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[28/10/95] Euphoria | Elvý & Yöan

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Ven 1 Mai 2020 - 16:15



Euphoria
☽  Elvý  & Yöan ☾


Samedi 28 octobre 1995


- T'es sûr qu'ils sont OK ?

Elvý amena un cachet à sa bouche et posa sa langue dessus. Amer. Ca avait bien l'air d'être de la MDMA. Mais à quel dosage ? Et quelles autres merdes y avait-il dedans ? Le mystère des taz.

- T'inquiète, c'est un type réglo qui me les a filés.

Darnell plongea son regard dans celui d'Elvý. « Fais-moi confiance », put-elle y lire. Mais la confiance, ce n'était qu'une illusion dans l'univers de la drogue. Une illusion qui suffit à la bercer. Comme à chaque fois. Elle cassa le comprimé en deux et donna l'autre moitié à son partenaire des bas-fonds. Puis, elle ingéra le sien.

Quand elle transplanna à quelques rues de la boîte de nuit sorcière avec Darnell, les effets n'étaient pas encore montés. Une légère angoisse persistait encore au creux de son ventre. Et si elle croisait Johann ? Ou Aaron ? Elle maudissait Darnell d'avoir insisté pour qu'ils aillent à ce club-ci. Il se trouvait sur le Chemin de Traverse. Trop près de son lieu de travail, K&W, Kingdom of the Spooky Pets. L'animalerie d'Aaron, l'ancienne boutique de Johann.

Elle chassa son angoisse. Ridicule, comme si Johann ou Aaron allaient dans ce genre d'endroit. Non, ce n'était pas ce soir qu'ils découvriraient ses excès nocturnes. Peut-être même qu'ils ne les découvriraient jamais. Elle l'espérait. Ce serait pour le mieux. Les deux hommes faisaient tout pour qu'elle se recontruise une vie en Ecosse, alors ils ne méritaient pas d'assister à ses moments de déchéance. Déchéance ? Non, ce n'était pas ça. Elle s'amusait, c'était tout. De temps en temps. Pas d'addiction. Pas encore. C'était sa façon à elle de profiter de cette nouvelle vie. Une nouvelle vie si vide qu'il fallait la remplir. Créer de nouveaux souvenirs. Ecarter les anciens qui tentaient de revenir. Elle n'était pas prête à les accueillir. Pas maintenant. Pas encore. Trop douloureux.

Darnell et elle se faufilèrent au milieu de la foule. Il était tard. Ou tôt ? Il y avait du monde. La musique, la chaleur, l'alcool. Ils rejoignirent le bar.

- Deux whiskies, dit-il en se penchant jusqu'à l'oreille du barman pour se faire entendre.

Darnell, elle ne le connaissait pas depuis longtemps. Un peu plus d'une semaine. Depuis qu'elle avait décidé de reprendre son indépendance en main, peu après la sortie de son coma. Darnell, c'était le petit gaillard toujours défoncé qui parlait à tout le monde en soirée. Qui avait décidé de prendre Elvý sous le bras et de la traîner partout avec lui après avoir vu son air tout égaré au beau milieu d'une nuit arrosée. Darnell, c'était celui qui lui avait rappelé son goût pour la fête et qui avait réveillé ses penchants pour les psychotropes. Darnell, c'était celui qui commençait toujours ses soirées avec un verre de whisky. Un Ecossais qui avait pour règle d'Or de faire honneur à ses origines.

Les Mornilles roulèrent sur le pan de bois et les deux amis trinquèrent. Darnell finit son verre cul-sec puis se pencha vers l'Islandaise en indiquant un endroit dans son dos.

- Y'a quelqu'un que je connais là-bas. On se revoit plus tard, princesse. Sois sage !

« Ou pas », disait son clin d'oeil. Puis, le sorcier s'éclipsa dans un coup de vent. Elvý commençait à s'habituer. C'était Darnell.

Elle but une nouvelle gorgée de son verre. Et ça monta d'un seul coup. L'ecstasy prit possession de son corps et de son esprit. Comme si une bulle l'avait soudain soulevé du sol. Elle flottait. Elle finit son verre et l'abandonna sur le bar avant de rejoindre le centre de la salle.

Pupilles dilatés. Mâchoire contractée. Les mouvements de son corps se calèrent peu à peu sur le rythme de la musique alors qu'elle se faufilait dans l'entremêlement des corps. Une énergie à la fois forte et douce animait ses jambes, ses hanches, ses bras et elle dansait. Les yeux mi-clos, elle dansait. Des rires s'échappant de temps à autre de ses lèvres, elle dansait. Grisée par la paix intérieure qu'elle ressentait, elle dansait. Et elle aimait le monde. Et elle ne sentait plus ses jambes. Et la musique vibrait en elle. L'extase. L'euphorie. Elle dansait.

Ses yeux, comme deux billes noires, finirent par croiser un autre regard. Un homme, non loin d'elle. Elle s'accrocha à ce regard. La beauté de l'univers dans lequel elle se mouvait déformait sa vision et elle ne voyait désormais plus que ce regard. Un nouveau rire lui échappa. Elle ne le voyait pas très bien avec toutes les lumières qui dansaient et l'éblouissaient mais elle était certaine qu'il était beau. Tout le monde était beau, ce soir-là. L'ecstasy ne mentait pas, n'était-ce pas ? Elle se rapprocha.
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Elvý Njállsdóttir
Admin amnésique
Elvý Njállsdóttir

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All that remains is a silent call
Is the Earth colored red, as I land like a flower on the meadow ? It happened quiet - Aurora

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Dim 3 Mai 2020 - 22:03

Euphoria
Les verres s’enchainent. A peine servis. Tout de suite vidés. Le sorcier se laisse submerger par cette débauche infâme enfin retrouvée. La fumée l’avait déjà noyé, grisant ses poumons. Son âme. Un mélange délicieux. Toxiques. De quoi voir la vie en rose et se perdre. Pour la dernière fois. Encore une fois. Débauche infâme qui l’accompagne depuis tant d’années. Douce maîtresse. Terrible démon.

Les basses de la boite de nuit –si semblable aux autres, assassinent ses tympans à chaque à-coup. Son pouls suit le rythme, emportant ce flot de poison jusqu’à ces organes maudits. Le cœur, trop bête, pompe tout son saoul. Merveilleux. Le cerveau, malin, transforme le venin en doux élixir. Les deux orbes s’agrandissent et goûtent pleinement aux merveilles qui s’étalent devant eux. Ses papilles s’affolent, s’assoiffent. Son derme le pique, l’éveil au moindre contact. Splendides. Il se sent plus vivant, enfin ! Dépourvus du poids qui écrase ses épaules, il se sent pousser des ailes. La piste lui appartient. Le comptoir aussi. Il se déchaîne et enchaîne, savourant ce monde qui semble vouloir se dérober sous ses pieds. La perte de contrôle est un art dont il se délecte avec passion.

Il tourne, rit, cri et saute au cœur de la foule. Seul sans jamais l’être. Heureux sans vraiment l’être. C’est là qu’il la voit –ou l’aperçoit. Silhouette sculpturale qui danse sous ses yeux éblouies. Explosés. Une créature divine qui l’attire, tel un phare dans ses ténèbres. Il s’en rapproche sans hésiter, laissant ces corps inconnus le guider dans cette quête absurde. Plus il se rapproche, plus il se rend compte. Elle est belle. Ses mains rencontrent ses courbes affolantes, effleurent le tissu qui recouvre ce corps tentateur. Il sourit, tout simplement. Les  corps se collent et se décollent. Dansent pour tout oublier, pour s’apprivoiser. Buste contre buste. Bassin contre bassin. Les intentions sont à peine voilées. Jeu habilement maitrisé grâce aux innombrables excès. Les musiques changent mais rien n’interfère dans cette valse dangereuse. Au fond, il n’y a qu’eux.

Sa bouche se colle contre son oreille et il savoure le parfum qui vient lui chatouiller les narines. Ses yeux se ferment un instant alors qu’il l’inhale. Substitut de nicotine.


« Yöan. »


Il prononce son nom dans un français parfait. Peur de l’oublier. Envie de posséder le sien, de le faire rouler sur sa langue. Cette dernière peine à rester à sa place. Quel goût aurait donc cette peau multicolore, teintée de ces lumières artificielles ? L’interdit, sans aucun doute.


« Un verre ? »



S’enivrer. Encore. Toujours. Jusqu’à ce que la nuit les abandonne à leur sort. Puisse-t-elle être son euphorie du moment. Il ne désire qu’une chose : perdre le contact avec la réalité et laisser derrière lui, rien qu’une nuit, son incapacité. S’il pouvait, rien qu’une fois, se dire qu’il n’est pas si horrible que ça. Après tout, il est loin d’être mauvais dans ce rôle de séducteur. Il se plait à l’endosser et à en jouer. Acteur d’opérette. Cette nuit devait être un break agréable, avant que les conséquences de ses actes ne viennent s’écraser contre sa gueule d’ange. Il allait le payer tôt ou tard. Tabata Onixya. Là, avec ses mains qui glissaient le long des courbes, il savait qu’il merdait. Encore. Qu’on le laisse respirer ou bien se noyer dans les méandres de son enfer.  

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Mer 6 Mai 2020 - 8:38



Euphoria
☽  Elvý  & Yöan ☾


Samedi 28 octobre 1995


Tourbillon. Lumière. Musique. Tourbillon. Foule. Danse. Tourner, encore, toujours, plus. Laisser le sol se dérober sous ses pieds. Ne plus penser à rien sauf à ce tourbillon. Sauf à ces yeux.

Un champ magnétique. Deux corps semblables à des aimants. Une attraction invincible. Ses pas la guidèrent jusqu'à lui et parmi la foule, elle flottait. Parmi la foule, ce fut comme si un chemin se dégageait. Pour eux. Lui aussi, subissait ce champ magnétique. Les faisceaux lumineux l'éclairaient de mille couleurs. C'était hypnotisant. Elle se laissa envoûter.

Un jeu secret, intime. Entre eux. Rien qu'eux deux pour la soirée. Elle le sentait, le savait, le voulait. La beauté du monde, cette nuit-là, elle lui appartenait à lui. Dans son regard rougeoyant d'ivresse et de désir. Dans ses mains qui vinrent frôler ses courbes. Dans ses bras qui vinrent s'enrouler autour de son corps. L'univers, la paix, l'amour, la sérénité, c'était lui. Il était son nouveau cachet. Sa nouvelle dose d'euphorie. Aussi attractif. Aussi irrésistible. Aussi exaltant. Et aussi éphémère, probablement.

Et elle dansait. Toujours plus. L'énergie débordait d'elle. Collée à lui, elle dansait. Elle riait. Riait-il aussi ? Elle n'entendait rien d'autre que la musique. Vibrante. Puissante. Guidant leur corps dans cette danse partagée. Alignant leurs courbes dans une chorégraphie synchronisée.

Il finit par se pencher à son oreille. Brisant le silence de leur valse séductrice. Ajoutant sa voix aux sons diffus qui vibraient dans leurs thorax. Elle put sentir son parfum. Et elle se demanda si ses lèvres avaient elles aussi une saveur aussi enivrante.

- Yöan.

Un prénom doux, prononcé avec un accent. Lui non plus n'était pas Anglais. Français ? L'hypothèse apparut spontanément à l'esprit de l'Islandaise. Sans qu'elle ne sache ni comment ni pourquoi. Quelque chose lui avait été familier dans sa courbure d'intonation, dans son caprice de prononciation. Un mot avait suffi. La France. Un pays où elle avait voyagé ? Peut-être. Ce n'était pas le moment d'y penser.

- Un verre ?

Elle s'éloigna juste assez pour l'observer. Il avait un beau visage. Elle se mordit la lèvre inférieure. Ses yeux pétillaient, malicieux. Elle s'écarta plus franchement, attrapa sa main, l'invita à la faire tourner sur elle-même telle une figurine de boîte à musique et, la pirouette à peine achevée, elle le tira jusqu'au bar. Tourbillon. Fuite. Capture. Hors de la foule.

Boire. Était-ce une bonne idée ? Elle avait soif. Très soif. Mais ce n'était pas l'alcool qui allait la désaltérer. Elle avait besoin d'eau. Un nouveau verre d'alcool n'avait rien de raisonnable avec le poison qui parcourait déjà ses veines. Mais qui avait dit qu'Elvý Njállsdóttir était raisonnable ? Cet adjectif faisait sans aucun doute parti des nombreuse choses que son amnésie avait décidé d'enterrer.

Arrivée au bar, elle se tourna vers le dénommé Yöan – prénom qui n'était pas s'en rappeler celui de l'Allemand qui l'avait hébergé – et lui sourit. De son sourire grand et rieur, déformé par la sérotonine qui abreuvait chaque parcelle de son corps. Elle se mit sur la pointe des pieds tout en s'appuyant sur les épaules du beau brun pour souffler à son tour à son oreille.

- Une bière, s'il-te-plaît. Et un verre d'eau.

Elle aussi avait un accent. Plus nordique, aux consonances scandinaves. Mais léger, à peine perceptible. Ressortant peut-être un peu plus suite aux substances ingérées.

- Et moi, c'est Elvý, ajouta-t-elle avant de se détacher de lui pour qu'il puisse prendre la commande.

Dans l'attente des verres, Elvý se mit à observer le plafond. Jaune. Orange. Rose. Bleu. Vert. Rouge. Plein de couleurs. Elles venaient, repartaient, tourbillonnaient. Insaisissables. Elle remarqua alors que sa mâchoire aussi bougeait dans tous les sens. Lamentable pantin désarticulé. Masséters pris au piège de la molécule ingéré plus tôt. Elle fouilla dans sa pochette suspendue en bandoulière par-dessus sa combi-short noire - élégante, resserrée à la taille, un décolleté en V, des manches en dentelles - et son bras s'y enfonça jusqu'à son coude. Elle y avait appliqué un sortilège d'extension principalement pour que Ríg n'y soit pas à l'étroit, bien plus que pour se trimbaler plein d'affaires. Le Botruc refusait de la laisser partir sans lui. Le gardien de la nature voulait constamment pouvoir veiller sur elle. Peut-être même plus qu'avant, depuis l'accident.

Elle trouva ce qu'elle cherchait. Le paquet de Ballongommes du Bullard. Elle en prit un. Mâcher mais ne pas faire de bulles. Elle se souvenait trop bien de celle qu'elle avait fait à sa dernière soirée et qui n'avait jamais voulu s'éclater.

Yöan revint et lui tendit sa bière et son verre d'eau. Elle trinqua avec lui et avala une gorgée du liquide ambré. Puis de son verre d'eau. Même deux. Et trois. Elle mourrait de soif. Elle releva ensuite la tête vers son amant désigné. Ses pupilles dilatées parcoururent son visage. Un sourire béat relevait toujours les commissures de ses lèvres. Tout était parfait. Ou presque. Elle fit un signe de la tête à Yöan pour l'inviter à la suivre vers un coin de la salle. Là où il y avait des canapés. Resterait-il seulement de la place ?

Miracle, ses soucoupes repèrent deux tourtereaux venant de quitter leur assise. Elle s'y précipita - ses pas lui semblaient si légers – et renversa un peu de liquide au passage. De quel verre ? Elle ne savait pas. Peu importait. Elle déposa les deux sur la table basse et s'échoua sur le canapé. Sa tête bascula en arrière pour s'appuyait sur le mur. Elle ria. Encore. Doucement. Avec rêverie.

Où était Darnell ? Elle s'en foutait pas mal. Elle se redressa, but une nouvelle gorgée d'alcool et rassembla ses cheveux sur une épaule. Elle avait chaud. Ses orbites noires attrapèrent à nouveau le visage de Yöan. Se plongèrent dans ses yeux rougis par la fumette. Elle continuait à mâcher son chewing-gum. Mais c'était d'une autre manière qu'elle voulait détendre sa mâchoire, à vrai dire. Elle se rapprocha un peu plus, pour se faire entendre. Et sentir à nouveau son parfum. Une main posée sur la joue du séducteur, elle frôla son oreille de ses lèvres.

- Yöan, dit-elle d'une voix traînante. L'univers n'est-il pas fascinant ?

Ses cordes vocales vibrèrent dans un nouvel éclat de joie. Un écho d'une candeur mélodieuse. Douce ecstasy.

- Bien sûr qu'il l'est. Et tes lèvres me font follement envie.

Cette fois-ci, ce fut le silence d'un désir impatient qui ponctua sa phrase.


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Elvý Njállsdóttir
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