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Mistral Gagnant [05/12/1995] Sessho & Maylone

 :: Poudlard :: Les Étages :: La Galeries des Armures Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas
Mar 13 Juil 2021 - 16:12
Mistral Gagnant.
Mardi 5 Décembre 1995,

« Comment vous sentez-vous aujourd’hui ? », lui demanda-t-elle en le regardant par-dessus ses lunettes.

Il releva son dos dans son fauteuil, les mains jointes sur ses cuisses. Le bureau dégagé pour le suivi psychologique n’était pas grand. Deux sièges face à face dans un cube de pierre, à peine décoré par un tableau et une plante jaunie par le manque de luminosité. La toile était désertée de son occupante, une dame mal échaudée dans une robe au col bouffant, vestige des guerres franco-britanniques. La fenêtre était recouverte d’un épais rideau, un drap sombre entrebâillant une minuscule fenêtre dont n’émanait que le gris du ciel.

Elle tapota la pointe de sa plume sur son parchemin, le ramenant à sa présence. Son regard insistant lui donna envie d’abréger leur entretien de jolis mensonges, d’acquiescer d’un sourire de façade pour faire taire un débat stérile. Comme il avait accepté les arguments bienveillants de son directeur de maison pour être soulagé de son inquiétude. Il comprenait, mais n’était pas certains de totalement accepter cette sympathie qu’il ne sentait qu’à demi légitime de supporter.

« Bien. », répondit l’élève avec assurance.

« Sessho. », commença-t-elle conciliante. « Appliquez la règle que nous avons convenue, vous vous souvenez ? »

« Ni bien, ni mal. », récita-t-il par dépit, sachant qu’il ne parviendrait pas à être quitte de leur séance sans introspection. Volontaire ou non.

Lui qui aimait disséquer l'esprit, le sien, celui de ses amis, pour saisir l'intensité d'un ressenti, la complexité d'une émotion, préférait fuir sa curiosité et l'enfouir sous une dalle de déni circonstanciel. Ne pas penser trop longuement à ses cauchemars, à ses sueurs froides, à ses angoisses. Ne pas regarder la zébrure de lettres capitales sur son torse. Ne pas revoir les contours d'un masque dans le noir. Ne pas entendre le bruit de la pluie.

En déglutissant, il eut l'impression de sentir le goût du sang.

« Vous devez mettre des mots sur ce que vous ressentez, Sessho. Vous devez comprendre vos émotions. Vous avez le droit de vous sentir en colère, dépassé.. »

« Je ne suis pas en colère. », la coupa-t-il sèchement. Il ferma les yeux, tempérant son intonation pour reprendre plus posément. Il ne se reconnaissait plus. « Je ne suis pas en colère. »

« Je crois que vous l'êtes, Sessho. Mais pas contre votre agresseur. Pas contre le monde. », elle prit quelques notes, analysant jusqu’à sa main qui alla se loger à l'arrière de sa tête.

Il se sentait comme un animal dans un laboratoire, testant les effets secondaires d'une potion dangereuse. Surveiller. Observer à la loupe, comme une bête de foire. Ça le rendit mal à l'aise. Il bougea, d'une jambe à l'autre, le regard fuyant et la mine fermée.

« Contre qui le serai-je, docteur ? »

« Contre vous-même. », lui dit-elle comme une évidence, relevant le nez pour admirer ses épaules convulser d'un rire contenu.

« C'est absurde. », grinça-t-il tout bas, finissant par se relever pour marquer quelques pas.

Marcher l'aida à réfléchir, à mettre au point une stratégie de repli. Il ne voulait pas en parler. Il ne voulait y penser. Il ne voulait pas se souvenir. Les doigts tremblants, il prit sur lui de respirer, d'inspirer profondément pour ne pas craquer. Ni pleurer. Ni crier. Ni céder à la pulsion de tout verrouiller. Il ne le ferait plus.

Il pouvait trouver une excuse. Il pouvait prétendre être fatigué. Mentir ne le satisfaisait pas. Mais c'était toujours mieux que de souffrir.

Elle ne lui laissa pas le temps d'appliquer sa maigre décision.

« Vous êtes en colère. », reprit-elle en suivant ses va et vient, qu'elle garda en mémoire d'un simple tiret.

« Je ne suis pas en colère. », répéta-t-il pour la seconde fois dans un soupir.

« Vous êtes triste. »

« Je ne suis pas triste. », la contredit le Serdaigle en se détournant pour contourner le fauteuil.

Tout ce cirque était ridicule et sa diplomatie filait sous ses doigts comme une poignée de poussière. Il pouvait lui dire qu'il était épuisé de ce jeu. Mais ses maigres réserves de tact l'en empêchèrent. Il n'était pas comme ça, et ne pouvait se résoudre à franchir la barrière de l'affrontement. Même verbal.

« Vous êtes désespéré. »

« Je ne suis pas... », il se racla la gorge, abasourdit par un terme aussi extrême. « Désespéré. »

Il n'était pas une brune à fleur de peau, se brisant la voix contre le vent. Il n'était pas une trop jeune âme fauchée par les eaux, pleurant dans les vagues pour oublier les échos de sa propre détresse. Il n'était pas le cœur fendu de notes stridentes. Il n'était pas un arc-en-ciel aux couleurs vacillantes, se figeant sur le terne d'un cocon instable. Il n'était pas un oiseau moqueur ne pouvant plus rire, claquant ses ailes dans la brume de son chagrin. Il n'était pas la moitié de tout cela.

Il était impuissant. Coupable, sans doute un peu. Frustré de sa faiblesse. Et égoïste d'y penser ne serait-ce qu'une seconde.

« Vous avez le droit d'avoir mal. Vous avez le droit de vous sentir coupable. », il serra les mâchoires, lassé qu'elle voit aussi clair en lui, ce qui l'encouragea à continuer, voyant poindre un début de réaction. « Vous avez le droit d'être en colère. Vous avez le droit d'être triste. Vous avez le droit de ne plus rien pouvoir gérer, Sessho. Alors... Je vous le redemande une dernière fois, comment vous sentez-vous ? »

Le vide lui tiraillait le bide, comme un tourbillon sous-marin. Son discours le plongea dans une mer glacée et il en frissonna douloureusement. Pour se protéger, il ramena ses mains contre ses côtes, croisant les bras. Il s'autorisa à papillonner des yeux, trahissant la montée de ses larmes. Il haleta, luttant contre une émotion qui le gagna à la gorge, qui submergea son être tout entier, ravageant sa culpabilité d'un revers. Elle n'en reviendrait que plus forte. Que plus lancinante.  

« Seul. »

.

C'est au pas de course qu'il sortit de son heure de thérapie de la semaine, le cœur battant, la fatigue dans les veines et la mélancolie dans le souffle. Il voulut mettre le plus de distance entre lui et le carnet de la psychomage. Entre lui et ses déductions. Entre lui et cette douleur qu'il fuyait depuis des semaines, sans mettre de mot concret sur son évolution.

La pause déjeuner fit vrombir les couloirs d'une animation nouvelle. Les étudiants sortirent de leurs salles de classe, emplissant l'espace d'éclats qui le rendirent sourd. Il bifurqua, manquant de se noyer dans la foule, et en ressortit dans un embranchement exiguë, la nausée au bord des lèvres, la sensibilité insupportablement exacerbée. Violente.

Il attrapa sa cravate, fiévreux, et tira sur le tissu pour dégager son cou. L'air dilatait ses poumons, comprimant ses bronches à chaque bouffée de panique, faisant siffler ses expirations saccadées. Il essaya de se raisonner à compter, comme il le suggérait toujours à l'un de ses amis subissant les aléas des troubles anxieux.

Un. Deux. Trois. Quatre. Cinq. Six. Sept. Huit. Neuf. Dix.

Il bloqua toute entrée d'air, faisant rougir ses joues. Il ne l'expulsa qu'une fois certains qu'il pourrait en contrôler le rythme. Il n'était pas sur une table. Il n'était pas blessé. Il n'allait pas mourir, se répétait-il à mesure qu'il s'enfonçait dans les étages, descendait des escaliers rendus troubles et en mouvement par ses asphyxies répétées.

Dans un élan lucide, il déserta la salle commune, et la grande salle. Il ne savait de toute manière pas si son estomac supporterait d'avaler quoi que ce soit.

Il quitta les marches enchantées pour le premier corridor qu'il discerna. Il était sombre, uniquement éclairé par des torches diffusant des cercles orangés sur les murs. Ses jambes le portèrent jusqu'à un alignement d'armures, une galerie mystique où la poussière dansait dans les airs comme un brouillard étourdissant. Les pas lourd, il s'appuya sur le manche d'une longue lance, puis au brassard en acier de l'un des occupants, muet et vide de toute conscience.

« Tu ne vas pas mourir. Tu n'es pas là-bas. », se fustigea-t-il en se laissant tomber entre deux armures, les jambes tendues devant lui, et le sommet de son crâne contre le mur.

« Reprends-toi, tu es ridicule.. », monologua le préfet en passant ses paumes moites contre son visage, dans la minable tentative de s'ancrer dans un monde, qui semblait décider à lui échapper et revenir la seconde suivante, au même tempo que ses sensations physiques.

« Reprends-toi.. », il ramena ses genoux contre lui, appliquant son poing sur sa tempe nerveusement.

Sa raison lui fit miroiter un semblant de mieux quand ses tympans bourdonnèrent, quand sa vue se rétrécie sur l'interstice des briques, comme un mirage blanc entourant sa vision. La galerie se para de traits biscornus, ondulant comme des vagues de fumée.

« Kuso... »
(c) AMIANTE

Sessho Shinmen
Préfet Serdaigle
Sessho Shinmen

_________________
Un enfant perdu qui fond en larme

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Mar 24 Aoû 2021 - 20:09

Mistral Gagnant

Maylone & Sessho

Les premiers froids de décembre craquelaient les lèvres de Maylone dont la langue rouge n'avait de cesse de passer sur la chair érodée afin de limer, en vain, les petits morceaux de peau. Son baume bon marché reposait sur sa table de nuit, laissé à l'abandon entre un peigne à cheveux brisé et un coupe-choux. Trois objets respectivement inutiles, l'un par ses cheveux indomptables, le suivant par sa cire toute en pétrochimie et le dernier par l'absence de pilosité faciale du rouge-et-or.
Du coup, l'attention de l'adolescent se retrouvait rudoyée par ces satanées écorchures alors qu'il avait pour habitude de laisser déborder sur ses lèvres le bout de sa langue quand il était concentré. Et de réflexion, Maylone en avait besoin tandis qu'il portait en équilibre un demi gâteau breton, trois croissants au beurre, deux pains au chocolat, une gourde de jus de citrouille et une part de tarte à la mélasse. Le butin sucré avait été subtilisé à la cuisine, près de la salle commune des Poufsouffle. Une chatouille plus tard, la poire avait laissé entrer le né-moldu et les elfes l'avaient accueilli comme l'un des  leurs - ce qui était un poil vexant car il se trouvait déjà beaucoup trop de similitudes sociales avec eux pour son propre bien.

Donc, en plus d'effriter les contours ourlés de sa bouche, la gelée hivernale creusait son appétit. Maylone aurait pu revenir au chaud dans sa salle commune pour dévorer son encas gargantuesque, mais ça aurait signifié laisser des crocs inconnus mordre dans ses viennoiseries. Le fait était qu'il n'avait en commun avec les Poufsouffle que sa faim sans fond et que leur générosité légendaire n'avait pas encore colonisé son esprit de crevard sans le sou.

Il cheminait le long de la galerie des Armures, seuls témoins muets de sa fringale éphémère. Bien moins soucieux de sa discrétion que de son apparence, le lionceau arborait des boucles et des sourcils chewing-gum pêche et un pull floqué Thelma et Louise. Même son jean ne lui accordait pas le moindre gramme de subtilité puisqu'il était troué.

La silhouette assise d'un étudiant se découpa à travers le verre de ses lunettes rondes. Les fausses converses élimées de Maylone couinèrent sur le marbre gris quand il s'arrêta net, avec la volonté de faire demi-tour en toute discrétion malgré le croassement aigu du caoutchouc. Non, il ne tenait vraiment pas à partager ses viennoiseries, vraiment pas...

- Sessho ?

Le prénom chuchoté dans l'intimité de sa propre bouche fit mourir son demi-tour. Maylone s'approcha de l'aiglon et s'assit à ses côtés, étalant consciencieusement son butin sur ses jambes ouvertes en tailleur.

- J'ai pas pris japonais en option, ça veut dire quoi Kuso encore ? Il voulait tenter l'humour à défaut de pouvoir sourire totalement sans provoquer de micro-déchirures à la commissure de ses lèvres abimées. Mais les perles de sueur qui gouttaient sur la nuque de Sessho et ses traits plongés dans la dureté réconfortante de ses genoux haussèrent ses propres sourcils oranges comme deux chenilles inquiètes.

L'odeur chaude d'un croissant au beurre et les effluves sucrées du jus de citrouille flottèrent dans les airs. Maylone pointa la viennoiserie vers le préfet dans une main, la gourde dans l'autre.

- Tu veux en parler ?

Maylone Allister

Maylone Allister
Membre
Maylone Allister
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Mer 6 Oct 2021 - 19:13
Mistral Gagnant.
Mardi 5 Décembre 1995,

Le marbre était glacé sous ses cuisses. Les armures l'encadraient de part en part et il réalisa en relevant le menton de ses genoux, que leur simple présence l’oppressait. Il se sentait observé, épié et surtout jugé. Sous la visière de leurs heaumes, Sessho leur imagina des yeux rieurs, des pupilles hilares devant cette démonstration de panique. Quelle honte, devaient-elles se dire, il n'a pas autre chose à faire que s’apitoyer ?, questionnait l'une. Il n'a pas à se plaindre, répondait sa voisine. Leurs voix caverneuses claquèrent contre ses tympans et son souffle sourd en marqua chaque point, chaque virgule. Il ne réalisa pas qu'elles provenaient des gifles du vent sur la vitre qui faisaient vibrer les carreaux. Il déglutit et la boule dans sa gorge s’accentua malgré ses efforts.

Les larmes grimpaient. Inéluctables. Coupables. Honteuses.

Des aiguilles piquèrent ses joues sous la honte qui révulsa son estomac. Ses pommettes se vidèrent de leur couleur en même temps que ses iris devinrent vitreux, creusaient par son estime chutant jusque dans ses bottes. Il essuya piteusement ses cils et les insultes moururent avant d'être envisagés. À quoi bon ?, s'insinua dans son esprit. À quoi bon lutter contre elles ?. L'emploi du pluriel le fit regarder autour de lui, mais il n'osa pas aller au-delà de la pointe des chausses de la gardienne maléfique à sa droite. Ni plus haut que la jointure de son armure, là, dans le creux des genoux. Il renifla discrètement, dissimulant les sillons humides ombrageant les poches violacées de ses trop nombreuses insomnies par le coton de sa manche de pull. Rapidement, des gouttes s'y apposèrent, comme des taches d'encre éphémères.

Plus elles coulaient et plus il était pleins. Pleins de confusion. Pleins de supplice. Pleins d'effroi. Pleins de regrets. Pleins de gêne. Les larmes l’alourdissaient de regrets en pagaille, sans début ni fin, comme une enclume qu'on avait simplement laissée pendre à son cœur pour mieux le déchirer à chaque inspiration.

Mit à nu au milieu d'un couloir vide, qui ne l'était plus tant que cela maintenant que sa psyché dérivait sur les flots de la paranoïa et des terreurs nocturnes en pleine journée, il ressentit l'air glacé pour la première fois. Un mélange de poignard dans les côtes et d'apnée au fond de l'océan. Un tout angoissant et douloureux qui le força à courber l'échine, un peu tremblant et claquant des dents.

Il rabattit ses paumes contre ses tempes dont chaque pulsation faisait vibrer l'air ambiant, comme une nuée de papillons en boomerang. Elle revenait sur lui, griffant ses os et entamant sa lucidité petit bout par petit bout, le grignotant à chaque allé retour. Il aurait pu en être épuisé, somnoler de l'incessant schéma l'hypnotisant, s'il n'endurait pas les fluctuations de son rythme cardiaque. Un serpent vicieux qui le gardait alerte à l’accélération et esclave torturé au ralentissement brusque.

Que ça s'arrête. Que ça continue, s'entendit-il formuler confusément sans émettre un son hors de sa bouche qui ne s'articula qu'à moitié. Des lèvres pâteuses, collantes qui s'arquaient mollement lui faisant prendre les traits d'un poisson hors de l'eau.  

Il se punissait d'éprouver chagrin et souffrance. Il fuyait la crainte et la folie.

Et étonnamment, depuis des jours, c'est bien la seule chose qui le rendit heureux.

Le couinement des chaussures, il le vit avant même de l'entendre. Un écho couleur pêche un peu trop vive, tranchant avec le monochrome du sol et des murs, un halo se fondant dans les contours d'une silhouette un peu floue.

« Sessho ? »

Le jeune homme se recula, butant ses talons contre son pantalon dans une acrobatie craquant ses articulations. L'échancrure de ses reins s'accrocha au mur, mal-à-l'aise d'être surprit. Le pitoyable de sa situation l'assaillit de plus bel, faisant naître l'impulsion de planter ses ongles dans ses paumes pour contenir derrière ses dents le flot de mots et de cris désespérés qui pourraient s'échapper de son être. De tous, il fallait que ce soit lui.

Pudique, il planqua son visage dans le cocon étouffant de ses bras. Qu'il aurait désiré être invisible. Ne pas exister. N'être qu'un fantôme. Ou un souvenir. Ou rien. De plus en plus extrême, il marqua des gouttes carmin dans les lignes de sa peau, dont la sensation accrocha toute son attention, au point de lui faire oublier la chaleur émanant de son ami qui s'était assit. Pourtant, quand il en prit connaissance, elle irradia tout autour de lui, comme un manteau réconfortant qu'il ne méritait pas.

« J'ai pas pris japonais en option, ça veut dire quoi Kuso encore ? », lui demanda-t-il avec humour.

Il essaya de contrôler sa respiration, de remettre un peu d'ordre dans la partition de son contrôle, qui à ses oreilles, ne ressembla qu'à une mélodie désaccordée. Les métaphores musicales et poétiques ne calmèrent pas la vague gelée le submergeant et ne s'échappant de lui que part les pâles éraflures séchant déjà. Les nerfs confus et flasques, il mouilla ses incisives, les écartant lentement pour se risquer à répondre.

« Rien qui ne vaut la peine d'être traduit en anglais. », le neutre de sa gorge enrouée le cingla d'une baffe. Cette indifférence assaisonnant chacun de ses mots d'un soupçon de dédain et de distance.

Il aurait pu lui dire de partir, que son méprit n'en aurait pas été plus dur, plus violent. Il ne jugea pas utile de raisonner qu'il se l'adresser allégrement. Il mordit sa langue pour se taire. Pour rendre inaudible le gémissement plaintif qui gonfla ses joues d'un arrière-goût métallique, se jumelant au touché craquelé et poisseux de ses doigts sur son épiderme. Il espérait que Maylone comprendrait qu'il devait partir. Qu'il devait reprendre sa route. Pour autant, son manque de réaction le cloua à sa place, incapable d'esquisser un mouvement de rejet plus franc qu'une intonation.

L'odeur sucrée de l’en-cas du rouge et or fit grimper dans son ventre le grognement affamé de ses excès déprimés, soulevant une question : Depuis quand n'avait-il pas mis les pieds dans la grande salle ? La perspective d'inquiéter et susciter le doute de ses camarades éclipsa sa santé et les risques qu'il prenait. Il essaya de fondre ses jambes contre son torse, comme si ça pouvait effacer sa présence. Il refusa de répondre à son approche, à cette main qui lui tendait un croissant qui l'aurait fait saliver.

« Tu veux en parler ? »

Comme lorsque l'on prononce le fatidique « ça va ? », il s'ébranla et la marrée salée qu'il retenait derrière ses paupières closes déborda de ses joues au menton, décrispant sa mâchoire dans un râle qui perça ses dents serrées. Ses épaules se secouèrent de pesants sanglots. Sa respiration se hacha et il sentit le poids de ses démons le passer à tabac. Il se crût sourd. Il se crût aveugle. La solitude l'emporta. La douleur tétanisa ses muscles et le recroquevilla en plus. Si seulement.... Oui, si seulement il pouvait ne pas être revenu.

« Non... », parvint-t-il à bredouiller entre deux hoquets, qu'il voulut faire taire en abattant son poing contre sa bouche, finissant par tousser contre son avant-bras.

Il ne voulait pas parler. Il ne voulait pas être consolé. Il ne voulait pas être prit en pitié. Il ne voulait pas être regardé. Il ne voulait pas rester. Et il ne voulait pas que Maylone reste non plus. Il étendit ses jambes devant lui, prit d'une bougeotte qu'il l'aurait fait se frapper dans un élan de colère s'il n'avait pas été éduqué dans la retenue. Les manches remontées jusqu'aux bouts des phalanges, il apposa celles-ci sur son visage, la nuque rejetée en arrière et l'arrière du crâne contre le mur.

« Pars... », murmura-t-il difficilement. « Pars ! », fit-il plus fortement, faisant résonner sa voix dans le corridor.

« Je ne veux pas que tu me vois comme ça... Pitié... », souffla-t-il péniblement en unique explication.

Je ne veux plus être moi.
(c) AMIANTE

Sessho Shinmen
Préfet Serdaigle
Sessho Shinmen

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Un enfant perdu qui fond en larme

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Dim 21 Nov 2021 - 11:50


Parce que Maylone avait sincèrement pensé qu'une note d'humour suffirait à ériger un sourire sur les lèvres de Sessho. Oh, my sweet summer child... La Louise Sawyer floquée sur son t-shirt en coton en aurait levé les yeux au ciel si seulement sa silhouette défraichie n'était pas figée dans une immobilité complètement moldue. Pour autant, l’âpreté que le Gryffondor obtint comme réponse ne suffit pas à le décourager. May n'en cala que davantage son dos contre le bas du mur et même le contact glacé des pierres ressenti à travers son vêtement échoua à le faire décamper.
Il avait demandé si le Serdaigle voulait en parler mais plus intensément que jamais, Maylone sentait que le simple usage de mots ne suffiraient pas à cristalliser la détresse de Sessho, pas plus qu'ils n'avaient aidé lorsqu'ils avaient exprimés l'interrogation fatidique. « Non...»  L’adolescent perçut davantage les hoquets qui agitèrent les épaules recroquevillées de son ami  que le refus murmuré par ses lèvres humides. Il décolla ses fesses du sol, de quelques centimètres, pas pour partir, jamais, mais pour mieux se positionner face à l’aiglon en s’aidant de sa paume posée sur les dalles du carrelage.  

- Sessho ? Hé, Sessho…
- Pars…pars ! La virulence de son rejet frappa Maylone au cœur, pourtant habitué aux éclats de voix. Avec un genou à terre sur le sol dur et rigide - une maigre expiation d’un ascète sans faute – le Gryffondor avança sa main sans trop savoir où l’emmener. L’explication de son ami suspendit ses doigts dans le vide. « Je ne veux pas que tu me vois comme ça…pitié… » Il ramena sa main près de son genou. Des fourmis commençaient à coloniser son pied vaguement plié au niveau de la cheville mais il était trop figé dans son désarroi pour réellement les sentir. Le butin de roi était oublié par terre, mélangé à la poussière d’un vieux château avec pour seul vestige de l’intérêt de Maylone, des miettes de gâteau breton sur ses cuisses.

- Non.

Il avait murmuré après l’éclat de Sessho, comme un apaisement, une ligne horizontale où chaque lettre était prononcée sur un ton d’égale mesure.

- J’irai nulle part.

Et pour preuve de son refus catégorique, May se réinstalla aux côtés de l’aiglon en pliant ses jambes qu'il ramena contre sa poitrine. A défaut de pouvoir prendre Sessho contre lui, il entoura ses tibias de son bras. De l'autre, celui qui frôlait son ami, il laissa sa main ouverte, dos contre le sol, paume allongée vers le plafond. Plus qu'un port figé dans une sécurité pérenne, c'était une ancre plongée dans les flots rugissants qui emportaient l'esprit de Sessho dans les méandres de leurs vagues.

- Ne crois pas que ta perfection est ta réalité. T'as le droit toi aussi. T'as le droit de ne pas aller bien, de briser ce moule dans lequel on t'a façonné. Et t'as le droit de l'afficher à la face du monde. C'est ok. C'est ok, Sessho. C'est ok.

Avant de sauver le monde, faut que tu te sauves de toi-même.
Maylone Allister
Membre
Maylone Allister
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Ven 3 Juin 2022 - 19:06
Mistral Gagnant.
Mardi 5 Décembre 1995,

Une goutte engendre le vide.

Plus il pleurait, et plus il se sentait léger. À mesure que les larmes dégoulinaient sur ses joues comme un barrage brisé, il en comprenait les effets bénéfiques. Peu importe la raison de sa confusion ou de sa douleur, elle s'exprimait enfin. Elle existait et il la laissait à présent, après des semaines de déni et de non-dits, agir au travers de lourds sanglots. Si dans sa poitrine tout se compressait, comme s'il était sous l'eau et peiné à inspirer, les expirations expulsaient l'angoisse et la terreur.

Au cours d'une séance, il avait été abordé qu'il était en son devoir et pouvoir, de réaliser l'ampleur de son deuil. Que par étape, il devrait accepter la souffrance, le chagrin, l'impuissance et toute une palette émotionnelle qu'il n'avait ni la connaissance, ni la légitimité de ressentir. C'était comme l'entendre conseiller quelqu'un d'autre, et d'observer la scène en simple transcripteur historique. Il prenait des notes, enrichissait son vocabulaire par des heures de lecture et enfin, transmettait ses conclusions dans le cadre clos de leur salle habituelle. Elle l'écoutait, et depuis lors, il s'était noué entre eux un dialogue presque professionnel, où parfois, transgressant leur accord tacite de conserver une distance, elle le mettait au pied du mur pour l'encourager à raisonner sur son propre état.

Favorisant depuis l'enfance l'intellectualisation et la classification de ses actions, Sessho s'était penché sur son cas en s'expulsant de l'équation. En sujet, il avait nommé monsieur X comme la victime du drame et monsieur Y comme son agresseur. De cette manière, il avait échafaudé une série de théories sur la détresse psychologique de monsieur X, dont les idées suicidaires étaient le résultat d'un assemblage de facteurs extérieurs – la négation de son traumatisme par un corps sociétal, type média – mais aussi culturels et éducatifs – un apprentissage le conditionnant à rejeter la notion de malheur ou de le reléguer au second plan-. S'il s'était essayé à l'exercice sur le papier, il n'avait partagé ses avancées à sa thérapeute par crainte qu'elle ne comprenne, alors, que son raisonnement l'avait conduit à une finalité morbide. Bien sûr, il avait rayé le terme suicide qui s'était retrouvé en dernière ligne et s'était empressé de brûler le parchemin.

Au début, il s'était forcé, accordant sa foi aux expériences enrichissantes qui étaient ressorties des témoignages qu'il avait eus l'occasion de lire. Certains étaient satisfaits du dialogue et parvenaient à guérir, de la même manière qu'une potion permettait de soigner les prémices d'un rhume. S'il était présent devant un médecin – de l'esprit, elle le lui avait précisé- c'était qu'il était atteint d'un mal qui pouvait être diagnostiqué puis guéri. Au fur et à mesures de ses diagnostiques, où les expressions déprime, insomnies, avaient été énoncées, il remettait en doute ses compétences.

Il avait souvent associé la déprime à la mélancolie. Un état passager aboutissant à une grande fatigue, et une période d'inaction. S'il en avait fréquemment été victime, elle s'était toujours manifesté par une sensation de vide ou une tristesse prédominante, mais stable. Là, c'était différent, et le lui expliquait n'aboutissait à rien, si ce n'est aux mêmes questions et à des réponses similaires. Il parlait à un grimoire qui après avoir achevé sa lecture lui récitait les paragraphes dans un ordre identique, sans en changer ou s'adapter. Bien sûr, il avait envisagé que ce soit aussi peu alarmant qu'une phase un peu compliquée. Mais ses introspections forcées au lac le poussaient à croire que c'était plus profond. Plus ancré. Plus durable.

Elle lui avait conseillé de se confier, si ce n'était pas à elle, à un ami, à un proche. Ayant nourri un rapport aux autres essentiellement sur le don de soi, il se retrouvait parfois démunis devant le manque d'écoute qu'il pouvait trouver chez certains camarades, ou le peu d'occasions propices à ce genre de discussion.

À présent qu'elle était toute trouvée, il réalisait qu'il ne souhaitait pas en parler. Par manque de préparations ou de volonté, il ne sut choisir, néanmoins, il était évident qu'il ne désirait nullement amorcer un chemin de réflexion avec son ami. Ayant à cœur de préserver ses relations, instaurant un schéma de conseils et de confidences – de son interlocuteur-, il se retrouvait prisonnier de voir la balance s'inverser. Captif de sa culpabilité – d'affecter Maylone de l'expression soudaine et inattendue de ses sentiments – mais également gêné – d'être à l'antipode de sa retenue. C'est elle qui le poussa à lui formuler de partir, tandis qu'en lui se battait sa pulsion de l'étreindre pour ne pas rester seul, et sa raison qui lui rappelait sa modestie.

Le tissu sur les paupières, il tenta vainement d’endiguer l'écoulement de ses yeux, partagé entre la nécessité d'attendre la fin de cette crise – à défaut de pouvoir la nommer autrement – et le désir de la forcer à être cloisonnée derrière ses barrières.

« Non. »

Ce mot sortit de nul part et résonna dans le couloir avant de s'éteindre dans le silence. Un murmure qui fit remonter des frissons le long de ses bras, comme une caresse chaleureuse.

« J'irai nulle part. »

Cette affirmation teintée d'une grande détermination fit battre son cœur plus vite. Il était rare qu'il assiste à une démonstration de loyauté ou réel investissement dans une relation. Il s'était parfois fait berner par des promesses en l'air auxquelles il s'était accroché éperdument, résolu à être déçu du dénouement. Là, catégorique, à la manière d'Aria des mois auparavant, il se rassit et ne quitta sa position. S'il fut tenté de relier leurs actions, l'indifférence et la carapace de cette-dernière était devenue si épaisse qu'il s'était retiré du duo – et donc de cette décision qu'ils avaient prise en commun ; celle d'être présent.

« Ne crois pas que ta perfection est ta réalité. T'as le droit toi aussi. T'as le droit de ne pas aller bien, de briser ce moule dans lequel on t'a façonné. Et t'as le droit de l'afficher à la face du monde. C'est ok. C'est ok, Sessho. C'est ok. »

Les larmes redoublèrent et s'il s'était tourné vers la nécessité de les laisser couler, il ne put statuer ni accepter de rendre sa faiblesse aussi visible. Il n'en était ni habitué, ni fier. Ainsi, de la nuque incurvée, il changea de position pour adopter une posture plus en retrait et distante. Les jambes entourées de ses bras, il prit un instant pour intégrer les paroles de Maylone dans son raisonnement. Ils firent écho à ceux qui s'étaient échangés sur les berges du lac, bien que leur sens n'ait pas été motivé par l'obligation de lui retourner ses dires réconfortants. Tu as le droit. Une affirmation spontanée qui déclencha un reniflement en réponse, puis le tarissement de sa peine. Elle se transforma progressivement en soulagement. Plus en confiance, il prit le temps de se ressaisir, ne l’exhortant plus verbalement, ni implicitement à repartir sur ses pas. Le nez rouge, il le frotta par deux fois, puis s'attaqua à son regard voilé qui reprenait de l'éclat.

La tristesse, la colère qui l'avaient aveuglé de chagrin s'étaient tût  La posture encore tremblante et la poitrine pesante, il guida sa main jusqu'à celle de son camarade. Leurs paumes se frôlèrent d'abord, puis, moins indécis, il la posa, entremêlant leurs doigts sur le carrelage.

« Merci. », souffla-t-il sincèrement, caressant sa peau de son pouce d'un geste léger et pensif. « Je me sens mieux. », tenta-t-il de le rassurer, conscient qu'il n'avait franchi qu'une partie de cette épreuve.

« Je ne veux pas l'afficher à la face du monde. », mollement, il haussa les épaules, puis, glissant du dos après s'être redressé, il colla sa tempe contre l'épaule du né-moldu, la respiration plus calme. « Mais je peux accepter, parfois, de le partager avec toi. », timidement, il releva les yeux sur son profil, les lèvres se soulevant imperceptiblement. Plus complice, il murmura : « Ça, c'est ok. »
(c) AMIANTE

Sessho Shinmen
Préfet Serdaigle
Sessho Shinmen

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Un enfant perdu qui fond en larme

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