Event de Noël - Bataille de boules de neige

Inscrits

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 « Alors, on fait quoi ? », Morgane regarda le dépliant qui leur avait été donné le premier jour en le tournant dans un sens puis dans l'autre, les yeux plissés.

Azalée fronça des sourcils, les lèvres relevées d'enthousiasme dans une grimace. Anna remonta ses lunettes, lorgnant par-dessus l'épaule de son camarade et orientant sa lecture d'une tape dans le coude, peut-être un par pitié et gagner du temps sur leur promenade. La petite blonde ne savait où donner de la tête. L'hiver, c'était sa saison. Avec l'été et son soleil. Et le printemps et ses jolies couleurs. Et l'Automne et Halloween, bien que cette facette effrayante ait pris une tout autre dimension, bien moins enfantine. Elle stoppa leur cortège dans un crissement dans la neige et c'est la brunette qui les tira de la foule pour qu'ils puissent échapper aux bousculades. Le nez en l'air, la blairelle admira la descente des luges sur les toits et la course des flocons dans la brise.

C'était beau. Une perle froide se posa sur son front et elle l'essuya de son gant en laine aux couleurs de sa maison. Sur un pied, elle regarda la liste des stands qu'il n'avait pas encore cochés d'un coup de plume en marge de la carte. Leur itinéraire s'était surtout fait à l'instinct et s'éparpillait au quatre coins de la zone. Chef de bande autoproclamée, parce que c'était connu, elle était la seule à savoir s'amuser de tout, elle aplatit son index sur ses premiers choix.

« Le labyrinthe et après, on va faire du patinage ! », leur dit-elle en sautillant un peu, finissant de faire tomber les pellicules blanches qui parsemaient son manteau crème.

Rajustant son chapeau à pompon, elle leur indiqua l'Ouest, posant son talon sur une caisse de marchandise en retrait à la limite de la ruelle, pour donner plus de poids à son éclat de voix théâtral.

« Tous à la conquête des mystères moussaillons ! », bombant la poitrine, elle emporta dans sa course le bras du Serpentard, qui laissa une traînée dans la poudreuse avant de se reprendre.

« C'est de l'autre côté. », la coupa son amie dans sa lancée.

Elle fit face à la mine déconfite d'une Anna aux joues rougies par le froid et aux paupières tombant déjà de fatigue. Bien que surprise de sa déconvenue, Azalée redressa le menton dans une posture assurée et triomphante. Avouer qu'elle avait tort un jour aussi important que celui-ci ? Hors de question !

« Ah. Bah, c'est ce que je disais justement ! C'était pour vous tester ! », fit-elle de mauvaise foi dans un sourire éclatant.

Innocente et ignorante du soupir lassé de sa camarade, elle enroula ses doigts dans le creux de leurs coudes, le pas sautillant et la pupille rieuse. Cette sortie, c'était son idée. Venir tous les jours, c'était son idée. Elle voulait chasser leur air morose et l'inquiétude de leurs visages. Morgane s'en faisait pour sa sœur. Anna craignait que l'engagement de son frère dans la brigade de la directrice rose bonbon ne la sépare de ses amis. Ils en avaient tous trois longuement parler, un peu à cœur ouvert peu avant les vacances. À Serpentard, c'est pas très drôle, tu sais, avait commencé le seul garçon. À la maison, c'est l'enfer, avait conclu la jaune. Ils avaient un peu pleuré, en silence par fierté et dans les bras parce que les étreintes donnaient le réconfort dont les mots étaient dépourvus.

Aujourd'hui, comme hier et demain, c'étaient leurs journées à eux. Loin des soucis, loin d'Halloween, loin des histoires d'adultes, loin des cris, loin de la guerre.

Bataille de boule de neige, venez vous inscrire.

La pancarte attira l’œil des trois enfants, qui se figèrent dans leur élan d'un même mouvement. Elle intercepta la lueur compétitrice et l'envie d'en découdre dans les sourires de ses condisciples.

« Et si on faisait ça d'abord ? », proposa l'héritier Shafiq. « Ça me fera une bonne occasion de te battre, Curtis. »

« Dans tes rêves, Shafiq. », répondit Anna dans un rictus.

« Sauf si c'est moi qui vous bats tous les deux. », s'immisça Winchester en jouant des sourcils dans une tentative de provocation. « Le dernier arriver est un scroutt à pétard avec la tête d'Ombrage ! »

*

Et c'est ainsi qu'ils se retrouvèrent dans l'arène jouxtant leur destination d'origine. Encore essoufflée de sa course et victoire, Azalée essaya de distinguer les couleurs de Morgane dans les silhouettes du terrain adverse. Ne voulant pas perdre son alliée, elle tenait farouchement sa main dans la sienne, soudainement un peu intimidée de la présence de tant d'adultes. Elle inspira pour se ragaillardir, jusqu'à tousser du froid qui congela sa cage thoracique.

« Petit jean ! », Jules pesa son poids à son cou. Et elle la serra aussi fort que possible en échange. Que c'était bon de la voir. Que c'était bon de l'entendre aussi joyeuse.

« Robin ! Je suis trop contente de te voir ! »

Elles n'eurent pas le temps de parler plus que ça, ni d'échanger sur leurs vacances. Le sifflet les coupa. La bataille commençait.

« On va gagner. », assura-t-elle à sa meilleure amie, en s'accroupissant pour former son premier projectile. « On va gagner. », répéta-t-elle à mi-voix pour se donner de la force.

« J'en suis sûre. », entendit-elle avant qu'un déluge de cris de guerre et de bousculade n'enveloppe tout le reste.

Elle se faufila entre les corps, glissant sur les genoux pour esquiver les attaques et elle-même participer. Le prélude de ses essais se solda par des échecs cuisants. La trajectoire n'était pas bonne et finissait soit dans le décor, soit à plusieurs mètres de sa cible. Frustrée de sa piètre performance, c'est avec plus d'exaltation que s'exprima sa victoire quand elle parvint à éliminer un élève un peu imprudent qui s'était essayé à percer leur ligne de défense. Bras levés haut dans les airs, c'est avec un couinement de souris, puis un éclat de rire, qu'elle se jeta dans un amas de neige. Elle y laissa sa forme, tandis qu'elle repartait à l'assaut.

Ses compagnons tombèrent pour beaucoup. Anna perdit face à la précision de Morgane, qui n'eut pas le temps de savourer son tir. Autour d'elle, tous s’effondraient comme des mouches et le bon enfant du jeu, fut remplacé par un enjeu bien plus réel. Bien plus urgent. Son cœur bondissait dans ses tempes. Elle ressentit la même pression que cette nuit-là. La même envie de se battre. Et de gagner. Sans fuir. Sans se cacher. Sans avoir peur. L'arène était la forêt. Et la forêt un champ de mort.

Ses gants plongèrent dans la réserve à même le sol. Elle tassa la poudreuse entre ses paumes. Son sourire se fana pour une expression plus fermée. Plus combative. Sans faire preuve de la moindre prudence, Azalée enjamba les maigres barricades qui s'étaient érigés dans son camp, pour fouler celui de l'équipe rouge. Elle courut. Comme si sa vie en dépendait. Comme si le sort de ses amis, de sa famille, de son monde, se trouvait au creux de sa main.

La tignasse d'Ariel se distingua dans sa vision. Et elle ne vit plus que lui.

Tais-toi pauvre idiote.

Et le contact du sol. La poigne dans ses cheveux. Tout se répercuta dans ses os, quand en serrant les dents, elle amena son épaule au plus loin en arrière, la posture pleine d'élan.

La boule s'envola, traversant les mètres d'un bel arc de cercle. Jusqu'à le toucher.

Sa vision forma de nouveau le marché. Adieu forêt. Adieu mauvais souvenirs. Elle se sentit trembler. Elle se sentit frileuse. Et fiévreuse. Fatiguée. Et mauvaise. Elle déglutit, fuyant cette colère, cette rancune, qui l'avait guidé dans son geste.

Un peu lâchement, elle se cacha derrière des plus grands dans son retrait. Et se plaça hors de portée. Là où elle pourrait attendre que ses épaules arrêtent de grelotter. Là où elle pourrait reprendre son souffle.  

(c) oxymort