, correcte et pacifique, il se serait sans doute laissé tenter plus facilement.

— Et deuxièmement, continua-t-il, implacable, tu as parlé de nos conversations aux autres. Pire ! tu leur as révélé exactement la teneur de l’une de ces conversations. Tu ne comprends pas que si c’est à toi que j’en parle, c’est parce que je ne veux pas en parler à d’autres, tout simplement ?

Il commença à faire les cents pas. Le contact répété du sol sous la semelle de ses chaussures l’aidait à se calmer.

— Comment je suis censé te faire confiance, maintenant ? Comment je suis supposé être sûr que tu n’as rien dit d’autre d’autres à Tom, Louisa et Oscar ? (Il ficha ses yeux dans ceux de Jules pour qu’elle comprenne qu’il s’agissait d’une question de sensibilité entamée davantage que d’une histoire d’ego blessé :) Parce que les cheveux violets, c’est une chose ; mais je t’ai dit des trucs que même ma soeur ne sait pas. Je t’ai confié des réflexions que j’élaborais en même temps que j’en parlais. La seule chose dont j’étais sûr, c’était ce truc qui fait que j’avais une confiance absolue en toi. Je ne suis même pas certain de qui je suis moi-même. Et maintenant…

Oui, et maintenant ? C’était une excellente question qu’Ariel se posait sans cesse. Normalement aussitôt transmise à sa comparse de confidences, elle était cette fois restée sagement au chaud dans un coin de sa tête. À mûrir, se développer et l’angoisser.

Une fois qu’il eût déballé toute sa peine, toute sa rancune et tous ses espoirs tombés en miettes, il se détourna. Les mots qui étaient sortis de sa bouche étaient crus. Lorsque habituellement il prenait le temps de peser chaque syllabes et de mesurer chaque liaison, il s’était livré sans filtre. Quelque chose en lui hurlait au danger, mais tous ses sens chantaient la même chose : le soulagement.

Le soulagement d’avoir enfin exprimé ce qui le rongeait depuis un mois.
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Ariel Melwing
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Ariel Melwing
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Mar 25 Aoû 2020 - 15:16



Accusée coupable
feat Ariel Melwing

Samedi 7 octobre 1995

- Jules…

Un soupir. Une déception. Qui en voilait tant d'autres.

Chaque être humain est fait de ses paradoxes. Jules Murphy aimait s'affichait comme une fervente militante qui refusait de se soumettre au rôle que la société attendait d'elle : celui de l'aveugle. Celui du bon citoyen qui fermait les yeux devant les problèmes qui peuplaient le monde pour ne s'intéresser qu'au confort poli de son chez-lui. Celui de l'abruti qui gobait tout ce qu'on lui disait en restant sagement derrière les barreaux de son esprit étriqué. Celui qui se voilait la face dès que la vérité faisait trop mal à regarder. Jules, elle, elle brandissait haut dans le ciel ces vérités pour forcer les aveuglés à s'y confronter. Et pourtant, elle faisait elle-même parti de ceux-là. De ceux qui, parfois, avancaient les yeux bandés.

Le savait-elle ? Avait-elle seulement conscience du degré de déni dans lequel elle s'enfonçait depuis à peu près un mois ? Si l'on croyait le principe-même du déni, alors non, elle n'en avait pas conscience. Et pourtant, c'était-là une cause importante qu'elle sabotait en agissant de la sorte : celle de l'amitié. Une des premières pour lesquelles elle se serait battue. Alors, en ce samedi d'automne, où se dissimulait cette combativité presque inébranlable qui la caractérisait habituellement ? Pour l'instant, il n'y en avait aucune trace dans le périmètre de ce grand terrain.

- Allez, Arie, souffla-t-elle d'un air implorant, viens, faut qu'on fête ça tout ensemble quand même...

Au nuage qui passa dans le regard de son confident, Jules comprit que cette énième tentative de fuite fût celle de trop. Elle sut aussitôt que cette fois-ci, elle ne s'en sortirait pas comme ça. La vérité arrivait au galop pour lui ôter son bandeau.

- Ecoute Jules, si tu veux fêter ça, ok. Mais sans moi. J’en ai marre.

Le ton calme de l'Aiglon fut l'ultime subtilité à cette prise de parole qui suffit à glacer le sang de la Lionne. Le reproche muet. La rancune froide. La distance comme arme la plus tranchante. Jules - qui avait fait mine de rejoindre le groupe retournant au château – se figea net. Elle aurait voulu continuer d'insister, d'implorer son ami comme elle avait si bien su le faire au moment des inscriptions pour l'atelier du professeur Kayser, mais tous les mots qui lui venaient restèrent bloqués dans sa gorge. Elle les savait vains. Elle les savait inappropriés et aggravants. Et elle savait Ariel sourd à toutes paroles, sauf s'il s'agissait des bonnes. Celles qu'il attendait depuis bientôt un mois.

Alors, la Gryffondor resta muette et immobile et ce fut le Serdaigle qui prit le départ. Puis, il s'arrêta. Se retourna. La regarda. Probablement qu'il lut de l'apitoiement dans son regard clair. Quant à elle, ce fut la colère qu'elle déchiffra dans son regard sombre. Toute la tension de la situation se concentra dans leurs iris respectifs jusqu'à se dissoudre en éclair depuis les lèvres du garçon.

- Puisqu’il semble y avoir des trous dans ta perception de ces dernières semaines, voici pour toi : vous m’avez, toi et tes petits copains - Jules arqua un sourcil à cette dénomination qui l’excluait lui-même de leur groupe de cinq -, lancé un sortilège à bout portant alors que j’avais le dos tourné. Attaquer un ami déjà, ça correspond pas à l’image que je me fais d’une amitié, et puis je ne pouvais même pas me défendre !

Jules ouvrit la bouche pour rétorquer. Il y avait tant de choses à dire pour le contredire ! Pour dédramatiser la situation, pour lui retirer le chapeau de la victime à lui et celui de la coupable à elle. Tant d'excuses contextuelles à glisser pour justifier la scène et faire de l'acte blessant un acte banal. Seulement, aucune n'eut le temps de franchir ses lèvres. Le Melwing ne lui laissa aucun répit dans sa tirade.

- Et deuxièmement, tu as parlé de nos conversations aux autres. Pire ! tu leur as révélé exactement la teneur de l’une de ces conversations. Tu ne comprends pas que si c’est à toi que j’en parle, c’est parce que je ne veux pas en parler à d’autres, tout simplement ?  

Là, plus aucune parole ne se bouscula à la frontière des lèvres de l'accusée. Elle baissa même les yeux. Il avait visé dans le mille. L'élément du tableau qui était le plus dur à regarder. La vérité la plus dure à accepter. Celle qui remettait en cause le principe de confiance sur laquelle reposait leur amitié. Non, Jules ne voulait pas regarder. Elle ne voulait pas accepter qu'elle eût failli à son rôle de confidente. Jules, elle était une vraie amie, une alliée sincère, un soutien de confiance, une oreille muette. Si elle avait une fois dévoilé une confidence, ce n'était pas par envie de commérer, de partager le secret d'autrui. Jules, elle avait construit une forteresse pour protéger certains secrets et ceux de son confident y étaient précieusement gardé ; jamais aucun de ses murs ne souffrait d'une quelconque faiblesse.

Alors, elle n'avait rien dévoilé par faiblesse, non. Ni par étourderie. Ça avait été un acte issu d'une réflexion lui promettant que, pour une fois, Ariel gagnerait plus à matérialiser son songe qu'à le maintenir dans une bulle vaporeuse. Une pensée qui lui profiterait plus dévoilée que gardée. Pas une seule seconde Jules Murphy n'avait imaginé le trahir, mais plutôt agir en sa faveur. Seulement, le mal était fait. Et, à présent qu'il était mis en évidence, plus aucune de ses justifications ne semblait valable. Penser bien faire n'était pas suffisant quand l'on empiétait sur les parcelles d'autrui. Et la Deuxième Année commençait à peine à le réaliser.

- Comment je suis censé te faire confiance, maintenant ? Comment je suis supposé être sûr que tu n’as rien dit d’autre d’autres à Tom, Louisa et Oscar ? Parce que les cheveux violets, c’est une chose ; mais je t’ai dit des trucs que même ma sœur ne sait pas. Je t’ai confié des réflexions que j’élaborais en même temps que j’en parlais. La seule chose dont j’étais sûr, c’était ce truc qui fait que j’avais une confiance absolue en toi. Je ne suis même pas certain de qui je suis moi-même. Et maintenant…

Ses paroles la blessèrent plus qu'elle ne l'aurait crut. Elle ne supporta pas d'entendre ces mots qui remirent en cause toute leur amitié. Toute sa loyauté. Toute la confiance qu'il lui portait. C'était comme se voir soi-même chuter de son balai au ralenti. Dégringoler des nuages. Alors, que dire ? Quand contredire ne ferait que l'enfoncer, que dire ? Quand se justifier ne serait perçu que comme une nouvelle fuite, que dire ? Quand promettre que cela ne se reproduirait plus alors que la confiance était déjà perdue, que dire ?

- Désolée... concéda-t-elle faiblement.

Si faiblement que le vent n'avait peut-être même pas su porter ses paroles à l'oreille du concerné. Même son regard n'osait affronter la réalité de ces excuses et restait figé sur ses mains qui tiraient sur son maillot de Quidditch.

Consciente que ce n'était pas suffisant pour arranger les choses – et ce qu'elle désirait encore plus que de fuir, à présent, c'était bien d'arranger les choses, de rafistoler leur amitié pour la retrouver comme elle était avant -, elle prit une grande inspiration, releva timidement son regard et répéta plus fort :

- Désolée, Ariel. Je le suis, vraiment. Je... - pourquoi sa voix devait-elle subitement se mettre à trembler maintenant ? - je pensais pas, tu sais... Je pensais pas à mal. J'ai rien dit d'autres à Louisa, Tom et Oscar, promis.

Elle rougit. Promettre signifiait-il encore quelque chose aux yeux de son confident ? La Gryffondor reprit une inspiration avant de continuer – par Merlin, ce qu'elle détestait ce manque de confiance qui l'avait soudainement gagné !

- Si je leur ai dit pour les cheveux violets, c'est parce qu'il y avait des étoiles dans tes yeux la première fois que tu m'en as parlé et qu'à moi seule, je n'étais pas capable de te faire sauter le pas. Je pensais vraiment pas te blesser en leur disant, j'imaginais que leurs soutiens t'aideraient justement à oser le faire... Puis, pour le Petrificus... J'ai merdé. Mais, t'sais, l'empressement, l'excitation, tout ça... C'est mon côté Gryffy ça - elle tira aux deux coins de son maillot rouge et or pour souligner son propos avec un léger sourire. Bref, j'ai merdé. Désolée...

Des excuses de la bouche de Jules Murphy ? Cela pourrait paraître invraisemblable et pourtant, celles-ci n'avaient rien à envier du côté de la sincérité. Ariel avait ce pouvoir sur elle. Elle n'était pas seulement son oreille, il était aussi la sienne. Ce n'était qu'entre eux qu'ils osaient exposer leurs faiblesses. Alors, Jules ne voulait en aucun cas perdre cette amitié si particulière qui les liait. Mais comment racheter sa confiance ? Si seulement il existait un sortilège ou une potion pour cela... Elle le ferait savoir à Lily : la magie ne résolvait pas tous les soucis.

☾ anesidora
Jules Murphy
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Jules Murphy
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Mar 27 Oct 2020 - 18:59
Accusée coupable

ft. Jules Murphy

Les mots coulaient comme de l’eau s’échappant d’un barrage trop longtemps maintenu. Incapable de contenir sa rancœur, incapable de réfréner sa déception, Ariel observait le visage de son amie se décomposer. Chaque mot qu’il assénait valait une blessure pour la Murphy. Un coup au cœur ou un coup à l’ego, en revanche, il n’était pas capable de l’affirmer.

Au début, il le vit bien, elle mourut de parler. C’était évident. Tous les signes étaient là : posture engagée, prise de respiration, mouvement volontaire du menton. À un autre moment, Ariel aurait sans doute cédé ; il se serait tu et aurait laissé la fillette s’exprimer. Une semaine plus tôt, il aurait plié. Trois jours en arrière, peut-être même.

Ce jour-là, l’entêtement de Jules à se voiler les yeux et son acharnement à détourner la tête de ses propres erreurs avaient marqué un point de non retour. Il continua, encore, inlassablement. L’expression de la rouge et or se fana. Comme si elle prenait conscience des conséquences de leur dispute sur l’état du jeune garçon.

Il saturait.

Il s’estimait plutôt patient en temps normal, mais ses limites étaient atteintes. Et peut-être qu’il était égoïste, mais il avait besoin de ça pour se délester du poids mort de leur différend.

Enfin son débit de parole s’amenuisa, bientôt il arriva à la conclusion de sa tirade. Une conclusion bancale, sans fin exacte ni définie, résumé de son état d’esprit et de sa désillusion, avec peut-être un peu d’espoir caché dedans. L’espoir d’être rassuré, l’espoir que ce qui fut cassé soit réparable.

Il se tut complètement.

En face, Jules se taisait aussi. Il tenta de déchiffrer son expression sans grand succès : elle avait juste l’air révoltée, mais Jules avait toujours l’air révolté.

Le silence s’étira pendant des heures même s’il dura moins de deux secondes.

Elle dit quelque chose et ses mots furent emportés par le vent.

Ariel l’observa sans ciller comme pour lui demander d’assumer ses excuses. Car il ne pouvait s’agir que d’excuses, non ? Même lui n’y croyait pas tellement.

Alors il cru s’être trompé lorsqu’elle articula plus fort :

— Désolée, Ariel. Je le suis, vraiment. Je… je pensais, tu sais… Je pensais pas à mal. J’ai rien dit d’autre à Louisa, Tom et Oscar, promis.

Le jeune Serdaigle soupira : il s’en doutait bien sûr, il l’espérait. Mais l’entendre de la bouche de son amie le rassura. Et parallèlement, il refusait que ce soit si simple. Il suffisait de quelques mots et tout partait aux oubliettes ?

Ariel croisa les bras, à moitié pour se protéger du froid et à moitié pour se calfeutrer dans une armure psychologique. Le mur de pierre qui bordait les gradins lui permit de s'y adosser, comme pour soulager la tension dans son dos.

Elle sembla comprendre qu’elle ne remporterait pas la partie ainsi car elle poursuivit sur sa lancée :

— Si je leur ai dit pour les cheveux violets, c’est parce qu’il y avait des étoiles dans tes yeux quand tu m’en as parlé et qu’à moi seule, je n’étais pas capable de te faire sauter le pas. (Ariel se mordit les lèvres, car il avait conscience qu’elle ne pouvait énoncer de meilleure vérité.) Je pensais vraiment pas te blesser en leur disant, j’imaginais que leurs soutiens t’aideraient justement à oser le faire… Puis pour le Petrificus

Le jeune homme se tendit imperceptiblement. La sensation du carrelage froid et humide demeurait sur sa joue. Impossible de ne pas leur en vouloir.

— J’ai merdé. Mais, t’sais, l’empressement, l’excitation, tout ça… C’est mon côté Gryffy, ça. Bref, j’ai merdé… Désolée.

Ariel haussa les épaules. Qu’avait-il à dire de plus ? Il était indéniable qu’en effet, elle avait perdu le contrôle des événements, et que pour sûr, il y avait eu un problème de communication entre les deux amis.

Il se demanda si elle avait vécu la même chose que lui pendant le mois qui s’était écoulé. L’avait-elle regardé, tous les jours, en se demandant ce qui clochait chez lui ? S’était-elle languie de leurs éclats de rire naturels et de leurs confidences à découvert ? S’était-elle rendue compte que leurs échanges étaient devenus faux et superficiels, même - surtout - lorsqu’ils étaient en compagnie des trois autres membres de leur groupe ?

Avait-elle remarqué qu’il ne lui avait pas adressé directement la parole depuis plusieurs semaines ? Il s’était toujours arrangé pour passer par un intermédiaire et pour ne pas ouvrir la bouche trop souvent en présence de la rouquine. Une question, une relance : un blocage survenait, le prenait au piège entre sa rancœur et son désir de passer à autre chose.

Sauf que la rancœur était toujours la plus forte.

— Je t’aurais bien dit que tes excuses suffisent, mais c’est plus compliqué que ça, dit finalement Ariel.

Et alors qu'il finissait sa phrase, la rudesse de ses mots lui sauta au visage. Le besoin de se justifier se fit sentir.

— Je veux dire, je sais que je suis l’un des rares privilégiés à pouvoir te tirer des excuses, parce que Miss Murphy assume le moindre de ses actes.

L’ironie était perceptible.

Se disant, un sourire en coin se dessina sur son visage ; un peu comme s’il souhaitait montrer qu’il avait conscience de l’excès de vanité qui en sortait. Il décida d’enfoncer le clou, pour lui montrer que si le pardon était envisageable, ce n’était pas le cas de l’oubli.

Il décida de lui ouvrir totalement son cœur, parce que ça faisait très longtemps qu’il ne l’avait pas fait et que les émotions qu’il avait verrouillées commençaient à le peser.

— Je suis heureux que tu l’aies fait ! Que tu te sois excusée, je veux dire. En fait, je… c’était ça que j’attendais, au début. Tu sais, en sortant des toilettes, que tu me prennes à part, qu’on en parle calmement loin des autres. Pas une putain de blague dont tu as le secret pour esquiver un truc qui te gêne.

L’insulte était partie toute seule, sans maîtrise ni retenue. Ça faisait du bien, même si Ariel n’était plus tout à fait sûr que Jules mérite ses sautes d’humeur. À mesure que ses ressentis s'extirpaient finalement de sa personne, la colère perdait de plus en plus de terrain.

Il la lorgna par-dessous ses cils. Chacune de ses expressions était précieuse, chacun de ses mots tenait lieu de code secret, à ce moment. Ariel s’en serait voulu s’il avait perçu qu’il allait trop loin ; il ne voulait pas aller trop loin. Il ne connaissait pas ses limites - pouvait-elle craquer devant quelqu’un ? pouvait-elle craquer tout court ? crier, fuir, pleurer ?

Fuir, assurément.

Il fallait néanmoins qu’elle comprenne à quel point l’attente l’avait touché. À quel point son silence et ses parades avaient été blessants. À quel point le déni avait failli tuer leur amitié. Il se décida pour une dernière question :

— Si je ne t’avais pas retenue, aujourd’hui, est-ce que tu serais un jour venue vers moi ?
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Jeu 19 Nov 2020 - 16:31



Accusée coupable
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Samedi 7 octobre 1995


C’était dur de voir une fissure dans un décor qu’on imaginait parfait. C’était plus facile de détourner le regard face aux brèches en formation. Hormis quelques petits accrocs minimes, leur amitié, à Ariel et elle, avait toujours était lisse. Quelques petits remous selon les humeurs, les périodes, les désaccords, mais jamais de grosse vague. Aujourd’hui, Jules avait l’impression de prendre de plein fouet le tsunami qu’elle avait refusé d’apercevoir à l’horizon depuis presque un mois.

Pourtant, il était là. Le tsunami. La brèche. Il s’était formé progressivement, lentement, silencieusement. Trop silencieusement. Ça avait été ce silence lourd et pesant qui avait annoncé l’arrivée de la tempête. Et ce silence, Jules l’avait ignoré. Trop occupée, trop éparpillée, trop négligée. Les sélections pour les nouvelles équipes de Quidditch avaient pris entièrement possession de ses pensées et de son temps ce dernier mois. Plus que tout, elle avait voulu sa place dans l’équipe. Et ses efforts avaient payé. Mais à quel prix ? Celui d’une amitié ? Allait-elle perdre Ariel car elle s’était focalisée sur ses entraînements plutôt que sur la brèche en formation ? Allait-elle perdre son confident car son déni l’avait rendu trop négligente pour apercevoir les maux qui les éloignaient un peu plus chaque jour ?

La claque de cette réalisation lui vrilla l’estomac. L’angoisse s’y était nichée. La culpabilité, aussi. Comment avait-elle pu faire un tel affront à ses priorités ? L’amitié, c’était sacré. C’était ce qu’elle revendiquait sans cesse. Et pourtant, si aujourd’hui l’une d’elle se réduisait intégralement en poussière, ce serait uniquement de sa faute. Celle de son déni, de sa négligence et de son ego.

Alors, elle décida enfin de chasser chacun d’entre eux pour plier l’échine avec de plates excuses.

Les prononcer n’avait eu rien de naturel. Comme si chaque syllabe lui était étrangère et, pourtant, sa voix avait tremblé de sincérité. Des justifications creuses s’y ajoutèrent. Comment les retenir ? Un simple « désolé » ne semblait pas suffire. Elle n’avait jamais vu Ariel aussi ancré dans sa colère. Pire, elle n’avait jamais vu cette colère-là dirigée contre elle.

- Je t’aurais bien dit que tes excuses suffisent, répondit finalement l’Aiglon, mais c’est plus compliqué que ça.

Quand ces mots frappèrent les tympans de la Murphy, son sang se glaça. Qu’insinuait son plus grand confident du château par cette phrase ? Que leur amitié allait se terminer là ? Que leur lien ne pourrait pas se rafistoler ? Interdite, Jules attendit la suite sans oser bouger d’un centimètre.

- Je veux dire, s’empressa-t-il d’ajouter - sûrement qu’il avait vu le teint de Jules pâlir brutalement -, je sais que je suis l’un des rares privilégiés à pouvoir te tirer des excuses, parce que Miss Murphy assume le moindre de ses actes.

En temps normal, ç’aurait été avec le menton haut revendiquant une fierté surjouée que Jules aurait accueilli cette remarque, se prêtant au jeu de la comédie pour répondre à l’ironie. Mais à ce moment précis, du plomb semblait avoir englué son visage : elle n’était capable d’aucune mimique. Figée sous le poids de l’incertitude. De la crainte de perdre son ami le plus cher. De la confusion quant à la façon d’interpréter ses propos.

Même son sourire en coin ne la rassura pas. Comme si elle ne savait plus lire en lui. Comme si Ariel Melwing se présentait pour la première fois à ses yeux comme l’énigme complexe qu’il était. Alors, devant le manque de réaction de la rousse, il enchaîna à nouveau :

-Je suis heureux que tu l’aies fait ! Que tu te sois excusée, je veux dire. En fait, je… c’était ça que j’attendais, au début. Tu sais, en sortant des toilettes, que tu me prennes à part, qu’on en parle calmement loin des autres. Pas une putain de blague dont tu as le secret pour esquiver un truc qui te gêne.

D’abord, les épaules de Jules s’affaissèrent. La première phrase fut salvatrice, libératrice, comme pleines de belles promesses qui faisait taire le désespoir. Puis, son visage se recolora et s’accorda même à la couleur de son maillot alors qu’elle émit un bref rire nerveux en réaction à la dernière phrase. Avait-elle droit de rire ? Avait-elle droit de croire que l’ambiance se décrispait légèrement ? Que ses craintes gigantesques qui venaient de naître en elle étaient, au final, irrationnelles ? Ce fut comme ça qu’elle voulut interpréter les dernières paroles de son ami aux boucles pourpres, même si l’incertitude restait encore maîtresse de son esprit.

- Faut croire que Tom m’a bien enseigné cette technique d’esquive, glissa-t-elle dans un demi-sourire, la voix encore hésitante.

Elle soupira, consternée par sa propre remarque. Comme si la moindre maladresse pouvait encore faire s’écrouler toutes les fondations de leur amitié.

- Mais, j’ai compris, se reprit-elle. Enfin, je le savais déjà, mais maintenant, je saisis vraiment, tu vois ?

Réalisant le flou de ses propos, elle s’efforça de trouver les mots pour clarifier :

- Avec toi, faut mettre les choses à plat. Tout de suite, je veux dire. Pas mille ans après. Et t’as bien raison, c’est juste que… - sa voix baissa de volume, elle se mit presque à marmonner - voilà, tu me connais, reconnaître mes torts c’est pas toujours facile.

Si bien qu’elle ne pût s’empêcher de relever le menton avec audace en ajoutant :

- Surtout que c’est pas dans mes habitudes, d’avoir tort.

Derrière son sourire vaniteux, elle resta attentive à la réaction d’Ariel avant de lui tirer la langue et de lui offrir un léger coup de coude. Mimiques complices qu’elle ne voulait pas voir disparaître. Alors, ce simple geste lui apporta du réconfort. Comme s’il signifiait que rien n’allait changer, que, malgré le sérieux de son ami, elle pourrait toujours blaguer avec lui.

Néanmoins, une ultime question fut émise par son confident. Comme une promesse au passé qui n’attendait qu’à être celée.

-Si je ne t’avais pas retenue, aujourd’hui, est-ce que tu serais un jour venue vers moi ?

Le visage de Jules se rehaussa de sérieux. Ou plutôt, d’une sincérité douce.

- Bien sûr, Ariel.

Elle fit une pause, tenta un léger sourire.

- Tu crois vraiment que j’aurais supporté encore longtemps ton ignorance ? Même si je faisais comme si de rien était, j’avais remarqué, tu sais… Et, même si j’essayais de pas trop y penser, de relativiser et de me convaincre que ça te passerait, bah.. ça me faisait chier, tes silences.

Un soupir.

- Alors, oui, bien sûr que j’aurais fini par venir te parler en constatant que ça te passerait pas. T’es mon ami, mon confident, je veux pas te perdre.

Sa voix s’était posée. Ses lèvres se retroussèrent ensuite en une moue sur le côté. Un instant d’hésitation, puis elle ouvrit ses bras pour proposer à Ariel ce qui se voulait être un câlin de réconciliation.
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Jules Murphy
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Jules Murphy
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Sam 21 Nov 2020 - 20:25
Accusée coupable

ft. Jules Murphy

Ariel ne pouvait qu’imaginer la douleur de Jules en le voyant si fermé. Ils n’avaient jamais traversé ce genre de crise ; même pendant leurs plus affreuses disputes - une divergence d’opinion sur la manière dont les sorciers traitaient les elfes de maison, sans doute -, le ton s’était contenté de monter. Quelques cris - frustration pour Jules, contrariété pour Ariel -, quelques insultes - “De toute façon, t’es qu’un gros nul !” - et puis une accolade pour clore définitivement le sujet. Ils évitaient ensuite d’approcher des pentes glissantes pendant quelques temps. Jusqu’à ce que le souvenir du différend se soit perdu dans les brumes de l’oubli.

Mais même après ce genre d’événements, les deux amis ne dérogeaient pas à cette règle d’or : l’un s’ouvrait comme une fleur pour s’épancher sur ce qui ne sortait jamais, l’autre s’adoucissait comme du coton pour lisser les angles bruts de son tempérament fulgurant.

Comment ne pas se sentir démuni en constatant que leur alchimie si parfaite ne fonctionnait pas ce jour-là ?

— Je t’aurais bien dit que des excuses suffisent, mais c’est plus compliqué que ça, avait-il même eu le culot de sortir.

Ariel avait assisté en direct à la décomposition complète du reste de l’ego de la Murphy.

De l’extérieur, la scène détenait peut-être un petit quelque chose d’amusant. Deux fiertés démesurées entraient en conflit et finissaient blessées. L’une triomphait pourtant et l’autre rendait les armes. Un feuilleton dont les quelques rebondissements, sans être trop imprévisibles, avaient quand même de quoi divertir. Deux amis sur le bord de la rupture, ça changeait des couples qui s’envoyaient des assiettes à la figure.

De l’extérieur.

De l’intérieur, le cœur d’Ariel se fissura sur toute sa longueur lorsqu’il vit les yeux de son ami perdre le reste de leur éclat. Habituellement, ils étaient un puits sans fond de lumière et de joie de vivre. Là, la seule émotion qu’ils renvoyaient, c’était le doute.

Alors oui, Ariel faillit rendre les armes. Sauf qu’il persévéra. Il avait des choses à dire, il le savait. Des choses qu’il ne pourrait peut-être plus dire en d’autres circonstances.

Il prit néanmoins sur lui pour enrober ses mots de douceur et de politiquement correct - ça, il savait faire. Un peu d’humour, car il savait que rien ne fonctionnait mieux que l’humour sur sa jeune amie, accompagné d’un zeste d’amertume. Pêle-mêle composant la panure se disputaient les regrets, la tendresse, la colère, la tristesse. Il en avait le tournis.

La fin de son discours prit les couleurs de toutes ces émotions, mais au moins il fut honnête.

— Je suis heureux que tu l’aies fait ! Que tu te sois excusée, je veux dire. En fait, je… c’était ça que j’attendais, au début. Tu sais, en sortant des toilettes, que tu me prennes à part, qu’on en parle calmement loin des autres. Pas une putain de blague dont tu as le secret pour esquiver un truc qui te gêne.

— Faut croire que Tom m’a bien enseigné cette technique d’esquive, rétorqua Jules sous les yeux ahuris d’Ariel.

Alors c’était ça, l’issue de la conversation ? Elle allait à nouveau pirouetter avec l’une de ces joutes verbales qu’elle maîtrisait si bien et s’en tirer sans un bleu ?

Ariel plissa les yeux, mécontent. Blessé. Et furieux. Oh que non : Jules Murphy allait en prendre pour son grade. Ariel lui avait ouvert son cœur pour une ultime confession. Il avait l’impression de perdre son temps.

— Tom n’est pas moi, articula-t-il. Et je ne confie pas tous mes secrets à Tom. Il n’a pas autant à se faire pardonner que toi.

— Mais, j’ai compris, dit-elle, et cela le calma temporairement. Enfin, je le savais déjà, mais maintenant, je saisis vraiment, tu vois ?

Ariel secoua la tête. Non, il ne comprenait pas. Il avait l’impression que Jules l’avait emmené dans une série de loopings et que ni son cœur ni son cerveau ne parvenaient à suivre le rythme.

— Avec toi, faut mettre les choses à plat. Tout de suite, je veux dire. Pas mille ans après. Et t’as bien raison, c’est juste que… Voilà, tu me connais, reconnaître mes torts, c’est pas toujours facile. Surtout que c’est pas dans mes habitudes, d’avoir tort.

Si le discours le rendait sceptique - alors elle remarquait ça deux ans après le début de leur amitié fusionnelle ? Tu parles d’une amie -, la fin le fit soupirer.

Jules Murphy était définitivement une cause perdue. Même la colère avait rendu les armes. La lassitude triomphait. Grande gagnante de ce concours aux contours déplaisants.

— Jules, il va vraiment falloir que tu apprennes à te remettre en question. Parce que si avec tout ça, tu n’as pas compris que toi aussi tu commettais des erreurs, alors je ne sais pas comment te le montrer. (Il leva la main et compta sur ses doigts à chaque énumération :) Tu as trahi ma confiance. Tu m’as lancé un sortilège dans le dos. Tu as ignoré mes Lumos Maxima (1) pourtant évidents qui te réclamaient des excuses. Et quand tu me les fais enfin, tu te débrouilles pour rejeter la faute sur quelqu’un d’autre - Tom.

Il baissa la main. Le but n’était pas de faire paniquer Jules à nouveau.

— Ce que je veux dire, Jules, c’est que peut-être que ta morale est à toute épreuve, peut-être que tu mènes des combats honorables, mais tu n’es pas parfaite. Loin de là. Tu fais des erreurs, comme moi, comme Tom, comme McGonagall même. Tout le monde en fait. Ce n’est pas une honte mais il faut savoir les reconnaître avant qu’elles ne prennent trop de place.

Parce que les tiennes ont failli tout gâcher.

Il ne le dit pas, mais la phrase resta en suspens.

Ariel se mordit les lèvres. Il avait bien conscience qu’il faisait traîner la situation, qu’il piétinait en attendant d’accepter les excuses de Jules. Pourtant, à présent qu’il sentait que leur amitié était sauvée, il sentait que c’était nécessaire : Jules devait prendre conscience qu’elle avait merdé et que ce genre de comportement ne passerait pas plusieurs fois sans conséquence. Des conséquences autres qu’une dispute après des essais de Quidditch.

Ses yeux se fermèrent fort, le temps de permettre à Jules de répliquer s’il le fallait. Il ne comptait pas continuer sur ce chemin. Pour lui, ils étaient en train de fermer le dossier et de le classer dans les archives. Un mauvais moment qu’ils venaient de passer. Le rapport serait peut-être douloureux à consulter, mais s’ils en tiraient les leçons qui convenaient, tout irait bien.

— J’ai besoin de savoir encore une chose, fit-il tout de même.

Il se blinda psychologiquement. Jules allait répondre sincèrement, il le savait, et sa réponse était d’une importance capitale. Il le sentait.

— Si je ne t’avais pas retenue, aujourd’hui, est-ce que tu serais un jour venue vers moi ?

— Bien sûr, Ariel.

Sa voix n’avait jamais parut si douce. Elle se para des couleurs de l’espoir et Ariel eut envie de la serrer dans ses bras. La retrouver, elle et sa joie de vivre fantasque, et revivre leurs moments de complicité exclusifs.

Mais il n’était pas encore temps alors il se retint.

— Tu crois vraiment que j’aurais supporté encore longtemps ton ignorance ? Même si je faisais comme si de rien n’était, j’avais remarqué, tu sais… Et, même si j’essayais de ne pas trop y penser, de relativiser et de me convaincre que ça te passerait, bah… ça me faisait chier, tes silences. Alors oui, bien sûr, j’aurais fini par te parler en constatant que ça te passerait pas. T’es mon ami, mon confident, je veux pas te perdre.

Ton déni ne t’est pas passé, lui non plus, aurait pu répliquer Ariel. Mais il se tut, car il en avait marre. Ses émotions étaient à vif. Sa sensibilité devenait de plus en plus aiguë, de plus en plus présente. À tout moment, elle explosait.

Au moins avait-elle mal vécu cette période, elle aussi. Au moins avait-elle eu conscience de leur amitié qui s'effritait - et l'avait-elle enduré avec tristesse. C'était tout ce qu'il voulait savoir. Qu'elle se souciait de lui autant qu'il se souciait d'elle.

Il se contenta de sourire, d’un sourire évocateur, d’un sourire qui acceptait.

Jules eut un rictus bizarre, à mi-chemin entre le sourire et la moue boudeuse d’un enfant qui reconnaît ses fautes. Elle lui ouvrit les bras, hésitante. Comme si elle n’était pas tout à fait sûre d’avoir le droit de le faire.

— Tu aurais pu en avoir marre avant, plaisanta-t-il en se blottissant contre elle.

Son odeur lui avait manqué, constata-t-il ainsi calé. Ce fut la seule remarque que son cerveau parvint à formuler.
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(1) J'ai voulu adapter l'expression "Tu as ignoré mes appels de phares pourtant évidents qui te réclamaient des excuses".

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Lun 14 Déc 2020 - 16:57



Accusée coupable
feat Ariel Melwing

Samedi 7 octobre 1995

- Tom n’est pas moi. Et je ne confie pas tous mes secrets à Tom. Il n’a pas autant à se faire pardonner que toi.

Ça, Jules le savais. Visiblement, le second degré n'avait pas encore sa place dans cette discussion et elle aurait mieux fait de ravaler sa dernière remarque. Après tout, Ariel ne pouvait pas dire plus vrai : il n'était pas Tom. À l'antipode du joyeux luron de la bande, Ariel était l'incarnation même du premier degré dans toute conversation aux tenants et aboutissants non-négligeables. C'est-à-dire, pratiquement toutes les conversations auxquelles il prenait part. « L'humour ne doit pas venir ternir le sérieux d'un discours », qu'il pourrait sans nul doute revendiquer. Sauf, bien entendu, s'il s'agissait de touche de sarcasme mettant l'emphase sur ses complaintes.  Jules s'y était faite. Mais sa fichue manie de dédramatiser les situations où elle se sentait inconfortable, elle, peinait à retenir la leçon. Alors, elle s'empressa de se rattraper :

- Mais j'ai compris, commença-t-elle d'une voix agitée pour s'engager sur la pente de ses conclusions.

Mais à peine le premier rappel à l'ordre prononcé, qu'elle commit une seconde fois la même erreur. Ce fut plus fort qu'elle. Elle dut achever son discours vaseux par une touche de dérision vaniteuse qu'elle accentua cette fois-ci d'un coup de coude et d'un tirage de langue évoquant le non-sérieux de ses dernières paroles :

- Surtout que c’est pas dans mes habitudes, d’avoir tort.

Sa gestuelle ne suffit pas. Encore une fois, elle en avait trop dit. Elle aurait dû s'arrêter à l'aveu qui avait précédé. Elle aurait dû. Tout comme lui aurait pu se défaire de la rigidité de son faciès pour accueillir son humour douteux d'à minima, un demi-sourire. Car Jules avait eu, l'espace d'un instant, l'espoir de retrouver leur complicité d'antan. Elle ne vit pas venir le flot de reproches qui noya à nouveau son sourire.

- Jules, reprit le Melwing d'une voix lasse, il va vraiment falloir que tu apprennes à te remettre en question. Parce que si avec tout ça, tu n’as pas compris que toi aussi tu commettais des erreurs, alors je ne sais pas comment te le montrer.

Les épaules de la Murphy s'affaissèrent. Elle voyait la vague revenir de plus belle et, alors que son vis-à-vis leva sa main pour énumérer ses accusations, elle détourna les yeux. Elle aussi commençait à goûter à l'amertume de la lassitude. Quand est-ce que ça en finirait ? Cette discussion, ces reproches, cette situation ? Quand est-ce qu'ils pourraient enfin passer à autre chose ? Quand est-ce que lui aussi rendrait les armes alors qu'elle avait déposé les siennes à ses pieds depuis plusieurs minutes déjà ?  

- Tu as trahi ma confiance. Tu m’as lancé un sortilège dans le dos. Tu as ignoré mes Lumos Maxima pourtant évidents qui te réclamaient des excuses. Et quand tu me les fais enfin, tu te débrouilles pour rejeter la faute sur quelqu’un d’autre - Tom.

Elle avait acquiescé en silence, tout du long. Puis, elle s'extirpa à sa contemplation du gazon pour relever son regard vers lui. Elle savait que les mots les plus durs allaient venir à ce moment précis. Elle ne pouvait s'y soustraire et devait les affronter de face. Sans un mot. Sans une parole. Elle devait juste les encaisser comme une multitude de gifles en se convainquant qu'elle les avait mérités.

- Ce que je veux dire, Jules, c’est que peut-être que ta morale est à toute épreuve, peut-être que tu mènes des combats honorables, mais tu n’es pas parfaite. Loin de là. Tu fais des erreurs, comme moi, comme Tom, comme McGonagall même. Tout le monde en fait. Ce n’est pas une honte mais il faut savoir les reconnaître avant qu’elles ne prennent trop de place.

Elle ne répondit pas tout de suite. Les battements de son cœur s'étaient imperceptiblement accélérés. Elle sentait les minces impulsions de son sang dans ses veines. Tout ce qu'Ariel venait de lui dire était vrai, réaliste, et elle savait déjà tout ça. Personne n'était parfait, évidemment que ça se savait. Mais il y avait quelque chose de blessant dans sa façon de le lui dire. Pas dans ses mots, mais dans sa voix. Celle qui portait encore l'intonation du reproche et de la déception. Ou peut-être bien aussi dans ses mots, ceux qui mettaient en avant ses qualités pour mieux les décrédibiliser ensuite. Blessée, elle aurait pu protester. S'énerver. Rougir. Rugir. Mais l'écho infatigable de son inquiétude gardait l'emprise sur son sang chaud. Une inquiétude qui résonnait en une seule crainte : l'aimait-il un peu moins, à présent, à force d'endurer la fougue de son comportement ? Son amitié avait-elle été détériorée par le temps et les événements ?

Elle remarqua que ses poings s'étaient serrés. Frustration, vexation, retenue, inquiétude, doute et craintes. Elle les desserra en laissant échouer son regard vers le bas.

- Je sais, Ariel, je sais tout ça... Et c'est justement parce que je suis imparfaite et que je fais des erreurs que maintenant, il ne me reste que des excuses pour essayer de rabibocher notre amitié.

Elle remonta son regard vers celui de son confident.

- Alors, encore une fois, désolée...

Un silence. Comme dans l'attente d'un jugement.

- J’ai besoin de savoir encore une chose, se décida finalement l'Aiglon. Si je ne t’avais pas retenue, aujourd’hui, est-ce que tu serais un jour venue vers moi ?

L'évidence s'échappa des lèvres de la rousse en un seul souffle :

- Bien sûr, Ariel.

Enfin, elle apercevait le bout. La porte ouverte vers la fin salvatrice d'une conversation qui lui avait longuement parut sans issue. Enfin, elle voyait s'ouvrir devant elle l'espace de s'exprimer avec sincérité, avec son cœur, sans le poids de la culpabilité. Juste un espace pour extérioriser ses ressentis du dernier mois.

-  Tu crois vraiment que j’aurais supporté encore longtemps ton ignorance ? Même si je faisais comme si de rien était, j’avais remarqué, tu sais… Et, même si j’essayais de pas trop y penser, de relativiser et de me convaincre que ça te passerait, bah.. ça me faisait chier, tes silences. Alors, oui, bien sûr que j’aurais fini par venir te parler en constatant que ça te passerait pas. T’es mon ami, mon confident, je veux pas te perdre.

L'ultime aveu qui chassa le brouillard. Elle vit le regard de son ami s'éclaircir. Elle ouvrit les bras. Il s'y blottit.

- Tu aurais pu en avoir marre avant, râla-t-il une dernière fois.

- Pas faux, rigola-t-elle doucement en lui ébouriffant sa tignasse pourpre.

FIN
☾ anesidora
Jules Murphy
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