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[16/01/1996] Fluide - Ariel Melwing

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Mer 8 Juin 2022 - 17:31
Fluide

S’accrocher jour après jour, semaine après semaine, pour prolonger un présent qui n’avait pas de futur, était un instinct qu’on ne pouvait vaincre, comme on ne peut empêcher les poumons d’aspirer l’air tant qu’il y a de l’air à respirer. • George Orwell


Les étoiles sont les phares des âmes perdues.

Les coudes sur la table, Sessho jouait du pouce sur le coin d'une page cornée. Une chandelle allumée à ses côtés, il profitait du calme de la nuit dans le silence d'un feu légèrement crépitant. Tôt dans la soirée, il s'était vu prisonnier de la suée et des questions tournant sans cesse. Prit de dépit, il s'était glissé hors de ses draps, faisant suite à plusieurs tentatives de sommeil infructueuses. Bien qu'il s'était essayé à des techniques inédites pour retarder cauchemars et projections cauchemardesques, il s'était heurté à l'échec de son décompte des étoiles, puis à la défaite de son initiative d'épuiser ses méninges à se réciter intérieurement des lignes de grimoires soporifiques. L'histoire de la magie et la divination avaient au contraire encouragé son insomnie, jusqu'à ce que, résolu, il s'égare dans la salle commune sous les ronflements et autres soupirs de ses camarades endormis.

Dans son pull et les pieds nus battant le sol doucement, il s'était emparé de quelques ouvrages dans la bibliothèque, aidée du concours de sa baguette. Si les titres différés, ils avaient tous été écrits sur un domaine global : La métamorphose.

La matière avait éveillé son intérêt et sa seule mention suffisait à réveiller une conversation, tout au moins, une proposition, qu'il avait présentée à Ariel des mois auparavant. Si elle s'était éloigné de ses priorités, au point, d'être reléguée au rang de souvenirs à trier, il vit en cela l'opportunité de tuer le temps et surtout, de s'occuper. Les bouquins éparpillés, il s'était obligé à choisir les thématiques avant de pleinement se pencher sur les détails. Un parchemin sous le poignet et la pointe encrée sur le bord d'un début de ligne, il prit une inspiration pour se donner motivation et inspiration.

Observateur, il lui arrivait de noter les habitudes de ses colocataires ou, plus généralement, d'élèves qu'il pouvait croiser plus ou moins régulièrement. Melwing en faisait partie. Son mal-être s'était traduit récemment de manière visible, et suivant un schéma qu'il pouvait anticiper ; les baignades en était la plus grande démonstration, et il supposait, qu'à sa manière, il souhaitait souffrir pour contenir, et non souffrir pour mourir. Si ses idées noires avaient été au centre de leur dernière discussion sur les berges du lac, elles n'étaient pas révélatrices de ses habitudes ou envies. Sa crainte viscérale des animaux ou sa passion pour le violet – qui s'était exprimée par une coloration capillaire – étaient, elles, plus instructives à ses yeux.

C'est pour cela, que durant ses achats empressés pour les fêtes, il avait seulement ôté un bracelet de son poignet, voyant l’aubaine qu'il soit d'une couleur adéquate, mais également d'une symbolique rassurante, en vue de l'offrir au jeune garçon. Il n'en avait pas eu d'échos et espérait qu'il ait, si ce n'est démontré ses pouvoirs, apportait un semblant de calme à son cadet.

Il marqua d'abord un point, puis, inscrivit une série de boucles sur le papier. Les titres mit bout à bout, il remarqua qu'il s'était concentré sur des sortilèges agissants sur l’apparence. Se laissant guider, il poursuivit dans ses recherches, se levant une fois qu'il eut épuisé les ressources d'un livre pour trouver des informations complémentaires dans un autre. Il usa la corne de ses doigts dans des paragraphes entiers, où il spécifia moulinets de poignet, astérixis indicatifs, mais aussi, applications quotidiennes, situationnelles.

Quand le jour pointa ses rayons, il finissait de ranger les manuscrits sur leurs étagères. Satisfait de son travail, il admira les trois sujets qu'il plaça côte à côte. Pointilleux, il se relut pour s'assurer qu'aucune coquille ne s'était glissé dans ses différents exposés et finalement satisfait, il les roula pour les ficeler d'un ruban – qu'il avait été cherché dans sa valise -. Le bleu autour de ses petits fardeaux, il les rangea dans son sac, en même temps qu'il prit ses affaires pour se préparer.

L'eau chaude coula sur son visage blafard, et c'est mécaniquement qu'il opéra de se laver, esquivant son torse. Le miroir embué lui épargna son reflet et fidèle à sa routine anti-angoisse, il se saisit des bandages qu'il appliqua sur sa poitrine, les yeux relevés sur le plafond en prévention. Il serra presque jusqu'à se couper le souffle. S'il ne voyait rien, alors, rien n'était arrivé. Les écritures cachées, il s'autorisa à soupirer. Camouflant ses cernes sous des couches d'enchantements, il se dessina un sourire devant la glace. Maintenant que son cerveau était au repos, loin des instructions à lire, il se sentait las et trop-pleins de questions. Des pulsions de vide et de chute.

L'envie gagna en intensité et les paumes sur la céramique du lavabo, il prit une minute pour s'organiser. Le chagrin, la colère, le désespoir finirent dans des vases séparés qu'il isola soigneusement sous clef. Faisant suite à un dernier soupir, cette fois-ci de soulagement, il rassembla ses forces pour se mêler à ses relations. Callum accueillit donc sa participation avec enthousiasme, combattant son envie de simplement ignorer la présence d'Hiverna, dont les arguments étaient contraires aux siens. Ils retrouvèrent un semblant de normalité sociale et il s'en sentit soudainement plus rassurer ; aucun ne remarqua les poches sous ses yeux fatigués, ni son manque de concentration évidant lors des cours, où il participa à peine. L'enchantement, qui d'ordinaire ravissait aisément son attention, avait été un casse-tête insoluble les dernières heures.

Faisant mine de rien, il parvint à distiller au déjeuner son désir de comparer ses notes avec celles de son binôme et ainsi les compléter au besoin, sans que cela n'alarme ledit camarade, qui ne nota pas l'impossible de cette demande ; jamais Sessho n'avait eu besoin de ça depuis sa première année.

Durant son temps de pause, et en prévision du petit mot qu'il glisserait au troisième année d'ici peu, il vadrouilla dans les couloirs, harpant les étages avec une intention précise ; Trouver une salle vide. Longeant la galerie des armures, il finit par tourner une poignée, qui consentie à lui dévoiler une pièce où quelques tables avaient été empilées. Le nez piqué par la poussière, il éternua silencieusement au creux de son coude, puis, gardant sa position, il traversa l'allée centrale pour tirer les rideaux. Les lourds tissus laissèrent voler un nuage qu'il put admirer grâce à la lumière extérieure traversant les carreaux. Sans être intimidé par la saleté, il retroussa ses manches puis soupesa sa baguette dans sa paume.

Depuis quelques semaines, ou mois, son utilisation avait été compromise. Le cerisier était le bois du contrôle, et loin d'être naïf, il était conscient qu'il pouvait être défaillant en ce moment. C'est en partie pour y remédier, en plus de garder ses sentiments profonds pour lui-même, qu'il s'était penché sur des méthodes alternatives pour cloisonner son esprit. Suite à Noël et son lot de discussions désagréables, il s'était fiévreusement documenté, et têtu, il n'avait pas ménagé ses efforts pour parfaire le schéma visant à le couper de ses traumatismes. Et en Janvier, il était parvenu à trouver un équilibre, qui, s'il n'était pas idéal et avait besoin d'être renouvelé au cours de la journée, avait eu le mérite de lui accorder une utilisation de sa baguette plus fluide. Ne voulant creuser l'écart avec ses camarades et prendre du retard, il avait profité de ses nuits d'insomnies pour s'entraîner, ou encore, épuiser sa rétine sur de la théorie, où chanceux, il pouvait s'endormir une heure ou deux.

Tout en informulé, il fit danser le bois dans les airs, soulevant comme un chef d'orchestre les notes de chaises et de tables dans les airs. Il les aligna, puis les débarrassa de la couche grise qui se fit souffler d'un ventus, dévoilant le brun des pupitres si commun à tout le château. Il rapprocha les premières rangées, et finalement, dégagea les autres pour garantir de la place. Il ne savait pas s'ils en auraient besoin, mais prévoyant, il ne voulait rien laisser au hasard. D'un simple moulinet, il alluma les bougies du plafonnier, puis appliqua la même démarche sur les bougeoirs muraux. La pièce se retrouva baignée dans une atmosphère tamisée, propice à l'apprentissage et à la tranquillité. Sans doute pourrait-il garder en mémoire son emplacement pour des expériences plus personnelles et l’aménager selon ses besoins.

Sur l'estrade, il garda le bureau en place, bien que désireux de rendre l'ambiance plus chaleureuse, il fit quelques allés retours avec l'extérieur pour y placer coquillages et autres curiosités naturelles : un bout de branche sec, des cailloux aux formes originales, et une fiole de sable venant du lac. Il jeta un coup d’œil à sa montre, puis enfila sa cape qu'il avait jusque-là délaissé sur une assise, il traversa l'école d'un bon pas, oubliant dans toute cette entreprise qu'il aurait été raisonnable de troquer toute cette mise en scène et son énergie, contre une sieste réparatrice.

De retour dans leur salle commune, il s'approcha de Melwing plus prudent et réservé. Se glissant sur un fauteuil adjacent, il se perdit un temps dans sa contemplation de la cheminée, qui fourmillait de braises et d'étincelles dorées. Sessho humecta ses lèvres, puis, prenant appuis sur l’accoudoir, il interpella le plus jeune d'un léger : Salut, qu'il souffla comme un murmure non intrusif.

« Un cours, ça te tente ? Je me souviens que tu avais accepté la dernière fois, néanmoins, compte tenu de la situation qui avait précédé ma demande, je n'ai pas désiré – il hésita brièvement – insister ? », puis, il se releva, d'un pied pour finalement se mettre droit sur ses jambes. « Je crois que.. », plus bas encore, il continua. « … nous avons tous les deux besoins d'une activité intellectuelle. »

Réfléchir c'était occuper son esprit. Occuper son esprit, c'était l'assurance de ne pas être pétrie d'angoisse au fond de son siège. Une part de lui voulait retrouver ses draps et ne plus en sortir jusqu'au lendemain, ou plus loin encore. L'autre était affamé de savoir et de questions. Elle était assoiffée de vide et de chute. Elle était insatiable d'idées et d'hypothèses sordides. Parfois, il donnait raison à l'une et ne cédait pas à la pulsion de se pencher aux fenêtres et de voyager des nuages pour achever sa course le corps tordu comme une feuille morte. À défaut d'être motivé à s'épuiser à dormir, il avait établi un compromis avec sa conscience : Il allait pouvoir réfléchir.

Ils passèrent les escaliers, où son impatience avait finalement encourager sa démarche, il les fit traverser la galerie vide où les armures étaient si justement rangées. Puis, bifurquant à gauche dans un renfoncement, il ne prit non pas la première porte, mais la deuxième.

« Celle-là mène à un placard à balais. », expliqua-t-il.

Rien ne s'était éteint depuis son départ. Au sol et sur les murs dansaient des halos chauds, ondulant comme de l'eau. Plus timide, il l'invita à approcher, puis, prenant place de l'autre côté des tables – trois mises bout à bout -, il sortit les parchemins de son sac. Les trois rouleaux se retrouvèrent devant lui, encore scellés.

« Choisis-en un. Et seulement un. - il leva son index à titre indicatif - Et ce sera le sortilège que tu apprendras. »

Le choix fait, il tendit la main pour s'en saisir et le décacheter. Un sourire releva doucement les coins de ses lèvres, puis, il l’aplatit devant eux, face au Serdaigle pour lui dévoiler l'intitulé : Enchantements colorés.

CODAGE PAR AMATIS
AVATARS PAR PINTEREST
Sessho Shinmen
Préfet Serdaigle
Sessho Shinmen

_________________
Un enfant perdu qui fond en larme

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Ven 10 Mar 2023 - 0:09
Ariel x Sessho
mardi 16/01/1996
Fluides
La pointe de la plume ripa sur le parchemin et se cassa tout à fait. Derrière elle, une traînée d’encre obscurcit le papier. Le noir se mêla aux teintes automnales et le dessin perdit son sens.

Ariel ferma les yeux, se laissa glisser sur la table et geignit dans sa barbe. Il était seul dans la Salle Commune. Et heureusement : comme souvent, ces temps-ci, il préférait ruminer dans son coin que de subir les regards inquiets de ses pairs. On avait bien remarqué qu’il allait mieux, mais il sentait encore le poids de leurs doutes dans son dos quand il passait.

Il avait pensé que ses camarades n’avaient rien remarqué de son absence de curiosité, de joie de vivre et d’initiative. Que personne ne s’intéressait à ses notes – même si en réalité, elles avaient été suffisamment élevées pour qu’il fasse partie de « la concurrence ».

Il avait eu tort.

Engoncé dans ses idées sombres, il n’avait simplement pas vu. L’attention discrète mais soutenue que lui portaient les élèves de Poudlard – ceux de son âge, mais aussi les plus âgés – lui était passée sous le nez. Il n’avait pas vu.

Maintenant que les choses s’amélioraient un peu – un peu seulement, pensait-il souvent -, continuer à ignorer les messes basses et les coups d’œil était impossible. Surtout pour quelqu’un d’aussi observateur qu’Ariel. Surtout pour quelqu’un d’aussi anxieux que lui, aussi.

Parfois, il se demandait s’il préférait le silence et l’absence de mouvement à la foule en délire. Au moins, quand il y avait du monde autour de lui, quand on parlait ou criait ou riait à son oreille, il n’avait pas le temps de penser. Pas l’espace pour penser.

Ariel se redressa et observa son dessin d’un œil morne. Il n’avait jamais été très bon dessinateur, même s’il avait un don certain pour repérer et reproduire les couleurs de la vraie vie. Personne ne savait mieux que lui capter le rouge d’une coccinelle, reconnaître le vert croupissant d’une eau stagnante ou retrouver le vermeil d’une brique à l’abandon. Et c’était une caractéristique qu’on retrouvait sur son travail du jour : les couleurs chaudes de l’automne étaient là, le doute n’était pas permis, mais les formes approximatives peinaient à rendre justice aux feuilles dorées. Quant à les faire voler, c’était un échec.

— Tu parles d’une thérapie, soupira-t-il.

Il retourna vivement son parchemin quand il entendit des pas derrière lui. Un étudiant de quatrième année passa. Ariel eut l’impression d’être brûlé par ses yeux inquisiteurs – des yeux qui ne se retournèrent jamais vers lui. L’élève disparut et le garçon reprit son souffle, à peine conscient de l’avoir retenu.

Il ravala une larme.

La psychomage se trompait : Ariel ne progressait pas. Ce n’était pas parce qu’il se baignait moins, qu’il cédait moins, qu’il avançait. En fait, il reculait chaque jour un peu plus, et l’impression tenace qu’il reviendrait bientôt au point de départ ne le quittait pas.

D’abord, la paranoïa.

Et puis le lac, puis les feuilles. Tout se rejouerait encore une fois.

Une colère familière, contre le monde, la psychomage et Ariel lui-même, refit surface.

Quatre jours depuis la dernière fois, compta le Serdaigle. Quatre jours seulement…

Ariel rangea ses affaires, soigneusement, en prenant le plus de temps possible. Il inspira, expira, recommença plusieurs fois. Tripota son bracelet et se mordit les doigts. À défaut d’être heureux, au moins savait-il comment calmer l’angoisse – ou du moins faire semblant qu’elle n’existait pas.

Mentalement, il retraça son programme : il irait déposer son sac au pied de son lit, il se passerait le visage à l’eau, passerait sur la douche cette fois-là parce qu’il n’avait pas envie de faire d’effort. Ensuite, il s’installerait dans son lit, ou peut-être dans la Salle Commune tout compte fait. Peut-être pourrait-il se plonger dans un livre de Métamorphose. Ou peut-être pas. En avait-il envie ? En avait-il l’énergie ?

Oscar le traînerait pour aller en cours – heureusement qu’il était là. Son regard se perdrait dans le vert sali du tableau. Et il reviendrait finalement dans sa Salle Commune, toujours aussi stoïque.

Lorsque l’antre des Serdaigle se viderait à nouveau, peut-être pourrait-il se recroqueviller dans un fauteuil, ou même au pied de la cheminée. Le craquement des bûches dans l’âtre et l’odeur de la fumée avaient presque le même effet qu’un chocolat chaud sur lui : le réconfort était immédiat.

Avec un peu de chance, il pourrait même s’endormir ainsi. C’était utopique, évidemment, et Ariel savait qu’il devrait remonter dans son dortoir s’il ne voulait pas attirer l’attention des autres Serdaigle. Mais il fit mine de ne pas le savoir.

Et le lendemain…

Le lendemain serait un nouveau jour. Il irait un peu mieux, il le savait – qu’il dorme auprès du feu ou non. C’était toujours ainsi : il touchait le fond un jour, et le lendemain, il se hissait de quelques centimètres sur la paroi du gouffre – parfois, quelqu’un lui jetait une corde, mais elle n’était jamais assez solide.

Et il recommencerait à vivre presque normalement pendant quelques jours, peut-être une semaine.

C’était un programme idéal. En tout cas, c’était toujours mieux que de se laisser attirer par le chant du lac.

Sessho vint interrompre son programme une vingtaine de minutes après la fin des cours de la journée. Les yeux fixés sur la cheminée, Ariel le sentit s’asseoir près de lui plus qu’il ne le vit. Curieusement, il sut immédiatement de qui il s’agissait – Sessho avait une énergie propre, une aura calme et un peu triste, qu’Ariel avait du mal à ignorer quand ils étaient à proximité.

— Salut, dit Sessho au bout de quelques instants.

Ariel ne répondit rien.

— Un cours, ça te tente ? finit par demander l’aîné.

Le plus jeune tourna la tête : Sessho semblait épuisé. Il était appuyé sur l’accoudoir du fauteuil et il avait vraiment mauvaise mine.

— Je me souviens que tu avais accepté la dernière fois, néanmoins, compte tenu de la situation qui avait précédé ma demande, je n’ai pas désiré…

Il hésita, et Ariel se mordit la lèvre. Par automatisme, ses doigts agrippèrent la pierre que Sessho lui avait offerte. Avait-il remarqué qu’il la portait tous les jours ?

— … insister ? finit-il par suggérer. Je crois que… nous avons tous les deux besoin d’une activité intellectuelle.

Le sixième année se releva pendant qu’il terminait, et Ariel ne put que suivre le mouvement en acquiesçant de la tête. Bien sûr qu’ils avaient besoin de s’occuper l’esprit : c’était le cas de tous les Serdaigle qui se respectaient, et davantage encore des Serdaigle dépressifs.

Un faible sourire étira ses lèvres : l’humour noir, ce n’était vraiment pas son truc.

— Je n’ai pas oublié, dit Ariel en lui emboîtant le pas.

Ils sortirent de la Salle Commune et longèrent plusieurs couloirs. À un moment où tous les étudiants étaient rentrés chez eux, certains s’attelant déjà à leurs devoirs, d’autres préférant profiter du début de soirée, le silence régnait en maître dans les corridors. Leurs pas résonnaient sur les parois de pierre.

Et au milieu de tout ça, le cœur d’Ariel battait. Trop fort et trop vite.

Sessho s’attendait peut-être à des prouesses de sa part ; il était réputé pour être bon en Métamorphose – le meilleur de son année, en fait. C’était de là, pensait-il, qu’était partie la proposition du plus âgé.

Pour autant, peut-être son talent avait-il été une réalité, mais aujourd’hui ses prouesses n’étaient plus les mêmes. Sans frôler le Piètre, ses notes de Métamorphose n’étaient plus aussi bonnes qu’avant. Et il savait – sentait – que quelqu’un le détrônerait bientôt. Quelqu’un serait bientôt meilleur que lui dans cette matière.

Il essayait, pourtant. Quotidiennement.

Mais il n’arrivait plus à réfléchir, et il avait du mal à rester concentrer lorsqu’il ouvrait un ouvrage spécialisé. Le même recueil, Cent utilisations créatives des basiques de la Métamorphose, reposait sur sa table de chevet depuis Halloween.

— Mais…

Le son fit un écho sur les murs glacés du couloir. Il percuta Sessho devant lui, dont la démarche trahissait un regain d’énergie.

— Je ne sais pas si j’en serai capable, murmura-t-il. Je ne sais pas si je suis encore capable de réfléchir.

Il parla si bas que l’autre aurait pu ne pas l’entendre. La honte suintait de ses mots.

Ils finirent par arriver au bout d’un couloir :

— Celle-là mène à un placard à balais, indiqua Sessho en désignant une porte.

Puis il ouvrit une seconde porte, tout à fait similaire à la première, et entra.

Ariel savait qu’il existait des dizaines – peut-être des centaines – de salles de classe vides, abandonnées ou peu utilisées. Il entrait parfois dans certaines d’entre elles, mais elles se ressemblaient toutes : sombres, poussiéreuses et même un peu inquiétantes. Le mobilier variait parfois, mais il était clair que de les maintenir en état était le cadet des soucis de Rusard.

Celle-là n’avait rien à voir. D’abord, aucun meuble n’était recouvert de poussière. Ils étaient alignés, propres et bien rangés, et même un peu lustrés. L’obscurité avait été chassée par des bougies aux flammes vaillantes, et l’austérité habituelle des salles de classe contrebalancée par quelques décorations qui avaient été placées çà et là. L'odeur du vieux n'avait pas été totalement évacuée, mais elle évoquait les grimoires à Ariel et il trouvait ce parfum rassurant.

L’air qu’affichait Sessho lui souffla que l’adolescent y était pour quelque chose : sans doute avait-il préparé leur arrivée.

— C’est beau, dit Ariel, sans savoir si c’était parce qu’il le pensait – parce qu’il le pensait, de fait – ou si c’était parce qu’il éprouvait le besoin de montrer à Sessho que ses efforts étaient appréciés.

Ce dernier l’emmena vers les tables, dont la disposition interpella Ariel. Obéissant, il s’installa sur une chaise et écouta Sessho lorsqu’il expliqua son projet :

— Choisis-en un. Et seulement un. Et ce sera le sortilège que tu apprendras.

Aussitôt, les yeux d’Ariel se fixèrent sur les parchemins. Héritage d’habitudes ancrées depuis des années, son cerveau tenta d’analyser la situation, avant qu’il ne se rende compte que la consigne ne demandait aucune sorte de réflexion – seulement de suivre son instinct.

Il se ressaisit, frotta un œil pour en chasser la fatigue et désigna le parchemin de droite.

Sessho lui révéla ce qu’il contenait.

Enchantements colorés.

Au fond de lui, quelque chose tressauta. Quel que fût son état d’esprit, la couleur serait toujours un baume pour lui. Du moins la perspective de travailler sur les nuances, les tons et la vibrance l’apaisait-elle un peu. Et l’idée d’allier couleurs et magie était suffisamment excitante pour le motiver.

Un sourire commença même à s’épanouir sur ses lèvres ; il était timide, mais suffisamment présent pour être remarqué.

Enchantements colorés ? fit Ariel. Quel genre d’enchantements ? Les profs ne nous ont jamais parlé de couleurs, sauf quand on parle de stade de préparation d’une potion.

Et, pour la première fois de la journée, sa voix avait un petit quelque chose de vivant.





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