Ce samedi-là, Léo s’était rendu à la salle du club de musique. C’est qu’il voulait travailler son coup d’archet, jouer quelques airs de fiddle. Il avait donc son violon à la main qui avait un archet un peu plus plat que ceux utilisés pour la musique classique. Une fois installé, il appliqua la colophane en quantité suffisante sur son archet, puis accorda son instrument. Quand ces étapes préparatoires furent terminées, il entonna un premier air. Il s’agissait d’une gigue irlandaise, nommé « Irish washerwoman ». Il tenait son violon au niveau de la poitrine, et non sous le menton, puisque c’était là l’une des positions typiques de cette technique. Et que globablement il la préférait à celle qui consistait à l’appuyer sur son coude. De temps en temps, s’il en avait besoin, d’un morceau à l’autre, il changeait de point d’appui lorsqu’il enchaînait de nombreux morceaux. Il faisait également sonner plusieurs cordes en même temps. Un violoniste de formation classique pouvait être tenté de critiquer cet état de faits, mais non, ce n’était pas une erreur de sa part, mais bien ainsi que l’on jouait du fiddle.
Vu la rapidité de l’air qu’il avait choisi, il aurait pu choisir plus simple pour commencer. Seulement, voilà, c’était le premier qui lui était venu à l’esprit. C’était néanmoins de son niveau et après deux mesures, il la joua non seulement juste et en rythme, mais donnant envie de se lancer dans une danse endiablée à quiconque l’entendrait. Il jouait par ailleurs avec joie et enthousiasme et cela s’entendait dans son jeu.
Il continua avec « Amazing grâce », plus lent, plus tranquille, mais aussi quelque peu mélancolique. Il ne chantait pas en même temps, même s’il connaissait les paroles par cœur. Ou plutôt, il chantait dans sa tête tout en jouant, mais sans faire entendre sa voix, trop concentré sur sa technique pour pouvoir en même temps se synchroniser avec sa voix. Du moins le pensait-il. Il interprétait les morceaux sans aucune partition, simplement, comme cela, de mémoire et d’oreille. Car il avait une très bonne oreille et également une excellente mémoire lorsqu’il s’agissait de musique. Puis, revenant aux gigues, il se lança dans celle qui s’intitulait swallowtail. Encore une fois de telle manière à donner envie de danser à toute personne qui l’entendrait. C’était aussi efficace qu’un tarrantallegra, sauf qu’il n’y avait aucune magie là-dessous, que l’art de faire passer des sentiments, des émotions à travers son jeu en plus de notes justes et du rythme, parfois soutenu, adapté.
Ensuite, il passa à beaucoup plus calme que tout cela, à un morceau qu’il connaissait depuis sa plus tendre enfance et qui lui rappelait son Irlande natale. Il s’agissait de « Too ra loo ra loo ral », une berceuse. En la jouant, il disait toute sa nostalgie de ce lieu. Non seulement il avait les images de la campagne de Doolin qui défilaient sous ses yeux tandis qu’il jouait, mais il revoyait également ses grands-parents le bercer avec cette musique, lui apprendre à la jouer. En frottant les cordes de son violon, il exprimait tout son amour pour sa patrie et sa famille. Il ne put s’empêcher d’avoir une pensée pour sa mère, surtout lors du passage de la chanson qui parlait de la mère, chantant un simple petit air de musique à la manière irlandaise et du désir de l’entendre encore chanter comme autrefois. Evidemment, il se retrouvait dans cette partie des paroles et bien sûr, il aurait aimé que sa mère pût chanter cette chanson ou quelconque autre encore à ce jour, même s’il savait cela totalement impossible.
Mar 12 Oct 2021 - 22:07
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